La fête à Ashaba, Après avoir passé le gué.

Gerbo était au bord de la crise de nerfs. ¤Ah, il a juste un peu trop bu... Bon, ça ne devrait pas être trop dur de le faire partir.¤
Le gnome n'aimait guère être déconcentré pendant qu'il préparait des sorts, et de toute façon, il avait déjà perdu le fil du sortilège. Avec un boulet pareil accroché à ses pattes, il n'irait pas bien loin...

-Mais voyons, qu'est-ce que tu fais là à m'enquiquiner alors qu'on paie la tournée là-bas ? dit-il en désignant grosso modo la direction de leur taverne, où avait eu lieu la bagarre la veille. "Me dis pas que t'es pas au courant !"

La ruse est le meilleur moyen de se sortir d'un tas de situations. Et ça, Gerbo l'avait bien compris.

Ank avait observé la foule qui circulait autour de lui en attendant que ces compagnons sortent de la forge. Le jeune moine était quelqu'un de loyal et de travailleur, certains y verraient peut-être du zèle mais le jeune moine était comme ça et ses frères supérieurs ne lui avaient jamais reproché son manque de motivation. La boutique dans laquelle il venait de rentrer pourrait satisfaire ces besoins en matière de carreaux. Seulement, le moine pesait encore le pour et le contre afin de savoir si sa dépense était nécessaire. Même si la récompense à venir se voulait intéressante, il savait qu'il pouvait ne plus être en vie pour la toucher : c'était l'enseignement qu'il avait reçu dans son monastère et il se devait être cette lame qui pouvait rendre la vie éphémère pour tout être qui en avait trahi un autre.
¤Pourquoi je repenses à ça maintenant ? Ce n'est pas le moment ! Il faut que je sois concentré sur ma mission afin d'être le plus vif possible ! Ma survie en dépendra peut-être !¤

Le moine leva les yeux vers le haut, il faisait cela pour se remémorer des choses. Il dressa rapidement la liste de son inventaire déjà bien pesant sur ses maigres épaules.
¤D'un côté je n'ai pas vraiment besoin de tous ces carreaux, de plus mon sac est déjà bien lourd et me ralenti déjà par rapport aux autres, ce serait une charge inutile finalement !¤

Le moine abandonna finalement l'idée d'achat de carreaux supplémentaire. Il préféra attendre dans l'entrée du magasin captant ainsi un léger courant d'air mais bien soulageant par ce temps. Le dur climat de sa contrée d'origine ne l'ayant pas habitué à des températures élevées. Le moine regarda de haut en bas le gnome commerçant, il voulait encore en apprendre sur sa race mais le moment lui paraissait incongru surtout que le gnome préférerait réaliser quelques affaires, plutôt que lui parler des us et coutumes de son peuple. Le moine repensa à Gerbo rester seul sur son banc. Ce petit être c'était montré très gentil et aimable avec Ank et ne lui avait pas fait de reproche quand à son questionnement. Ank croisa les bras et attendit que tous finissent de faire leurs courses dans un silence solennel.

Tout était allé très vite depuis quelques temps pour le groupe. A peine Eranis avait-il entamé la conversation avec Ank que Paolo les emmenait dans une autre boutique. Insanis avait également tenté d'engager le dialogue, mais Eranis n'avait pu lui répondre que par un sourire, Paolo semblant de plus en plus pressé...¤Bah, nous aurons bien le temps de discuter pendant notre mission¤, s'était dit Eranis, regrettant toutefois de ne pouvoir prendre davantage de temps pour répondre à son frère de race. Il savait que, depuis le début de l'aventure, il ne s'était pas montré très bavard. C'était sa façon d'être, il avait besoin de temps pour faire confiance aux étrangers. Son caractère taciturne le faisait souvent apparaître comme quelqu'un de distant.

Pour l'heure, les compagnons se retrouvaient dans une nouvelle boutique, dont il vit sortir Ank tout aussi rapidement que la précédente. Eranis comprit bien la raison de cette sortie prématurée, et il ne mit pas longtemps à le suivre. Lui non plus ne se sentait pas l'utilité d'acheter des armes, car son équipement lui paraissait bien suffisant, et il ne souhaitait pas avoir de compte à rendre à son employeur. Bien qu'il se fut engagé, Eranis ressentait toujours quelques réticences à faire totalement confiance à ce Coitrain. Mais il était trop tard pour reculer à présent...

