L'oeil des Sorcières, Aventure dans les Moonshae

Alors qu'elle sentait sa dague déchirer le cuir épais de l'ogre, Sail constata que de vieux réflexes refirent vite surface. Elle était étonnée de constater avec quelle précision ses gestes étaient restés chirurgicaux, comment, malgré la différence de gabarit d'un humanoïde standard, elle parvint à localiser des tissus suffisamment fins pour pénétrer la chair de ce monstre, suffisamment pour lui faire ressentir la douleur.

¤ la douleur... ¤

C'était peut être pour ça, pensait-elle alors, que lorsque quelques semaines plus tôt elle combattait les goules, la sensation n'était pas la même. Ces morts-vivants n'eprouvaient rien quand ils voyaient leur chair lacérée, pas de peur ni stupéfaction, rien qu'un regard vide. Seule la lumière de Vëla avait semblé les perturber.

L'ogre avait ressentit la douleur, et tandis qu'elle plongeait son regard dans le sien, Sail aussi avait ressentit que cela lui était douloureux. Elle sourit intérieurement.
Elle reconnaissait ce sourire, c'était le même qui lui arrivait d'afficher face à ses victimes dans la salle de torture à Zazesspur , parfois.

*Trop de fois... *

Surprise par la riposte du géant, elle parvint tout de même à éviter un coup qui autrement aurait certainement été fatal. Tandis qu'elle se repositionait, elle croisa le regard de Sylaruil, qui venait tout juste de renchérir en compliments ses talents en alchimie.
Un bref instant, elle mesura avec émotion la valeur de ces encouragements sincères, et ce qu'aurait été sa vie dans un environnement aussi bienveillant que la Llewyr.
Puis...

*encore...ENCORE!*

Elle ressera sa dague dans sa main, puis fondit de nouveau sur l'ogre pour l'attaquer.
Si Sail était libre depuis maintenant un bon bout de temps, elle ne se doutait peut-être pas suffisamment que son passé en revanche n'avait jamais relâcher son emprise.

Sail attaque l'ogre au rocher, expertise du combat >-2 au jet d'attaque et +2 à la CA jusqu'au prochain tour.

Alors qu'il s'apprêtait à fondre sur l'ogre qui menaçait Hermine, Tijak vit le monstre s'immobiliser bizarrement avant de s'écrouler d'un coup aux pieds de la jeune femme. Pourtant, le mousse aurait juré que cette dernière l'avait à peine touché, en tout cas, pas assez pour provoquer une telle chose. L'aventurière allait en avoir des choses à expliquer au gamin pour satisfaire sa curiosité mais, pour le moment, l'urgence était ailleurs.

Reportant vite son attention vers le feu de camp, le jeune adolescent s'aperçut vite que la situation tendait à pencher fortement du côté de leur petit groupe. Fort heureusement, le géant restait toujours indécis et il fallait espérer qu'il ne changerait pas d'avis, tant sa seul présence pouvait faire basculer la balance de façon incontrôlable.

Rebroussant chemin, Tijak réalisa qu'il était trop loin pour intervenir efficacement au corps-à-corps aussi plaça-t-il rapidement une bille dans sa fronde. Faisant tournoyer son arme, il fit rapidement quelques pas en avant pour se rapprocher de sa cible et accentuer son coup. Puis, prenant garde à viser encore la tête de l'ogre afin d'éviter de toucher Sail, il décocha son projectile. Jamais deux sans trois, disait-on, et le gamin avait déjà touché deux fois son adversaire. Avec un dernier effort, il allait bien parvenir à le mettre hors-de-combat.

e concept connu sous le nom de paume vibrante trouvait son origine dans les techniques énergétiques des anciens arts internes qui traitent de l'énergie parcourant le corps. Il se décrivait comme « une technique en partie psychique et en partie vibratoire, cette énergie est ensuite concentrée en une vague ». En aiguisant leur sensibilité et leur maîtrise, certains étaient capable modeler cette « vague », pour ensuite la relâcher d'un coup sous la forme qu'il désirait. C'était cette technique que la guerrière -que d'aucuns surnommaient Sirène- avait mis en pratique pour abattre son adversaire, un ogre de deux fois sa taille et huit fois son poids. Cependant, cette technique ne vous était d'aucun secours quand ledit adversaire s'écroulait en avant, mort, de toute sa masse ... en plein sur vous.

