Un vol pour le Téthyr, En compagnie de Gunlann et Miri

La séparation avec l'Aquilière Timaer’Sha et le Grand Aigle Llenitha semblait avoir troublé la jeune halfeline.
Elle qui se croyait au-dessus de tout-ça, la perte temporaire de deux des membres de sa "nouvelle famille" lui pinçait un peu le coeur.

Elle garda le silence tout au long de sa longue marche à travers bois, remuant en même temps dans son esprit tourmenté tout ce qui la préoccupait. Le voyage vers le grand inconnu, la rencontre avec un véritable Gardien de croisée de chemins, les épreuves qui les attendaient toutes au Téthyr...
Elle se mettait subitement à douter d'elle-même. Auraient-elles, Gunlann, Sipah et elle, les épaules assez solides pour supporter le poids des troubles qui agitaient le Téthyr en ce moment même?
Leur échec pourrait avoir de graves répercussions dans la région...

Cette simple pensée la terrifiait.

Les nerfs en pelote, elle grattait nerveusement le dos de Sipah qui marchait à ses côtés, lui soutirant à plusieurs reprises quelques grognements d'exaspération.

Leur petite randonnée forestière s'interrompit brusquement, et les cris de l'archidruide la tirèrent de sa torpeur.

¤ Malabron? Ce serait donc le fameux Gardien? A qui aura-t-on affaire? Un tréant? Une dryade? Un esprit follet? ¤

A sa grande surprise, le dénommé Malabron surgit d'un entrelac de racines, les toisant d'un regard impérieux et visiblement irrité.

C'était la seconde fois qu'elle voyait de ses propres yeux un membre du peuple fée. Et même s'il n'avait pas vraiment l'air dangereux, elle savait pertinemment que c'était un être magique exceptionnellement doué dans les arts arcaniques. Un être de légende, qui n'existait, pour la plupart des petites gens de ce monde, que dans les contes et les comptines populaires.

Elle le fixait et le détaillait sous toutes les coutures, tentant d'immortaliser l'instant en s'imprégnant de tous les détails possibles et imaginables...



Ce fut , une fois de plus, l'Archidruide Gostegotti qui vint interrompre ses rêveries.
Son mutisme avait, selon lui, fait bonne impression à Malabron. Chose qui la surprit quelque peu; dans la plupart des sociétés, il était plutôt mal vu de répondre à une question par un long silence.

Arborant un sourire timide, Miri montra au vénérable gnome qu'elle l'avait bien compris. Elle s'apprêtait à lui répondre, quand Malabron se mit à leur hauteur, la main tendue et le mot "cadeau" pendu à ses lèvres.

Elle réprima un petit rire et s'adressa donc au Gardien avide:


" Je vous prie de m'excuser pour mon mutisme, ami Malabron. Tant de problèmes s'agitent au Téthyr... J'en oublie parfois de me montrer civile et avenante. "

Inclinant sa tête pour marquer ses excuses, elle reprit aussitôt.

" Je me nomme Miri Bruissefeuille, Novice des Gardiens Sylvestres, et je viens, accompagnée de ma consoeur et amie Gunlann, de l'Archidruide Gostegotti et de ma fidèle et bien aimée Sipah, vous demander un service que seul, vous, le Gardien Malabron, pouvez nous offrir. "

Elle fit une petite pause et continua:

" Pour montrer tout le respect et toute la considération que nous vous portons, je vous offre une modeste ode en votre honneur. J'espère qu'elle siéra à vos oreilles."

Elle prit une petite inspiration, et s'écria de sa voix enfantine:

"Gardien de la Croisée, vous ne me connaissez guère
Je ne suis qu'une simple hin; vous n'en avez que faire.
Je viens vous présenter, d'une voix forte et posée
Mon humble requête, simple, raisonnable et sensée.

