Quel est votre nom, voyageur ?
Eléasis (VIII) 1373, 2ᵉ chevauchée
   

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> Les Noces Calishites, Kalyope - Rendez-vous sous les Étoiles
  écrit le : Jeudi 28 Juin 2012 à 17h07 par Ithek le Gris
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La musique basse et monotone se mêlait aux fumées d’encens pour former un cocktail entêtant, qui enivrait l’esprit des fidèles et emportait même les plus rétifs dans une transe communautaire à laquelle ils ne pouvaient échapper. Lentement, ils tournèrent autour de la pierre noire, si noire qu’elle semblait aspirer la lumière et la faire disparaître dans le néant. Ils psalmodiaient les vers qu’on leur avait appris, des paroles qui résonnaient en eux comme s’ils les avaient toujours connues, des mots qui leur semblaient évidents, et qui leur apparaissaient alors comme la seule vérité, les seuls mots dignes d’exister et pour lesquels il valait la peine d’exister. Bientôt, toute rémission serait exclue car ils feraient partie du groupe, et les méfaits qu’ils auront accomplis les excluront du monde extérieur, les condamnant à cette existence pour laquelle ils penseront avoir été élus, tels de rares privilégiés.

Le cercle de fidèles tournait de plus en plus vite, au rythme des tambours toujours plus soutenu, leurs voix étaient plus fortes et plus graves, et leurs pieds nus frappaient le sol avec une énergie telle qu’ils saignaient, mais leur esprit était si confus, si entièrement tourné vers l’adoration de la Déesse qu’ils ignoraient la douleur, qu’ils ne la ressentaient même pas. La tension atteignait son comble, les fidèles ne savaient plus où ils étaient, chacun suivait la silhouette qui dansait devant lui, et répétait les paroles sans même sans rendre compte. Ils sentaient cette tension puissante dans leur poitrine, leur cœur qui battait dans leurs jambes, à leur tempe, le sol qui vibrait sous les pieds ensanglantés. Toute cette tension se transformait en un désir de violence, l’envie de faire couler le sang sur le pavé noir, de frapper encore et encore jusqu’à ce que toute vie soit éteinte dans le corps de ceux qu’ils haïssaient, de frapper si fort et avec toute leur haine, pour que même leur âme n’y survive pas. Ils désiraient se frapper, se meurtrir jusqu’à ce que le néant s’empare de leurs âmes perdues et les libère du fardeau insupportable de la vie.

Lorsque la tension fut insupportable, avant que chacun ne se jette sur le plus proche pour le déchirer de ses ongles et de ses dents, les tambours cessèrent et la voix grave et autoritaire du grand prêtre immobilisa la scène. Les fidèles écoutaient ses paroles qui venaient de la Déesse, Ses mots qui leur parvenaient à travers lui. Obéissants, ils se rangèrent par deux et marchèrent silencieusement vers la salle suivante, prenant chacun la dague à lame sinueuse qu’un serviteur leur tendait. Sur l’autel au milieu de la salle, éclairée par une unique flamme violette qui flottait au-dessus, une femme était étendue, vêtue d’une simple robe blanche qui laissait voir son corps. Ils ne l’avaient jamais vue, sauf un des fidèles, qui la connaissait car il s’agissait de la sœur d’un de ses amis, à son village. Elle adorait en secret une déesse étrangère, Séluné, lui avait dit son frère. Il fit semblant de ne pas la reconnaître, car elle avait suivi la mauvaise voie, et son destin était mérité.

Sur les ordres du grand prêtre, le cercle de fidèles s’approcha de l’autel jusqu’à ce leurs coudes se touchent, serrés autour de la jeune femme allongée, qui regardait terrorisée autour d’elle, la bouche serrée par un bâillon. Le grand prêtre s’approcha et deux fidèles s’écartèrent pour le laisser se pencher sur la jeune femme et défaire son bâillon. Un cri perçant retentit, et les fidèles abattirent leur dague sur elle et frappèrent encore et encore, jusqu’à la vider de son sang, jusqu’à tailler son corps en morceau et livrer son âme perdue à la Maîtresse de la nuit. Le grand prêtre prononça un mot, et les fidèles levèrent leur dague et s’éloignèrent. Il s’approcha et se pencha sur les entrailles du corps en lambeaux, pour y lire les instructions de la Déesse sombre jusqu’à la prochaine ascension des ténèbres.