Levant les bras en hâte, Hermine parvint à retenir le corps de l'ogre juste assez de temps pour le contourner avant de le laisser s'écraser à ses pieds. Elle le regarda le corps allongé au sol et un sentiment fugitif voila un instant ses yeux redevenus émeraude. Ça n'était pas non plus son genre de s'allonger passivement sur un plateau repas, elle devait donc se défendre. Dispenser la mort. Encore ... Et encore. Tel était son lot. Mais aucunement son envie ou sa joie.

Relevant la tête, elle commença à écarter les bras ... avant de les laisser retomber sur ses flancs. Il était déjà reparti. Elle ravala sa moue car, connaissant son ancien mousse, elle aurait du s'en douter : l'impatience de la jeunesse, l'énergie de l'adolescence !
Cherchant à cacher son trouble, elle trouva rapidement dans la poche intérieure de son armure ce qu'elle cherchait, miraculeusement réchappée de son récent dépouillement : sa paire de verres fumées, qu'elle enfila pour se donner une contenance.

Soudain, une pensée heureuse, à la fois nouvelle est délicieusement familière, effleura son esprit. Finalement, ses bras ne resteraient pas vides !
Hermine s'accroupit pour accueillir un éclair blanc qui jaillit des buissons ... Biscotte, son hermine, enfin retrouvée ! Tout sourire, l'aventurière laissa l'animal grimper le long de son bras, lui tourner autour des épaules, et les deux amies se perdirent un court moment, toutes à la joie de leurs retrouvailles.

Un instant plus tard, après que son projectile ait quitté la fronde de Jakelm, Hermine s'accroupit derrière un buisson, à plusieurs mètres de l'éclaireur —malgré son envie de proximité avec ses anciens compagnons, son sens tactique prenait le pas : ne jamais rester plus d'un à portée d'une attaque de zone.
Sa tactique de dispersion des ennemis ayant partiellement échoué, elle avait temporairement renoncé à faire retraite, pour constater la réussite relative des autres aventuriers. Sahadeva et sa sauveuse, notamment, semblaient plus ou moins indemne. La femme à la peau noire et cette elfe aux cheveux flamboyants étaient certainement alliées de ses amis, tandis que Vëla de Torm semblait créer un troisième camp ?
L'aventurière fronça néanmoins les sourcils. À coté des ogres, le géant était un adversaire d'un tout autre niveau, et elle n'avait aucune envie de se frotter à lui alors qu'elle venait à peine de s'échapper de sa grotte ... ni de voir quiconque mourir sous ses coups de massue.

Hermine: Furtivité.
Hermine: retarde son action.

Narration

Jötunn regardait le chaos autour de lui et aussi lentement qu’il se faisait une idée précise de ce qu’il convenait de faire dans cette situation inédite, les traits tendus de son visage se relâchaient. Vëla pouvait y lire, qu’elle comprenne cette position ou pas, que l’évolution lui convenait, ou dans tous les cas, qu’il ne ferait rien pour l’empêcher. C’était trop tard. Ou la moins mauvaise conclusion.

Les Ogres tombaient l’un après l’autre, le dernier debout, qui d’un coup aurait pu briser le fil de courage de Sail, n’eut pas le temps de réfléchir tandis que les archers relançaient l’assaut. En une seconde, trois flèches et une bille filèrent droit sur la tête du lanceur de rochers. Sahadeva espérait le mettre hors d’état de nuire sans lui ôter la vie, nul doute que son bras fut guidé par toute sa conviction tant ses tirs étaient précis et efficaces. Titubant sous les impacts tandis que son esprit prenait du temps pour se rendre compte qu’il sombrait, il reçut les projectiles sans plus se rendre compte de leur cuisant impact. Sail, voyant son agresseur à sa merci, changea de posture avant d’enfoncer sa dague dans l’aine sans protection de la créature, déchirant son artère iliaque externe, laissant son sang chaud s’écouler à flot.

Les Ogres n’étaient plus.

