[Prologue] Cormaeryn

Vingt-Troisième jour du Mois de la Ponte, année des Dragons Renégats.
23 Mirtul 1373 (CV)
Lieu : Cormaeryn (Nord de Fort-Dague)
Moment : milieu de journée
Météo et températures : 15°C, bruine, légère brise

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Alrion:
Elion d'Alusaire:
Gunlan:
Ina:
Xarss:

ne fine pluie arrosait la région d'Eauprodonde en ce mois printanier depuis près de deux jours. Les chênes et bouleaux recouverts de chatons attendaient leur heure avant de dévoiler leurs feuillages. A leurs pieds, les crosses des fougères se déployaient et bientôt deviendraient de belles frondes. Non loin d'elles, de jeunes renardeaux roux sous la surveillance de leur mère, tentaient d'apprendre les rudiments de la chasse alors que sur les tiges d'ail des ours, une coccinelle se délectait de dizaines de pucerons. La vie fleurissait à chaque endroit de cette nature sauvage.

Plusieurs routes commerciales se tournaient vers la cité des splendeurs, charriant un flot de produits des différentes régions alentours. Celles du Sud, partant de Portcalim traversait les villes de Mennon, Pierremousse, Bérégost avant de longer quelques forêts et marécages et de déboucher sur le Gué de la dague. Puis dans un dernier soubresaut, reliait la cité d'Eauprofonde livrant à ses habitants épices, joyaux, herbes rares, soies, vins...Au Nord-Ouest, la Grand-route terminait sa course à Luskan, quant à celle du Nord-Est appelée Longue-route, elle reliait Mirabar à la côte des épées apportant à la plus influente ville du Nord, pierres et minerais de toutes variétés.

C'est donc sur la plus méridionale d'entre elles, la Route du commerce, que cheminaient les différents protagonistes de notre histoire. Chacun d'eux avait sa raison d'être là et bien malin pouvait savoir qui les y avait mis dans une fourchette de temps très rapprochée. Bientôt, ils se retrouveraient dans la même auberge, sirotant une bière naine ou une tisane chaude. Mais pour le moment, ils battaient le pavé chacun de leur côté sous ce crachin venu de l'ouest.

La plus proche du village fut Ina. La Damarienne marchait d'un bon pas, se retournant de temps à autre. Un œil attentif pouvait remarquer dans le ciel, juste au-dessus d'elle un faucon. L'oiseau semblait la suivre et criait dès qu'il percevait une moindre forme, avertissant par le fait la gardienne des feuilles. Cette dernière, un cimeterre de bonne facture accroché dans son dos, paraissait bien armé pour affronter le moindre danger mais un douloureux évènement vécu voilà près de dix ans, pesait toujours sur son corps et resterait à jamais graver dans son âme.

Quelques kilomètres plus au Sud, cheminait un Chondathien et pour un de sa race, ses atouts physiques furent des plus impressionnants. Ses pas cadencés trahissaient une période militaire et tout portait à croire que rien ne pouvait arrêter ce colosse. Un écureuil traversa soudainement devant lui. Sa couleur extirpa Alrion de sa marche forcée, un flots de souvenir d'une demoiselle à la chevelure rousse envahissaient soudainement ses pensées.

A sa vue sur cette route commerciale, beaucoup se détournaient en voyant la noirceur de son visage. Pourtant ce drow flanqué d'un compagnon animal commun, tentait à chaque rencontre de se montrer le plus sociable possible. Malheureusement pour lui, ses origines souterraines n'arrangeait guère son état d'esprit. Xarss rejoignait Cormaeryn, une mission l'y attendait et le natif de Menzoberranzan était bien décidé à démontrer à ses supérieurs qu'il était digne de leur confiance en la résolvant le plus rapidement possible, confirmant le choix de ce nouveau sentier de la rédemption.

Quand un homme de près d'un quintal aux yeux topaze, armé jusqu'aux dents, vêtu d'une armure argenté en mithral et montant un destrier protégé par des pièces d'armures en écaille suivi de près par une mule, déambulaient sur ce chemin, les gens s'écartaient de respect teinté d'une peur bien légitime. Aucun paysan du cru ne souhaitait le provoquer ni même croiser son regard glacial. Et pourtant, cet être aux origines divines œuvrant pour le bien était encore hanté par des images de feu et de sang. Arriverait-il un jour à s'en défaire ou faudra-t-il qu'il vive avec jusqu'à son dernier souffle ?

Cette question, la novice ne se la posait point. Elle devait rejoindre au plus vite sa responsable. Malgré sa taille, la naine démontrait ses excellentes qualités sportives, si bien que son compagnon à la fourrure tant convoitée par les trappeurs, avait bien du mal à suivre. Quelques gouttes de sueur perlaient sous le tricorne de Gunlann coulant lentement dans ses yeux gris. D'un revers de manche, la naine les balaya et rageait de ne pas pouvoir aller plus vite.