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user posted imagelmraiven ! " cria la vigie du haut de son mat. Et ce n'était pas trop tôt. Cela faisait une dizaine de jours que Kalyope avait embarqué à Ormspur sur ce navire marchand qui allait jusqu'à Portcalim, et en dehors des deux escales à Yallasch et Sudolphor, elle s'était ennuyée ferme. Ici aussi, les marins avaient cette désagréable tendance à la superstition, et si le capitaine avait laissé la jeune femme monter à bord contre quelques pièces d'or, c'est à peine si l'équipage lui avait adressé la parole pendant tout le voyage. Et comme ils étaient calishites, pour la plupart, elle ne comprenait pas un mot de leurs conversations.

Mais à ce moment, enveloppée dans son voile de soie pour se protéger du froid de la nuit, Kalyope contemplait les mille lumières scintillantes d'Almraiven, reflétées par la surface noire et lisse de la Mer Étincelante. Grâce à l'habileté du capitaine et des matelots, le navire se glissa derrière les digues de pierre, par delà le grand phare qui gardait le port, et accosta en douceur sur le quai. L'amarrage effectué, les marins échangèrent quelques paroles réjouies, heureux d'être arrivés à cette nouvelle escale. Déjà, une bonne partie d'entre eux quitta le navire pour aller prendre du bon temps en ville ; les dockers d'Almraiven ne commenceraient pas à décharger la marchandise avait le lendemain matin.

Le capitaine marchand, qui ne quittait jamais son navire sauf lorsqu'il fallait signer le registre à la capitainerie ou aller conclure un accord juteux en ville, s'approcha de Kalyope avant qu'elle ne parte. Il s'appelait Émir Rumshalak, c'était un homme petit et rond, qui adorait se parer de riches atours pour impressionner ses concurrents. Il avait une voix douce et sirupeuse, ce qui attirait chez les uns de la sympathie, et chez les autres une sorte de méfiance moqueuse. Lui n'était pas originaire du Calimshan, mais du Lac de Vapeur.


- C'est là que nous nous quittons... J'espère que vous savez où aller, car ce pays n'est pas des plus hospitaliers pour une jeune femme seule... pour un jeune home seul non plus, d'ailleurs. Si vous ne savez pas où dormir, essayez le souk, à l'extérieur du port, ils y offrent souvent des logements pour les voyageurs. Il y a aussi le ribat non loin d'ici, qui héberge des militaires mais aussi des pèlerins. Peut-être qu'ils vous ouvriront, malgré l'heure tardive. Mais... bien sûr, ça ne me dérange pas si vous préférez rester encore ici une nuit.

Tout ce que Kalyope savait, c'était qu'elle devait retrouver une certaine Syzra dans un endroit de la ville appelé "le Chat de Safran", le 1er de Nuiteuse. Mais il était déjà le 1er de Nuiteuse, et la nuit était bien avancée. A moins d'un miracle, elle serait en retard pour le premier rendez-vous de sa vie d'aventurière.



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écrit le : Jeudi 28 Juin 2012 à 22h38 par Kalyope
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Appuyée sur le bastingage, son poing gauche soutenant son menton boudeur, et les doigts de sa main droite tapotant nerveusement le bois, Kalyope rongeait son frein.
Elle qui avait été si excitée à l'idée de monter sur un bateau pour la première fois, elle avait rapidement déchanté. Outre les paysages et les escales à terre, le voyage en mer avait été d'un ennui mortel. Elle n'avait pratiquement rien à faire de ses journées, et ne pouvait compter sur la compagnie des marins : ces rustres la fuyaient comme la peste - dans un sens, elle ne s'était pas sentie trop dépaysée - sous prétexte qu'une femme à bord attire le mauvais œil sur le navire et son équipage. Et quand bien même, ils ne parlaient même pas sa langue.
Elle avait pourtant su faire bonne figure, durant la dizaine de jours passés à bord, mais sa patience s'épuisait. D'autant qu'elle se savait attendue à Almraiven.