Urok était éteint devant la lumière de Torm, le lanceur de rochers baignait dans son sang, le corps du cuisinier était encore prit des spasmes de la décharge électrique qu’il avait reçu, le lanceur de pieux était définitivement brisé aux pieds de Malo qui se tenait à présent à quatre pattes et dont le corps se tordait dans une impossible –et probablement terriblement douloureuse- posture.

Dans le calme qui suit la tempête, le géant se pencha en avant dans une posture si sereine qu’elle aurait pu sembler déplacée.

- Vëla de Torm. Je t’ai entendu et j’ai choisi le chemin qui me semblait agréable. Les Ogres n’ont jamais été à moi. Il la servait Elle. Et mal. Elle avait dit ne pas se battre et ils n’ont pas obéi. Maintenant ils sont punis. J’ai dit.

Très heureuse de l’issue du combat, Sylaruil ne put s’empêcher d’afficher un grand sourire plein de satisfaction. Ni une, ni deux, elle enchaîna au profit de sa forêt :

- Jötunn, nous n’avons pas de grief envers-toi et sommes disposés à te laisser en paix. Cependant nous te demanderons de ne plus jamais t’associer avec les sorcières ni de faire du mal à un humain ou de l’emprisonner comme tu l’a fait avec celle-ci, dit-elle désignant du menton Hermine dont elle ne connaissait pas encore le nom. Ceci tu dois nous le promettre sur la Terre Mère.

Sylaruil souhaitait un engagement absolu de la part de Jötunn. Elle n’était pas prète à accepter de laisser un tel être menacer le village auprès duquel il était ainsique les êtres peuplant ces forêts.

Quel que soit sa réponse, il fallait néanmoins faire vite. Que Marge soit de gré ou de force avec ‘Elle’, il était nécessaire de les rattraper. S’adressant immédiatement après l’échange avec Jötunn à Malo, l’elfe des Sélénae demanda :

- Malo, souhaites-tu nous accompagner jusqu’à Marge ? Saurais-tu nous prêter tes sens pour nous guider ?

La demande avait coûtée à la Synnorienne, interagir avec une créature peu naturelle la mettait mal à l’aise, mais l’objectif était trop important et méritait de dépasser les premiers préjugés. Et puis son comportement avait été exemplaire à leur première rencontre, et il avait renouvelé son appui au groupe dans ce nouveau combat. Elle laissait ses compagnons lui présenter Hermine qu’ils semblaient déjà connaître, et ferait des présentations courtes pour ne pas entraver la poursuite de leur objectif.

Sur le trajet elle voudrait en savoir plus sur les agresseurs, Malo avait sûrement vu voire observé cette dite ‘Elle’. Guillerette de cette fin heureuse, Sylaruil était prête à repartir au pas de course, un chant vibrant d’entrain dans ses cordes vocales pour donner du corps à la poursuite.

jet de social pour appuyer ma demande au géant

Bien qu'il ait modifié la trajectoire de son tir au dernier moment, Sahadeva avait effectué un geste parfait, tel que celui qu'il avait réalisé quelques temps plus tôt face à la meute de loup : l'ogre s'était effondré, inconscient. Un petit sourire de satisfaction s'était affiché sur le visage du Maquar, mais il s'en effaça rapidement lorsque le guerrier constata que Sail venait d'exécuter purement et simplement leur adversaire.

¤ Mais qu'est-ce qui lui a pris ?!? Tant d'efforts réduits à néant… et une vie de plus de perdue… Elle lui a volé sa chance de faire pénitence… ¤

Sahadeva était déçu. Même s'il semblait peu probable que l'ogre se repente de sa vie passée, il estimait qu'il fallait lui laisser une chance, non sans lui avoir infligé le châtiment qu'il méritait pour ses crimes. Il en voulait un peu Sail qui avait gâché ses efforts, mais il savait qu'elle ne partageait pas ses croyances, qu'aucun de ses compagnons ne les partageait. Il était dur d'évoluer loin des Eaux Dorées et il eut un petit pincement au coeur en repensant à sa patrie.

