L'oeil des Sorcières, Aventure dans les Moonshae

Le grig l’amusait et Sylaruil était vraiment heureuse de cette belle rencontre. En plus de ceci, ces petites fées avaient souvent la langue bien pendue ce qui lui permis d’en apprendre un rayon. Elle remerciait chaleureusement la petite créature au moment où celle-ci, ne laissant aucune chance de poursuivre cet agréable entretien, se volatilisa.

Au petit matin, Sylaruil en profita pour réveiller délicatement ses compagnons. Le temps qu’ils émergent vraiment, elle en profita pour faire quelques exercices avec sa lame noble elfique. Elle n’était pas une grande guerrière, mais quelques exercices du matin lui feraient du bien. Une fois tout le monde debout elle sortit quelques rations qu’elle avait pour un petit encas et prit elle-même le temps de faire son petit déjeuner. Elle profita du moment ensemble et des préparatifs pour répondre à Sahadeva qui questionnait le groupe :

- Cette nuit, une petite fée de cette forêt nous a rendu visite, peut-être les guetteurs du moment se souviennent de leur sommeil lourd, dit-elle dans un rictus ? Néanmoins, j’ai quelques informations croustillantes à vous partager. Les druides ont quitté cette forêt, ce qui explique la présence des ogres, des géants et autres monstres. La fameuse Elle serait un redoutable adversaire, qui parle en effet aux ogres et qu’évitent soigneusement nos amis du peuple fée. Avec Marge, elles marcheraient de compagnies près de la rivière plus bas à environ 4 heures de marche de notre position actuelle.

Elle laissa un moment à chacun, le temps qu’ils intègrent l’information. Elle avait parlé comme si tous étaient habitués du contact des fées, elle qui en avait souvent fréquentés dans sa vie d’elfe à Synnoria.

- Malo, connais-tu cette rivière ? Pourrais-tu nous y conduire ? Si nous sommes décidés à poursuivre, je crois qu’il nous faudrait lever le camp au plus tôt.

ermine avait dormi. Trop dormi. Beaucoup trop.
Que s'était-il passé ? Se rendormir au milieu d'un tour de garde ne lui était plus arrivé depuis des années. Ses réflexes s'émoussaient-ils ? L'âge la rattrapait-il finalement ? Où étaient passées toutes ces années ?

¤ Empalées sur la lame d'un ennemi, oubliées au fond d'un fossé, ou dans la gueule d'un dragon ... Voilà où, si tu ne te ressaisis pas ... ¤

L'humeur de l'aventurière était sombre en ce petit matin. Trop sombre.
Dès son réveil, elle été restée assise en tailleur devant sa tente en un pose méditative, le regard lointain. Plus tard, c'est effectivement d'une main ferme, dénuée d'aggressivité mais aussi probablement d'une grande partie de l'empathie qu'il lui connaissait, qu'elle réveilla "Monsieur Fileyeur". Elle salua à peine ses autres compagnons, qui interprétaient peut-être son attitude comme de la culpabilité de s'être assoupie. Mais ce qui occupait son esprit était bien plus profond.

Régulièrement Biscotte lui mordillait le doigt, dans une tentative de réconfort, puis abandonna, et la regarda en face d'un air sévère. Les yeux des deux hermines se croisèrent. Elles se comprenaient. Évidemment. Ce n'était pas l'âge, ni la paresse, ni la déloyauté, qui ne les auraient pas touchées toutes les deux de la même manière, au même moment.
Une influence magique. Un redoutable adversaire ...

Aux indications de Sylaruil, Hermine se releva brusquement. Sans même petit-déjeuner, elle défit sa tente, la fourra dans son sac comme le reste : soigneusement organisé, facile d'accès en cas de besoin. En moins d'une minute, tout était prêt. Jetant son paquetage sur son épaule, elle se campa sur ses jambes.
Elle fit un geste impatient de la main. Comme en réponse, toutes les pièces de son armure, qui étaient l'instant d'avant proprement rangées, s'envolèrent vivement dans sa direction. Rapidement, en un ballet compliqué et intense, elles s'assemblèrent parfaitement, la revêtant d'un harnois aussi sombre que la Mer de Nuit. Le dernier élément à se mettre en place fut la visière de son heaume, qui dissimula son visage derrière un masque de métal, froid et dénué d'expression.

Toujours sans un mot, la guerrière fit quelques pas, silencieuse, inscrutable. 4 heures, au bord de la rivière ...
Elle avait une destination, elle avait une Trace, elle avait un objectif. Et la volonté de l'accomplir.