Au village de Cormaeryn, la seule auberge pouvant accueillir des voyageurs avait ouvert ses portes depuis le lever du jour. Son propriétaire un ancien forgeron au crâne rasé et aux rouflaquettes généreuses balayait consciencieusement le sol de terre battu, attendant les premiers clients de la journée. Entre son jardin potager et son auberge, l'homme avait très peu de temps pour lui et cela lui convenait fort bien. Respecté et apprécié de pratiquement tous les villageois, son commerce était souvent au centre des ragots et autres papotages plus ou moins véridiques. Quand le besoin s'en faisait sentir, souvent à partir de la tombée de la nuit, Reynald faisait appel à une jeune fille pour l'aider dans le service. Il la rétribuait convenablement par quelques pièces de cuivre, voir une pièce d'argent, selon la durée de son travail. Elle pouvait aussi manger gratuitement et emportait souvent les restes des repas chez elle, nourrissant ainsi le cochon ou les poules qu'elle et sa famille élevaient.

L’ex-sombre avait atteint le village la veille de nuit et était resté dans les ombres pour prendre le pouls de Cormaeryn. Le jeune drow cherchait des indices sur des créatures qui auraient laissé des traces dans ce hameau pour monter vers le nord. Depuis son retour de Lunagent où il avait cru passer plus de temps, il se demandait si la main des mystères ne se débarrassait pas de lui bonnement en l’envoyant encore en mission, quoi que pour retourner à la tour il lui fallût passer par là, une pierre deux coups se disaient-il pour se remonter le moral. Le faux fourbe avait pris des informations sur Cormaeryn sur la route, ce qui l’avait renseigné sur la population et sur le compte Enguerrand Cormaeryn et sa main droite Maelyn d'Azur.
Ses recherches de la nuit précédente avaient été plutôt vaines, si la nuit permettait de découvrir un hameau tranquille et d’y parcourir les rues et ruelles puis fouiller les moindres recoins, les informations historiques y étaient plutôt rares, quoique dans une ruelle étroite deux ivrognes finissaient une bouteille commencée plus tôt en jouant aux dés sur le dessus d’un baril de bois. Il tentait de se joindre à eux en restant le plus couvert possible et d’en apprendre un peu plus sur l’étrange histoire qui aurait passé ici il y avait une quinzaine.
Au moins il avait pu apprendre et connaitre le hameau, ayant aperçu quelques commerces, comme un charpentier, un forgeron, un maçon, une boulangerie, une épicerie et une auberge. Couvert de son piwafwi et de sa capuche il attendit que l’unique auberge fermette ouvre pour aller prendre une boisson chaude ou plutôt un hydromel tien, ce serait plus agréable en bouche et à l’esprit. Surtout que la journée semblait partie pour être humide.

Il entrait donc dans cette auberge au moment où les résidents de la veille devaient descendre prendre leurs déjeuners. En entrant, il regardait la disposition des tables et l’architecture de l’endroit lui proposait de prendre la dernière table du coin face à l’entrée. Les bruits de la cuisine ne le dérangeraient pas et pourraient aisément tendre l’oreille pour y cueillir des informations utiles pour sa mission. Du moins c’est ce qu’il croyait. Prenant place il déposait son havresac à ses pieds et Vorn vint se déposer sur lui confortablement. Il se donnait la journée et la soirée pour cueillir des informations et qui sait, peut être que dans la journée, si cela lui tentait et que la météo y était plus clémente, il irait peut-être voir le compte ou sa main droite pour s’informer. Il avait envie d’un peu de repos, et comptait bien commencer cette mission à son rythme, lentement et confortablement.

Il sortit le petit traité sur les grandes vertus qu’il s’était offert à Lunargent et l’ouvrit pour continuer sa lecture. Avant d’entreprendre celle-ci, il prit une pause, regardait les flammes dans la cheminée puis se demandait s’il y aurait de l’hydromel dans cette auberge.



Perception et social.

ême si elle avait, techniquement, commencé son voyage la veille, l'Inugaakalikurite ne commença à se sentir de retour sur les routes que lorsqu'elle quitta l'abris à l'orée d'Arprofond où elle avait passé la nuit. Une nuit que ses yeux encore ensablés, et Kelp qui baillait et ne semblait pas décidé à partir, avaient trouvée trop courte mais que ses jambes avaient eu hâte de voir finir. Le vol à dos d'aigle n'avait pas été désagréable, elle commençait à se faire à ce genre de transport même si elle n'était pas prête à aller demander à Moenna de l'accepter parmi les rangs des Gardiens des Vents, et la traversée d'un portail restait une expérience excitante mais il n'y avait rien de tel que de pouvoir utiliser ses propres gambettes.

Elle n'avait pas vraiment eu le temps de s'ennuyer pendant les deux mois qu'elle avait passés à Thüldae mais elle n'était clairement pas faite pour rester au même endroit très longtemps. Et le Ruban d'Argent avait beau être magnifique, elle avait besoin de plus d'eau dans sa vie que la petite rivière ne pouvait lui en fournir. De ce qu'elle avait compris, Cormaeryn n'était pas sur la côte, ni même à proximité de la Rivière Delimbiyr. Mais elle avait d'autres raisons d'être intéressée par cette mission.