Jötunn avait fait montre de bonnes intentions et le Maquar n'avait rien à lui reprocher : il semblait donc que le combat soit terminé. C'avait été un bain de sang, mais l'attitude des ogres ne leur avait pas laissé le choix. Sahadeva avait rangé ses flèches dans son carquois et baissé son arc en signe d'apaisement. Sylaruil avait pris la parole en premier et imposé ses conditions au géant. Elles semblaient dures au guerrier.

¤ Il est dur de lui parler de la sorte alors qu'il n'a cessé de faire preuve de diplomatie… J'aurais abordé les choses différemment. Mais il est vrai qu'il a commis une grave erreur en participant à l'enlèvement de Marge et à la séquestration d'Hermine… ¤

Le Maquar tourna son regard vers sa compagne retrouvée. Un petit sourire ses dessina sous sa moustache. Une fois que les pourparlers avec Jötunn seraient terminés, il s'empresserait de la rejoindre pour la serrer dans ses bras. Il n'était pas habituellement du genre démonstratif, mais la disparition soudaine de son amie, car il la considérait comme telle, l'avait marqué et il était très heureux de la retrouver… et très curieux d'apprendre ce qui lui était arrivé !

n se voyant désignée par Sylaruil, Hermine se raidit : elle aurait préféré se faire oublier, et quitter cette clairière au plus vite avant que le géant change d'avis et décide de les écraser. Elle n'avait pas vraiment peur pour elle-même, pensant pouvoir échapper à un combat qu'elle ne souhaitait pas, si c'était nécessaire. Mais elle connaissait Sahadeva et, si le géant l'attaquait, celui-ci tenterait à nouveau de la défendre, risquant ainsi une fois de plus la vie de ses compagnons. Le Maquar avait-il oublié leurs séances d'entraînement ? Ne voyait-il toujours pas au delà des apparences ? Que l'Équilibre peut prendre plusieurs formes, et la Loyauté plusieurs chemins ?
Hermine serra le poing.

¤ Ou alors, il voit les choses plus clairement que toi ... ¤

Derrière elle, Loup montra les crocs en un étrange sourire.

Même si le géant semblait pacifique pour l'instant, il suivait les ordres de quelqu'un de suffisamment intelligent pour rester dans l'ombre jusqu'au moment d'attaquer ; il restait donc une menace pour les alentours. Il n'empêchait que de le menacer alors que les aventuriers n'avaient apparement ni les moyens, ni l'envie de se battre contre lui n'était, pour Hermine non plus, pas une bonne idée. Ou plutôt, dans la manière qu'avait l'elfe d'exprimer les choses, il y semblait y avoir une certaine marge d'amélioration. À Hermine de tenter de démontrer la différence entre le bon ultimatum et le mauvais ultimatum –différence qui était, pour les initiés, à peu de chose près la même qu'entre le bon chasseur et le mauvais chasseur.
Encore quelque peu enrouée de sa captivité, Hermine s'éclaircit la gorge et arbora un mystérieux sourire, en faisant quelques pas en avant.

- Ce que ... celle-ci veut diяe, champion ... , entreprit Hermine en désignant à son tour avec un clin d'œil Sylaruil du menton, « ... c'est que ton destin n'est pas de seяviя tes maîtяes actuels, mais de me яejoindяe moi. Moi, la gueяяièяe en aяmuяe noiяe. »

Hermine marqua une courte pause, le temps certainement pour le géant de marquer son impatience ou à de se moquer de son affirmation, qui n'était à priori pas beaucoup plus réaliste que celle de l'elfe. Gardant sa contenance, elle fit mine d'épousseter sa courte cape brune pour en chasser une brindille. Elle s'attendait à une telle réaction : personne n'accepte de reconsidérer sa position sans une ... incitation.

- Яis, mais tu as toяt de mépяiseя mon offяe !, lança t'elle en pointant un doigt accusateur vers le géant, campée quelques mètres devant lui. « Mon Pouvoiя est le plus gяand, caя je vois le futuя, et je te prédis le destin suivant ... » D'un geste ample, Hermine ôta ses verres fumés, et ses yeux devinrent fixes. Sa voix se fit plus forte, et légèrement éthérée.

À notre prochaine rencontre, tu manqueras encore de discernement, et ta Force deviendra inutile.
Ce n'est qu'en rejoignant mes rangs que tu La retrouveras, et tu La mettras à mon secours.