Vëla de Torm avait fait bien du chemin jusqu’ici. De sa naissance au nord des terres de la horde, aux limites des montagnes de bord glacé pour ensuite vivre aux limites de Rashéménie le début de son existence de misère, de pauvreté, mais surtout d’amour qui durait presque dix ans, elle avait subir par la suite les attaques des Tuigans, son véritable premier malheur. Ayant été faite prisonnière par eux pour assouvir leur bas instinct, et ce, avant l’âge de 12 ans elle allait dévier de son destin, mais des yeux veillants c’étaient posés sur elle. Ensuite elle fut retrouvée par son père qui l’avait sauvé pour l’amener dans le monastère de l’ordre du corbeau, là où elle avait fait la rencontre de Torm, après un entrainement militaire, monastique et spirituel. Elle était devenue le bras armé de Torm, l’être au service de la justice, de la rédemption et d’abnégation. Son service aux marches d’argent, fallait le dire, l’avait désillusionné, elle avait quand même continué de servir, mais certains principes allaient à l’encontre de sa véritable foi. Elle était maintenant à l’âge ou les femmes forment des familles, l’appel se faisait, le devoir maternel s’insufflait en elle comme un poignard. Le pouvait-elle, le devait-elle, était là, depuis peu ses questionnements. Oui elle était partie des marches pour retrouver son paternel, mais sa véritable intention, sa déviance du moment, totalement égoïste, était pour se retrouver comme femme. Depuis son départ, la guerrière divine avait un appel profond, naturel, allait-elle l’écouter ou le fuir, pouvait-elle l’accomplir tout en continuant son service à Torm?

Son cœur battait fort lorsque Malo la regardait et suite à son baisé, voyant l’étincelle au fond de son regard, elle sentit en elle un appel grandissant, mais ne venait-il pas de lui mentionner qu’il était là pour Marge; elle qui avait été là pour lui. Vëla clignait des yeux, soupirait légèrement puis dit sur une teinte douce…-Tu es un homme bon, courageux et loyal Malo, tu es un être d’exception, c’est tout en ton avantage, Marge doit garder confiance en elle, bientôt elle te retrouvera, reste intègre… Mon ami. Je donnerai ma vie pour la sauver. - Elle l’avait enlacé de ses bras s’autorisant une dernière fois, un câlin. La rose au cœur de la paladin était ébranlée, une tristesse n’allait pas la faner, au contraire, elle allait lui redonner du baume.

Elle s’était assoupie, le cœur lourd et s’endormit dans les bras lumineux et chaud de Torm. La garde se fit dans un silence, se repassant sa vie et le service qu’elle avait accompli depuis. Heureuse du bonheur qu’elle avait apporté dans le cœur de tous ceux qu’elle avait secourus, une larme coulait sur sa joue droite repensant à sa situation et au choix qu’elle devrait prendre bientôt puis elle sombrait dans le sommeille sans rêve. À son réveille, la fille du nord était presque congelée, mais que lui était-elle arrivé, elle qui n’avait plus besoin de dormir? Ceci allumait une alerte en elle, la guenaude était ici! Non, Sylaruil vint dédramatiser le fait, ils avaient eu la visite d’une fée pendant sa garde, tout s’expliquait pour le mieux, même si sur le coup, la preux chevalière trouvait la chose presque impossible. Elle avait beau avoir déjà entendu parler des fées, savoir qu’une avait pu l’endormir aussi facilement ne la sécurisait pas pour autant. Restait que la guenaude n’était qu’à quatre heures d’eux et que c’était elle la menace à venir.

Après sa piété, Vëla appelait Abby à venir la rejoindre, le rituel de courte durée était toujours un moment particulier pour la paladin, car elle utilisait le langage céleste si apprécié et avait l’impression d’avoir un contact direct avec son amant Torm. L’arrivée du destrier du plan céleste recevait ses caresses habituelles puis elle ajustait la selle, y attachait solidement son sac puis la guerrière divine prit place en installant la lance d’arçon à l’étrier, sans étendard à l’effigie de Torm bien sûr. Lorsque Malo et Tijak allaient prendre les devants pour ouvrir la route, elle dit solennellement…


-Ami, c’est aujourd’hui, semble-t-il que nous allons croiser la ou les guenaudes, nous devons impérativement éliminer cette menace, évitons toute discussion, ce sont des êtres vils qui peuvent nous tromper de multiples manières naturelles soit par une malédiction, métamorphose, nous affaiblir au contact sans parler des autres ruses perfides puis surtout et le plus important, elle n’a plus son œil, ce qui nous laisse présager qu’elle n’est pas au courant de notre venu, est là possiblement un avantage, mais surement pas notre seul atout. J’ai confiance en vous et sachez qu’auprès de moi vous aurez une certaine protection. Soyez fort, direct, précis et rapide, soyons Uns dans nos différences et nous vaincrons! Allons sauver Marge, pour Malo. Je vous aime.-

Elle attendit de voir si les autres voulaient ajouter quelque chose.



