Un havre de paix - Chapitre 2, Badrok, Elrik, Hiielle, Stor

Chapitre précédant

Date: 13 Tarsakh 1373 - Treizième jour de la Griffe des Tempêtes
Lieu: Pierre-tonnerre - Cormyr
Temps: Nuageux - 15°
Moment: Début d'après-midi

Narration: Stor

Une chose était certaine, le Luiren était encore bien loin et le petit barde connu sous le nom de Stor Mousseracie en avait parfaitement conscience... L'halfelin, dont rien ne pouvait entacher la bonne humeur s'était fait à cette idée lorsqu'il avait quitté le citée d'Eauforte il y avait déjà bien des jours de cela...

Bien déterminé à découvrir le monde et user de son Art, le barde s'était donc mis en route, arpentant les sentiers, les chemins des Royaumes au grès des rencontres et des dangers de la route. Son itinéraire était vague et son point de chute encore plus mais le Hin gardait son objectif en tête... Tout naturellement, il avait pris la décision de rejoindre les rives de la Mer des Etoile Déchues, carrefour incontournable pour quiconque devait traverser le continent en direction du Sud Est. Ainsi, chemin faisant, le hasard conduisit Stor Mousseracie dans le royaume du Cormyr.

Malgré son optimisme inébranlable, Stor commençait pourtant à ressentir un certaine lassitude. Perdu depuis qu'un voyageur s'était joué de lui en lui donnant de fausses indications, il arpentait la lande entre le petit village de Hultail et Pierre-Tonnerre depuis plusieurs jours. Hors de la route principale, le Hin ne rencontra personne hormis quelques paysans plus disposés à le chasser de leurs terres plutôt qu'à lui offrir le gîte et le couvert... Vivant de rapine et dormant à la belle étoile, son yarting pour seul compagnon et sa bourse aussi fine de ses jambes étaient fluettes, Stor était épuisé et affamé.

Ce fut pourtant en chantonnant une ballade de sa composition, par un après midi nuageux, que Stor Mousseracie franchit enfin la porte Ouest de Pierre-Tonnerre. Bien qu'un garde du nom de Kern lui eut lancé quelques avertissements et conseils de comportements en faisant références à d'obscurs troubles dans la citée, l'enregistrement auprès du sous-officier de garde ne fut qu'une simple formalité.

n a beau être un aventurier aguerri et infatigable, il arrive un moment où les jambes commencent à se faire lourdes et où le besoin de souffler un peu s’impose naturellement. Stor n’échappait pas à cette règle et, en dépit d’un moral à toute épreuve, il avait poussé un petit soupir de soulagement en apercevant les murs de Pierre-Tonnerre. Non pas qu’il se soit déjà lassé des charmes de la campagne du Comyr, ni de la rudesse de ses habitants, non, c’était juste qu’il aspirait à un repos bien mérité tout en bénéficiant d’un confort moins rustique que celui d’un tapis de mousse. Son dernier repas chaud remontait déjà à trois jours, lorsqu’un lièvre téméraire avait bien voulu arrêter le vol d’une de ses flèches. Mais depuis, aucun animal n’avait eu le bon goût de tenter une expérience similaire et le petit barde avait dû se contenter de racines et de baies en guise de tout repas ce qui, quand on connait l’importance de la nourriture chez les Halfelins, constituait un véritable exploit. C’était même un miracle authentique de voir que la bonne humeur était toujours au rendez-vous.

Pourtant, le jeune Stor avait bien tenté de se faire offrir l’hospitalité, ou d’échanger celle-ci contre quelques chansons de sa composition, rien n’y avait fait. La méfiance maladive et injustifiée (a-t-on déjà vu un Hin chaparder quelque chose ?) des paysans lui avait fait trouver porte close et l’avait donc contraint à poursuivre son chemin et à dormir dehors. Aussi, la bourgade toute proche tombait à pic et allait lui permettre de reprendre quelques forces, à condition qu’il trouvât un moyen quelconque de remplir sa bourse, dangereusement plate, avant de poursuivre le périple qui devait le conduire jusqu’au Luiren.

