Chapitre 2 : Maman, "M" et les hors-la-loi

Année des Dragons Renégats - 1373, 6 d'Éléasis, Monguldarath, Téthyr

Voila une petite semaine que les aventuriers étaient les hôtes du manoir Monguldarath. Mentionner Jeanne leur avait largement ouvert les portes de la demeure et l'examen de leurs trouvailles avait contribué à leur notoriété. Les documents trouvés étaient manifestement authentiques et levaient bien des zones d'ombre sur le sort d'une des familles nobles habitant précédemment le comté. Deskyr Thanterim n'aurait aucune difficulté à faire valoir ses droits, pour peu qu'il prêtât allégeance au pouvoir en place. Seule la mention de la présence d'un magicien dans la crypte, mage qui semblait être Geor Thanterim, oncle du marchand amnien, aurait pu causer quelques inquiétude mais l'homme n'avait pas donné de signe de vie depuis le jour funeste qui avait vu la destruction de sa famille et rien ne laissait penser qu'il allait réapparaître bientôt.

Le Comte Keelson, pris par ses nombreuses obligations, était absent lors de l'arrivée des aventuriers et, tout naturellement, son intendant veilla à ce que les visiteurs ne manquassent de rien en attendant le retour de son maître. Après quelques jours passés en leur compagnie, Jeanne avait prit la route pour convoyer jusqu'à Deskyr le contenu de la crypte, sur lequel le salaire convenu avait été prélevé.

Profitant de ce repos forcé, chacun put vaquer à ses activités. Jafert se plongea dans des études magiques et Kald se concentra sur l'analyse du calepin noir relatif au Culte du Froid. Alors qu'Iskender s'attelait au dressage de Luna, se réjouissant des progrès de la chienne qui consentait maintenant à rester au pied, Falrin passa beaucoup de temps dans la bibliothèque à la recherche de toute mention du clan Percetroll dans les ouvrages historiques.

De sa lecture méthodique du carnet, Kald en arriva à la conclusion qu'une guerre larvée et secrète opposait la famille Thanterim au Culte du Froid, preuve que ce dernier était bien une réalité dans la presqu'île, voilà un quart de siècle. Par contre, les dates les plus récentes relevées remontaient à cette période et rien n'indiquait ce qu'il était devenu après l'élimination des Thanterim. Avait-il survécu à deux décennies de guerre civile, rien n'était moins sûr, mais rien, non plus, ne permettait d'affirmer le contraire. Pour infirmer cette disparition, Kald se raccrochait aux propos de la garde de Tulmène qui lui avait confirmé la présence d'une délégation religieuse parmi les victimes des taslois. Même si la divinité en cause était inconnue de ces lourdauds, le Sossrim avait tout lieu de penser qu'il s'agissait certainement d'Aurile, les vêtements liturgiques trouvés dans le butin des gobelinoïdes abondant en ce sens. Pour quelle raison une fille du Gel se serait-elle trouvée en ces lieux si ce n'était pour y prêcher la parole de Saukunik en s'appuyant localement sur un Culte du Froid renaissant ?



Tanar Keelson étant enfin rentré, ce fut dans le vaste bureau du noble que les aventuriers furent reçus par le maître des lieux. Âgé d'environ dix-huit ans, l'homme semblait bien jeune pour assumer une pareille fonction. À son titre de comte Fyraven s'ajoutait la charge de grand amiral du Téthyr, faisant peser sur ses épaules la responsabilité de la sécurité des côtes du royaume. Il était habillé assez simplement, quoiqu'avec une certaine élégance, des rubans rouges et jaunes venant réchauffer l'austérité apparente de ses vêtements. L'œil exercé de Falrin remarqua bien vite un discret bijou de quartz rose épinglé sur sa poitrine, dont la forme circulaire trahissait un prêtre de Lathandre.

S'il déplorait le départ de Jeanne, le noble comprenait néanmoins sa hâte et se réjouissait du retour imminent d'un nouveau banneret. Il y avait tant à faire pour maintenir la sécurité et reconstruire qu'une nouvelle famille ne serait pas de trop pour l'aider dans cette tâche.