Le retour d'Ina, il y a un peu moins de deux dizaines, avait été une surprise qui avait secoué la Confrérie et Thüldae. Gunlann avait commencé son Noviciat après sa disparition et n'avait donc jamais eu l'occasion de la rencontrer mais personne n'ignorait qui elle était. Sa disparition et le retour de Lähmee Tribäle sans elle avait fait d'elle une légende, au moins pendant les quelques jours qui avaient séparé la cérémonie des Arakhora et son retour. Et l'Inugaakalikurite était trop curieuse pour pouvoir ignorer l'opportunité d'écouter une légende raconter ses aventures. Evidemment, elle avait envisagé de demander au Ly'Aegisir des Conteurs du Naturel de lui raconter au moins les événements menant jusqu'à la disparition mais ce dernier avait été envoyé en mission dès le lendemain de la cérémonie et elle n'avait pas même eu l'occasion de l'approcher.

Gunlann avait essayé d'approcher la Ly'Aegisir des Gardiens des Feuilles mais elle avait promis à Gostegotti et Isorion de les aider avec la protection des frontières de Thüldae et d'assister les patrouilles et elle n'était pas du genre à revenir sur ses promesses. La chance avait failli être de son côté quand Ina s'était vue attribuer une nouvelle mission et que la naine polaire avait été considérée pour l'accompagner. Mais le Caercilcarn avait décidé, d'après Moenna après beaucoup de débat, qu'elle était plus utile là où elle se trouvait. Mais la situation avait visiblement changé et elle devait maintenant, retrouver celle à qui elle voulait tant parler.

Le soleil n'était pas encore levé au-dessus de la Côte des Epées méridionale mais, aujourd'hui en tout cas, l'Inugaakalikurite ne pouvait pas se permettre de faire la grasse matinée. Aidée par la grâce et la magie du Dormeur Eternel, elle allait devoir cheminer pendant de longues heures si elle voulait arriver à Cormaeryn avant que l'astre du jour n'atteigne son zénith, telle qu'elle avait promis à Isorion de le faire. Kelp ne pouvait pas suivre son rythme et se lova donc dans sa capuche et se rendormit aussitôt.

Il ne lui fallut guère plus d'une heure au rythme où elle allait pour rejoindre la route qui reliait de nombreux villages de moindre importance qui n'étaient pas directement connectés à la grande route marchande plus loin au sud. Fière de son allure, elle décida de faire une pause prématurée pour s'alimenter en milieu de matinée. Cela lui sembla être une excellente idée, assise à l'abris de la pluie sous une sorte cairn, écrivant dans son journal ses notes sur son voyage jusque là, mais son estimation de ce choix changea drastiquement quand la magie du Père des Géants cessa, plusieurs kilomètres avant qu'elle n'arrive à Cormaeryn.

Elle déposa Kelp sur le sol, ce qui ne lui plut pas, et se remit donc en route, essayant de forcer le pas pour ne pas manquer son rendez-vous. Elle ne pouvait pas maintenir son rythme très longtemps sans magie et fini donc par accepter de marcher à un rythme un peu plus lent, quoique toujours trop rapide au goût de sa loutre. Quand, après une bonne heure de marche additionnelle, elle arriva enfin en vue des portes de la ville, elle ne put s'empêcher de faire un petit bond de joie pour célérer sa réussite. Elle n'avait plus maintenant qu'à trouver Ina et à partager avec elle un déjeuner bien mérité, si possible suivi d'une sieste et d'une histoire. Et la place la plus logique pour trouver la druidesse semblait être l'auberge locale.

7 Mirtul. Ce jour vit naitre une seconde vie chez une jeune Damarienne, plus si jeune que ça finalement. Bientôt trente années qu’elle foulait le sol de Toril et qu’elle allait d’aventure en aventure bravant les dangers et se délectant des simples plaisirs de la vie.

Son retour à Thüldae aurait été discret si elle avait pu. Un an d’absence, pour enchainer sur une aventure inimaginable de balancier des forces du bien et du mal. Une histoire qu’elle garderait à jamais dans sa mémoire et qu’elle espérait un jour transmettre à ses enfants si elle en avait un jour.

Elle était revenue avec une partie de la force de frappe de la ville après un affrontement sanglant avec des Drows, entre autres. Le premier jour, elle reçut la visite du protecteur et de ses amis qui n’étaient pas encore en mission. Moënna, la première, évidement. Les deux amies avaient passé la journée complète ensemble dans le nid bien poussiéreux de l’humaine et avaient rattrapé le temps perdu à grand renforts de rires et quelques larmes. Fatiguée mais téméraire, elles avaient même fait la fête à la taverne de l’arbre géant toute la nuit. Ina ne se souvenait pas de comment elle était revenue dans son lit, pourtant au petit matin quand Leth la réveilla elle s’y trouvait.

Les deux compagnes de route avaient pu passer bien un jour ou deux avant que le protecteur ne les fasse querir pour leur confier une mission. A cette occasion elle rencontra rapidement Gunlann, novice druide de la confrérie qui avait mis fin à la crise du Changelin dont Moënna lui avait tant parlé et sur laquelle elle avait largement donné son avis lors d’une réunion du Caercilcarn.