C’est donc yarting en bandoulière que Stor se présenta devant le garde de faction à la porte Ouest de Pierre-Tonnerre. Haussant un sourcil surpris devant les diverses recommandations, le jeune Halfelin tint à rassurer le militaire :

- Pas d’inquiétude, mon brave, je suis la discrétion assurée. Si vous ne m’aviez pas vu passer, vous n’auriez jamais pu deviner que je me trouvais en ville. Je vous garantis que je n’y suis pour rien dans vos ennuis passés, présents ou à venir. Oui, oui, vous en faites pas, je vais voir votre chef pour dire que je suis là…

Aussitôt dit, aussitôt fait, il se retrouva devant le sous-officier et déclina, sans hésitation, son identité. S’il fut déçu que l’homme soit assez inculte pour ne pas connaître le célèbre Stor Mousseracie, pourtant renommé dans toute la cité d’Eauforte, ou du moins le quartier abritant sa famille, le barde n’en laissa rien paraître et parut même s’amuser de devoir faire un nœud de paix au fourreau de son épée courte.

- Vous êtes sûr que c’est vraiment utile ? demanda-t-il en obtempérant. Ce n’est pas avec mon cure-dent que je vais attenter à l’ordre public. D’ailleurs, en parlant d’ordre public, y-a-t-il des endroits à éviter en ville. Votre garde a vaguement mentionné des incidents et je ne voudrais pas me retrouver mêlé à quelque chose de louche.

¤ Du moins pas tant qu’il me restera encore quelques jours à passer en ville… ¤, corrigea intérieurement le petit homme, avant de demander, à voix haute cette fois :

- Au fait, connaîtriez-vous une auberge qui serait prête à engager un troubadour ? Je ne me débrouille pas trop mal et j’aurais bien besoin de gagner quelques pièces. Je peux vous faire une démonstration de mes talents si vous le souhaitez…

Joignant le geste à la parole, Stor empoigna son yarting et joua un rapide accord, fredonnant à mi-voix :

- Ecoutez cette histoire que l’on m’a racontée.
Du fond de ma mémoire, je vais vous la chanter.
Jadis vivait un homme, Ondeth Obarskyr,
Géniteur du Royaume qu’on appela Cormyr.
Géniteur du Royaume qu’on appela Cormyr.

D'après " Le petit âne gris" d'Hugues Aufray

Date: 13 Tarsakh 1373 - Treizième jour de la Griffe des Tempêtes
Lieu: Pierre-tonnerre - Cormyr
Temps: Nuageux - 15°
Moment: Début d'après-midi

Narration: Stor

Emplissant l’air du poste de garde avec quelques accords de yarting supplantés par sa voix mélodieuse, le petit barde décrocha un sourire approbateur au sous-officier de garde. Celui-ci s’arrêta un instant d’inscrire des informations dans le registre des entrées tout en hochant la tête pour battre la mesure.

Il ne fallait pas être archimage pour deviner que le militaire était un vrai patriote doublé d’un mélomane. En tant que tel, le Dragon-Pourpre ne pouvait qu’apprécier une ballade ayant pour thème le fondateur du Royaume Forestier et de la dynastie des Obaskyr…

- Excellent maître barde ! Gagner votre croûte en ville ne devrait pas être bien difficile et puis ce ne sont pas les tavernes qui manquent ici… Il y’a bien le « Nid de Dragon » si vous n’êtes pas contre un public presque exclusivement composé de militaires... Pour les endroits les plus connus, vous trouverez également le « Bruit du Tonnerre » , c’est tout proche d’ici sur votre gauche quand vous aurez franchi la porte. C’est la plus grande taverne de la ville et la concurrence y est rude. Par contre je vous déconseille le « Destin des meubles » à moins que vous n’aimiez vous battre en même temps que vous chantez ? Nos gars y interviennent quotidiennement donc pour votre tranquillité comme pour la notre, évitez ! Sinon, y’a bien la «Tanière de l’Ours » ça a excellente réputation bien que le patron soit une vrai tête de bois !