Tanar Keelson

- Vous m'apportez des nouvelles bien inquiétantes, murmura le jeune homme à la mention des découvertes faites dans la cavernes des taslois. Les pirates et les contrebandiers sont légions sur nos côtes et je ne dispose pas d'assez de navires pour être partout. Et encore, s'il n'y avait que les pirates, je pourrais m'en sortir mais traquer Buchembrallor mobilise une bonne partie de ma flotte. Esquissant un léger sourire dans lequel passa une gravité inhabituelle sur un visage aussi juvénile, Tanar poursuivit : - Mais vous n'êtes pas venus m'entendre évoquer mes difficultés. En me voyant confier ce poste, je les ai acceptées et y ferai face. Par contre, je ne suis naturellement pas opposé à une aide et je vous remercie de me proposer d'enquêter sur ce mystérieux "M", qui me semble bien être un receleur sans scrupule. Je vais vous rédiger une lettre de recommandation à l'intention de Liras Finsire, le commandant de la garde de Tulmène, signifiant que vous agissez en mon nom. L'homme est loyal à la couronne et ses soldats s'évertuent à maintenir l'ordre en ville. Je gage qu'il détienne des informations utiles ou, du moins, des soupçons assez forts pour vous permettre de commencer une enquête. -------------------- À voir ce visage encore juvénile, qui pourrait croire être en présence du grand amiral du Téthyr ? En dépit de qualités martiales indéniables, son jeune âge reste cependant toujours un handicap pour lui permettre d'asseoir totalement son autorité sur l'ensemble des capitaines de la flotte royale.

Manifestement, même s'il ne les méprisait pas, les opérations de basse police n'entraient pas dans les responsabilités directes du comte. Il faciliterait la tâche des aventuriers mais ne se substituerait pas à eux, leur laissant la bride sur le cou. À eux de se coordonner avec la garde de Tulmène pour un maximum d'efficacité.

Le nouveau chapitre est ouvert. À vous de faire part de vos observations et de la façon dont vous voulez commencer votre enquête.
Logiquement, la suite devrait vous mener à Tulmène pour y collecter vos premières informations mais vous pouvez prendre le contre-pied de ce que je vous propose.

Lancers...

Iskender - Jet de compétence : Dressage : 12(d20) +5(deg) +0(Cha) = 17 vs DD15 ~ Réussite

rès content d’avoir un nouveau chien, Iskender ne tarissait pas d’éloge sur celui-ci, enfin plutôt celle-ci ! Elle apprit très vite la marche au pied, surtout qu’avec Kimo la chose n’était pas trop facile : elle devait se mettre contre la jambe gauche d’Iskender et Kimo était lui-même à la gauche de Luna. Elle était donc encadrée par Iskender et Kimo. Et les deux chiens suivaient fidèlement Iskender dans ses déplacements, détours et demi-tours compris.

Outre l’éducation des chiens, enfin surtout de Luna la nouvelle, Iskender s’exerçait au tir à l’arc pour bien maitriser son nouvel arc et il faisait aussi des exercices à l’épée, la tenant essentiellement à deux mains. Il laissait ses compagnons (les « intellos », comme lui et ses camarades de classe appelaient les premiers de classe dans sa jeunesse) faire des recherches dans les livres et les écrits anciens.
De toute façon, il leur faisait confiance pour trouver la piste de ce fameux "M" : avec tout le temps passé dans les bouquins, ses compagnons trouveraient bien une piste valable.

Au manoir Monguldarath, la Compagnie des Pas Grands avait pu apprécier l’hospitalité du compte Keelson, malgré son absence. L’intérêt pour leurs faits d’arme dépassait largement ce qu’avait pu anticiper le prêtre nain, mais les intérêts en termes d’accueil et d’attention le ravissaient. Il prit ce temps de respiration pour conter leur histoire à Jeanne et aux habitants du coin ou de passage qui appréciaient de boire une bière avec lui.

La bibliothèque étant accessible, le prêtre d’Haela en profita pour en apprendre plus sur les clans Percetroll, Gemcrypt et Ghalrin ainsi que sur le royaume de Sondarr. S’il trouvait quelques livres de religion, il lirait en discrétion quelques trouvailles sur les cultes du froid et de Siamorphe. Sa curiosité était toujours grande et les connaissances permettaient rapidement d’identifier un allié d’un ennemi. En tout cas, c’était le raisonnement simpliste qu’il avait adopté.

Il put d’ailleurs le mettre en application lors de la rencontre avec Tanar Keelson qui leur fit l’honneur de les recevoir. Eux, une piètre et jeune compagnie. Son jeune âge ne surpris pas tellement Falrin, qui avait l’impression d’être constamment entouré de jeunes gens et qui savait que les mœurs nobiliaires pouvaient amener par le biais de l’héritage de pouvoir à ce type de situation.

- C’est bien aimable à vous d’nous recevoir et d’nous avoir accueilli ces quelques jours. Ce r’pos nous a ragaillardi. Un grand merci pour cette lett’e ! Z’avez dit Liras Finsire ? Alors j’crois qu’la Compagnie des Pas Grands va démarrer par là, finit-il en interrogeant ses camarades du regard et en attendant une forme d’assentiment.