Le protecteur lui confiant une mission de diplomatie. Au départ la jeune femme se dit que la diplomatie n’était pas tellement son fort. Sa version était plutôt à coup de pieds dans la face. Enfin bon, s’il a confiance en elle pour cette affaire, il a ses raisons et jamais encore il ne s’était trompé sur son compte et ses capacités. Elle rassembla ses affaires et partit pour cette nouvelle aventure bien plus tôt qu’elle n’espérait. Elle aurait bien passé un mois entier à glander et refaire une vie simple à Thüldae.

Equipement fait, elle décida de prendre son envol elle-même, sans l’aide des aigles, pour rejoindre sa destination, missive en poche. Une bonne partie du trajet se fit sous forme d’aigle, ou de faucon. Parfois quelques formes de loup ou de cheval pour les zones dégagées. Elle pu lors de ce voyage découvrir les plaisirs de la vie animale. Le vent, l’adrénaline de la course, le bruit des sabots sur l’herbe encore humide du matin. La célérité des piqués des rapaces, l’euphorie de s’élancer face au vent et de découvrir le monde sous un autre œil. Elle ne passa que peu de temps sous forme humaine, si ce n’était pour se reposer ou prendre son temps dans les endroits où la nature méritait plus que d’habitude d’y prendre son temps.

Assez insouciante, elle était à une journée et demi de marche lorsqu’elle se fit dire par sa compagne qu’un individu non identifié la suivait depuis maintenant quelques jours sans jamais se rapprocher d’elle. Comme si elle était surveillée. Le message d’alerte fit son office et le retour rapide de la réponse fut sans appel. Elle ne devait pas prendre de risque, la missive dans sa poche était bien trop importante pour être perdue. Elle devait s’arrêter dans la prochaine ville, Cormaeryn, et y attendre les renforts en la personne de Gunlann. Cette naine polaire qu’elle avait rencontrée rapidement avant de partir à l’aventure.

Elle se trouvait maintenant à une demi-journée de marche de la ville, toujours suivie, mais au galop, cela serait une autre affaire. La pluie et le vent étant un peu handicapant pour voler, le cheval serait une forme tout à fait acceptable. De cette façon, elle pourrait rejoindre la ville avant le déjeuner avec un peu de chance et distancer les suiveurs pour préparer la suite au calme

Sans plus de réflexion sur la situation, elle prit la forme d’un mustang alezan au pieds et crinière noir. Cette race de cheval sauvage était d’une beauté incroyable et taillés pour la vitesse et l’endurance. Appréciant une nouvelle fois cette forme et les sensations nouvelles que les sens de l’animal lui procuraient, elle partit au grand galop, aussi vite que le vent pouvait la porter. Cette sensation grisante de vitesse au raz du sol par rapport a un oiseau lui fit presque perdre l’idée qu’elle était suivie. C’est arrivée à une centaine de mètres de la ville qu’elle reprit forme humaine. Il ne faudrait pas trop qu’elle se fasse remarquer en changeant de forme trop près des gardes.

L’entrée en ville fut tout à fait simple, sans même une question. A peine un bonjour de la part de la garde qui visiblement se la coulait douce. Elle repéra rapidement l’auberge, où elle demanda un repas chaud et une chambre pour se reposer et attendre Gunlann. Alors que l’humain du nom de Reynald lui préparait un repas, elle se dirigea vers sa chambre et y fit un brin de toilette. Avec ces histoires de changement de forme, elle devait sérieusement sentir. Elle redescendit dans la salle principale qui servait surement à tout sauf à dormir vue l’odeur générale qui mélangeais nourriture et boissons diverses. La ville était petite, moins d’une centaine de maisons, il serait facile de la repérer si jamais elle était véritablement suivie. Tout en dévorant son repas chaud et la bière brune de la région, elle pensait à une forme à adopter pour plus se fondre dans la masse. Il était temps de pousser le change forme a un autre niveau. Et pourquoi pas devenir un homme le temps d’une demi-journée ? Cette idée était séduisante, mais pour autant, elle n’était pas tout à fait à jour sur l’anatomie des hommes dans certains endroit personnels. Cette idée la fit sourire et elle l’écarta aussi vite qu’elle était apparue.

Elle sortit donc de l’auberge encapuchonnée pour cacher la phase de transformation, avec une forme plus classique. Elle avait changé de visage pour emprunter les traits de son amie d’enfance Lucia. Plus fine et surtout blonde aux cheveux longs, avec une bonne dizaine d’année en moins, tel que dans ses souvenirs, elle se pensait assez méconnaissable. Pour qui tenterais de la suivre. Leth tournoyait au-dessus de la ville, faisant des cercles larges pour ne pas éveiller les soupçons d’une quelconque relation entre elles. Cette dernière cherchait l’intru ou une âme amie pour se regrouper, mais Ina pensait bien que Gunlann n’arriverait pas avant le lendemain au moins.

