Introduction : Lions noirs et blanche Griffe, Introduction de Kalam et Phénix

Phénix avait l'intuition que la barbare était prête à leur faire subir un rythme élevé pour traverser cette forêt qui recelait certainement d'autres danger que celui que Kalam et lui avait rencontré. C'est pourquoi il avait accroché sa targe à son cheval pour avoir plus de liberté de mouvement dans la course qu'il s'apprêtait à subir.

Se tournant vers Kalam, il lui demanda :

- Prêt pour un peu d'exercice ou il est préférable que tu prennes le cheval? Tu sais monter au fait, ou dois-je le tenir par les rênes?

C'est donc sans hésitations que Phénix emboîta le pas à la barbare Uthgard prêt à soutenir l'épreuve, de plus cela lui permettrait de bien faire circuler son sang et donc de se réchauffer. Ce qui ne serait pas un luxe dans sa situation.

Après quelques instants, leur guide délia enfin sa langue brièvement afin de savoir qui ils étaient et ce qu'ils venaient faire ici.

- Je suis Phénix et nous cherchions du bois pour faire un feu pour nous sécher et nous réchauffer.

Phénix omit volontairement de parler de sa véritable raison d'être ici, il ne pensait pas que ce soit l'endroit ni le moment pour en parler et peut-être non plus la personne à qui le raconter. Il valait mieux pour l'instant éviter de trop en dire. Il laissa Kalam se présenter lui-même ne sachant pas s'il donnerait son véritable nom ou son nom d'emprunt comme il l'avait fait avec le convoi, après tout même s'ils avaient été sauvé par la barbare ils ne savaient pas encore à qui ils avaient à faire.

- Et j'ai remarqué trop tard le piège dans lequel nous sommes tombé, encore merci pour ton aide.

- Et toi, qui es-tu? J'aime connaître le nom des gens envers qui je suis redevable!

Allongé au sol, Kalam attendait le retour de Phénix. Il laissa son esprit divaguer et fut donc surpris lorsque la barbare lui toucha le bras. Il senti une chaleur envahir son corps et resta planté là, les yeux écarquillés. Jusqu’au moment où il fut tiré du sol comme une brindille soufflé par le vent. Contre tout attente, il ne ressentait plus que quelques légères douleurs supportables. Il se massa les cotes et resta silencieux face à la barbare.

En attendant le rôdeur, il ne put s’empêcher d’observer le corps musculeux de la jeune femme. Il prit également quelques instants pour étudier la plante qui les avait attaqués. Il ne voulait pas revivre pareille aventure.

Dès que Phénix fut de retour, le roubalrd répondit à sa question en montant sur le dos de son cheval.

- Ouais tu peux garder les rênes en main. Je vais m’accrocher à ton canasson.

Il passa ses bras autour de l’encolure et s’agrippa fermement. Il senti la chaleur de l’animal lui réchauffa les membres.
Il resta ainsi une bonne partie du trajet, se laissant guider par la barbare et le rôdeur.
Lorsque ces derniers échangèrent quelques paroles, le natif d’Eauprofonde resta silencieux, à l’écart de la discussion.
Il ferma les yeux et se laissa bercer.

Daphnis

La politesse de Daphnis ne semblait rien pouvoir y faire : le vieillard ne s'était pas déridé et, l'œil sévère, continuait d'accabler le freluquet de son regard perçant. Le symbole de Tymora, arboré fièrement, avait brièvement retenu son attention avant qu'il ne se concentre pour formuler une réponse.

Patreveni Mainunique

- Patreveni,répondit-il en frappant vigoureusement son moignon contre son robuste poitrail, pour ajouter aussitôt avec fierté : Moi shaman... Père vieux de la tribu. Toi ? Sa question finale, aussi soupçonneuse que brutale, avait jailli comme la pierre quitte la fronde. Les réponses qu'attendait Daphnis, à en juger le silence qui s'installait lentement, devraient attendre qu'il ait achevé de se présenter. Apprivoiser le vieux n'était pas chose aisée, mais au moins ne s'était-il pas fait dévorer. -------------------- Ce vieillard encore robuste dévisage quiconque l'approche avec la méfiance farouche des animaux blessés. Un moignon à la place de la main gauche, il tient vigoureusement de son autre main un bâton dont l'extrémité ferrée représente la tête d'un lion.