Falrin n'avait pas de grande ambition pour lui-même et il ne rechignait pas a faire de petites enquêtes pour le bien du petit peuple. C'était au contraire, bien plus aligné avec sa philosophie et ses origines paysannes.

Les retrouvailles avec Jeanne se firent sans effusion de pathos, l’adolescente était occupée dans ses recherches au manoir. Elle accepta sans discussion la mission de retourner auprès du seigneur Thanterim, fière de redonner ses droits à une famille nobiliaire.

Côtoyer les nobles n’avait jamais plu à Jafert qui ne sentait bien qu’au contact de la plèbe et des gens simples. Mais profiter d’un vrai lit et des commodités de leur hôte ne pouvait se refusé après tous ces jours d’aventure. Le magicien commençait pas une bonne nuit de sommeil et une grâce matinée débordant sur l’après midi. Il rejoint Kald et Falrin dans la bibliothèque du château en fin d’après-midi. Les ouvrages étaient néanmoins intéressant et son étude durait une bonne partie de la nuit, son esprit vagabondant d’un ouvrage à l’autre poussé par une curiosité intellectuelle insatiable.

Tenar Keelson bien qu’étant l’archétype du seigneur de province était moins hautain que ses alter égos des villes possédant bien moins de pouvoir. L’attitude de Jafert n’allait pas jusqu’à la sympathie mais au moins jusqu’au respect et il ne fut pas peiné le moins du monde quand le Comte les renvoya vers la garde de Tulmène.

Le tavernier, bien que possédant un gout pour les écritures et les connaissances, était un homme d’action.
¤ On ne peut pas passer d’un interlocuteur à un autre comme ça, il faut aller chercher les informations sur le terrain, mettre ses mains dans la bouse si on veut attraper le cafard. ¤
C’est lorsque les compagnons se retrouvèrent un soir seul dans la salle à manger qu’il leur présentait son plan :
- Nous allons ne rapprocher de plus en plus de ce M et j’ai lu dans son carnet qu’il traiterait avec la guilde des voleurs de l’ombre. Je préfère me tenir à distance de ces gens-là avec qui j’ai eu mal à partir à Athkatla. Je propose qu’on entre à Tulmène séparé. Je me grimerai et prendrai une chambre seul dans une autre auberge que La crique confortable de Starnar. Menez votre enquête auprès de la garde et en ville et vérifier si les Voleurs de l’Ombre sont établis dans ce port. De mon côté, je me créerai un personnage de commerçant obscur, peut être aurais-je accès à d’autres canaux d’informations.



Une fois la conversation terminée, Jafert prit 15 minutes pour discuter avec le comte en tête à tête. Le magicien présentait sa volonté d’ouvrir un service de portail de voyage. Il présentait la chose comme une opportunité commerciale pour la presqu’ile de Velen, même si le comté de Fyraven était déjà très ouvert sur les océans. Le commerçant tentait de faire valoir sa solution comme plus sécurisé, quasiment sans risque d’attaque. Jafert n’avait appris l’existante de tels portails que quelques jours appart avant mais présenter le sujet comme sa spécialité. Lorsqu’il estima que le jeune comte était mure, il lui glissa l’idée de l’associer à l’opération. Il s’agissait d’investir de l’argent pour des recherches, la rentabilité se ferait à moyen terme. Mais le jeune dirigeant l’arreta au beau milieu d’une phrase :
- Croyez bien que j’ai bien d’autres soucis a gérer, comme je l’ai dit précédemment à votre compagnie. Les menaces sur le Vélen sont nombreuses et je dois gérer la situation au jour le jour. Je n’ai pas d’argent à investir dans quelques aventures que ce soit. Inutile de gaspiller notre temps plus longtemps.
Jafert se fit une raison et retourna auprès de ses camarades qui préparaient le départ pour Tulmène.

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Nouvelle identité
Jafert coupera ses cheveux à ras et défit les nattes de sa barbe. Il rangera sa tunique de voyage dans son bagage et arborera sa chemise blanche à moitié ouverte qu’il porte habituellement caché. Il tentera de modifier son odeur à l’aide de plantes sauvages fournis par les conseils de Falrin.

Sa nouvelle identité sera : Gunard Samson, antiquaire d’Athkatla venu à Velen pour trouver des pièces rares et magiques. Il fera profil bas en restant enfermé dans sa chambre au maximum ou ira visiter un vendeur de bric à brac ou d’objet magique pour parfaire sa couverture.

Si on vous pose des questions au sujet de Jafert, il s'est désolidarisé du groupe et resté chez le comte de Fyraven.