Eranis rejoint Ank à l'extérieur. Il avait bien compris qu'il n'était pas opportun de commencer une conversation : la mission approchait à grand pas, et il n'était plus temps de discuter. Sans dire un mot, il scruta les alentours, se demandant bien comment ils allaient pouvoir retrouver un homme qu'ils ne connaissaient pas en ce lieu. Il serait temps, en effet, se dit Eranis, de réfléchir à une stratégie. Se lancer à l'aventure sans aucun plan serait suicidaire, et réduirait la mission à néant avant même qu'elle ne fut commencée!

Attendant aux côtés d'Ank l'arrivée de ses compagnons afin d'en discuter, le rôdeur ne bougeait plus, à la fois pensif et désormais concentré...

MJ

Tous

Insanis avait, contrairement à ses compagnons, des emplettes à faire dans cette jolie échoppe. Après négociations avec le marchand, il se décida à acheter un arc court et un carquois rempli de vingt flèches, pour le prix de trente-deux pièces d'or. Ils se quittèrent en bon terme, le rôdeur heureux de ses empletes et le commerçant content d'avoir trouvé acheteur.

Insanis en avait fini avec son équipement, il avait racheté les armes qu'il avait perdu dans les flots, mais pour le reste, grâce au ciel, il avait pu conserver ses armures et son sac.

Quand ils furent tous ressortis de la boutique, Paolo les interrogea afin de déterminer s'il manquait quelque chose à quelqu'un. Personne ne broncha, Paolo trancha donc, les aventuriers allèrent rejoindre Gerbo sur son banc.

Celui-ci venait, grâce à une fine astuce, de rediriger un homme ivre qui était venu l'importuner. Néanmoins, dérangé en pleine méditation, il n'était pas parvenu à mémoriser le sort, et c'est avec déception qu'il vit ses compagnons revenir.

Paolo se renseigna sur l'heure, puis décréta qu'il était temps de se presser. Encore une fois, il mena le groupe à travers les rues de la ville qu'il connaissait si bien. Ils marchèrent quelques minutes, puis s'arrétèrent au coin d'une rue. Paolo leur fit signe de stopper leurs discussion et de l'écouter.

-"C'est dans cette boutique qu'il vient à chaque fois, il désignait une boutique en face d'eux, de l'autre côté de la rue transversale à celle dans laquelle ils se trouvaient, nous devont la surveiller. Je pense que nous avons un peu de temps devant nous, mais au moins seront nous sûrs de ne pas le manquer. Si vous avez des questions, c'est maintenant, car quand il sera là, je vous laisserai, et il sera trop tard."

Le gnome ne fut pas si déçu de ne pas pourvoir préparer son sort. Après tout, ceux qui lui restaient en tête étaient tout aussi utiles, et il serait loin d'être seul pendant cette mission. Aussi, il ne garda aucune amertume contre ce vieux poivrot crédule, et fit comme si de rien n'était pendant le trajet. Il était aussi joyeux qu'à son habitude.

A peine Paolo eut-il montré la boutique, que Gerbo commençait déjà à réfléchir. Imaginer des plans, prendre des décisions, le gnome adorait cela. La mission en elle même n'était pas très compliquée, mais il ne fallait négliger aucun détail. Laissant ses compagnons poser d'éventuelles question, il s'aventura discrètement un peu en avant, afin d'avoir une meilleure vue sur la rue de la boutique.

Il observa le bâtiment qui se trouvait en face de celle-ci : Probablement que l'un d'eux pourrait s'y poster. ¤Il faut aussi quelqu'un dans l'échoppe même, car il y a peut-être une autre sortie, et nous aurions l'air bien bête si Thomas nous échappait ainsi. Quant aux autres, mieux vaut qu'ils restent ensemble à faire semblant de discuter: Comme ça, pas besoin de se cacher, et ils n'auront pas l'air de guetteurs.¤ Ceci réfléchi, il jeta un oeil sans s'en approcher à l'enseigne du magasin pour tenter de savoir ce qu'ils y vendaient. En effet, mettre par exemple Thoglin dans une mercerie ne serait pas de toute discrétion...

Gerbo n'était pas stressé par l'imminence de l'action, mais plutôt excité. Il fit cependant son possible pour maîtriser ses émotions afin de ne pas se faire remarquer pendant ses observations: C'était le genre de choses qui pouvaient tout faire capoter.