Social pour encourager la troupe.

Sahadeva avait médité sur l'étrange rencontre que Sylaruil avait faite. Les informations qu'elle avait pu recueillir s'avéraient très précieuses : si elles étaient exactes, Marge et sa ravisseuse se trouvaient à portée de main... et le danger était proche. C'était une occasion inespérée de tirer les choses aux clair. Le Maquar avait approuvé la proposition de l'elfe :

- Merci pour toutes les informations que tu as pu recueillir, et merci à notre amie fée. Ces informations nous procureront un certain avantage. Tu as raison, partons sans attendre.

Le natif d'Estagund était pratiquement prêt pour le départ. Il remballa rapidement sa couverture et ses ustensiles de cuisine, puis aida ses compagnons à faire un peu de rangement. Ce faisant, il ne put s'empêcher de remarquer qu'Hermine était particulièrement silencieuse. Il se demanda si c'était parce qu'elle était concentrée sur la rencontre qui s'annonçait ou si c'était en lien avec ce qu'elle avait vécu depuis leur séparation.

¤ Que ces ogres lui ont-ils fait subir ? ¤

Une forme de pudeur l'empêchait de lui poser directement la question, il avait un petit peur de la déranger en un instant inapproprié. Un moment où ils seraient seuls près du feu de camp conviendrait bien mieux à ce genre de conversation. Il se contenta de lui adresser quelques sourires bienveillants pour tenter de la dérider.

C'était alors que Vëla s'était lancée dans sa harangue. Sa voix portait fort et elle semblait habitée par les paroles qu'elle déclamait. Sahadeva ne put s'empêcher d'admirer sa force d'inspiration et son courage à toute épreuve… ses certitudes aussi.

Il prit la parole à sa suite et ajouta :

- Bien parlé, Vëla ! Ensemble, nous sommes capables de renverser des montagnes ! Songeons à ce que nous avons découvert au hameau, à toute cette souffrance, à tout ce désordre malsain… et à cet œil dans la grotte… Nous devons découvrir ce qui se trame pour empêcher d'autres drames de se produire !

Le Maquar était définitivement prêt à partir.

Son tour de garde effectué, à peine enveloppé dans sa couverture, Tijak avait aussitôt sombré dans un sommeil profond, n'ayant même pas eu le temps de se retourner deux ou trois fois pour aménager sa couche. Avait-il, lui aussi, été influencé par la magie de la fée, voila qui était fortement probable, d'autant que l'ensemble de ses compagnons, à l'exception notable de Sylaruil, avait également cédé aux charmes de Sehanine Archelune.

Secoué un peu plus sèchement que nécessaire par Hermine, le gamin ouvrit de grands yeux encore embrumés avant de s'assoir en répriment difficilement un bâillement. Rassemblant ses affaires, il boucla son sac tout en écoutant attentivement les informations délivrées par l'elfe.

Oh non, dire qu'il dormait profondément au moment d'une rencontre aussi exceptionnelle. Le garçon se maudit intérieurement d'avoir loupé une occasion pareille de voir une de ces créatures mystérieuse.

Ainsi, leur adversaire était proche et il convenait de se mettre en route sans attendre pour conserver l'effet de surprise. Le seul point qui peinait un peu Tijak était le rôle joué par Marge dans tout cela. Au fond de lui, le jeune mousse espérait qu'elle ne soit qu'une victime de la guenaude mais certaines indications laissaient supposer que tout n'était pas aussi simple et qu'il faudrait se méfier également de cette femme.

Le discours motivant de Vëla galvanisa l'adolescent qui se sentait de taille à renverser des montagnes ou, du moins, à se mettre, lui aussi, immédiatement en route. Seule l'attitude d'Hermine, inhabituellement renfrognée et distante, venait doucher un peu ce bel enthousiasme.