Kald, à sa plus grande frustration, eut tôt fait d'arracher aux pages du petit carnet leurs maigres secrets. Ces nouvelles informations étaient dérisoires ! Peu lui importait d'apprendre que le Culte avait âprement et longuement lutté contre la famille Thanterim. Ces chroniques guerrières ne faisaient que confirmer ce qu'il savait déjà : l'organisation de Kaverin Mainsdébène était implantée sur la presqu'île de Velen. La belle affaire, comme dirait l'autre !

Un accès de colère semblable à celui qui avait manqué de le faire exploser au sortir de la caserne de Tulmène le traversa alors qu'il refermait rageusement l'ouvrage. Les mêmes bourrasques s'étaient élevées entre ses côtes, battant son cœur comme les vents assassins des Terres gelées, lorsque cet imbécile de milicien avait refusé de lui céder la hache de sa Sœur des glaces. Il avait alors contenu la tempête in extremis, serrant les poings à s'en briser les doigts et se mordant l'intérieur des joues pour ne pas hurler de douleur : adolescent, il avait rapidement compris qu'il valait mieux céder à ces accès d'énergie arcanique que les combattre, un véritable supplice. Seul dans sa chambre, il n'hésita donc pas à laisser la magie suinter de ses mains. Un torrent d'une blancheur lunaire s'abattit violemment sur le bureau auquel il étudiait, couvrant presque instantanément le plateau de bois d'une pellicule de givre épaisse. Les pieds du meuble, robustes, avaient émis un gémissement sinistre sous la force de l'impact. Les doigts gourds, perclus par le froid divin, le Sossrim expira lentement comme pour chasser une dernière once de colère.

Comme celle de tout ensorceleur, sa vie était parcourue de ce genre de spasmes, dont les effets pouvaient être bien plus dévastateurs. Le mobilier du comte Fyraven, s'il garderait une cicatrice, s'en tirait à bon compte.

***

L'impétueux Sossrim tournait depuis quelques jours déjà comme un loup en cage quand le jeune Tanar Keelson fut enfin de retour. Prudent, il avait évité autant que possible la compagnie de Jeanne, que l'air de Monguldarath n'avait pas rendu plus agréable, et s'était abstenu de rendre ostensiblement hommage à la Déesse. Aussi, le soir venu, priait-il Saukuruk dans l'intimité de sa chambre, fenêtre grand ouverte, plutôt qu'au grand air. Que ce bon Falrin ait feuilleté le carnet l'avait rendu méfiant. Secrètement, il priait pour que le nain n'ait pas attiré l'attention de la servante de Siamorphe sur la petite guerre à laquelle s'était livrée les Thanterim... Le court-sur-patte et la rouquine avaient de toute façon, du moins l'espérait-il, d'autres préoccupations...

Fort courtois pendant l'audience que leur accorda le comte, il prit la parole pour expliquer que l'affaire était peut-être moins anodine que ne pouvait le laisser penser les quelques pillages commis par les taslois. Le journal de bord d'un navire, La Traque de Malar, qu'ils avaient trouvé dans le repaire de l'ennemi pouvait laisser penser que le Consortium de Rundeen était impliqué...

- Mais peut-être pouvez-vous nous dire ce qui est arrivé à ce bateau ? demanda-t-il au jeune Amiral de sa voix traînante, dont l'atonie faisait un étrange contraste avec la curiosité. Bahri Jassar est-il un criminel connu ?

L'entrevue terminée, les compagnons s'accordèrent pour gagner Tulmène le plus rapidement possible. L'importance de l'affaire n'admettait à ses yeux aucun délai, du moins pas au profit d'activités aussi futiles que le dressage d'un chien ou la recherche d'une antique cité naine... Fort heureusement, son point de vue semblait partagé par l'entreprenant Jafert dont l'esprit fantasque avait déjà imaginé un plan. Contre toute attente, le fils du Froid acquiesça sans émettre la moindre réserve. L'enquête confiée par le comte n'était après tout qu'un prétexte pour séjourner à Tulmène, où des affaires autrement plus importantes retiendraient son attention.

L'entretien terminé, Tanar Keelson n'avait, à son grand regret, pas davantage de temps à consacrer aux aventuriers. Lors de ses rares séjours dans son manoir, le comte avait mille choses à régler, toutes plus urgentes les unes que les autres, et, comme le constata rapidement Jafert, était focalisé sur le court terme, l'important étant d'effacer les stigmates de la récente guerre civile. L'homme était également impatient de reprendre la mer et de fouler de nouveau le pont de son navire amiral. Comme tout marin, il ne se sentait bien qu'en respirant l'air du large et veillait limiter au maximum la durée de ses séjours sur le plancher des vaches.