Chance ou malchance, le cri particulièrement strident d'un oiseau retentit au-dessus du village. Etrangement sensible à ce signal, Patreveni s'était aussitôt écarté de la façade pour fouiller les cieux du regard. Un second cri, plus aigu encore, avait suivi, faisant se serrer le cœur du jeune homme tant il ressemblait à une plainte humaine. L'inquiétude se lisait sur le visage du vieillard, qui maugréait des paroles incompréhensibles dans sa barbe.


Kalam, Phénix et Skelli

Leur sauveuse n'était pas du genre causeuse, c'était le moins que l'on puisse dire... Et sa piètre maîtrise du langage commun n'était pas seule en cause. Sa parole était franche, pour ne pas dire brute, et rare. Cela arrangeait sans nul doute Kalam, dont le caractère taciturne et cachottier l'avait poussé à feindre l'épuisement pour échapper aux présentations. Phénix, d'un naturel plus sympathique, ne se formalisa pas de la rudesse des manières de la barbare : en homme des bois, il avait l'habitude de rencontrer des individus éloignés des beaux usages de la civilisation, au comportement parfois rustre et à la parole sans gêne. Ce dernier parvint néanmoins à apprendre qu'elle se nommait Skelli et qu'elle vivait au Puits de Béorunna, où elle se proposait de les reconduire. Son faucon, Eowk, les avait repérés plus tôt dans la matinée, alors qu'ils remontaient la rivière à la recherche du gué où traverser. C'était le cheval, à la lisière, qui lui avait permis de retrouver leur piste...

L'urgence avait été de quitter le couvert des arbres sinistres sous lesquels les étrangers avaient eu l'audace de s'aventurer. La bande de terre qui séparait les bois jumeaux nommés "Arbres de nuit" était étroite de quelques kilomètres à peine, mais cela était suffisant, apparemment, pour se prémunir des menaces qu'ils renfermaient. La guerrière des Lions noirs, étrangement sereine au regard de la mésaventure qu'ils venaient de vivre, ne surveillait que d'un œil la lisière de part et d'autre de la piste.

Une éclaircie, en fin de journée, offrit un peu de répit aux voyageurs fourbus. Arrivée dans un endroit où la plaine s'élargissait, leur guide fit halte : alors que le soleil, toujours invisible, finissait sa course dans un ciel chaque minute un peu plus sombre, Kalam et Phénix purent picorer leurs dernières rations de voyage et reposer leurs jambes. Comme si la douleur tenace de ses côtes n'était pas un désagrément suffisant, l'aquafondien avait été frappé d'une vive migraine. Était-ce l'héritage de la fatigue ou de la baignade ? On n'aurait su dire... Phénix, quant à lui, ressentait ce picotement caractéristique au fond de sa gorge qui annonçait une mauvaise toux. Il n'était pourtant pas question de s'éterniser en ces lieux hostiles : Skelli avait annoncé sans ménagement qu'ils termineraient le voyage de nuit.

Ils atteignirent le Puits de Béorunna de longues heures après la tombée de la nuit. A la lueur d'une lune parfaitement ronde, ils aperçurent les contours de la haute palissade de bois qui ceignait le village endormi. Ils traversèrent quelques champs aux sillons réguliers, bordés par de plus rares enclos, vides, pour s'arrêter devant une petite grange en bois. A en juger les rares débris qui jonchaient le sol et les outils agricoles remisés contre le mur, c'était là qu'avait dû être entreposé le foin : il n'en restait rien après l'hiver... Aussi furent-ils invités à dormir à même le sol, à l'instar de la barbare qui passerait la nuit avec eux. Les surveillait-elle ? Les protégeait-elle ? Comme à son habitude, elle n'avait pas donné la moindre explication.

***

Exténués par leur voyage et ses péripéties, les deux voyageurs, couchés fort tard, avaient longuement dormi. Leur sommeil avait pourtant était difficile et même désagréable, la dureté de leur couche, le froid de la nuit et leurs courbatures les ayant souvent réveillés.

A leur réveil, le jour était déjà bien entamé. Skelli, plus matinale, veillait sur eux à l'extérieur, devant la porte de la grange. Le ciel était gris, bas et lourd, mais il ne pleuvait plus. La conversation portait probablement sur le temple de Heaume - la barbare venait justement à la rencontre de la caravane quand elle les avait rencontrés - quand le cri strident d'un oiseau déchira la quiétude du village. Phénix avait reconnu un aigle. L'inquiétude qui se peignit sur le visage ingrat de leur protectrice ne pouvait tromper, cette alerte n'avait rien de réjouissant. Un deuxième cri, plus puissant, d'une détresse poignante, suivit.