Chapitre II : La route vers le Fort, Chapitre II : La route vers le Fort

uite du Sourire du Kraken



Le Sourire du Kraken, Chapitre II : La route vers le Fort est longue
200km via la Route de Commerce
2ème jour de Chess, 1373

A la porte sud d’Eauprofonde, les chariots de commerce s’agglutinaient pour répondre aux commandes qui se devaient d’arriver le matin même pour garnir les étals des marchands qui participeraient bientôt au brouhaha incessant de la cité. On pouvait deviner sans peine aux cernes de certains cochers la distance qu’ils avaient parcouru bien avant l’aube pour honorer leurs promesses de livraison que la route fut bonne ou pas.

Sur l’ensemble, pas un ne semblait avoir fait de malheureuses rencontres, aucun chariot n’était endommagé comme pouvaient l’être ceux venant du Nord et d’une route plus dangereuse et difficile.

Les gardes vérifiant les cargaisons pour la forme étaient conciliants à la faveur d’une éclaircie bienvenue.

Les voyageurs entamaient un trajet de cinq jours sur la route la plus fréquentée des Royaumes en compagnie d’une mule qui, pour l’heure, semblait partager leur enthousiasme sous la bénédiction évidente de Lathandre.

Sur leur gauche, au Sud-Est, ils pouvaient deviner au loin la Forêt d’Arprofond tandis qu’à droite, s’étendaient quelques cultures avant les falaises qui plongeaient dans la mer de la Côte des Epées. Pour la première, Azur’ael comme Vieltal savaient de source sure pour l’une et de légende pour l’autre qu’il n’était pas bon pour un humain de tenter la traverser sans une excellente raison : Les Elfes d’Eldreth Veluuthra y tenait un repère et vouaient une haine féroce aux humains coupables de l’abatage de tant de leurs arbres. Mais la forêt était loin et ils évitaient de s’approcher de ce grand axe de commerce.

Sahadeva avait accepté avec gratitude l'antidote, étant bien conscient que le poison pouvait terrasser le plus puissant combattant. Les contes de son pays regorgeaient d'histoires de valeureux guerriers éliminés avec l'aide d'armes pernicieuses.

Par ailleurs, tout semblait s'être arrangé pour le mieux : l'arbalétrier avait été remis en liberté, malgré les doutes de Célestia, et le groupe semblait décidé à débuter son enquête à propos de la cargaison qui avait mystérieusement disparu.

Comme ils avaient un peu de temps libre avant le départ, le Maquar avait suggéré qu'ils procèdent à quelques achats. Il voyageait frugalement depuis sa traversée du Shaar et se souciait peu du confort, comme il avait eu l'occasion de le signaler à ses compagnons. Néanmoins, l'attaque dont ils avaient été les victimes prouvait qu'ils étaient démunis en matière de soins : aucun homme saint ne figurait parmi eux, aucun prêtre capable de faire usage de magie curative.

- Avant notre départ, je pense que nous devrions acheter quelques onguents de soin et, au besoin, quelques potions. La chaleur et l'humidité qui règnent dans les marécages aggravent considérablement le risque d'infection des blessures.

Sahadeva ne le savait que trop bien : lui-même était originaire d'une région dont le climat était chaud et humide. Il avait ensuite ajouté :

- Je propose que nous nous contentions d'acheter ce matériel absolument nécessaire. N'oublions pas que cet argent provient du culte d'Umberlie... Si l'existence de dieux mauvais est sans doute dans la nature des choses, le fait que des hommes les servent est contraire à mes convictions et je veux être le moins possible redevable à ces individus...

Pour conclure, le guerrier s'était incliné en direction d'Azur'ael :

- Quelle que soit votre décision, je vous escorterai jusqu'à notre départ. Quant à vous, Célestia, il serait sans doute plus prudent de ne pas arpenter seule les rues de la ville...

L’elfe lunaire partait, confiante, en compagnie de ses compagnons qui avaient démontré des compétences dans chacun leur domaine. Toutefois, subsistait une certaine appréhension ou inquiétude, mais dont l’origine n’était pas ce départ vers les marais. Cette forêt légendaire d’Arprofond n’était pas étrangère à ce petit malaise. En effet, cela lui rappelait la Haute Forêt, là où elle avait sa famille d’adoption et son sauvageon Lahmëe, dont elle était tombée amoureuse, qui lui manquait cruellement. Elle n’avait plus de nouvelles, ni de lui ni des gardiens sylvestres. Elle commençait à fantasmer des images sinistres dan son esprit, comme celles d’un dracosire rouge soufflant les flammes de l’enfer sur sa cité sylvestre.