Pour répondre aux questions de Kald, la Traque de Malar était bien un navire connu du Consortium de Rundeen qui faisait l'objet d'une surveillance dès qu'il prenait la mer. Néanmoins, il n'avait pas été signalé depuis quelques chevauchées et l'hypothèse qu'il n'ait coulé lors de la dernière tempête circulait, hypothèse que semblait confirmer, Valkur en soit loué, le livre de bord trouvé chez les Taslois.

Néanmoins, les aventuriers n'avaient pas spécifiquement besoin du comte pour accomplir le travail qu'ils avaient accepté et le chef de la garde de Tulmène ferait un bien meilleur interlocuteur pour cette enquête de basse police.

Chacun se prépara donc à se rendre en ville, peaufinant les derniers préparatifs. Bien que soucieux de parfaire son déguisement en se faisant couper les cheveux, Jafert refusa tout de même la proposition de Kald de lui raser complètement le crâne. Pendant qu'Iskender s'émerveillait des progrès de Luna à lui rapporter le morceau de bois qu'il lui lançait, Falrin avait tenter d'en apprendre davantage sur le royaume disparu de Sondarr. Malheureusement, la bibliothèque de Monguldarath ne possédait aucun ouvrage en faisant mention. Néanmoins, l'archiviste examina avec attention les documents découverts dans la tombe de Bheldor. À son avis, le Frère Bouclier Vorn Ghalmrin qui siégeait au conseil royal y porterait un intérêt certain. Ce seigneur était le second fils de l'archiduc Obar et l'héritier du clan Ghalmrin. Si quelqu'un pouvait apporter une réponse sur l'histoire des royaumes nains, c'était bien lui. À supposer qu'il veuille bien partager ces informations avec un étranger. Il faudrait se rendre à la capitale pour en être certain tant le secret était encore de mise dans cette colonie naine. Personne ne savait d'ailleurs précisément où se situait leur forteresse qu'on estimait être "quelque part" dans les Piquétoiles. Mais, si Falrin le souhaitait, le bibliothécaire pourrait envoyer un message au conseil, une réponse devant certainement leur parvenir dans les mois à venir.

S'étant découvert une nouvelle passion pour la botanique, le prêtre nain avait également passé de longues heures avec la guérisseuse du manoir qui avait le même centre d'intérêt. En avait résulté des heures de promenade dans les jardins du domaine et la forêt proche au cours desquelles Falrin put enrichir partiellement son herbier. Cinq-feuilles aux propriétés aphrodisiaque (la préparation des feuilles de cette plante grimpante augmente de désir sexuel et le charisme de celui qui la consomme), Birnot contraceptive (les feuilles noires de cette vigne, une fois séchées, servent à préparer un thé à boire une demi-heure avant "l'acte". Si cette décoction était globalement efficace, elle pouvait néanmoins provoquer, dans de rare cas, une impuissance passagère chez les hommes) et Alkanet dont les épaisses racines rouges, consommées crues, sont un efficace antidote à tout poison ingéré enrichirent bientôt le calepin de Falrin. Mais il restait tant à apprendre que le prêtre déplorait de ne pouvoir y consacrer davantage de temps.



Ayant laissé Jafert jouer le rôle qu'un riche antiquaire d'Athkatla en allant prendre une chambre à la Tour de Tulmène, luxueuse auberge de la ville, le reste du groupe s'était rendu à la petite caserne où tenait garnison la garde de la ville. La lettre de recommandation du comte fit merveille et ils se trouvèrent rapidement en présence de Liras Finsire, chef de la place. D'allure austère et de maintien droit, l'homme avait tout d'un vétéran, blanchi sous le harnais, prenant très au sérieux son rôle de protecteur de la ville. Les Taslois avaient constitué une menace réelle pour les voyageurs et leur élimination était certes un bienfait mais qui entrait davantage dans les prérogatives de la garde comtale que dans celle de la milice citadine. Néanmoins, savoir que les habitants de Tulmène pourraient sortir, sans risque majeur, des remparts de la ville réjouissait le vieux soldat qui s'alarma davantage d'un lien possible entre ces monstres et un possible receleur résidant dans la cité.

Si les aventuriers voulaient bien repasser d'ici un jour ou deux, Liras aurait le temps de rassembler diverses informations sur la pègre connue de Tulmène, ainsi que sur les endroits louches qu'elle fréquentait. Les criminels les plus en vue étaient, certes, incarcérés mais, dans un port aussi sulfureux que Tulmène, où les marins de passage étaient légion et où certains conservaient encore des liens avec les pirates nélanthériens, il n'était pas possible de neutraliser tous les délinquants.