Elle passa la fin de sa journée à flâner dans les rues, sans recevoir le moindre signal d’avertissement de sa compagne. Elle trouva même une boulangerie ou elle récupéra de quoi gouter et diner le soir. La boulangère était charmante, il faudrait qu’elle y repasse le lendemain pour lui reprendre ces petits pains chauds fourrés, si bon.

Peu avant que la magie de transformation ne cesse de faire effet, elle retourna à l’auberge pour prendre un verre ou deux et aller dans sa chambre. Elle n’avait vu aucune trace de suiveurs dans la ville. Etrange. Ina, en allant se coucher vérifia doublement la fermeture de sa chambre, plaça une chaise devant la porte et se mis au lit en petite tenue pour y lire à la lumière d’une chandelle la missive qu’Isorion lui avait confié. Quitte à ce que cette missive ne doive tomber en de mauvaises mains, autant qu’elle en connaisse le contenu pour pouvoir transmettre le message.

L'océan avait été une révélation pour l'aassimar. Lui qui était originaire des chaudes contrée de la Mulhorande, il n'avait jamais vu autant d'eau de toute sa vie.

Lorsqu'il acheva sa dernière mission au profit de la Compagnie des Marches, Elion d'Alusaire était empli de doute. Il avait rejoins cette guilde qui devait lui permettre de trouver plus facilement les foyers du Mal qui menaçaient des innocents. Loin de ce qu'il avait pensé, on l'avait affecté à la protection de dignitaires entre la Compagnie et l'Oeil. Une mission qui en soit entrait tout à fait dans ses cordes. Pour autant, il en gardait un souvenir douloureux. Le chef du détachement, Polby l'avait contraint et obligé à côtoyer un être maléfique sans pouvoir l'éradiquer de la surface de Toril. Le Malin avait finalement prit la fuite échappant par la même à l'exécution programmée qui planait sur la tête du demi-orque. Le paladin en avait ressenti un terrible sentiment d'échec et il ne pouvait s'empêcher de craindre pour les innocents qui allaient maintenant souffrir sous les coups de Micheleto. Son dieu ne lui en avait tenu rigueur, mais il s'agissait d'une tâche grasse sur ses états de service.

Le bras armé de Heaum avait exprimé le besoin de faire une retraite religieuse avant de repartir. Dans un premier temps, il avait demandé le logis à la Maison Vigilante de Sundabar. Connaissant ses faits d'arme pour la Compagnie des Marches, on lui avait fait un somptueux cadeau. Un magnifique harnois en mithral, spécialement conçu pour lui permettre de pouvoir le porter avec ses ailes. Elion d'Alusaire accepta le don de l'église et leur versa un don financier conséquent. Il passait son temps en prière dans sa petite cellule au confort des plus spartiate. Il donna également quelques cours dans le maniement des armes, mais il se contenta des débutants. Le paladin estimait que l'entraînement fourni par le temple était bien de trop léger pour être efficace. Il ne voulait pas que des prêtres s'estiment d'un certain niveau, alors qu'une fois sur le terrain, ils se rendraient vite compte que son entraînement l'avait par trop préservé de la douleur, de l'adrénaline, la peur, du stress qui conduisait invariablement à être obligé de ressentir et de questionner sa propre foi. Pour Elion, la plus grande force d'un combattant était la profondeur de sa foi. Lui n'était en vie que par la grâce de Heaum et sa vie appartenait au Vigilant. Pour le paladin, ce n'était pas une métaphore. Dans sa façon d'aborder les choses, il était déjà mort et ce n'était que par l'intervention divine qui avait mit Hector sur sa route qu'il avait survécu. Hector avait fait de lui son écuyer. Son mentor l'avait entraîné à la dure. Elion avait ressenti la faim, la soif, la fatigue, le froid, le chaud, le poids des coups, la morsure de l'acier pénétrant la chaire. Hector avait fait en sorte qu' Elion d'Alusaire devienne une arme froide, obéissante et infaillible. Elion d'Alusaire n'avait aucune relation, quelle fut amicale, familiale ou amoureuse. Ceux qui partageait sa vie, sa mule Dano et son cheval Athéar n'étaient que des outils... remplaçables. Un être totalement dévoué à la cause de son dieu. Mais Hector lui avait caché bien des choses. Des choses qui étaient maintenant autant de questions qui avaient besoin de réponses. Des réponses que l'Aasimar estima ne pas pouvoir trouver à Sundabar.