L'annonce de la vigie, indiquant leur arrivée imminente, vint mettre un terme à ses ruminations. La jeune femme releva la tête, et la vue qui s'offrait à elle acheva de dissiper sa mauvaise humeur. Devant elle, les lumières de la ville scintillaient comme une multitude de joyaux. Et la mer, jalousant l'éclat du ciel, lui empruntait sa parure pour briller de mille feux.
Le navire accosta, et Kalyope était toujours entrain de contempler la ville lorsqu'Emir, le capitaine marchand, vint la trouver. A l'instant où elle posa son regard sur lui, l'éclat émerveillé de ses prunelles violettes s'éteignit pour faire place à une expression dubitative. Elle avait du mal à cerner ce petit homme rondouillard et ostentatoire, à la voix par trop suave. Celui-ci s'était toujours montré tout à fait poli et serviable, et en cette heure, il prit la peine de lui indiquer des endroits où passer la nuit, et de la mettre en garde contre les dangers qu'elle pouvait encourir.

Mais Kalyope n'en avait cure. La seule chose qui lui importait à présent, était de trouver ce qu'elle supposait être un établissement appelé « le Chat de Safran », où l'attendait son contact, une certaine Syzra. La jeune ensorceleuse ignorait l'heure exacte, mais la nuit était tombée depuis un long moment, et elle se savait très en retard, ce qui la mettait en rage. Elle hésita un court instant à demander à Emir s'il avait des renseignements sur l'endroit qu'elle recherchait, mais sa méfiance l'emporta, et elle renonça à cette idée.
Elle remercia poliment le capitaine, et au prix d'un effort surhumain, le gratifia même d'un léger sourire charmeur.


¤ Mieux vaut lui laisser croire que je l'ai apprécié. Un homme dont on satisfait l’ego est toujours moins dangereux.¤

Puis elle prit congé, et s'éloigna rapidement sur les docks, en essayant de se faire la plus discrète possible, mais bien décidée à trouver « le Chat de Safran » au plus vite.



 
 
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écrit le : Vendredi 29 Juin 2012 à 22h38 par Ithek le Gris
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user posted imagealyope sentit le regard du marchand sur sa nuque, jusqu'à ce qu'elle disparaisse dans l'obscurité. Des dizaines d'entrepôts se succédaient, éclairés par des lanternes éparses. Kalyope distinguait également les créneaux d'une muraille, sur sa gauche, et de nombreux bateaux amarrés sur les quais. Le port était très calme, et elle ne croisa personne jusqu'à ce qu'elle parvienne à une large porte traversant la muraille.

Un des deux grand battants était ouvert, mais quatre hommes montaient la garde, discutant en alzhedo, la langues des calishites. Deux lanternes accrochées aux murs les éclairaient. Deux d'entre eux ressemblaient à des gardes conventionnels, portant cotte de maille, heaume pointu et hallebarde, mais les deux autres portaient de simples robes bleu marine à la mode calishite. Seul leur brassard brodé, commun aux quatre hommes, montrait qu'ils faisaient tous partie de la garde.

Les quais formaient un angle droit à cet endroit du port, et Kalyope pouvait partir sur sa droite pour les longer et tenter de trouver une autre issue, si elle ne voulait pas passer devant les gardes. Ou rebrousser chemin, au cas où elle aurait raté une autre porte.



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écrit le : Samedi 30 Juin 2012 à 09h28 par Kalyope
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Bien qu'elle ne puisse le voir, Kalyope sentait que le marchand ne la quittait pas des yeux, alors qu'elle s'éloignait prestement. Un sentiment de malaise s'empara d'elle, lui faisant presque regretter son petit sourire enjôleur.
En avançant en âge, elle avait découvert que si certains Halruéens ne voulaient pas d'elle dans leur ville, et idéalement dans leur vie ; ils n'auraient point rechigné à l'avoir pour quelques heures dans leur lit. D'ailleurs, plus violents étaient leur haine ou leur rejet, plus indécentes étaient leurs propositions. Cette constatation l'avait d'abord emplie d'horreur, mais elle avait appris depuis à mépriser ce genre de comportement et à le tourner à son avantage, bien que ne pouvant se défaire d'un certain dégoût. N'ayant pas pour habitude de pondérer ses idées, elle en était venue à penser qu'une bonne majorité de la gente masculine était facilement corruptible par la chair.


¤ Ce petit homme dodu ne déroge probablement pas à la règle. ¤

La sensation de brûlure sur sa nuque s'envola dès qu'elle se coula dans l'ombre des entrepôts. Elle se concentra alors sur sa progression, tachant d'éviter les petites flaques lumineuses projetées par quelques lanternes ça et là.
Les docks étaient déserts à présent, et la succession d’entrepôts n'avait rien d'engageant, mais une haute muraille à créneaux apparut sur sa gauche. En longeant celle-ci, elle arriva rapidement en vue d'une porte à moitié ouverte, gardée par quatre hommes. Elle se trouvait suffisamment proche d'eux pour constater qu'ils parlaient la même langue que les marins sur le bateau.