Ne partageant pas la pudeur de Sahadeva, le gamin mit délibérément les pieds dans le plat, en apostrophant la jeune femme.

- Ben, m'dame Hermine, il s'passe quoi ? Pourquoi vous faites la tête comme ça ? C'est quand même une bonne nouvelle d'savoir où s'trouve les méchants...

Endossant d'un geste souple son havresac, il posa machinalement la main sur sa hachette, s'assurant ainsi de la présence rassurante de l'arme.

- On y va alors ? J'pars seul en tête ou vous préférez qu'on y aille tous les deux en faisant comme vous m'avez montré hier soir ?

e garçon s'adressa à l'armure noire. Lentement, le masque de métal se tourna vers lui, inscrutable. Lorsque son interlocuteur eut terminé, il retourna à sa posture initiale. L'armure resta droite, immobile et silencieuse. Pendant quelques instants, ce fut sa seule réaction.

Puis, ses épaules se relâchèrent, et Jakelm crut entendre un soupir.
Un bras se plia, le gantelet de métal noir pointa une tempe du heaume, qui s'ouvrit en spirale, tel un coquillage de métal. Le masque sans expression disparut, pour laisser la place à au visage d'Hermine. Un visage soucieux.
La guerrière posa un genou à terre, et fit signe à Jakelm d'approcher.

- Je déteste doяmiя tяop longtemps. Je déteste êtяe la cible de magie ..., murmura-t'elle, les sourcils froncés. Elle regarda le garçon droit dans les yeux : « Tu te souviens de l'aяaignée, Jakelm ? De Chax'l ? De Bяuce, et des autяes ? Des dommages iяяépaяables que peuvent faiяe l'espяit ? »

Comment oublier ?
Sirène et le marmouset avaient navigué ensemble, combattu ensemble. Par le passé, un affrontement mortel les avait opposés à de cruelles aberrations. Leurs ennemis avaient dominé et réduit en esclavage de nombreuses créatures, dont deux amis du duo, par la seule puissance mentale. Ce combat avait coûté la vie à encore plus de leurs compagnons. D'autres avaient perdu l'esprit ...

Hermine allait-elle avouer à Jakelm qu'elle avait de bonnes raisons pour ne pas dormir plus qu'elle ne pouvait ? Que notamment, quand son sommeil s'éternisait, elle revivait ses cauchemars ? Un défilé de gens disparus, ou morts ... Dont un en particulier, ressemblait étrangement à Jakelm. Un instant rieur, vivant et sans souci, mais l'instant d'après ...
Hermine allait-elle avouer à Jakelm sa détresse à son réveil quand, dans ces fugitifs instants où elle n'était qu'à demi-éveillée, encore liée par le filet tissé par les mauvais rêves, elle avait craint le pire ? Et son soulagement, quand elle s'était aperçue qu'il respirait normalement, et que cette tâche de sang sur son cou n'était qu'un effet de la pénombre ? Maintenant qu'elle les avait retrouvés, lui et Sahadeva, elle avait aussi retrouvé ses vieux démons : la crainte, l'inquiétude, la servitude de l'amitié ...
Elle était Louve, une nourricière, et un animal de Meute. Il était son Totem. Elle n'avait pas le choix ... Telle était sa croix. Et il aurait été injuste de la faire reposer sur les épaules du jeune garçon. Celui-ci devait vivre sa vie, indépendant —et de toute manière, il bougonnait dès qu'on le maternait un peu trop.
Oui, c'était une bonne nouvelle d'avoir retrouvé la trace des sorcières qui menaçaient la région. C'était l'occasion d'en finir. Mais c'était aussi le moment de tous les dangers. Parmi les aventuriers, combien réalisaient, et acceptaient, qu'ils risquaient leur propre vie ?

- Tijak ... Hermine soupira, se mordant la lèvre. « Яeste en vie. Fais tout ton possible pouя яesteя en vie aujouяd'hui ... C'est tout. » Elle se releva, remit la main près de sur sa tempe, et son heaume se referma à nouveau, plaque par plaque, jusqu'à l'emprisonner toute entière. Seule subsista sa voix qui, bien qu'étouffée et un peu plus métallique qu'à l'habitude, acheva d'un ton péremptoire :
« Et si toi ou Sahadeva essayez encoяe de me sauveя, je vous juяe que je me fâche. »

Elle se détestait. Au lieu de témoigner son affection, elle formulait des reproches. Pour les protéger, elle se montrait distante. Mais ça n'était pas grave : sous son masque, personne ne pouvait voir ses sentiments. C'était son problème. Elle pouvait gérer. Oui. Elle le pouvait. Elle le devait. Il le fallait.