Sa retraite le ramena là où il avait été adoubé Chevalier des Yeux Vigilants. Cet ordre de chevalerie se dressait contre le Mal préférant le détruire plutôt que d'en réparer les dégâts. Là, il trouva à qui parler. Les entraînements ressemblaient déjà un peu plus à ce qu'il avait connu et il put se recueillir, prier et méditer. Les voies de Heaums n'étaient peut-être pas aussi tracées que ce que lui avait dépeint Hector. Son mentor avait bien travaillé. Elion était devenu ce que l'on pouvait appeler un extrémiste. Il avait une vision manichéenne du monde. Et une conception plutôt simpliste. Il y avait le Bien ou le Mal. Au milieu, il y avait un gris tirant plus du côté sombre ou du côté clair. Ce qui revenait à dire que soit on était blanc, soit on était sombre. Dans l'ordre des choses et dans son esprit, les dogmes de son dieu se trouvaient tout en haut d'une pyramide hiérarchique, ensuite venait les lois des hommes, puis les ordres du commandement. On tenta de lui expliquer que les dogmes de Heaum devaient s'inscrire dans les lois des hommes. Ce qu'un paladin pouvait se permettre à un endroit n'était pas forcément vrai ailleurs. L'objectif restait le même, mais le chemin à suivre pour y arriver pouvait changer. C'était en quelque sorte, une révélation pour lui. Et cela entrait directement en conflit avec ce qu'on lui avait apprit jusqu'ici. Il avait besoin maintenant de se retrouver face à lui-même pour faire le point.

Monté sur Athéar et suivit par sa mule Dano, Elion d'Alusaire prit la direction de l'ouest. Il irait tout droit jusqu'à l'océan. Et il y arriva par une belle journée ensoleillée. Sur le haut d'une petite falaise surplombant la mer, les yeux vitreux du paladin embrassait l'émerveillement qui le secouait. Le soleil brillait haut dans le ciel et se reflétait dans cette immensité. A perte de vue, il n'y avait que de l'eau. Le spectacle était de toute beauté et il ne résista pas à l'envie d'aller voir de plus près et de plus haut.
Prenant son envol, il profita des courants d'air marin pour se laisser glisser parmi les oiseaux marins. Il avait beau prendre de l'altitude, il n'en voyait pas le bout. Il y avait ça et là de petits îlots de terre et quelques navires si petits. Mais aussi loin que pouvait porter son regard, il n'y avait que de l'eau. Piquant vers les flots, il redressa juste avant de toucher la surface. Volant à quelques pouces des petites vaguelettes l'aasimar prit avec plaisir de petits embruns salés sur son visage. Quelle sensation de liberté, il avait à chacun de ses vols. Une sensation accrue par cette immensité liquide sans limite. Revenant sur la terre ferme, il repéra une une ville portuaire un peu plus au Nord. Elion venait de trouver sa prochaine destination.

Après une courte nuit à Gué de la Dague, il remonta encore vers le Nord. Ce jour là serait moins agréable que celles qui la précédait. Un ciel chargé laissait se déverser une bruine pénétrante. Elion d'Alusaire se servit de ses ailes comme d'une cape en s'enroulant dedans autant que possible. La pluie n'était pas forcément agréable, mais si on passait ce désagrément, il avait comme quelque chose d'apaisant. Tout était plus calme, il y avait moins d'aller et venue sur les routes et la nature elle-même semblait profiter de ce calme.

A la mi-journée, il arriva par la porte sud en vue d'un petit village. Il ne connu aucune difficulté pour y entrer puisqu'on ne lui demanda rien, il semblait d'ailleurs ne pas avoir de garde dédié pour le filtrage de l'entrée en ville. Une bâtisse un peu plus grande portait au bout d'une potence de façade un panneau indiquant qu'il s'agissait là de l'auberge.
Compte tenu du temps qu'il faisait, le paladin estima que faire une halte et laisser son cheval et sa mule se reposer au chaud et à l'abri. Il chercha les écuries et paya pour deux boxes. Comme à son habitude, le paladin s'occupa lui-même de ses montures. Il avait appris à ces dernières à ne se laisser toucher que sur ordre. Un tour qui fort heureusement n'avait pas toujours fonctionné, mais c'était une autre histoire. Une fois séchées, une couverture sur le corps, nourries et abreuvées, le paladin les laissa avec l'ordre de protéger leur harnachement et l'équipement qui y était lié. Jetant un dernier coup d’œil derrière lui, il rejoignit l'entrée de l'auberge.

Poussant la porte, l'Aasimar commença par ébrouer un peu les plumes blanches de ses longues ailes qui arrivaient presque au sol pour éviter de tout mouiller plus que nécessaire. Il tapa ses bottes renforcées de plaque de mithral pour les décrotter et entra non sans pencher un peu la tête pour ne pas se prendre l'encadrement de la porte, ni accrocher la garde du lourd cimeterre à deux mains qui trônait dans son dos. Il marqua une courte pause pour repousser sa capuche pour exhiber une chevelure argenté coupée courte et balayer en arrière. Il prit connaissance de son nouvel environnement en balayant la salle de son regard topaze sans pupille ce qui lui donnait l'air d'être sans vie. La peau pâle de son visage taillé à la serpe portait une longue balafre verticale qui partait du haut de son front jusqu'au menton. Un air sévère, le visage fermé, le paladin portait un harnois magnifique entièrement en mithral frappé au centre du plastron du symbole de Heaum. Il s'avança vers le comptoirs et attendit que l'aubergiste vienne à lui.