- Ça n'est pas une menace, Jötunn, mais ton futuя. La voix d'Hermine était redevenue normale, mais elle semblait néanmoins totalement sûre d'elle. « Tu n'as que deux chemins pour l'éviteя : ne cяoise plus jamais ma яoute, ou deviens mon allié. Tu méяites mieux que ta seяvitude actuelle. Entends mes mots, saisis la main que je te tends. Bon couяage. »

À ces mots, Hermine remit ses lunettes, rejeta ses cheveux et sa cape en arrière d'un geste théatral, avant de tourner les talons pour quitter tenter de quitter la clairière.

La bille d'acier à peine décochée, Tijak avait rapidement fouillé dans son petit sac pour en sortir une nouvelle afin de pouvoir réitérer son attaque. Là, réalisant que son premier projectile n'avait, en fait, que frappé un adversaire déjà hors-de-combat, il interrompit son mouvement avant de jeter un coup d'œil vers le géant, encore inactif. Ce dernier semblait, fort heureusement, bien disposé à leur égard - de toute façon, ils n'auraient pas pu faire grand chose contre lui - et il fallait espérer que l'intervention, un peu sèche, de Sylaruil ne le fasse pas changer d'avis.

C'est alors qu'Hermine se dévoila à son tour et prit la parole. Tijak écarquilla les yeux de surprise devant tant d'assurance. Réelle certitude de force de la part de la jeune femme, faculté soudaine de voyante ou magistrale tentative de bluff, l'ancien mousse n'aurait encore pu le dire, toujours est-il qu'il ne put s'empêcher d'être impressionné par celle qui fut la navigatrice à bord du Protecteur et qui leur avait permis de tutoyer les étoiles, tout en éprouvant tout de même un furtif sentiment de crainte devant la façon surnaturelle dont la prédiction avait été assenée.

Mais il n'était encore qu'un enfant, au fond, et la défiance qu'il pouvait ressentir envers l'Hermine prêtant sa voix aux esprits disparut vite devant l'élan d'affection qui l'envahit devant son retour. La jeune femme avait à peine eu le temps d'esquisser son demi-tour qu'elle reçut dans les bras un véritable boulet de canon, recouvert de boue.

- M'dame Hermine, j'suis trop content d'vous r'voir. Mais pourquoi vous nous avez quitté comme ça ? Vous êtes allée où ? Mais bon, c'est pas grave, c'qu'y compte, c'est qu'vous êtes là à nouveau...

orsque Jakelm se jeta sur elle, Hermine mit à profit son expérience du corps à corps pour, d'un même mouvement coulé, lui rendre brièvement son câlin, passer un main de son dos jusque derrière son genou, le déséquilibrer pour le glisser tout entier sous son bras et le maintenir fermemant d'un bras tout en ébouriffant ses cheveux aussi tendrement qu'aggressivement de sa main libre. Tout ceci, elle le fit sans presque ralentir le pas, et continua à s'éloigner d'un pas souple –du moins, aussi souple qu'on pouvait l'être avec dans les bras un préadolescent qui gigote des pied et des mains.
Un observateur extérieur aurait peut-être pu songer à un enlèvement d'enfant, dont la victime souffrirait du syndrôme d'une quelconque ville nordique.

Du point de vue du jeune éclaireur, cependant, la situation était différente : de sa position quasiment tête en bas, il était pris en tenaille d'une part par Biscotte, le rongeur blanc de son amie, lui agripper le col d'un air qui ne souffrait aucune protestation, et d'autre part par l'Hermine qu'il connaissait. D'en dessous, il put la voir se mordre brièvement la lèvre et le couver du regard l'air attendri, comme elle l'avait parfois fait dans le passé déjà. Toute sourire, elle lui intima cependant le silence :

- Tishina !, chuchota-t-elle, « Tu gâches mes effets ! »

Une fois hors de vue du géant, la navigatrice reposa son ancien mousse à terre. Les pieds du jeune garçon eurent à peine eu le temps de toucher le sol qu'Hermine l'étreignit cette fois pour de bon, lui caressant les cheveux, l'enserrant de ses bras qu'elle serra presque trop fort.

...

Après un moment, elle relâcha son étreinte, mit un genou à terre et posa ses mains sur les épaules de Jakelm, les yeux brillants.