De graves incidents troublent présentement le Téthyr
Et emprunter votre Croisée me ferait grand plaisir.
Au delà de ça, il ne faut pas l'oublier,
Bon nombre d'autres personnes pourraient être sauvées.

Ce n'est donc pas une demande mue par l'égoïsme,
Mais une humble supplique teintée d'altruisme.
Je vous prie donc, Gardien et ami Malabron,
De vous tourner vers moi et m'accorder votre attention .

Votre sagesse n'a surement d'égal que votre prestance
Je suis sûre que vous saurez faire preuve de bienveillance.
La dure décision vous appartient toutefois
Et quoi que soit votre réponse, elle m'emplira de joie."

Elle termina son poème improvisé par une petite courbette et attendit patiemment la réaction de l'être féérique.

À son tour, Gunlann devait donner un cadeau à Malabron. Faire des cadeaux ne lui déplaisiat pas mais elle ne savait pas vraiment quel était le genre de cadeaux qu'aimait le gardien des croisements. Cela méritait un peu de réflexion.

Spontanément, l'idée qui était venue à l'Inugaakalikurite était un peu la même que celle de Miri. Toutefois, elle doutait d'avoir le même talent pour la chanson que sa compagne d'aventure et, de toutes façons, il lui semblait qu'il n'était pas judicieux d'offrir deux cadeaux trop semblables au sympathique gardien. Elle fit malgré tout un signe d'appréciation à la hin pour la féliciter de la qualité de sa prestation tout en continuant à chercher ce qu'elle pouvait bien offrir.

Il ne lui fallut pas bien longtemps pour trouver une nouvelle idée qui lui sembla meilleure. Elle avait sur elle des feuilles de parchemin, ainsi que des plumes et de l'encre. Elle n'était pas particulièrement douée pour le dessin mais elle avait suffisamment l'habitude d'agrémenter ses textes de lettrines et de petits dessins pour espérer pouvoir réaliser un cadeau digne de ce nom. Toutefois, une fois de plus, elle abandonna son idée. Même si elle parvenait à faire un beau dessin, elle ne savait pas encore quel sujet elle voulait traiter et, elle se connaissait, elle était presque certaine que la décision de ce qu'elle allait dessiner, puis le dessin lui-même risquaient de lui prendre très longtemps. Il lui fallait donc une nouvelle idée.

¤ Allons, réfléchis calmement et simplement. Quels sont les qualités d'un cadeau ?
-Il doit être précieux, je veux dire sentimentalement, pour celui qui donne. Il doit avoir une valeur cachée, en somme.
-Tout à fait. As-tu quelque chose qui correspondent à cette description ? ¤

Une nouvelle fois, Gunlann commença à réfléchir mais cela ne lui prit pas longtemps. Il lui restait un élément d'un passé qu'elle avait presque intégralement oublié, un passé dont ne lui restait qu'un amour de la glace fondue qui s'étendait sur des surfaces apparemment sans fins, un amour des créatures et des plantes qui vivaient dans cet élément si nécessaire à la vie et pourtant si dangereux. Ce qui lui restait était un cadeau qui lui avait été fait, elle ne se souvenait plus quand, ni où, ni par qui, ni pourquoi. C'était un cadeau qui lui avait valu son nom, une construction particulièrement belle mais fabriquée par une toute petite créature. Une créature à laquelle elle voulait croire qu'elle ressemblait. Elle se passa la main dans les cheveux et en retira cet objet dont elle était presque sûre qu'elle ne retrouverait jamais l'égal au cours de sa vie. Mais elle avait changée de vie et, si elle regrettait de perdre un objet auquel elle était attachée, elle était fière de le faire pour aider sa nouvelle famille. Elle regarda une dernière fois le morceau de pierre orangée qui lui avait servit pendant si longtemps de décoration de cheveux.

-Voici mon cadeau, Malabron. Ceci est la création du corail, un minuscule être vivant au fin fond des étendues de glace fondue. Il aura fallu de longues années pour produire un morceau de quelques centimètres. Je suis sûr que vous saurez prendre soin de ce véritable trésor.