D’un revers de main symbolique, elle tenta de les chasser, puis porta son regard d’émeraude sur l’étrange homme calishiste qui l’escortait. Elle avait été fort inspirée de le prendre comme garde du corps. En homme du terrain, il avait pris toutes les mesures en matière d’équipements pour se lancer dans cette aventure, notamment en matière médicale. Le groupe manquait en effet cruellement de prêtre ou de guérisseur et tôt ou tard ils devraient faire face à de mauvaises rencontres.

Pour l’instant, il n’y avait pas de quoi s’alarmer tant qu’ils seraient sur cette route commerciale autant fréquentée.

L'étrange groupe avait quitté Eauprofonde et circulait sur la route commerciale à l'écart de l'inquiétante forêt d'Arprofond. Le barde avait bien évidemment entendu des rumeurs et des légendes sur cette forêt. En observant Azur'ael, il se demandait si celle-ci ne pouvait pas l'éclairer d'avantage sur ce mystérieux endroit. Le chemin allait être long si personne n'engageait la conversation. Se raclant la gorge, il prit la parole en s'approchant de l'elfe:

- Vous semblez connaître pour plus que les légendes que j'y ai entendu...Si vous voulez bien partager votre savoir avec nous bien sur

Il sourit à ces mots. La journée était belle et le voyage qu'ils entreprenaient ne serait pas de tout repos. Le groupe devrait se réjouir des moments paisible comme celui-ci pour faire face aux futurs obstacles. Et puis, si les conversations n'étaient pas leur fort, il pourrait toujours se rabattre sur sa flute pour agrémenter les journées!

Célestia écouta attentivement l'homme enturbanné dans un silence quai religieux et même angoissant. Une attitude qu'elle avait souvent adoptée car il permettait de ne rien laisser transparaître à ses ennemis et ses amis. Elle faillit tiquer sur sa dernière remarque. Elle était libre de se promener dans n'importe quel endroit car nul n'avait une quelconque autorité sur elle. Elle retourna cependant cette situation à son avantage comme pour mieux faire accepter cette décision contrainte.

-En effet, il serait plus sage que je ne sois pas seule. Il se pourrait qu'il faille m'arrêter si jamais je venais à être attaquée. Je pourrais ne pas faire preuve d'autant de clémence qu'envers le précédent assassin qui a essayé de me tuer.

La moniale fixait son attention sur la forêt. Elle avait consulté un jour un rapport d'un membre de la compagnie concernant cette étrange forêt. Tout ce qu'elle avait appris tenait en trois mots : Disparu corps et âme. Cela concernait feu un membre de la compagnie des marches. Il avait eu une mission de ce côté du continent et n'était jamais revenu. On avait conclu à sa mort en haut lieu mais personne n'avait pu déterminer ce qui lui était arrivé. Il était tentant qu'en étant aussi près elle pouvait enfin savoir ce qui lui était arrivé, mais après tellement de temps et une mission tout autre en cours, ce n'était pas très judicieux. Un jour peut-être elle irait voir ce qui se tramait dans cette forêt.

Azur’ael ne fut pas particulièrement prolixe au sujet de la forêt et de ses légendes. Peut-être y reviendrait-elle plus tard, quand ils l’auraient dépassée et que ses nouveaux amis ne risquaient plus d’avoir la mauvaise idée d’en prendre la mesure d’eux-mêmes …

Les aventuriers poursuivaient leur route, croisant, au hasard, charriots et caravanes marchandes. A de nombreux endroits, la route était endommagée par la pluie, le froid, ou quelques affrontements passés qu’on pouvait y deviner. Différents convois s’y retrouvaient et s’aidaient à franchir les obstacles ou, pour les moins bien protégés, gardaient une distance qu’on pouvait deviner de précaution. Peu saluait les quatre qui descendaient vers le Sud et, à midi passé, il n’avait rejoint personne circulant dans leur sens. Nul ne les avait rattrapé.