- Tijak, quelle suяpяise !, souffla-t-elle, « J'essayais de яemettяe la main suя Sahadeva, et voilà que je le tяouve en compagnie d'amis, ... et toi paяmi eux ! Si je m'attendais ! J'étais si inquiète de t'avoir peяdu de vue pendant notяe яetouя ! Je suis tellement désolée, si tu savais ... Je n'ai pas pu ... » S'interrompant, Hermine se détourna pour passer son poignet au coin de chacun de ses yeux. Après un instant, elle sourit à nouveau : « Mais ce n'est pas le moment de paяleя de ça. Tu as яaison, ce qui compte c'est de s'être яetяouvés. Et j'ai hâte d'entendяe ton histoire. Mais d'aboяd ... »

Lentement, l'aventurière se releva. Son sourire ému avait disparu, et elle semblait avoir repris du poil de la bète, retrouvé sa cuirasse habituelle. Elle posa la main sur l'épaule de Jakelm, et continua d'un ton faussement officiel :

- ... Aujourd'hui, Monsieuя Fileyeuя, nous ne somme plus suя un naviяe, et je ne suis plus votяe officieя. Vous n'avez plus d'oяdяe à яecevoiя de ma paяt. Cela étant, si vous êtes néanmoins pяêt à accepteя une nouvelle mission ... Un vague sourire flotta sur ses lèvres, et son ton redevint doux : « ... Tu me pяésente à tes amis ? Que je sois sûяe du genяe de guêpieя dans lequel j'ai choisi de me fouяяeя en яevenant dans ces Яoyaumes ... »

Vêla de Torm respirait mieux, les ogres, un après l’autre était à terre. Même si cette fin la décevait, la justice divine en avait parlé, ainsi l’ordre lumineux l’emportait encore sur les noirceurs. La réponse de Jötunn lui confirmait que ce géant en avait plus dans la cervelle qu’il en laissait paraitre. La paladin sourit en lui faisant un signe de tête approbateur en rangeant Ô Sainte dans son fourreau dorsale après l’avoir essuyé et allait poursuivre auprès du géant, mais la représentante du beau peuple prit la parole avant elle. La façon employée dérangeait un peu la guerrière divine, mais Sylaruil qui connaissait cette île devait avoir ses raisons et ses droits. Vêla la laissaient terminer avant de poursuivre, mais elle se fit prendre de cours par l’évadé nouvelle.


Si les mots de Sylaruil étaient demandants, ceux de l’évadé vinrent déranger la paladin. Ce n’était pas que des demandes, mais une forme de contrôle qu’elle tentait d’exécuter sur Jötunn, lui qui venait de voir disparaitre les ogres un après les autres, lui qui venait de confirmer qu’il avait choisi le chemin qui lui semblait agréable, il avait beau être un géant, il avait droit à son libre arbitre. La guerrière divine se serrait les dents en regardant dans la direction de l’évadé puis ensuite elle levait la main gauche vers Jötunn puis sa main droite vint se déposer sur son cœur et elle baissait légèrement la tête vers le géant pour ensuite tourner les talons et prendre la direction que Jötunn lui avait précisée peu de temps auparavant. L’intermède ogre était passé il fallait maintenant poursuivre la piste de Marge, ils avaient le chemin, c’était à eux de le fouler et de reprendre le temps perdu. Jötunn était libre et la paladin ne voulait pas se mêler des intention de l'évadé.


La néophyte de l’ordre du corbeau était lasse, pour elle cette journée n’était pas la meilleure qu’elle avait connue, mais elle devait impérativement mettre de côté ses états d’âme actuels et rien de mieux qu’un ami pour cela. Une fois un peu en retrait elle en appelait à Abby de venir la rejoindre. De son monde céleste le destrier apparut d’une splendeur royale, son pelage semblait plus soyeux, il lui semblait qu’Abby avait pris du coffre, il lui semblait plus fort, plus robuste encore qu’au matin. Elle sourit puis s’approchait pour le caresser le soignant d’attention et d’amour puis elle mit pied aux étriers. Comme il faisait bon de le retrouver, un baume qui n’avait jamais trouvé d’égal.