Après quelques précisions complémentaires destinées à faciliter l’orientation de Stor en ville, le sous-officier lui indiqua que les formalités étaient terminées. Tout naturellement donc, le Hin quitta le poste de garde et passa sous le grand linteau de la porte principale. De chaque coté de celle-ci, probablement motivés par la démonstration de Stor, les sentinelles fredonnaient doucement en cœur ce qui s’apparentait à une marche militaire…

S’engouffrant vers la ville, l’halfelin entendit l’un des deux s'interrompre dans son dos avant que tous deux n'éclatent de rire :

- Je r’pense à c't'histoire de ce matin Kern, l’halfelin avec le pantalon sur les chevilles, ça pourrait-faire une sacrée bonne chanson pour sûr ! Faudrait qu'un barde s'y penche tiens ! AHAHAH !

près avoir remercié le sous-officier pour ses renseignements et muni de toutes les autorisations nécessaires, Stor pouvait donc entrer en ville par la grande porte. Il comptait bien faire la tournée des auberges fréquentables afin d'y trouver un travail temporaire et bien rémunéré. Même en se tenant à l'écart du "Destin des Meubles", il y avait manifestement encore l'embarra du choix, sans compter les établissements que l'homme avait certainement oubliés.

- Bon, autant commencer par la plus proche, murmura-t-il dans sa barbe inexistante en passant à proximité des deux sentinelles, résolu à aller tenter sa chance auprès du propriétaire du "Bruit du Tonnerre".

Le rire des deux hommes attira naturellement l'attention du petit être dont la curiosité se trouva attisée par les propos tenus : un halfelin avec le pantalon aux chevilles, voila en effet un spectacle bien incongru. Qu'est-ce qui a donc bien pu amener un de ses congénères à s'exhiber en pareil accoutrement ? Non pas que cette situation soit particulièrement insolite - ce ne serait pas la première fois qu'un galant soit contraint de partir précipitamment sans avoir le temps de se rhabiller complètement - mais le barde sentait qu'il y avait probablement une autre explication et que tout renseignement supplémentaire était bon à prendre pour nourrir la trame d'une histoire.

- Bien le bonjour, mes seigneurs, les interrompit le barde avec un grand sourire. Je n'ai pu faire autrement que d'entendre vos dernières paroles. Vous parliez d'un halfelin, habillé de façon quelque peu négligée, si je ne m'abuse ? Je vous assure que je n'y suis pour rien, je viens tout juste d'arriver en ville. Par contre, on pourrait illustrer tout ça de cette façon.

Saisissant de nouveau son yarting, Stor improvisa un rapide couplet qu'il fredonna en s'accompagnant de son instrument :

- Un Halfelin fut vu,
Devant tous, les chausses descendues.
Le brave Dragon-Pourpre
Lui dit : "Pauvre bougre,
T’as l’air plutôt niais,
Tout déculotté."
C’est rien, lui dit le Hin
J’allais juste prendre mon bain.

Accentuant son sourire, le chanteur s'interrompit et adressa un clin d'oeil aux deux hommes.

- Mais pour la suite, il me faudrait plus de détails. Pourriez-vous m'en dire davantage ?

D'après "Le Bon Roi Dagobert"

Date: 13 Tarsakh 1373 - Treizième jour de la Griffe des Tempêtes
Lieu: Pierre-tonnerre - Cormyr
Temps: Nuageux - 15°
Moment: Début d'après-midi

Narration: Stor

Coupés dans leur éclat de rire, les deux soldats s'interrompirent avec étonnement lorsque Stor revint sur ses pas pour les questionner.
Les deux hommes regardèrent le barde un instant en silence puis l'un d'eux pris la parole:

- Bah z'avez d'la chance maître barde, mon collègue Kern, il l'a même rencontré votre gugus. Y vous racontera mais qu'si vous faite un couplet sur nous dans votre chanson ?! Marché conclu ? EHEH !

Sans laisser le temps à Stor de répondre quoi que ce soit, l'autre garde, Kern, leva la main en signe de paix et s'approcha légèrement du Hin.