¤ Que n'ai-je pas été plus opiniâtre dans mon apprentissage de langues nouvelles. Cela m'aurait peut être permis de dissimuler le fait que je sois étrangère. ¤

Il demeurait la possibilité de s'adresser à eux en commun, mais restait à savoir comment les aborder. Que dire pour qu'ils ne s'étonnent pas de sa présence en cette heure tardive, et la laissent pénétrer dans la ville ? Sans compter que certaines idées pouvaient toujours leur traverser l'esprit : ils étaient quatre, elle était seule.

Elle continua néanmoins de détailler les quatre Calishites, et s'aperçut que deux seulement portaient une tenue de garde. Les deux autres semblaient vêtus en civils, et sans leurs brassards indiquant leur appartenance à la garde, on aurait pu les prendre pour des citoyens ordinaires.
Que pouvait bien signifier cette tenue ? Que ces deux là étaient de repos et venaient tenir compagnie à leurs camarades ? Ou que les hommes en bleu appartenaient à une faction différente ? Peut être une milice ? A cette pensée, un frisson lui parcourut l'échine, et elle renonça à l'idée se présenter aux gardes.
Il lui fallait pourtant entrer dans l’enceinte de la ville. Kalyope considéra les autres options qui s'offraient à elle. Aurait-elle manqué une porte plus petite, ou un passage dans la muraille en venant jusqu'ici ? La jeune femme en doutait ; et le temps lui étant compté, il n'était pas envisageable de faire marche arrière. Par ailleurs, les quais formaient un coude sur sa droite. Elle pouvait tout à fait s'y faufiler, et chercher un autre moyen d'entrer en ville.

A pas de loup, et retenant son souffle pour ne pas attirer l'attention des gardes, Kalyope se dirigea vers l'angle du quai.



 
 
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écrit le : Dimanche 01 Juillet 2012 à 13h18 par Ithek le Gris
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user posted imageasser discrètement ne fut pas particulièrement difficile : l'endroit était très sombre, et malgré ses bottes, Kalyope parvenait à ne pas faire trop de bruit sur les pavés.

Cette partie du quai n'accueillait que de petits bateaux, et il n'y avait pas d’entrepôts, seulement la muraille sur sa gauche. Ce qui réduisait aussi d'autant les endroits où elle pouvait se cacher. Longeant la muraille telle une ombre, elle finit par arriver à un petit chenal de six mètres de large environ, qui permettait aux petits bateaux de passer de cette partie du port à l'intérieur de la ville.

Le quai et la muraille se poursuivaient de l'autre côté du chenal, mais le seul moyen pour accéder en face était une passerelle qui pour le moment, était relevée. Sur sa gauche, la muraille plongeait directement dans l'eau, à la verticale, sans passage permettant aux piétons d'accéder à la ville. Pour passer, il fallait en faire le tour en s'accrochant aux petites aspérités de la pierre, sur les cinq mètres de sa largeur. Ou sauter dans l'eau pour entrer dans la ville à la nage...

Tandis qu'elle se demandait quoi faire, Kalyope entendit derrière elle des bruits de pas régulier sur la pavé. A moins que ce ne fut son serpent qui l'avertit de cette présence. Se retournant, elle vit un garde en armure qui approchait, une lanterne à la main. Situé à une quinzaine de mètres, il ne l'avait pas encore repérée. Mais là où elle était, Kalyope n'avait aucune cachette, et bien peu d'issues. Elle pouvait rejoindre un ponton pour se cacher sur le bateau qui était amarré au bout, mais pour cela, elle devait retourner quelques pas en arrière, dans la direction du garde qui risquait de la voir. Ou tenter de passer derrière le mur d'enceinte en l'escaladant par le côté.



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écrit le : Dimanche 01 Juillet 2012 à 22h51 par Kalyope
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Kalyope se glissa comme une ombre vers l'angle du quai. Elle dut néanmoins marquer un temps d'arrêt, pour permettre à ses yeux de s’accoutumer à l'obscurité. Cette partie des docks était plus étroite, réservée aux bateaux plus modestes, et ne permettait pas la présence d'entrepôts ; et donc, pas de lanterne. Ce qui lui évitait au moins l'embarras d'avoir à se déplacer de zone d'ombre en zone d'ombre, mais n'offrirait aucune cachette convenable en cas de besoin.