Elle souriait en offrant son cadeau même si son sourire était crispé. Si Malabron était un tant soit peu observateur, il saurait à quel point elle était triste de se séparer de cet objet qu'elle avait tant aimé. Mais elle pensa vite à autre chose. Avec un peu de chance, comme elles allaient loin dans le Sud, elle aurait l'occasion de trouver d'autres exemplaires de coraux. Et un projet se fit jour dans son esprit, elle devait chercher s'il existait des coraux capable de vivre dans de la glace fondue plus froides et, pourquoi pas, dans des lacs ou des rivières. Il allait sans doute lui falloir beaucoup d'efforts et de recherche mais elle souhaitait vraiment réussir à créer une merveille en corail dans l'enceinte de Thuldäe. Un sourire reparut sur son visage quand cette idée germa.

Trentième jour du Cœur de l’Hiver, Année des Dragons Renégats
30 martel 1373(CV)

Lieu : Quelque part en Haute-Forêt, près de Raythayllaethor
Temps: Ciel dégagé, froid, Températures négatives
Moment: Matinée

MJ
Narration: Miri Bruissefeuille et Gunlann Landeblanche

e silence qui accompagna les déclarations de Miri et Gunlann fut pesant, d’autant que le silence s’était installé tout autour d’eux mais bien vite le visage ronchon de l’être fée s’éclaira d’un beau sourire tandis qu’il se fendait d’une courbette théâtrale.

- Malabron vous remercie jeunes novices, vos cœurs sont bons et vos âmes le sont tout autant. Votre passage est assuré enfants de Thüldae

Malabron se détourna et en quelques sauts se retrouva face au tronc de l’immense et vénérable arbre sur lequel il apposa les deux mains en murmurant quelques mots en une langue que la naine polaire et la druidesse ne comprirent pas mais elles ne manquèrent pas d’écarquiller les yeux devant le spectacle qui s’offrit à elles. L’air devint plus lourd, la luminosité changea et autour des deux compagnes d’aventures, tout s’assombrit sauf autour du majestueux arbre que Malabron chérissait tant. Devant leurs regards circonspects, le tronc se déforma, s’écarta doucement pour laisser apparaître une arche sylvestre haute d’une toise, dominant un escalier de terre et de racines qui s’enfonçaient dans les entrailles de la terre. A l’intérieur aucune lumière, bien évidemment, le contraire eut été étonnant, seulement des ténèbres bien noires.

Malabron s’écarta un peu et se tourna vers les deux novices. Son visage était cette fois milles fois plus avenant qu’à leur arrivée, ses prunelles rieuses fixées sur Miri et Gunlann, il les invita à avancer.

- Sans lumière vous avancerez, fermez les yeux et faites confiance à vos sens enfants de Thüldae, le Loup Argenté saura vous guider. Que l’Héxade sacrée vous assiste dans votre mission, dit simplement l’archidruide Gostegotti, adressant à chacune un sourire confiant, puis : « Avec impatience, j’attendrai votre retour…

Il ne restait plus qu’aux deux aventurières et au chien de selle de faire quelques pas et se lancer vers l’inconnu. Une forte odeur d’humus exhalait des entrailles de la terres, de l’escalier naturel, on ne distinguait que les premières marches puis plus rien, elles devraient faire attention, faire confiance à leurs sens lors de cette descente vers l’inconnu. Sipah se colla contre Miri, gémit doucement. Le chien de selle était tout sauf rassuré.

endant un court instant, plus que la magie du lieu et du rituel ne la surprirent, l'Inugaakalikurite se trouva en proie au doute. Non pas parce qu'elle ignorait ce qu'elle devait faire, ce qu'elle pouvait faire, ou ce qu'elle allait faire mais parce qu'elle se demandait si l'arbre avait ressenti de la douleur en leur offrant ainsi son sein. Elle se demandait si l'arbre avait volontairement accepté d'être transformé, pour ne pas dire déformé, pour leur laisser le passage. Mais une petite voie lui intima de continuer sans trop y réfléchir.