- Ah ça c'est une idée. On parle toujours dans les ballades des valeureux chevaliers et des héros légendaires. Pour sûr que notre commandant lui, y doit bien être le héro d'une bonne demie douzaine de chansons. Mais pour nous autres les plantons des Portes, y'a jamais rien sur nous. J'vais vous dire moi... vot' collègue Halfelin là, j'lai vu de mes yeux vu c'midi quand je déjeunais à la taverne avant de prendre mon tour de garde. Et j'ai même discuté avec un d'ses compagnons. Enfin bref... Notre Lionar il les a cueillis au saut du lit parce qu'y sont accusés d'une ribambelle de crimes. Y s'trouve que quand nos gars on chopé vot' type, l'avait même pas eu l'temps d'boucler son ceinturon et que son futal il lui est tombé sur les chevilles. Il est resté l'calcif à l'air pendant toute l'arrestation... Enfin c'est ce que nos collègues qui y étaient racontent... Si vous v'lez des témoins oculaires allez à la Tanière de l'Ours c'est là qu'ça s'est passé.

Le dénommé Kern continua son monologue en donnant une description physique assez détaillée de Badrok et de ses compagnons. Il venta par trois fois les qualités de physionomiste, l'excellente mémoire et la fiabilité des Portiers de la ville...
Afin d'illustrer les propos de Kern quand aux supposées qualités sans cesses rabâchées des plantons mais également pour être certain d'apparaitre lui aussi dans la ballade de Stor, le compagnon de Kern fit mine de réfléchir longuement avant de donner à Stor les noms des trois malheureux aventuriers: Badrok, Elrik et Hiielle... Bien entendu, Stor ne pouvait se douter que ces noms étaient déjà bien connus de la plupart des Dragons Pourpres de la ville tant l'histoire de l'arrestation avait circulée dans leurs rangs depuis la matin même...
C'est alors que le sous-officier auprès duquel Stor s'était enregistré sorti de sa cabane.

- Vous deux, à vos postes et un peu de discipline. Maître barde, je vous prierai de ne pas distraire mes hommes et je vous demande de bien vouloir circuler !

Le sous-officier ne témoigna pas la moindre méchanceté mais son ton était sec et plein d'autorité. Les deux gardes saluèrent le troubadour et se remirent à scruter l'horizon comme deux statue de chaire sans piper un mot de plus...

e ton employé atténuait la portée de la réprimande mais Stor se le tint pour dit et arrêta immédiatement de questionner les gardes.

- Vraiment désolé, monsieur l'officier, s'excusa-t-il aussitôt en accentuant son air contrit. Je ne vous dérangerai pas davantage et je vais me mettre en quête d'une auberge.

Affirmant la prise sur la bretelle de son sac, il remonta ce dernier d'un rapide mouvement d'épaule avant de saluer les soldats d'un léger sourire.

- Merci encore pour vos informations et vraiment désolé de vous avoir importunés. Promis, je ne manquerais pas de composer une chanson à la gloire des vigilants et loyaux Portiers de Pierre-Tonnerre.

Sur un dernier geste de la main, le jeune Halfelin s'éloigna en sifflotant la petite mélodie qu'il venait d'improviser à la "gloire" de son congénère. Tout cela lui donnait envie de creuser cette histoire et d'en apprendre un peu plus sur cette arrestation et les crimes qui l'avaient amenée. Donc, la Tanière de l'Ours semblait toute désignée comme prochaine étape. Restait à supposer qu'une chambre y soit libre et que son propriétaire ne soit pas trop méfiant envers les Hins et soit enclin à en engager un pour égayer un peu l'atmosphère de son auberge.

Tout en cheminant, Stor se mit à fredonner à mi-voix, essayant de trouver une suite amusante à la comptine qu'il venait d'ébaucher.

- Comme il les remontait,
Pour sa dignité retrouver,
Le brave Dragon-Pourpre
Lui dit : "Pauvre bougre,
Ton caleçon à fleurs,
Il va faire fureur."
"J'espère, lui dit le Hin,
Qu'au Cormyr, c'est la mode qui vient."

Date: 13 Tarsakh 1373 - Treizième jour de la Griffe des Tempêtes
Lieu: Pierre-tonnerre - Cormyr
Temps: Averse - 10°
Moment: Après-midi

Narration : Stor

Tout en fredonnant les bribes de sa toute nouvelle composition, Stor s’engouffra dans rues de Pierre-tonnerre bien décidé a visiter un peu la ville avant d’atteindre la Tanière-de-l’Ours. Stor avait du temps et de la créativité à revendre et pouvait donc se permettre de flâner un peu, la fatigue et la faim pouvaient encore attendre...