- Heureuse rencontre. Que le Vigilant vous ait en sa sainte garde. Je souhaiterai vous prendre une chambre et avec ça, un verre de lait chaud et je vous offre un verre de ce que vous voulez. Alors dites-moi, quelles sont les nouvelles de Cormaeryn ces derniers temps et qu'avons-nous au menu ?

Cela faisait longtemps qu'il n'avait plus besoin de manger. Pour autant, avaller quelque chose de chaud ne serait de refus. Elion d'Alusaire s'installa au comptoir de façon à voir le reste de la salle. Son étrange regard balaya à nouveau la salle. Sans marquer d'arrêt sur l'une ou l'autre des personnes présente, il prit ses marques.
Il y avait là, visiblement quelques gens du cru. Dans un coin de salle, cherchant la discrétion, il y avait un homme de petite stature, du moins s'il le comparait à lui-même. Prit dans la lecture d'un petit livre, il caressait nonchalamment un chat posé sur ses genoux. Si Elion avait eu une place à prendre dans cette salle, il aurait probablement opté pour celle-ci. Face à l'entrée, et à l'écart, le poste d'observation était parfait. Un peu plus loin, deux forestiers discutaient en partageant un repas. Il y avait là une humaine de belle stature, sa tenue ne laissait planer aucun doute sur le fait qu'elle devait parcourir les grands espaces plus souvent qu'à son tour. A ses côtés, se tenait une naine au teint presque aussi blafard que le sien. Une petite loutre semblait à son aise, bien au chaud dans les girons de sa maîtresse. En somme, rien de bien inquiétant.

Reportant son attention sur les dires de l'aubergiste, le paladin écouta avec attention les ragots, rumeurs et inquiétudes du secteur. On ne pouvait pas dire qu'Elion d'Alusaire était un grand parleur. On pourrait même souvent penser qu'on puisse avoir plus de disccussion agréable avec la porte d'une cellule de cul-de-basse-fausse qu'avec lui. Mais lorsque l'on voyageait en solitaire, il fallait aller à la pêche au renseignements auprès des locaux. Le paladin avait remarqué que les renseignements ne venaient que très rarement directement jusqu'à lui. Qui savait, peut-être qu'il pourrait se révéler utile, bien que le coin semblait particulièrement calme et serein.

Tout bardé d’acier qu’il était, Alrion marchait. Un pas devant l’autre, simple, efficace, une méthode qui avait fait ses preuves depuis des millénaires. La tête relevé, il observait les alentours, pas spécialement aux aguets, mais les habitudes avaient la vie dure, et on ne savait pas quand il pouvait de nouveau se retrouver face à Tania. La reconnaîtrait-il s’il la trouvait aujourd’hui ? Ce n’était pas une pensée agréable, mais cela faisait longtemps, elle pouvait avoir changé, surtout si de la magie était impliquée, mais les marches solitaires étaient de très bons moments pour les interrogations sans réponse, et pouvait donner une profonde tendance à la dépression. Il fallait malgré tout continuer à avancer, c’était la seule solution.
Même avec les yeux levés, c’est plus par un réflexe inconscient que de par sa volonté propre qu’il s’arrêta alors que passait un petit animal sauvage devant lui, le sortant de ses pensées pour un temps. Levant les yeux, il regarda les rares voyageurs aussi présents dans les environs, profita de l’instant pour faire une courte pause, bu un coup, s’étira les deux bras et reprit la route.
Il lui fallut encore un moment pour atteindre le village, traînant un peu, arrivant à l’apogée du jour. Un village comme il n’en avait pas croisé depuis un moment, c’était peut-être l’occasion de s’arrêter un peu plus longtemps, histoire de refaire le plein, à la fois de vivres et d’énergie, cela faisait longtemps qu’il était sur la route, ou de toute autre chose utile pour la suite de son voyage. Après tout, il n’avait pas de rendez-vous, il fallait juste rentrer à la tour, après encore un voyage décevant du point de vue personnel, mais une mission simple de plus accomplie, c’était toujours une bonne chose. Aussi, à une condition très précise, resterait-il au village pour le reste de la journée pour repartir le lendemain, car le village avait l’air correct. Cette condition, c’était la nourriture de l’auberge, aussi le colosse en poussa les portes, dont l’agréable odeur parlait en sa faveur pour le moment.
Ce faisant, il eut deux grandes surprises en voyant les clients de l’établissement. En effet, on croisait rarement des drows dans les environs, et ceux-ci étaient encore plus rarement assis à une table pour le repas, ils étaient plus du genre à chercher à se servir de vos entrailles pour en faire le repas en question. Une belle preuve d’ouverture d’esprit de la part du tenancier, ou de ses difficultés financières. L’autre surprise n’était, heureusement, pas une personne à surveiller de près, contrairement au drow, puisqu’il arborait fièrement un symbole du Gardien sur son armure hors de prix. Rares étaient ceux à l’arborer aussi ostensiblement, lui-même ne le portait que sur ses gantelets, il fallait dire qu’à une certaine époque, il n’avait pas les moyens pour plus, la réputation du Gardien n’étant pas la meilleure depuis les Troubles en Faerûn, même si lui n’était personnellement pas du même avis. Qui plus était, le porteur de ce plastron n’était pas de ce monde, apportant plus encore d’étrangeté à sa tenue, mais personne n’aurait osé porter cette dernière s’il l’avait volé.
Avec des gens aussi différents à l’intérieur, l’auberge avait un petit air de surnaturel, mais ce n’était pas ce qui était le plus important ici, saluant le propriétaire, Alrion commanda d’une voix forte :

- Bien le bonjour Aubergiste ! Je vais vous prendre une portion de votre plat qui cuit sur le feu et du vin pour aller avec. Ajoutez du pain et du fromage, cela ne fera pas de mal. Et si vous avez une spécialité à faire goûter, apportez m’en donc.