¤-Ne soit pas sotte, Malabron est une fée, c'est lui l'esprit de l'arbre. Il a choisit de nous laisser passer et si l'arbre souffre, il souffre aussi.
-C'est un peu comme un accouchement, Malabron souffre peut-être mais il le fait volontairement car il sait que par ce sacrifice il offre à autrui beaucoup.
-Donc arrête de tergiverser et avance, garder cette position est sans doute douloureux alors essaye d'abréger ses souffrances en accélérant un peu le pas.¤

Gunlann était émue et elle faillit même pleurer tant parce qu'elle avait l'impression qu'elle avait un nouvel ami que parce qu'elle voyait que ce nouvel ami était prêt à souffrir pour l'aider. Elle lui était incroyablement reconnaissante et elle fit donc une petite révérence pour le remercier de son aide. Elle était maintenant certaine que si elle avait l'occasion de revenir vivante de cette mission périlleuse, elle chercherait à trouver le temps de rendre visite à Malabron avec de nouveaux cadeaux dignes de lui.

Elle se tourna ensuite vers Gostegotti en essayant de garder ses émotions cachées au plus profond d'elle-même, chose qu'elle avait du mal à faire. C'était la deuxième fois en peu de temps qu'elle disait "au revoir" au gnome et la répétition ne rendait pas forcément la séparation plus aisée. Elle tâcha tout de même de sourire en lui rendant son adieu.

-Je vais fermer les yeux et avancer mais ce n'est pas en mes sens que j'ai confiance mais en vous, Archidruide, et en le Loup Argenté. Puisse le repos ne jamais vous fuir.

Le temps était maintenant venu de partir et c'est vers sa compagne d'aventure, ou plutôt ses compagnes d'aventure, qu'elle se tourna enfin. Miri n'avait que peu réagi jusqu'alors et Gunlann interpréta cela comme une sorte de respectueuse crainte. Qu'elle ressentait aussi un peu. Elle essaya donc de la rassurer en lui prenant la main.

-Ce qui fait peur dans le noir et l'inconnu, c'est la solitude. Mais, dorénavant, nous ne sommes plus seules. Nombreux sont ceux qui comptent sur nous et sont avec nous dans l'adversité. Et, quoiqu'il arrive, nos pas suivront le même sentier. Allons.

C'est avec une certaine anxiété que Miri observait la réaction de Malabron. Allait-il les renvoyer toutes deux d'un petit geste impérieux de sa main et refuser leurs cadeaux, ou bien allait-il leur accorder le privilège d'emprunter la Croisée qu'il gardait avec ardeur?

Son petit sourire vint alors effacer toute crainte de son esprit. C'est le souffle court qu'elle suivait le petit être féérique des yeux, se demandant comment est-ce qu'il allait procéder pour "ouvrir" sa fameuse Croisée de chemins.

Elle sursauta lorsque les environs s'assombrirent, comme enveloppés dans un voile de lumière tamisée. Le silence quasi mystique qui s'était brusquement installé fut brisé par les petits crissements plaintifs de l'arbre qui se déplaçait sous les paroles et les gestes ésotériques de Malabron.

Lorsque le silence reprit ses droits, une majestueuse arche de bois tressé se tenait à la place du grand arbre, invitant qui le voudrait à emprunter l'obscur passage qui se révélait désormais à lui.

Miri restait immobile, comme hypnotisée par ce spectacle hors du commun. Elle serrait machinalement l'encolure de sa compagne à quatre patte pour tenter de se rassurer...


La main de Gunlann lui ramena toutefois les pieds sur terre. Tant de choses restaient à faire, il fallait avancer. Et comme elle le disait si bien, elle n'était plus seule.