Vëla avait sorti sa voix de Paladine pour déclamer un discours solennel dont elle avait le secret.

* Sûrement un impondérable de la formation de Paladin !*

Sylaruil décida de l’accompagner d’un air grave du premier instrument qu’elle ouvrait. C’était à la fois une manière de rendre le truc plus léger, mais aussi de montrer à Vëla qu’un peu de détente n’était pas non plus de refus ! Le ‘je vous aime’ était fort aussi mais par ailleurs tellement appréciable.

*Un peu d’amour dans cette belle forêt*

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- Je vous laisse décider de la meilleure façon d’avancer, ma meilleure contribution sera le chant. Il vous donnera courage et force, mais n’est pas le moyen le plus discret.

Sur le chemin de course, alors qu’ils slalomaient entre les arbres au son des animaux, son esprit fit : *Tilt ! Si les druides ont quittés la forêt, alors qui est Marge ?*

L’elfe du soleil levant décida qu’elle irait glisser un mot à ses compagnons, tout en restant discrète vis-à-vis de Malo. Elle préférait questionner directement ce dernier. Sans le bombarder d’interrogation, elle voulait lui laisser la place de s’exprimer, mais elle lui demanderait des choses du type

« Malo, toi qui connais bien marge, pourrais-tu nous en dire plus sur elle ? Quelle sont ses relations avec cette Elle ? Depuis quand habite-t-elle dans cette forêt ? Sais-tu si elle est au service de la Terre Mère ? »

Narration

S’entrainer à se déplacer silencieusement en terrain forestier en poussant la chansonnette était … un vrai défi. Pour l’heure, les aventuriers conclurent que dissocier les deux avaient plus de chance de donner du résultat.
La troupe était galvaudée par les encouragements de Vëla. Fut-ce juste en fonction de la situation ou des démonstrations d’affection dont elle avait pu faire preuve, chacun, en son for intérieur, y trouva ce dont il avait besoin pour espérer de toutes ses forces que leur entreprise réussisse.

Après avoir fait disparaitre au mieux les traces de leur bivouac, ils reprirent la route, arrachant à Sylaruil une réflexion qui pouvait mener à bien d’autres et à, finalement, préciser leur quête. Leur chasse aux Guenaudes s’étaient transformée en une mission de sauvetage d’une villageoise. Ils étaient partis pour sauver Marge des Guenaudes. Mais qui était-elle au fond ? Si les Druides avaient quitté l’île, pourquoi ne les avait-elle pas suivis … était-elle vraiment leur initiée ou … détenait-elle ses pouvoirs … d’ailleurs ?

Lors du sauvetage du Hameau, ils en avaient appris beaucoup sur le sort qu’Herledan lui avait fait subir en la bannissant. Sahadeva, confident du vieux Brendan, avait-il raconté cette histoire à ses compagnons ? Les mots lui revenaient en mémoire.

- Marge était singulière mais … j’ai toujours regretté la décision d’Herledan même si je la comprends … La pauvre fille a perdu ses parents alors qu’elle n’était qu’une jeune fille, il y a treize ans, au début du terrible hiver qui a marqué le début de cinq années de cauchemars pendant lesquels nombre des nôtres sont morts. Les tempêtes ne se calmaient que pour permettre aux pirates de débarquer. Nous n’aurions pas survécu sans le puit.
- Ce n’est pas la première fois que nous devons nous reconstruire et sans doute pas la dernière mais cinq années, c’est long, plus encore quand on est une adolescente sans repère, il y avait de quoi perdre la raison. Et finir par chercher le réconfort où il se trouvait. Hog avait un trop grand cœur et sa femme était à la capitale, Marge était jeune, belle, désespérée, elle était devenue une femme. Un village ne peut pas se passer de son forgeron, les habitants auraient pris position et ça se serait mal passé. Il m’a demandé mon avis mais son idée était déjà faite, pour le bien de notre communauté, il fallait qu’elle disparaisse et que même Hog se plie à la cause, avant le retour de sa femme. Il a suffi de faire courir la rumeur pour que tout ce qui nous arrivait devienne sa faute.
- Ça a si bien marché que la rumeur a pris corps, abandonnée pour la seconde fois, elle a trouvé du réconfort ailleurs. Elle n’était pas née quand la Bête a frappé les îles, et elle avait besoin d’une force et d’une furie qui ne soit pas celle qui avait brisé ses parents et sa vie. Elle s’est tournée vers les forces sauvages qui l’aideraient à survivre, seule, dans les bois.