Ces premières heures de marche seraient les plus difficiles pour ceux d’entre eux moins habitués à marcher à un rythme imposé. Il fallait le temps au corps de s’y faire, à la voute plantaire de se durcir.

Le ciel s’était à nouveau chargé de lourds nuages venus de l’ouest. Au-dessus de la mer, à quelques centaines de mètres tout au plus, il pleuvait dru. Aucun n’était de sucre, mais le froid combiné à une lourde averse si tôt dans leur périple risquait bien doucher leur motivation et leur couper les jambes.

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Jets de détection.
Célestia, 13(dé) +12 = 25 : Réussite

Célestia, bien avant quiconque, aperçu au loin ce qui devait être une bergerie. A cinquante mètre de la route, deux cents mètres plus bas. elle devait être relativement camouflée de la voie de commerce par la végétation qui avait repris ses droits. Si le groupe décidait de faire une première halte pour se restaurer, laisser passer l’averse ou profiter de l’un pour l’autre, c’était, à vue, le meilleur endroit. Cela dit, les chaudes capes qu’ils avaient reçu les protègeraient peut-être assez et peut-être souhaitaient-ils mettre plus de distance entre eux et Eauprofonde.

La moniale avançait lentement. Du moins c'est ce qu'elle éprouvait personnellement. Il était vrai qu'elle avait un bon pas et qu'il fallait s'adapter au moins rapide de ses compagnons de route. La pluie pouvait même fatiguer davantage les moins endurants d'entre eux.

-La bâtisse là-bas, une bergerie peut-être. Dans cette direction. Nous pouvons faire une halte pour nous mettre au sec et nous reposer un peu. La route promet d'être longue et difficile avec ce temps. Et puis on pourra toujours questionner les résidents pour avoir des nouvelles de ce qui nous attend. C'est toujours bien de savoir en avance sur les embûches que la route peut nous réserver.

Célestia remarqua que peut de monde réagit à ce qu'elle montrait. Elle fronça les sourcils se demandant si ses compagnons voyaient la même chose qu'elle. Elle tendit le bras dans la direction de ce qu'elle avait vu et continua.

-C'est au bord de la route, juste dans cette direction. Reste a espérer que nous ne sommes pas attendus.

C'était le trait d'humour du jour de la moniale. Bien entendu, elle ne laissa rien transparaitre dans son comportement ou sur son visage. Elle fit même cette remarque avec une pointe d'ironie. La dernière surprise qu'ils avaient due subir avait eu lieu en milieu urbain. Il n'était pas du tout évident, dans l'esprit de la moniale, que la prochaine tentative d'assassinat se face en rase campagne.

¤Il faut dire que les idiots ça osent tout. C'est même à cela qu'on les reconnait.¤

Elle s'avança vers la bâtisse en tête du cortège. Simple question de pratique plutôt que de bravoure. S'il fallait partir rapidement, autant placer la plus rapide en tête.

Le Maquar plissa les yeux, en espérant apercevoir la bergerie que lui décrivait Célestia. Malgré une bonne vue (condition nécessaire pour tout bon archer), il ne put distinguer qu'un petit point à l'horizon, point qu'il supposa être le bâtiment en question.

Une fois de plus, il jeta un regard admiratif en direction de la moniale : à ses yeux, elle avait développé des capacités presque surhumaines grâce à son entraînement et à son mode de vie ascétique. Lui-même s'était engagé dans cette voie et espérait un jour atteindre un tel niveau d'aptitude.

Après avoir réfléchi quelques secondes, Sahadeva finit par répondre :

- Cette proposition me semble judicieuse. Avançons vers la bâtisse mais restons sur nos gardes.

Il se tourna vers Azur'ael en espérant qu'elle fournisse elle aussi son accord quant à la proposition de Célestia.

A vrai dire, le Durpari n'avait pas véritablement besoin de repos. Il avait habitué son corps à endurer des épreuves bien plus dures que celles-ci et tant qu'il aurait la volonté d'avancer, il avancerait. La pluie ne le dérangeait pas outre mesure car il était habitué, depuis son enfance en Estagund, aux abondantes averses. Le froid par contre était bien plus pénible mais la cape qu'on lui avait fourni lui permettait de l'endurer plus facilement. S'il avait marqué son accord pour faire une halte, c'était davantage pour récolter d'éventuelles informations et pour ménager ceux de ses compagnons qui en auraient besoin.