Ank avait écoutez attentivement les directions rapides données par Paolo. Ce voulant simple et efficace, le commerçant leur avait amené le dénommé Thomas sur un tailloir. Fixant le magasin que leur employeur leur avait désigné, le moine étudiait ainsi la position à laquelle le groupe se situait du dit magasin.
¤Nous sommes bien loin pour être réellement efficaces, il va falloir se rapprocher, la foule pourrait nous y aider.¤

Le moine le savait, leur mission avait commencée, une quelconque excitation le démangeait mais son introspection précédente lui permettait de se concentrer sans aucun problème. Ank était résolu à atteindre son objectif, il en avait toujours eu les moyens et cela ne risquait pas de changer.
¤Malgré tout il faut que je fasse attention je ne suis pas seul cette fois-ci il va falloir faire un travail d'équipe admirable pour réussir¤

Ank respira profondément et d'une petite voix murmura à l'adresse de Paolo
"Lorsque nous aurons réussi à débusquer ces hommes, où voulez-vous qu'on vous retrouve ? A l'auberge ?"

Ank voulait se rassurer, il ne voulait pas avoir à traîner des hommes ligotés ou même pire dans les rues d'Ashaba. Il fixa quelques instants le commerçant attendant une réponse tout aussi succincte et claire que la précédente. Il posa les yeux tour à tour sur ses coéquipiers, il se devait de fonctionner en groupe et ainsi former une équipe ce que le moine n'avait jamais expérimenté auparavant. Il se retourna pour englober le plus possible de gens et leur murmura quelques mots :
"Messieurs, c'est à nous ! Il va falloir s'organiser !"

La mission était toute proche à présent, et Eranis l'avait bien compris. Il leur fallait prendre des décisions, et vite, puisque jusque là, aucun plan n'avait été élaboré, ce qui paru fort déplaisant au rôdeur. Depuis que Paolo leur avait annoncé la tâche qui leur était dévolue, Eranis avait beaucoup réfléchi sur la meilleure manière d'agir. Il ne savait pas s'il détenait la solution adéquate, mais du moins devait-il en faire part à ses compagnons, peut-être ceux-ci jugeraient son plan intéressant.

Ank avait pris la parole et invitait ses compagnons à faire entendre leur point de vue. Eranis en profita pour prendre la parole à son tour:

" Eh bien, c'est la première fois que je travaille dans ces conditions. Je veux dire, avec un groupe si varié, et si...nouveau; pour une tâche que ne me plait que moyennement. Aussi allons nous devoir nous faire une totale confiance, sur ce que chacun fera. Nous agirons certainement un peu en aveugle, car nous nous connaissons peu." L'elfe marqua une pause, s'assurant qu'il avait l'attention de tout le monde, y compris de Paolo.

"Voici le plan que je propose : il s'agit de ne pas attirer trop l'attention dudit Thomas sur nous, mais de le distraire pour qu'il nous offre les informations que nous souhaitons ou mieux, qu'il nous mène à son chef. Il ne faut surtout pas qu'il nous soupçonne de quoi que ce soit. Gerbo nous a déjà prouvé son aptitude à la distraction. Il pourrait selon moi faire un excellent interlocuteur, et tenter de soutirer quelques informations de la part de Thomas -en jouant de beaucoup de finesse bien sûr, et certainement d'un peu d'humour. Ank, Thoglin et Dalekh pourraient se tenir dans la taverne, et provoquer une échaufourrée mettant en cause Thomas. Si l'on en croit ce qui s'est passé la veille, les autorités sont très présentes dans cette ville. L'arrestation de Thomas pourraient nous fournir des informations précieuses et nous mener à Riton. Dans le cas où cela tournerait mal, Insanis et moi nous posterons à l'extérieur, afin de pister Thomas. Nous sommes je crois les plus à même de le suivre sans nous faire remarquer."

Eranis repris son souffle après ce long exposé de son plan. Il ne savait pas ce qu'en penserait les autres, mais il était persuadé que cette façon de faire pourrait les mener à ce qu'ils cherchaient. Cependant, il n'était pas dans ses habitudes d'échaffauder des plans, et il attendait avec impatience l'avis de ses compagnons. Il leur restait peu de temps, et s'ils n'étaient pas d'accord avec cette façon de faire, il leur faudrait faire vite pour se décider. Aussi se tourna-t-il, insistant, vers les aventuriers et Paolo :

"Qu'en pensez-vous?"

MJ

Tous

Paolo s'étonna de la promptitude de chacun a exposer ces plans, il eut un sourire amusé en regardant chacun faire tout à tour l'étalage de ses idées. Quand Eranis eut fini, il les regarda tous avec apaisement, puis leur dit d'une voix sereine...

-"Eh bien, je crois que c'est le moment où nous nous quittons, car j'ai à faire. Je vous souhaite bonne chance, et quand vous reviendrez, venez me trouver à l'auberge où nous avons eu la chance de nous rencontrer la nuit dernière. Il s'adressa à Eranis, en désignant de nouveau la boutique, ce dont nous parlons n'est pas une taverne monsieur, mais bien une échoppe. A moins que, bien sûr, nous ne parlions pas du même endroit."