Pendant cet entretien, mené de main de maître par Falrin, Iskender était resté à l'extérieur, toute son attention était absorbée par ses deux chiens. Si Kimo était relativement obéissant, il fallait tenir plus fermement Luna dont le dressage était très récent. L'agitation de la ville n'était, en outre, pas idéale pour la quiétude d'animaux habitués aux grands espaces.



De son côté, Jafert était entré dans son nouveau rôle et l'antiquaire Gunard Samson faisait de brèves excursions en ville, officiellement pour y dégoter des objets magiques dignes d'intérêt mais, en réalité, pour y chercher des traces de la pègre localement, tout en veillant à passer inaperçu si, par hasard, il y voyait des signes de la présence des Voleurs de l'Ombre.



Après plusieurs jours, ce fut dans une chambre de la Crique Confortable de Starnar où la compagnie des Pas Grands avait jeté l'ancre que, Jafert les ayant discrètement rejoint, ils purent faire un point sur leurs découvertes.

Lors de ses visites en ville, l'Amnien avait pu remarquer quelques bâtiments ornés du discret symbole des Voleurs de l'Ombre. De son côté, Liras Finsire leur avait signalé plusieurs lieux dont les activités étaient parfois à la limite de la légalité : Les Cinq Dagues, taverne sordide sur les docks dont le patron était un indicateur, un peu cher néanmoins, La Voile du Crépuscule et La Barrique de Helbuck, autres établissements des quais recevant les marins de passages, pirates et contrebandiers inclus, ainsi qu'un grand hangar au bout des docks, servant d'entrepôt mais soupçonné également d'abriter des marchandises aux origines peu claires.

Lancers...

Iskender - Jet de compétence : Dressage Luna : 12(d20) +5(deg) +0(Cha) = 17
Iskender - Jet de compétence : Dressage Kimo : 19(d20) +5(deg) +0(Cha) = 24
Jafert - Jet de compétence : Tromperie : 17(d20) +2(deg) +2(Cha) +2(don regional) +2(don) = 25
Jafert - Jet de compétence : Social : 9(d20) +0(deg) +2(Cha) = 11
Falrin Grandtranchant - Jet de compétence : Social : 12(d20) +4(deg) +0(Cha) = 16
Jafert - Jet de compétence : Social : 11(d20) +0(deg) +2(Cha) = 13
Kald - Jet de compétence : Social : 14(d20) +0(deg) +4(Cha) = 18
Kald - Jet de compétence : Tromperie : 14(d20) +5(deg) +4(Cha) = 23
Jafert - Jet de compétence : Tromperie : 16(d20) +2(deg) +2(Cha) +2(don regional) +2(don) = 24
Iskender - Jet de compétence : Dressage Luna : 8(d20) +5(deg) +0(Cha) = 13
Iskender - Jet de compétence : Dressage Kimo : 3(d20) +5(deg) +0(Cha) = 8

- Voilà ce que j’ai découvert, ce n’est pas grand-chose. J'ai préféré ne pas trop 'user' ma couverture trop tôt.

Jafert était content de retrouver ses camarades, les journées avaient été bien ennuyeuse à cause de sa couverture. Heureusement, il avait su profiter des soirées à la Tour de Tulmène. C’était un endroit propre et distingué ou il avait pu jouer son personnage juste pour le plaisir et partager des discussions endiablé avec les quelques bourgeois du coin. Celas qui avaient un penchant pour la boisson mais qui ne pouvaient boire chez eux, ils y en avaient dans chaque ville des royaumes. Ces conversations ne lui avaient rien apporté de plus qu’un mal de tête au réveil mais au moins cela étoffait sa couverture.

- On fait quoi maintenant ? Jafert semblait prêt à en découdre, ignorant la présence avéré de la guilde dans la ville portuaire.

L’enthousiasme des aventuriers du groupe pour la recherche de M semblait très réel. Des idées fusaient du groupe, et Jafert sacrifia même une partie de ses cheveux, mettant à exécution ses propres idées en allant se déguiser et loger seul.
Iskender en était assez ébahi et aussi admiratif de l’inventivité de ses compagnons.

Cependant, il ne partageait pas leur enthousiasme.
L’entrevue avec le comte l’avait plutôt déçu car il s’attendait à ce que le comte les récompense pour l’élimination des Taslois (même s’ils ne l’avaient pas fait pour cela) et leur propose une prime (conséquente) pour aller à la recherche de M. Mais rien n’avait été proposé.
Déception confirmée après l’entrevue de Finsire.
Les Nobles étaient-ils au-dessus de ces basses considérations matérielles ?