Sahadeva hésita à dégainer son cimeterre, Nakula, ou à encocher une flèche dans son arc, tout en cheminant vers la bergerie. Cela pourrait leur faire gagner un temps précieux en cas d'embuscade... Mais, d'un autre côté, s'avancer arme au poing en direction d'un habitat pourrait faire fuir ses occupants, craignant de rencontrer quelque maraudeur ou bélître.

Le guerrier durpari décida d'opter pour une voie médiane et détacha son chakram de sa ceinture et de le saisir de sa main droite. L'arme était moins visible qu'une lame ou qu'un arc et son aspect exotique le rendait moins menaçant : sur les navires sur lesquels il avait navigué, les marins avaient éprouvé plus de curiosité que de peur vis-à-vis de cette arme étrange. Le chakram ne permettrait pas de neutraliser une menace potentielle mais, lancé par le Maquar, il pourrait surprendre l'assaillant et permettre au petit groupe d'organiser sa défense.

Sahaeva prend en main son chakram et cherche à ne pas le mettre en évidence.

Les compagnons n’étaient pas très bavards. Plus vite ils se rendraient à destination, mieux c’était! La pluie qui tombait et le froid ne le gênait pas outre mesure. Évidemment, la pluie qui imbibait ses quelques vêtements fait de fourrures – souvenir de sa contrée natale – ne plaisait pas au barde et lui donnait un air de chien mouillé. Il fut surpris quand Célestia adressa la parole au groupe pour signifier qu’elle voyait une bergerie, au loin à travers la végétation.

L’Illuskien plissa les yeux pour voir de quoi il s’agissait sans pouvoir identifier quoi que ce soit. Il haussa les épaules en se contentant de croire la moniale. Il regarda le groupe pour tâter le pouls de leur fatigue. Sahadeva avançait bien droit mais rabattait les pans de sa cape autour de lui… Le froid devait sans doute être relativement nouveau pour lui. L’équipe était forte et le barde se doutait bien qu’il était le moins expérimenté du groupe. Il ne montrerait pas de signe de faiblesse et se prouverait à la hauteur de toutes situations.

Bien qu’ils aient parcouru quelques lieux, le nordique ne sentait pas la fatigue le gagner et la sagesse n’était pas son fort. Malgré les embuches qu’ils allaient devoir surmonter, il préfèrerait continuer plutôt que de s’arrêter maintenant et se reposer.

- Personnellement j’opte pour qu’on continue mais si il y a des résidents, nous pouvons toujours arrêter se renseigner. Je suivrai la décision du groupe.

La pluie caressait le visage laiteux de l'elfe, transcendant sa beauté naturelle et ses origines inconnues de fée aquatique. La gardienne des mystères aimait la pluie, par contre elle aimait moins ce froid qui tentait sournoisement de se glisser entre ses vêtements. Mais ce n'était pas le plus dure en soi. Ses pieds et ses jambes commençaient à s'endolorir, peu habités à de tels efforts. Ces quelques temps passés à Eauprofonde lui avaient fait oublier la pénibilité d'un tel voyage ou alors peut être que ses précédents voyages en compagnie de ses frères et sœurs gardiens arrivaient à lui faire oublier la dureté des marches.

La moniale aux yeux de lynx apportait une bonne nouvelle : une bâtisse dans laquelle ils pourraient peut-être s'y arrêter et s'y reposer. D'un signe de tête, elle montra son accord. Elle s'étonna de toute la prudence que faisaient preuve ses compagnons. Il y avait peu risque d'être victime d'une embuscade à cet endroit précis. Mais après tout cela ne coûtait rien de l'être. Puis finalement, leurs excès de prudence la fit douter. Elle décida donc aussi de participer à sa façon à la sécurisation du périmètre, en incantant un sort de détection de la magie. Ses yeux d'émeraude moucheté d'or passèrent en revue la zone. La présence d'une magie plus ou moins puissante serait un indice à interpréter. Et puis l'expérience de la bleuté dans la Haute Forêt lui avait appris à se méfier à de potentielles illusions

Détection de la magie