Au bout d’une bonne heure de pérégrinations et de haltes ici et là, le temps commença à se couvrir. L’humidité dans l’air ne cessait de s’intensifier a mesure que le ciel se chargeait en nuage. Les motivations touristiques du semi-homme finirent par totalement disparaître lorsque les premières goûtes se mirent à tomber… Rattrapé par la fatigue et la faim, Stor mis cette fois-ci le cap vers l’auberge une bonne fois pour toute.

Le petit barde pénétra dans le grand bâtiment à la façade verte si caractéristique. Quelques clients étaient au bar et d’autres jouaient aux fléchettes sur le coté de la scène qui était encore déserte. Un couple discutait discrètement dans une alcôve. Le gros de la clientèle n’était pas attendu avant quelques heures…

Le seul membre du personnel visible était un nain a l’air rustre qui était emmitouflé dans des habits en peaux d’ours. A l’approche de Stor, le nain qui briquait frénétiquement le bar derrière lequel il était installé s’arrêta pour lui demander de quoi il avait besoin. Stor Mousseracie fit ainsi la connaissance de Derdek Valprofond…

Après quelques minutes de discutions, le nain, qui s’était révélé beaucoup moins rustre que son apparence ne le laissait croire, proposa le gîte et le couvert à Stor en échange de quelques heures de son temps et de son art pour divertir le public de la soirée…

Derdek scella l’entente en apportant à au barde affamé une assiette de ragoût de biche aux airelles, une pinte d’ale et quelques gâteaux aux épices macérés dans du miel.

- Deux dernières choses Maître barde. Premièrement j’veux rien d’graveleux et rien d’tonitruant a vous retourner la baraque. Mes clients sont des clients d’choix y z’aiment la qualité et y z’aiment pouvoir parler aussi... Pas d’tambourin ou d’truc comme ça donc. L’autre chose, c’est que pour la chambre z’allez devoir la partager avec un autre Hin. J’ai plus d’chambre disponible pour les p’tites personnes hormis la sienne qu’est une chambre double qu’il occupe tout seul pour l’instant. J’vous l’présentrai quand il arrivera c’soir. Histoire d’le prévenir avant d’vous donner une clé quoi. Question de principes... Enfin… Si y r’vient un jour… Bref, en attendant, posez vos affaires derrière l’bar et si vous voulez vous r’poser avant d’jouer installez-vous dans une alcôve.


Date: 13 Tarsakh 1373 - Treizième jour de la Griffe des Tempêtes
Lieu: Pierre-tonnerre - Cormyr
Temps: Averse - 10°
Moment: vers 21h00

Narration : Tous

Hiielle, Badrok et Elrik firent leur entrée dans la Tanière-de-l’Ours alors que la soirée était déjà entamée et que nombre de tables et alcôves étaient occupées. L’atmosphère n’avait pas changée par rapport aux soirées précédentes. L’ambiance était chaleureuse, les odeurs d’alcool frais et de repas chaud embaumaient l’air dans un mélange subtile invitant a la détente.

Seule nouveauté, la scène n’était plus occupée par un harpiste mais par un petit barde qui grattait son yarting alors qu’il achevait une ballade. Devant la scène une dizaine de personnes attablées battaient discrètement la mesure de la tête…

Alors qu’il aperçu ses clients infortunés, Derdek s’approcha d’eux avec un regard mêlant surprise et joie. Aussitôt, le nain alla a leur rencontre.

- Bonne rencontre vous trois ! Heureux d’vous voir libres et en bonne… le tavernier s’arrêta un instant en apercevant les vêtements déchirés et tachés de sang de ses interlocuteurs... Baaaah au moins z’êtes pas au fond d’un cachot ou entrain d’vous balancer au bout d’une corde. Aller poser vos affaires et installez-vous… Tiens y’a une alcôve qui s’libère là-bas si vous-voulez. Vous avez b’soin d’quelque chose ?