Non, Marge n’était pas au service de la Terre Mère. Elle s’était tournée vers la Bête depuis longtemps et il était … fort probable … que sa découverte des secrets associés aux Druides ait une toute autre source.

- Je ne sais pas ce que je peux vous dire de plus. Si « Elle » est une Guenaude, je ne crois pas qu’elle l’ait jamais rencontré depuis qu’elle a été bannie du hameau, il y a longtemps déjà.

Quelque chose dans sa propre réponse gênait Malo. Il n’était pas tout le temps à ses côtés et, d’après ce que Vëla avait dit, ces sorcières avaient probablement le pouvoir de se faire passer pour … autre chose … ou quelqu’un d’autre. Puis les pouvoirs qu’elle avait développé devaient bien venir de quelque part, d’un apprentissage auquel il n’avait pas assisté. Finalement, c’était possible.
Il se mordit la lèvre pour s’éviter de partager ses réflexions mais son corps parlait pour lui.

- Je ne pense pas l’avoir jamais vue en tous cas. Pour ce qui est de servir la Terre Mère, nous savons que nous lui sommes tous liés mais Marge … vous savez … elle a été trahie par tout le monde. Et la Terre Mère n’aime pas les Bêtes comme l’ours … ou moi.

Hermine avait-elle fait le lien avec ce que son vieil ami lui avait confié de son apprentissage des mystères et de l’origine de l’étincelle dans son regard ? Lui avait-il d’ailleurs partagé l’origine de celle-ci ?

À la lumière de la question de Sylaruil e de la réponse de Malo, la paladin s’embrunie légèrement sans en laisser paraitre la moindre trace. Elle savait depuis qu’elle avait rencontré Marge que rien ne serait facile avec elle, mais profondément et professionnellement, Vëla était un être de miséricorde, elle savait qu’avec du vouloir, de la volonté et un peu de sagesse que l’on pouvait s’améliorer. Elle savait aussi que ce n’était pas pour tout le monde, mais l’histoire de Marge l’avait pris au cœur et la guerrière divine souhaitait faire entendre raison à la jeune femme tourmentée, si elle avait échoué la première fois, elle réussirait possiblement la deuxième fois.

Voyant le non parlé de Malo, la preux chevalier ne put retenir sa pensée et sur une teinte céleste puis en commun elle dit doucement…


(En céleste)-Torm vient lui en aide, éclaire-le à prendre la bonne décision pour lui et eux. - [/LANGAGE][LANGAGE=20]- Malo, il va falloir que tu commences à te faire une idée, je ferai tout en mon pouvoir et celui de Torm pour sauver Marge, elle le mérite amplement, ce serait son salut, mais à la lumière de ce qui me parvient présentement, sache que si elle ne veut pas coopérer… Ce sera difficile de ne pas briser des pots, je ne dis pas là que nous devrons l’éliminer, mais l’emprisonner et elle devra répondre à la justice malheureusement. Là, Malo, il me faut savoir de quel côté tu seras… J’ai confiance en toi et je sais pertinemment que toi aussi tu feras tout en ton pouvoir pour lui faire entendre raison… Aurons-nous ton support Malo advenant que Marge ne veuille rient entendre? N’oublie pas que peut importe ce qu’il arrivera, je serai toujours là. -

Son regard était franc, aimant et supporteur, elle disait la vérité. Dans le tribunal de sa conscience, il n’y avait rien de plus important que de régler le cas des guenaudes ou de la guenaude et s’il fallait que Marge en soi une, il n’y aurait pas mile solution malheureusement; soit elle comprendrait en faisant un choix éclairé en se soumettant à la justice, soit elle périrait, elle ne pourrait pas rester une agente libre du sang noir et semer le mal sur cette île.

Son regard se portait ensuite dans celui de Sahadeva puis de Sylaruil, les deux autres étant en avant d’eux. Vëla ne cherchait pas leurs supports, elle savait qu’elle l’avait, elle voulait juste saisir leurs sentiments du moment. La mélancolie coutumière de la guerrière divine survint doucement et un dialogue intérieur avec Torm prenait place, elle cimentait ses bases, fortifiait sa piété, demandant que tout soit fait dans le bon ordre des choses.




Social sur Malo.