En continuant de longer la muraille, elle arriva devant un chenal assez peu large, permettant tout juste aux bateaux de petite taille de pénétrer en ville. En journée, une passerelle autorisait manifestement les piétons à traverser, mais celle-ci était à présent relevée. En revanche, aucun accès à la ville pour les personnes à pied n'avait été aménagé. Le quai s'arrêtait net, et la muraille tombait à pic dans l'eau sombre.

Kalyope s'en approcha tout de même pour l'examiner. La chose ne serait pas aisée, mais la muraille comportait suffisamment d'aspérités pour qu'elle puisse la longer en s'agrippant aux pierres. Elle savait son pied sûr et son sens de l'équilibre assez bon. Mais aurait-elle suffisamment de force dans les bras pour tenir les quelques mètres qu'elle avait à parcourir ?


 ¤ Je n'ai pas le choix. De toute façon, c'est ça ou la nage.  ¤

Mais cette dernière solution lui paraissait aussi désirable qu'une pinte de bière amnienne tiède... Nageuse moyenne en temps normal, elle tremblait à l'idée de devoir progresser dans le noir, avec un sac relativement lourd sur le dos.
La voie à suivre semblait donc toute indiquée.

Alors qu'elle allait entamer son escalade transversale, elle sentit qu'Ilasseera venait de détecter quelque chose. Un coup d’œil sur sa gauche lui apprit qu'un garde – l'avait-il vue ou entendue tout à l'heure ? - se dirigeait dans sa direction, une lanterne au poing. Pour l'instant, il ne semblait pas l'avoir repérée, mais il manquerait pas de le faire dans un futur très proche.
L’œil fiévreux et le souffle court, Kalyope examina les alentours à la recherche d'une cachette, sachant très bien qu'il n'y en avait aucune. A moins de se réfugier sur un bateau... Mais l’embarcation la plus proche se trouvait à quelques mètres dans la direction de la sentinelle. Comment y parvenir sans qu'il ne la voit ou l'entende ?
La jeune femme resta figée et indécise pendant une poignée de secondes, puis fit volte-face vers les remparts.


¤ Après tout, j'étais partie pour escalader. ¤

Kalyope prit une profonde inspiration, puis se plaqua contre la pierre froide et humide en s'agrippant de toutes ses forces ; et commença sa progression.



 
 
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écrit le : Mardi 03 Juillet 2012 à 09h16 par Ithek le Gris
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user posted imagealgré la difficulté de la tâche, Kalyope parvint à s’agripper aux interstices dans le mur de briques, et une minuscule corniche lui permit de poser le bout de ses bottes et de progresser lentement. Ses doigts lui faisaient un mal de chien, et elle avançait à une allure telle qu’elle avait l’impression que le mur ne se finissait jamais, mais elle posa finalement le pied droit sur le sol de l’autre côté. En tendant l’oreille, elle entendit le garde faire demi-tour et s’en aller en sifflotant.

Elle avait quitté le port, et se trouvait à présent étriquée sur un étroit passage entre le canal qui s’enfonçait plus loin dans la ville, et des maisons à un étage dotées de petites fenêtres d’où filtrait parfois de la lumière ou une douce musique. De l’autre côté du canal, d’autres maisons semblables étaient alignées. Il n’y avait pas beaucoup de lumière pour voir où elle mettait les pieds, mais elle voyait assez bien le contour des bâtisses, l’entrée des ruelles sombres devant lesquelles elle passait prudemment, et les gros obstacles qui se dressaient sur son chemin.

D’ailleurs, une forme ronde à terre, à quelques pas devant elle, retint son attention et la fit s’arrêter. Le pelage luisant ne trompait pas : il s’agissait d’un animal, probablement un chien, qui dormait paisiblement sur le passage, contre le mur. Il y avait toujours la place de passer, et la bête ne s’était pas réveillée à son approche. Kalyope remarqua également une passerelle sur le canal, un peu plus loin, que traversaient deux gardes dont un était équipé d’une lanterne, et l’autre d’une hallebarde.