Sur ce, il les salua brièvement de la main puis s'éloigna de quelques mètres, avant de faire volte-face et de revenir sur ses pas. Il leur sourit, s'excusa et ajouta :"J'aillais oublier, la description de Thomas, et celle de Riton aussi, car vous les reconnaîtrez difficilement sans ma précieuse aide. Thomas est jeune, très brun, grand et efflanqué, le visage et les doigts excessivement fins. Il a un air rêveur, derrière lequel il cache ses côtés mauvais. Riton, quand à lui, est plus costaud. Il est roux, et grand, avec une large carrure d'épaule. Son nez a été cassé, vous ne pourrez pas ne pas le reconnaître.

Il les salua, puis se retourna, il marcha droit devant et ne se retourna pas. Il ne revint plus sur ses pas, tourna au coin de la rue, et laissa les aventuriers livrés à eux-mêmes.

Ank avait écouté attentivement l'elfe lors de l'exposé de son plan, il lui semblait assez réfléchi, l'elfe avait du le penser depuis plusieurs temps déjà, ce qui expliquait peut-être son silence durant la matinée et une partie de la soirée.
Ank réfléchissait rapidement, il ne voyait pas de défaut apparent au plan du rôdeur. Le moine espérait seulement qu'il pourrait jouer activement la comédie, son échec à la porte lui pesait lourd sur les épaules.
D'un coup, Ank s'aperçut d'un petit défaut dans le plan du rôdeur, le magasin n'étant pas une taverne y déclenché une bagarre serait peu probable.
¤On va pas se battre pour des tissus quand même !¤

Ank se frotta le menton et répondit derechef à Eranis pour clarifier les choses :
-Votre plan est tout a fait correct maître elfe, mais comme l'a précisé Paolo ce magasin n'est pas une taverne y déclencher une bagarre ne serait pas crédible, imaginez si c'est un magasin de vêtements ! Il faudrait d'abord se faire une idée de quelle type d'échoppe il s'agit auparavant et si il n'y avait aucun risque qu'il puisse échapper à notre surveillance…- Ank reprit son souffle à la fin de sa déclaration, il fallait rentrer et observer l'échoppe avant toute chose ! "Je propose que l'un des rôdeurs qui prendra en filature Thomas par la suite rentre dans l'échoppe et fasse le tour et que s'il y a une autre sortie vienne nous prévenir sinon après dix minutes nous agirons ! Sinon le plan d'Eranis me parait être parfait !
Vous avez d'autres suggestions vous autres ?"

Gerbo était plutôt dubitatif quant à la proposition de l'elfe. ¤Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Une bagarre... Même si cela ne nous met pas directement au trou, il y a une chance sur mille pour qu'on arrive à obtenir quelque chose de Thomas de cette façon !¤ Pour mieux se faire entendre, il se mit au milieu du cercle que formaient ses compagnons, et leur souffla :

-Sans vouloir vous offenser Eranis, je crois que vous faites en effet fausse route : Même si ce magasin était propice à une bagarre, ça nous attirerait plus d'ennuis que d'autre chose. Et qui sait, nous ne connaissons pas Riton ni Thomas, peut-être sont-ils malgré leur "profession" les amis de la milice locale ? Si jamais c'était le cas, nous serions dans de beaux draps...

"Mieux vaut respecter ce que nous a dit Paolo ce matin ; A mon avis, il serait beaucoup plus simple de suivre tous simplement ce jeune homme jusqu'à chez lui, en mettant toutes les chances de notre côté pour ne pas se faire repérer, ou le perdre de vue. Et une fois là bas, lorsqu'il sera seul, on l'attrape et on l'interroge !"

"Je suis d'accord avec vous Ank, il faut vérifier s'il n'y a pas d'autres sorties. En fait, il vaut peut-être mieux que deux d'entre nous entrent dans le magasin, afin de faire un peu de repérage. Ceci fait, un seul en ressortira, pour avertir ceux qui resteront dehors, pendant que l'autre attendra l'arrivée de Thomas : Ainsi, tout le monde saura s'il y a une autre sortie, et celle-ci sera surveillée."

"A mon avis, Ank est le meilleur pour rester dans l'échoppe : Vous êtes un homme, et vos habits passeront inaperçus, pas comme une armure."

Si Gerbo avait bien tout suivi, il n'apportait que des modifications à ce qui était déjà proposé.