Elle lui sourit, serra un peu plus fort sa main et hocha la tête silencieusement pour montrer à sa consoeur que ses mots avaient touché juste, et fit un pas en avant... avant d'être retenue par une Saint-Bernard immobile.

Devant tous ces évènements, Sipah semblait encore montrer de vives réticences pour s'engouffrer dans ce passage sous-terrain...

Elle approcha sa tête de cette dernière et lui susurra à l'oreille sur un ton enjôleur:

" Allons, allons, compagne de mon coeur. Tu sais bien que nous devons y aller. N'aie pas peur et suis-moi, tout devrait bien se passer. "

Elle lui tapota la tête et s'avança vers l'arche sylvestre...

Trentième jour du Cœur de l’Hiver, Année des Dragons Renégats
30 martel 1373(CV)

Lieu : Quelque part en Haute-Forêt, près de Raythayllaethor
Temps: Ciel dégagé, froid, Températures négatives
Moment: Matinée

[b]MJ
Narration: Miri Bruissefeuille et Gunlann Landeblanche [

es deux novices eurent la sensation d'être littéralement happées dès qu'elles s'enfonçèrent plus en avant dans l'étrange passage. Elles ne virent pas le passage dans l'arbre se refermer ni le le sourire que l'être fée arborait, une simple esquisse de sourire à peine discernable pour un profane. L'archidruide Thüldae lui retourna un regard calme et serein.

- Elles réussiront, elles portent le Loup Argenté ensemble elles sont plus fortes, elles n'échoueront pas, cela ne peut.

Gostegotti avait simplement murmuré ces quelques mots, telle une certitude. Gostegotti de Thüldae ne se trompait que rarement, pas plus d'une fois toutes les décénnies disait-on. Malabron hocha la tête d’un air entendu.

- J’y compte Gost, j’y compte….elles doivent me visiter et j’adooooooore les visites…

Pendant ce temps, les novices perdirent complétement la notion du temps, tout tourbillonnait autour d’eux et elles sombrèrent dans une semi-conscience incapable de résister au flux d’énergie qu’elles traversaient. Miri s’accrochait à sa compagne à fourrure qui restait collé à elle, la main de Gunlann attrapa inconsciemment celle de son amie halfelin tandis qu’elles se laissaient emportées par le tourbillon, les yeux fermés, l’esprit divaguait au grès de leur pensée. Puis tout s’arrêta soudain, brusquement, sans appel. Elles avaient cette impression étrange de ne plus avoir senti la caresse du soleil ou de la clarté argenté de la lune depuis des lustres.

Elles ouvrirent simultanément les yeux alors qu’un vent chargé d’embruns caressa leur visage, et pour Gunlann, le réconfort de sentir cet air salin qu’elle aimait temps. Elles réalisèrent alors qu’elle se trouvait sur une immense plage de galet, devant elles, la mer dans son immensité s’étendait à perte de vue. Il faisait grand jour. Elles se risquèrent à tourner sur elle-même pour découvrir de hautes falaises déchiquetées, un chemin, juste sur leur droite permettait d’accéder au sommet. Un paysage qui n’était pas inconnu à la naine polaire. En même temps, leur estomac protesta violemment, là encore, elles réalisèrent qu’elles étaient proprement affamées, comme si elle avaient passées des jours sans manger.

n entrant dans l'arbre, Gunlann s'attendait à quelque chose de désagréable. Voire même à quelque chose de douloureux. Cela lui semblait presque stupide tellement c'était consensuel mais elle n'avait pas peur. Elle qui détestait et craignait tant la magie n'avait pas peur de cette magie-là. Et elle savait pourquoi. Pas parce que cette magie était différente, pas parce qu'elle était naturelle. Mais parce qu'elle était avec Miri et Sipah et, plus que tout, parce qu'elle faisait confiance à Gostegotti pour ne pas les exposer à ce genre de danger.