’entrainer à se déplacer silencieusement en terrain forestier en poussant la chansonnette était effectivement … un vrai défi. Il y avait plusieurs manières de dissocier les deux : si certains préféraient papoter, tant mieux pour eux. De son coté, Hermine n'était guère d'humeur sociable, et préférait se concentrer sur l'entraînement. Cela ne lui posait guère de problème : elle avait le pied léger et la foulée rapide ; lors de ses derniers voyages, pour rester au niveau de ses compagnons, elle devait constamment se forcer à marcher plus lentement que son rythme de croisière. Mais quand la plupart d'entre eux marchait trois lieues, elle était capable d'en avaler plus de quatre. Sans s'essoufler.

Aussi, ce jour-là, lorsque Sylaruil se mit à chanter, et les autres à discuter, la guerrière observa ses compagnons un à un ; si un seul d'entre eux, l'impatient Tijak en particulier, souhaitait continuer l'entraînement, elle ne fit aucun effort pour ralentir. Au contraire, elle accélera le rythme et, ensemble, ils se détachèrent rapidement du groupe. Cela leur offrit plusieurs bénéfices : non seulement s'approchèrent-t'ils davantage d'une situation réelle (ne pas se faire rattraper par une armée alliée, ou ennemie, qui n'avait aucune connaissance précise de leur position), mais en plus purent-ils mettre en pratique certains signes qu'Hermine avait mis au point avec Jakelm la veille au soir, et dont elle avait informé au minimum Sahadeva : fleur percée d'une brindille, branche cassée en deux et repositionnée d'après un angle précis ... Quelques mots d'un langage majoritairement visuel, connus d'eux seuls et qui signifiaient aux autres "n'allez pas par là", "corrigez votre trajectoire dans cette direction", "gibier sur votre gauche" ou encore "sérieux, baissez le volume, on n'entend que vous !".

Hermine restait concentrée sur le fait de guider Jakelm. Elle tentait de le guider, de l'aider à corriger ses défauts, mais aussi de lui faire confiance quand elle le perdait de vue. Aider ceux que vous aimez à grandir, et apprendre à vous détacher d'eux ...
L'entraînement était une nécessité. L'entraînement était aussi un prétexte. Un masque, aussi efficace que celui de métal qui cachait son visage. Un masque qui évitait à Hermine d'exprimer ses idées à voix haute.

L'ignorance était un cadeau. Elle évitait de se poser trop de questions.



Des questions … Hermine en avait beaucoup.
Quand à la connaissance … La sienne était vaste.

• Certaines espèces de fourmis réduisent en esclavage d'autres insectes, sans contrepartie aucune pour les victimes.
• Toxoplasma gondii infecte les souris et les rends insensibles à l'odeur de l'urine de chat … les rendant plus susceptibles d'être mangées, lui permettant de se reproduire.
• Ophiocodyceps unilateralis atteint le cerveau de certains insectes qu'il transforme en zombies parfaitement compatibles avec l'incubation de ses spores.
• Alors même qu'ils sont contraints par les autres races à vivre dans des conditions terribles, les hommes-lézards pensent à la survie de leur peuple, de leurs œufs ; c'est cela qui leur rend parfaitement acceptable le cannibalisme.
• Les vargúlfr peuvent être parfaitement sociables, loyaux et dignes de devenir votre ami ; la pleine lune venue, cela ne les empêchera pas de vous dévorer tout cru ...
• Tandis que les fées personifient d'une certaine manière les cotés merveilleux de la Nature, les guenaudes en sont les cotés violents, effrayants, dérangeants.

Qui décide ce qui est Mal ?

La survie du plus fort, ou du plus apte, est un concept que la plupart des philosophes, ou des intégristes du Bien, trouveraient maléfique.
Mais la Nature … La Nature n'est pas gentille. La Nature peut être très, très effrayante. La Nature veut vous tuer, pondre ses œufs dans votre cadavre pour pouvoir répandre plus de Vie. La Nature n'a aucun sens du Bien ou du Mal.
La Nature … est.