Iskender ne comprenait pas pourquoi ses compagnons s’emballaient ainsi.
Est-ce que Falrin et Kald avaient reçu des messages divins pour combattre le Mal ?
Peut-être.
Pourquoi Jafert se donnait-il tant de mal et courait-il tant de risques, se payant une luxueuse auberge, lui qui fut -d’après ses propres dires- un tavernier plus ou moins proxénète, plutôt plus que moins d’ailleurs ? Avait-il reçu une somme secrète pour entraîner le groupe dans la recherche ?
Ça serait une explication.

En tout cas, Iskender ne trouvait aucune motivation pour aller prendre des coups, peut-être mortels, dans une quête où le bénéfice –pour lui au moins- ne lui apparaissait pas. Son sens du commerce lui criait que tout peine mérite salaire et là, rien ne leur avait été proposé, pas même un salaire de garde !

Il restait dans le groupe car, sans sa présence, celui-ci aurait vraiment été très faible notamment dans le combat au corps à corps, et il ne voulait pas lâcher ses compagnons avec lesquels il s’était lié et qu’il appréciait.
Mais il se rendait bien compte qu’il n’y avait aucun combattant de première ligne dans le groupe depuis le départ de Jeanne, et M ne devait pas être une proie facile à attraper.
Il avait toute confiance en ses compagnons pour trouver la piste de M, mais ne serait-ce pas pour se jeter dans la gueule du loup ?

Le refus de ses compagnons de prendre un peu de temps avant de traquer M l’avait aussi déçu.
Peut-être avaient-ils raison.
Mais peut-être aussi qu’il valait mieux ne pas agir trop précipitamment, car M devait être sur ses gardes après l’élimination des Taslois et la perte de documents. Et laisser passer un peu de temps n’aurait probablement pas été inutile, laissant les alarmes de M s’apaiser et lui permettant de reprendre ses affaires comme d’habitude.

Mais, bon, il laissait ses compagnons agir.
Lui s’occupait de ses chiens : il les habituait à la ville, aux bruits de la foule, aux bousculades, aux cris des colporteurs et des marchands de rue, aux charrettes qui risquaient de les écraser, aux cavaliers qui passaient parfois presque au galop près d’eux…
Il en profitait aussi pour visiter les boutiques, et notamment les boutiques d’armes, en rêvant sur des armes inaccessibles.
Et matin et soir, il entraînait Luna à la garde, avec l’aide de Kimo car Luna imitait Kimo, son aîné, en presque tout.

Curieusement le tumultueux ensorceleur avait fait profil bas pendant l'entretien avec Liras Finsire, abandonnant au fidèle d'Haela le premier rôle. Il en sortit avec l'insupportable impression d'être mené en bateau. Non seulement le vétéran renvoyait l'affaire sous l'autorité de la garde comtale, alors même que le seigneur de Fyraven s'était déchargé sur la milice de cette "enquête de basse police", mais il semblait tout ignorer de sa propre ville. Quel genre de surveillance et de protection exerçait une caserne à laquelle il fallait plusieurs jours pour réunir de menues informations sur la pègre locale ? C'était invraisemblable !

- C'est louche, ne put-il s'empêcher de souffler, à peine sorti de la bâtisse. Les Friges m'emportent s'il ne connaît pas déjà les bas-fonds de Tulmène et sa racaille ! Un jour ou deux... Aucune piste, rien !

Si le vieux soldat n'avait pas eu le visage de la probité, Kald l'aurait accusé d'être corrompu et de retarder sciemment leur enquête. Pour l'heure, il ne pouvait avoir que des soupçons ; peut-être Finsire était-il seulement incompétent après tout ?

Reclus à la Crique Confortable de Starnar, le Fils du Gel parcourait une énième fois les notes qu'il avait prises en épluchant le petit carnet noir. L'enquête de Jafert ne porterait pas ses fruits avant longtemps et la milice demeurait silencieuse, aussi pouvait-il se consacrer à une affaire autrement plus importante : la résurrection du Culte du Froid.

La piste était pour le moins ténue. Aucun nom d'agent, aucun établissement, pas même un quartier ne ressortaient des chroniques guerrières, lesquelles évoquaient l'ennemi sans le décrire ni renseigner d'éventuels signes de reconnaissance ou modes de communication. Rien, non plus, ne permettait d'élucider l'énigmatique présence de l'organisation en pareille région de Faerûn... Kaverin Maindébène avait-il jamais eu vent de cette lointaine cellule ? Et quel rapport entretenait-elle précisément avec l'Eglise d'Aurile ? Impatienté, il se détourna des papiers muets. Si le Culte avait survécu, il fallait trouver un moyen d'attirer son attention afin d'établir le contact.