Le patron de la taverne fit un geste à Stor qui venait de terminer sa chanson. Captant son attention, il invita le petit barde venir le rejoindre tandis qu’il expliquait déjà à Badrok légèrement embarrassé que ce dernier allait devoir faire chambre commune...

ela avait été un plaisir de conclure aussi vite une affaire avec le patron de la taverne. Sous des abords un peu revêches (réputation naine à préserver, très certainement), ce dernier se montra être un interlocuteur fort agréable qui proposa un marché parfaitement honnête. Le gîte et le couvert se voyaient ainsi garantis et le jeune barde espérait bien y ajouter les quelques piécettes que les spectateurs ne manqueraient pas de lui lancer en guise de pourboire.

Devant les dernière recommandations de l'aubergiste, Stor se hâta de le rassurer en montrant son yarting dont le son restait tout de même bien moins assourdissant que les percussions d'un tambourin. Quant aux chanson, s'il était tout à fait capable d'entonner un chant paillard pouvant faire rougir un orque, le Halfelin possédait un solide répertoire dans bien d'autres domaines. Paisibles ballades et douces rengaines n'avaient plus beaucoup de secret pour lui.

- C'est pour moi, ce festin ?, s'extasia-t-il devant le ragoût dont le fumet le faisait déjà saliver d'envie. Un grand merci, maître Valprofond, tout cela a vraiment l'air succulent.

Le temps de humer le plat avec un air ravi et le Barde poursuivit sa conversation comme si de rien n'était.

- Je déguste ce délicieux repas et je monte sur la scène, annonça-t-il enthousiaste. Pour la chambre, ne vous en faites pas : je n'ai aucune objection à la partager avec quelqu'un d'autre. Ça fera de la compagnie pour bavarder le soir.

Et, Yondalla le sait bien, en matière de bavardage, Stor était un expert, toujours à l’affût d'une histoire ou d'une aventure à transcrire.

Comme promis, aussitôt la dernière bouchée avalée à une vitesse confirmant la réputation des Hins dans le domaine gastronomique, il entreprit de divertir les clients de l'auberge, savourant les applaudissements qui saluaient chacun de ses morceaux.

L'arrivée du petit groupe et l'invitation de l'aubergiste à les rejoindre arriva à point pour que le barde puisse s'accorder une petite pause. Tout en marchant vers le comptoir, ce dernier détailla les derniers venus. À voir leur air fatigué et l'état de leurs vêtements, la journée n'avait pas dû être une partie de plaisir et un bon repos leur serait certainement salutaire.

Affichant un sourire amical sur son visage, Stor attarda son regard sur Badrok. Ainsi, c'était lui l'infortuné héros malgré lui de la dernière composition, encore inachevée, du petit barde.

- Heureuse rencontre, le salua-t-il en s'approchant. Stor Mousseracie, pour vous servir. Je suis ravi de faire votre connaissance. J'espère que cela ne vous dérange pas de m'accueillir dans votre chambre. Pas d'inquiétude, je sais me faire tout petit et je ne ronfle pas.

Ronfler, ronfler... Par association d'idées, un nouveau couplet commença à prendre forme dans l'esprit fécond du petit barde :

¤ - Un Halfelin ronflait
Si fort que les vitres tremblaient.
Le brave Dragon-Pourpre
Lui dit : "Pauvre bougre,
C’est une vraie forge
Que t’as dans la gorge."
"Je sais, lui dit le Hin,
Je crache du feu chaque matin."¤

Depuis qu'il avait quitté le bureau du lionar des Dragons Pourpres en compagnie de ses camarades d'infortune, Badrok n'avait que trois envies. D'abord, manger. Ensuite, trouver quelqu'un pour l'aider à donner de ses nouvelles à sa famille. Enfin, dormir. Heureusement, grâce au bon travail des médecins de la milice, le Hin sentait beaucoup moins ses blessures le tirailler, laissant ainsi une grande fatigue s'installer. En marchant à travers Pierre-Tonnerre, se retenant au manche de sa lance à la manière d'une canne, les vêtements pleins de sang et son cou à peine capable de soutenir sa tête, le petit guerrier donnait l'impression d'être fraîchement revenu à la vie manipulé par un nécromancien débutant. Une attitude qui changea quand il entra dans la Tanière de l'Ours.