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écrit le : Mardi 03 Juillet 2012 à 11h02 par Kalyope
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Centimètre par centimètre, Kalyope progressait sous la voute sombre. Chaque nouvelle avancée requérait une étude préalable du mur, pour savoir où glisser ses doigts, où poser son pied ; et ce le plus silencieusement possible. La jeune femme respirait calmement et profondément, toute concentrée à sa tâche, mais une sueur glacée ruisselait dans son dos. Elle craignit d'attirer l'attention du garde à maintes reprises, car elle ne pouvait éviter que de petits morceaux de muraille s'effritent, et tombent dans le canal ; autant de "plouf" qui lui paraissaient tonitruants.
Une fois parvenue de l'autre côté, au bout de ce qui lui sembla être des heures, elle dû s'adosser contre la muraille pour calmer les tremblements qui agitaient son corps. Alors qu'elle reprenait ses forces, elle entendit le garde s'éloigner du chenal.
Kalyope sourit pour elle-même, plutôt fière de sa réussite. Elle essuya son front où perlaient quelques gouttes de sueur, natta grossièrement sa lourde chevelure, et se remit en route.

Face à elle, le canal continuait de s'enfoncer dans la ville. Il était bordé de chaque côté par un alignement de petites maisons à un seul étage, mais de minuscules quais jumeaux permettaient de le suivre.
Elle s'engagea dans le passage d'un pas décidé. Ici encore, l'éclairage était presque inexistant, mais quelques raies de lumière filtrant par certaines fenêtres lui permettaient de distinguer l'essentiel.
Maintenant qu'elle était parvenue à entrer en ville, Kalyope se sentait plus légère, et l'environnement commençait à lui plaire : l'air était agréable et légèrement parfumé, et de la musique douce provenant des maisons accompagnait ses pas.

Alors qu'elle commençait à se détendre pour de bon, l'apparition d'une forme sombre à quelques mètres d'elle remit tous ses sens en alerte. La jeune ensorceleuse stoppa net, et scruta la masse noire pour tenter de déterminer de quoi il s'agissait. A première vue, d'un gros chien endormi dans le passage. Fort heureusement, il ne l'obstruait pas complètement, et elle avait encore suffisamment de place pour passer, à condition de ne pas le réveiller. Pour l'instant, il ne l'avait ni entendue, ni sentie ; mais elle se trouvait encore à 5 ou 6 mètres de lui.

Une fois de plus, les alternatives étaient minces. Elle avait bien croisé quelques ruelles sombres, depuis qu'elle cheminait sur le petit quai, mais celles-ci semblaient se perdre dans un dédale d'habitations, et ce n'est pas en sillonnant toute la ville au hasard qu'elle risquait de trouver « le Chat de Safran ». Suivre le canal lui permettrait sans doute d'aboutir à un endroit plus central, où elle pourrait peut-être trouver des gens qui ne s'étonneraient pas de sa présence, et pourraient la renseigner.
Il qui fallait à tout prix passer à côté de ce chien sans l'éveiller, car outre le fait qu'il risquait fort de l'attaquer, il ne manquerait pas d'aboyer. Or, elle venait justement d'apercevoir deux gardes qui traversaient une petite passerelle, située quelques mètres après la bête endormie.

Kalyope décida de rester sur place quelques minutes, plaquée contre le mur d'une maison, pour attendre que les sentinelles se soient suffisamment éloignées. Dans le pire des cas, ils entendraient un chien qui aboie au loin, et alors ? Les chiens aboient pour de multiples raisons, ils ne feraient probablement pas demi-tour pour vérifier quelle était la raison de celui-ci.


¤ Quoi qu'il en soit, il n'est même pas question de le réveiller. Je cesserai de respirer et marcherai sur les orteils s'il le faut, mais je dois passer. ¤



 
 
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écrit le : Mercredi 04 Juillet 2012 à 23h10 par Ithek le Gris
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user posted imageetenant sa respiration, Kalyope d'approcha du chien à pas de loup, jusqu'à arriver suffisamment près pour le voir respirer. Sans être un cerbère, il était de bonne taille et Kalyope n'aurait pour rien au monde voulu tester ses mâchoires sur ses molets.

Elle posa ses pieds avec précaution à quelques centimètres seulement de l'animal, qui eut un sursaut dans son sommeil mais ne se réveilla pas. Ce n'est qu'après l'avoir dépassé de plusieurs pas que l'ensorceleuse se sentit hors de danger.