*Un anneau ? Des mains noires ? Un flocon ?*

Associés, ces trois symboles ne manqueraient pas d'interpeler ceux qu'il recherchait. Mais comment les offrir à tous les regards sans éveiller curiosité et soupçon ? Portant la main à sa broche d'argent, dont il avait pris l'habitude de caresser les contours dentelés pour s'apaiser, il fut soudainement inspiré : un des signes de Saukuruk prenait tout son sens !

Quelques minutes plus tard l'enfant du Grand Glacier, drapé du blanc immaculé des Aurilites, arpentait les rues de Tulmène. Comment n'avait-il pas compris plus tôt que la Déesse lui avait fait présent du meilleur des sésames !

La montagne avait accouché d'une souris ! Au bout de deux jours d'attente patiente, la milice ne leur avait livré que trois noms d'établissements et n'avait pas plus de renseignements à leur fournir sur le mystérieux M. Kald n'avait pu cacher son effarement : tout laissait penser que les autorités n'accordaient qu'un intérêt lointain à l'affaire, pour laquelle d'ailleurs aucune rémunération ne leur avait été promise - Iskender faisait bien d'y insister. Or, le susceptible froidecape n'avait rien du bon paladin...

Jafert, quant à lui, pouvait confirmer la présence des Voleurs de l'Ombre à Tulmène mais n'avait pas réussi à remonter la piste des marchandises pillées. S'il ne s'était pas étendu sur la sombre guilde, il en avait assez dit pour les convaincre des dangers qu'ils encourraient à s'immiscer dans ses trafics. Le jeu n'en valait pas la chandelle.

- On laisse tomber, rétorqua le jeune homme, piqué. La milice se fiche de cette affaire comme d'une guigne, comme le petit comte, d'ailleurs ! On n'a rien à gagner à mettre la main dans ce panier de crabes.

Le groupe n’avait pas perdu de temps et Liras Finsire avait été d’une aide précieuse comme le prêtre nain l’avait espéré. Ils avaient repéré rapidement des lieux d’intérêt où ils pourraient en apprendre plus sur le trafic de marchandises auquel monsieur semblait être lié.

Jafert était dans son élément, il avait pu déjà faire des repérages dans la ville, notamment des voleurs de l’ombre qu’il connaissait bien. Ce genre de bande organisée que Falrin connaissait peu mouillait dans la contrebande à plein nez. La piste ou les relations pouvaient être sérieuses.

Iskender restait lui en retrait, préoccupé par son nouveau compagnon, Luna avec qui il passait du temps de dressage.. Falrin ne comprenait pas bien le sens de son action ni ses motivations et tenta de le questionner à ce sujet, notamment sur sa foi :
- Alors bonhomme, j’vois bien qu’tu tournes en rond. T’as la passion des bêtes, Kimo te sert comme un chef d’ailleurs. J’imagine que tu tentes de faire de Luna un fidèle compagnon. Mais quelle est ta cause profonde ? Pour quoi, pour qui on contre quoi ou qui te bats-tu ? Qu’est-ce qui t’fait l’ver l’matin ?

Il marqua une pause de repris :
- Moi c’est Haela, c’est une divinité qui à d’l’humour, de l’amour pour les nains. Not’e combat c’est d’en finir avec les monstres qui menacent nos peuples sur cette terre, pour que nous puissions vivre paisiblement. Alors quand j’vois des Taslois et des magiciens ensemble, j’ai comme une envie qui me monte au nez, telle la moutarde, et qui m’fait prier et prendre ma hache en main. Et toi c’est quoi ?

HRP : chaud pour poursuivre en MP ou sur un autre fil si tu es partant

Une fois avec ses compagnons, au tant attendu débrief, le nain d’or proposa la piste des deux établissements mentionnés par Liras Finsire, ​​La Voile du Crépuscule ou La Barrique de Helbuck. Ils pourraient y aller en binômes, humer un peu l’ambiance. Il faudrait sûrement faire un effort d’acclimatation vestimentaire mais Jafert pourrait les aider. Quand Kald intervient, le nain fut quelque peu surpris de sa naïveté. Le regard affuté et critique de Kald l’amenait à toujours prendre le contre-pieds. Le nain se fit la réflexion que c’était un atout précieux.
- C’est sûr que pour citer deux noms d’taverne, il aurait pu l’faire dès l’premier jour. Ce genre d’établissement doit faire partie de ceux qu’il a à l’oeil. On a peut-être rien a gagné de la part des autorités d’ce comté, mais on trouvera peut-être d’autres trésors. Et plus besoin d’en reverser un bout à Thanterim.

- Et puis vous’avez pas envie d’savoir c’qui s’cache derrière ? Si c’est pas l’cas alors malheureusement l’contrat qui nous unissait dans notre quête pour Thanterim est fini. Nous pourrions reprendre chacun not’e chemin.