Etrangement, elle fut presque déçue par l'expérience. Le voyage l'avait plongée dans un état de demi-conscience, voire d'inconscience, telle qu'elle ne parvenait pas à se souvenir très bien de ce qu'elle avait ressentit, de ce qu'elle avait entendu, vu ou sentit, de ce qu'elle avait pensé. Et cela voulait dire qu'elle ne pouvait pas l'expliquer, pas le rapporter dans son journal. Cela avait été trop différent de ce à quoi elle s'était attendue, trop déstabilisant.

L'odeur de la glace fondue lui fouetta le visage et l'esprit. Le voyage était terminé et elles avaient atteint leur objectif. Gunlann se souvenait très bien de cette crique et elle savait qu'elles n'étaient pas loin du village. Ou, en tout cas, était-ce ainsi qu'elle s'en souvenait. Quoiqu'il en soit, elle était certaine qu'elles pouvaient marcher jusqu'au village pour y trouver de quoi se nourrir. Ce qui tombait bien parce qu'elle n'était pas sûre d'être capable de pêcher un repas pour trois et elle n'était pas sûre que les techniques de chasse de Sipah soient adaptées à cet environnement.

-Miri, je supposes que tu as aussi faim que moi. Mais nous ne sommes pas loin de Petite-Anse. Nous pourrons y trouver des gens que je connais et qui voudront bien nous nourrir en échange de petits services. Si tu as besoin de quelques temps pour te remettre du voyage, assieds-toi. Je vais prendre des notes dans mon livre avant d'oublier. Si tu as trop faim pour marcher, j'ai dans mon sac de quoi nous tenir au ventre. Mais je ne suis pas certaine que je puisse retrouver des biscuits aussi simples à conserver par ici.

Gunlann s'assit donc sur la plage de galet et sortit son matériel de calligraphie. Elle ne voulait pas faire attendre Miri plus que de raison et elle essaya donc de ne pas perdre trop de temps à dessiner de belles lettres et de limiter la longueur de son texte. Après tout, elle n'avait pas grand chose à raconter et elle aurait sans doute plus de temps une fois arrivée au village. Elle n'était pas sûre de combien de temps s'était écoulé mais elle estimait que cela faisait moins d'une journée depuis sa dernière entrée donc elle n'ajouta pas la date en début de texte mais laissa la place pour le cas où il faudrait le faire.

Notre voyage touche à sa fin, et ce bien que peu de temps se soit écoulé depuis le moment de notre départ. Nous avons traversé l'espace grâce à une croisée de chemins, un acte hautement magique mais nullement douloureux. De fait, il faudrait que je retente l'expérience avec un esprit plus ouvert pour pouvoir juger ce mode de transport et en rendre un compte rendu détaillé. Quoiqu'il en soit, nous avons fait la connaissance de Malabron, le gardien du croisement. Il faudra que je retourne le voir un de ces jours car il m'a paru fort sympathique et sage.

Nous sommes presque à Petite-Anse que j'ai quitté il y a de cela il me semble si peu de temps. Je dois avouer que je ne pensais pas être aussi contente de pouvoir de nouveau admirer l'immensité de la glace fondue. Lorsque je serais de retour à Thüldae, il faudra que je fasse part de mon souhait de voir notre famille se préoccuper plus de cet élément. Mais il est temps de reprendre le voyage et de marcher.

Septième jour de la Griffe du froid, Année des Dragons Renégats
7 Alturiak 1373(CV)

Lieu : Royaume du Téthyr, non loin du village côtier de Petite-Anse
Temps: Ciel dégagé, froid, Températures négatives
Moment: Matinée

MJ
Narration: Miri Bruissefeuille et Gunlann Landeblanche

es deux novices de la Confrérie se trouvaient désormais bien loin de Thüldae et de la Haute-Forêt. un tournant certain dans leur aventure allait débuter et cela n'en était que plus vivifiant.

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