Kalyope poursuivit son chemin le long du canal, jusqu'à une rue assez large et tordue donnant sur la passerelle. Autour d'elle ne se trouvaient que des maisons sombres et désordonnées, entrecoupées de ruelles d'où aucune lumière ne filtrait. Les lanternes étaient si rares (dans toute cette portion de rue, il n'y en avait que deux éclairant la passerelle), que seule la lumière des astres célestes permettait d'y voir quelque chose.
L'ensorceleuse pouvait emprunter la rue sur sa gauche, ou traverser la passerelle pour la suivre vers la droite. Ou encore, s'engager au hasard dans une des ruelles...

Mais encore une fois, quelque chose vint précipiter son choix. De l'autre côté de la passerelle, l'éclat d'un objet brillant se réflétant dans une lanterne proche attira son attention. Un petit groupe de trois personnes encapuchonnées venait de passer l'angle d'une maison, à moins de vingt pas de Kalyope, et s'apprêtaient à traverser le canal. Ils chuchotaient entre eux, et elle était certaine qu'ils ne l'avaient pas encore vue. Mais ils avaient quelque chose de louche, comme s'ils cherchaient à ne pas se faire repérer en longeant les murs.

Si elle voulait les éviter, Kalyope avait l'embarras du choix pour s'éclipser ou se dissimuler. Il y avait un recoin sombre à sa gauche, dans la direction opposée aux intrus, une ruelle de l'autre côté de la rue, et un chariot vide auquel elle pouvait accéder en trois pas à peine.



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écrit le : Jeudi 05 Juillet 2012 à 09h42 par Kalyope
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Le premier réflexe de la jeune femme fut de se placer dans le coin sombre à côté d'elle, afin de laisser passer les encapuchonnés sans se faire remarquer. Mais elle commençait à être lasse de trouver autant d'obstacles sur sa route ; et encore une fois, elle allait perdre du temps.

¤ A ce rythme, je ne trouverai pas « le Chat de Safran » avant une semaine ! ¤ pensa-t-elle, excédée.

Si seulement elle avait eu quelques informations supplémentaires sur ce lieu ou son contact. Mais rien, à part leurs deux noms, ses propres connaissances de la ville, et son intuition. Ces dernières lui soufflaient que l'endroit où elle devait se rendre ne pouvait être une école de magie, bien que la ville en regorgea : ni le nom, ni l'heure de son rendez-vous n'étaient appropriés. « Le Chat de Safran » évoquait davantage un comptoir marchand, une taverne, ou peut être même un lieu de plaisir.  Dans tous les cas, ce nom avait quelque chose de secret, de souterrain...
Or pour avoir accès aux réseaux souterrains d'une ville, la meilleure chose à faire restait de s'adresser aux personnes susceptibles d'en faire partie. Des gens qui se déplaceraient la nuit, furtivement, protégés par de larges capuchons, par exemple...

La jeune ensorceleuse considéra le petit groupe d'un œil nouveau. L'entreprise était risquée, une fois de plus ; et après avoir triomphé de l'escalade et du chien, elle craignait que sa bonne étoile ne l'abandonne. D'autant qu'elle n'avait pas la moindre idée de ce que projetaient les trois encapuchonnés. Elle n'avait pas non plus la garantie absolue qu'ils puissent la mener au « Chat de Safran ».
Mais si elle parvenait à leur faire croire qu'elle leur était indispensable en cet instant, pour une raison ou une autre... Elle pourrait aviser ensuite, et trouver le moyen d'obtenir les renseignements tant désirés ; puis leur faire faux bond ou les éliminer, au besoin.
Bien sûr, même si elle arrivait à faire en sorte qu'ils ne se méfient pas d'elle, il ne fallait pas non plus qu'elle se retrouve embrigadée dans une aventure qui lui ferait perdre encore plus de temps...


¤ Ah la barbe ! Il faut que je me décide avant qu'ils ne disparaissent. ¤

La patience n'étant décidément pas son fort, Kalyope sortit de l'ombre et se dirigea vers le groupe à petits pas discrets mais décidés, non sans avoir rabattu son voile de soie sur son front au préalable.

¤ Je dois être folle ... ¤ songea-t-elle ¤ mais tant pis. ¤

A mi-voix, elle s'adressa en commun à la première personne qui se trouva devant elle :

- Bonsoir... Quelle heureuse rencontre ! Il semblerait que vous ayez grand besoin de moi.

¤ Ilasseera, ne te montre pas tant que je ne te le demande pas. ¤



 
 
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