Le druidisme, lui, est une construction sociale, une religion.
Admettons que Marge était une druide. Elle était une druide, pas La druide archétypale, et encore moins tous les druides. Le simple fait qu'elle soit membre de cette classe n'influait en rien sur sa personnalité. Hermine, elle-même, était de part sa culture une « barbare », primitive et un peu rude —mais elle n'était pas une Barbare. Ses capacités de Moine impatientaient ceux qui ne la voyaient étudier dans aucun monastère. Plusieurs membres du groupe d'aventuriers pouvait certainement être qualifiés d'« assassin », et pourtant aucun n'était membre de la classe éponyme.
La classe de quelqu'un était un raccourci de ses capacités, parfois un métier, mais ne suffisait pas à résumer qui était vraiment cette personne, les choix qu'elle allait faire, sa manière d'agir. Nos compétences informent autrui de qui nous sommes, mais des millions d'autres expériences entrent en jeu lorsque nous avons à prendre des décisions. Ce sont ces millions d'éléments de personnalité qui font vraiment de nous qui nous sommes.

Qui décide qui vous êtes ?

Marge était peut-être une druide. Ou une sorcière. Ou une prêtresse. Peu importait.
Elle était humaine. Elle était femme.
Telle la mystérieuse célibataire qui passe tout son temps dans les bois ; la sage-femme qui semble en savoir davantage que le médecin académique ; la vieille excentrique qui vit seule et semble tout savoir des superstitions, tabous, rituels de protection, et anciennes malédictions. Sont-elles de simples femmes, sans mari, sans enfants, sans famille, ou sont-elles quelque chose d'autre —quelque chose de pire ? Est-ce que ma famille est à l'abri ? Est-ce que mon mari est réellement fidèle ? Est-ce que c'est bien mon bébé qui dort dans son berceau ?
La guenaude personnifie la peur que les hommes ont des femmes, et est un reflet de la jalousie et du dégoût des femmes envers elles-mêmes. Celles qui s'écartent du rôle traditionnel de la mère ou de l'épouse, sont marginalisées et prises pour cibles. Les hommes peuvent être intimidés par tout ce qui menace leur position dominante, et les femmes éprouver du ressentiment envers celles qui parviennent à se débarrasser du carcan que leur impose la société.
Et derrière le masque de la guenaude, derrière ses nombreuses couches de rides, se cache la peur de la vieillesse, la peur d'un corps en ruines, la peur de l'oubli, la peur de la Mort ...

Qui décide de la direction que prend votre vie ?

À l'instar de toxoplasma, ophiocodyceps ou la lycanthropie, certains organismes, maladies ou malédictions viennent altérer nos actes, tels des cancers qui viennent obscurcir notre personnalité. De même, chacun d'entre nous peut, à la suite d'événements traumatisants, adopter une autre personnalité, une nouvelle manière d'agir, ou un point de vue sur la vie totalement différent.
D'événements traumatisants, Marge semblait avoir eu plus que sa part. Et comme on ôte un kyste malin pour préserver l'organisme hôte, Marge avait été diabolisée, et frappée d'ostracisme, pour préserver une communauté. Était-elle une guenaude ? La communauté d'Herledan, par son ignorance, par son intolérance, avait-elle donné corps à ses propres craintes ? Créé le héraut de sa propre destruction ?

Que craignez-vous vraiment ?

La Nature n'est ni Bonne ni Mauvaise et, quelque part, on peut aussi dire cela de l'Humanité dans son ensemble. Mais la Nature, comme l'Humanité peuvent être, elles aussi, la cible de manipulations extérieures, de parasites, de cancers.
Les divinités, qui s'approprient des concepts, pour en rediriger l'énergie vers elles-mêmes, et manipuler les humains, les amputer de leur complexité inhérente, et servir leurs propres desseins, sont-elles si différentes de toxoplasma ou ophiocodyceps ? La plupart de ces divinités ne créent rien, elles ne font que modifier, amplifier, simplifier, et détruire au nom de leurs idéaux. Donner une notion de "Mal", ou de "Bien", à des Forces qui seraient, sans elles, restées pures ou, à défaut, simplement humaines.

L'Instinct de survie, la loi du plus apte. Voilà un exemple de Force, parmi les plus primales, enfantée par la Nature. Dans ces Royaumes, elle était personnifiée, corrompue, par un dieu de la Furie, qui la transformait en l'Instinct de tuer, en la loi du plus fort. Malar.
Une jeune femme anciennement proche de la Nature s'est retrouvée affaiblie par la bêtise humaine. Et la divinité s'est greffée sur son âme tel un cancer. Une autre Foi avait peut-être pris racine, obscurcissant la vision de la jeune femme qui, heureusement, gardait suffisamment de conscience pour aider un humble pêcheur affligé par son propre parasite. Pour l'aider … Ou pour propager le cancer de Malar ?

Quelles sont vos convictions ?
Êtes-vous sûr que ce sont bien … les vôtres ?