Tout d'abord, il devint nerveux, sachant que le grabuge du matin même avait sans doute mis le tavernier en colère contre Badrok. Pas sûr que le trio serait accueillit à bras ouvert. Ensuite, la chaleur de l'établissement ne fit qu'augmenter l'envie de s'enfoncer dans des bons draps propres. Alors qu'il somnolait sur le rythme de la ballade du barde halfelin, le petit guerrier s'étonna, autant qu'il pu, quand le patron de l'établissement les reçu avec le sourire, leur indiquant qu'une alcôve et un repas chaud les attendait. Le Hin se contenta alors de répondre d'un geste respectueux de la tête, espérant ne pas se fatiguer à parler avant d'avoir avalé quelque chose. Malheureusement pour son épuisement, Badrok fut prit à part quelques instants.

Apparemment, le tavernier avait été forcé de partager la chambre du petit guerrier avec le barde qui jouait encore voilà quelques instants. Sans doute s'agissait-il d'une mesure prise en cas surpopulation dans la tanière, mettre les halfelin dans la même pièce. Le troubadour s'approcha alors sans que Badrok ne puisse dire mot, se présentant et espérant que sa présence ne gênerait pas le petit guerrier. Celui-ci eut un léger sourire. Chez lui, Badrok arrivait à dormir à poing fermé dans une chaumière minuscule avec trois enfants dont un en bas âge. Certes, il avait aussi sa femme, Mélice, pour l'y aider, mais ce n'était pas un ménestrel sans doute propre sur lui qui le gênerait. D'ailleurs, il répondit simplement, d'une voix visiblement fatiguée :

-'Chanté Stor, moi c'est Badrok. Z'en faites pas pour c'soir, c'est plutôt à moi d'm'excuser pour les odeurs d'humidité, de sueur et sang séché que vous z'alez d'voir subir. Maint'nant, si ça vous dérange pas trop, j'm'en va béqueter un morceau dans l’alcôve.

Le regard visiblement déjà dans la bière et la charcuterie, salua le barde et le tavernier avant de se diriger vers la table pour s'y asseoir.

lle ne s'attendait pas à un grand accueil. Elle n'avait jamais été de ces gens qui s'attendent à accaparer l'attention, préférant soit être remarquée pour ses actions et ses capacités, ou subtilement imposer sa volonté aux esprits faibles. Pourtant, même Hiielle fut quelque peu surprise par la réaction de l'aubergiste.

- Pas encore, l'ami. Pas encore.

Un halfelin ronflait. Ou chantait-il ? Les soins que l'enchanteresse et ses compagnons avaient pu soutirer à la garde avaient été plus que bienvenus, mais elle était sur le point de tomber de sommeil, et elle ne parvenait plus à se concentrer sur la conversation - mais dû malgré tout réprimer un éclat de rire en entendant le halfelin se vanter de pouvoir se faire petit. Manger et dormir, il en fallait définitivement peu pour être heureux.

- Bonne rencontre. Hiielle.

Badrok était bien plus patient et plus poli qu'elle. Et certainement aussi que Elrik. Il était en fait particulièrement patient. Au vu de la profession de son nouveau compagnon de chambre, ce trait lui serait utile. D'après sa propre expérience, les musiciens avaient tendance à être des personnes expansives et bruyantes. Celui-ci était en plus un halfelin, et la magicienne, qui appréciait conserver son propre espace, tant physique que sonore, craignait cette combinaison.

- Badrok et Elrik, comment vont vos blessures? Je ne sais pas vous, mais je ne vais pas traîner. Je tombe de sommeil, et je dois préparer mes sorts demain matin. On devrait s'asseoir dit-elle en prenant place, manger, et décider quoi faire demain, non ? Vers qui devrais-je aller pour examiner la substance ? Je pense aller voir le gnome que le Lionar a mentionné.

Même si elle tentait de se montrer rationnelle, et de prévoir leurs prochaines actions, l'image d'une bière fraîche ne quittait pas son esprit.

- En passant, qui veut une bière ?