Vingt-Quatrième jour du Mois de la Ponte, année des Dragons Renégats.
24 Mirtul 1373 (CV)
Lieu : Cormaeryn (Nord de Fort-Dague)
Moment : milieu de journée
Météo et températures : 15°C, bruine, légère brise

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Alrion:
Elion d'Alusaire:
Gunlan:
Ina:
Xarss:
Perception et social -> voir ci-dessous

e fut autour de l’heure du déjeuner que le hasard ou peut-être le destin, permit aux quatre aventuriers de se trouver dans l’auberge de Reynald. Et pourtant en y regardant de plus près, cela pouvait être aussi les forces occultes de cet univers qui les rapprochaient ainsi.

Deux d’entre eux arrivèrent la veille et avaient un point commun : être le plus discret possible. Mais les raisons différaient car si la Ly'Aegisir le faisait pour fuir un danger, le natif de l’Outreterre jouait avec les ombres pour épier les villageois, afin de récolter des informations susceptibles de faire avancer son enquête. Mais ce dernier n’eut pas de résultat probant, les habitants pourtant issus d’origines différentes, voyaient d’un mauvais œil l’être à la peau ébène et se freinaient dans les paroles qu’ils purent prononcer devant lui. Malgré cela, il perçut quelques brides sur des jeunes femmes disparues.

Ina avait elle aussi visité Cormaeryn et en connaissait maintenant toutes les ruelles et impasses. Au moins elle pourrait en cas de mauvaises rencontres, fuir plus aisément. La nuit se passa calmement et la Damarienne connaissait le contenu de la missive. Des mots pouvant peut-être expliqués la présence des ombres qui la suivaient. Elle descendit dans la grande salle, elle perçut un elfe noir sirotant de l’hydromel, une boule de poils sur ses genoux. Ina prit possession d’une table et s’asseyait de façon à avoir une vue sur l’entrée de l’établissement.

Ses courtes jambes martelaient le sol et quelques gouttes de sueur perlaient sur son front quand l’adoratrice d’Ulutiu aperçu le village. Elle demanda à la première personne rencontrée la direction de l’auberge car la faim la tiraillait fortement. A ses pieds, sa loutre semblait elle aussi avoir un creux à l’estomac. Les deux marcheuses continuèrent donc suivant les indications données et eurent rapidement la taverne devant elles. A quelques pas de la porte, la naine vit un être ailé entrer. Elles le suivirent. Gunlann resta un peu dans l’ouverture afin de s’habituer à la pénombre des lieux mais une fois sa vision complètement rétablie, elle aperçut très vite celle qui était à l’origine de cette course. Au même moment, Ina dont la vue fut bouchée quelques instants par la carrure imposante de l’Aasimar croisa le regard de la novice qu’elle invita d’un signe de main à la rejoindre à sa table.

Dans la salle, trois villageois attablés se détournèrent quand l’être à la chevelure couleur argent et aux ailes blanches se dirigea vers le comptoir. Après la présence d’un elfe noir, celle d’un être céleste délieraient les langues et les cancans iraient bon train dans les prochaines heures. Non loin d’eux, Reynald accueilli le visiteur comme il se doit. Après lui avoir renvoyé son salut, il l’invita à prendre place à une table libre tout en répondant à ses dernières questions.

-Aujourd’hui, nous avons du poulet avec pommes de terre ou si vous préférez un ragoût de mouton précédé d’une soupe de légumes. Je vous conseille un pichet de vin du pays pour accompagner, il est, cette année, acceptable.

L’homme marqua une pause avant de reprendre, un peu sur la réserve.

-Quant aux nouvelles, rien qui ne vaille de longs discours.

Avant que l’étranger ne pousse son interrogatoire un peu plus loin, un colosse blond fit son apparition. Reynald se précipita à sa rencontre, soulagé de mettre fin à des questions-réponses dont il n’était pas très friand. Les demandes du nouveau venu lui convenaient un peu plus, portant principalement sur la nourriture.

-Bonjour. Et bien ce sera du ragoût de mouton et le vin cette année ne pique pas. Installez-vous donc à une table, je vous apporte cela très rapidement.

La journée s’annonçait pas trop mal pour Reynald, quatre clients de passage, voilà de quoi mettre un peu de beurre dans les épinards. Cela changeait des quelques habitués, venant principalement siroter un peu de vin et surtout colporter des commérages du village.

La journée allait bien, la lecture était intéressante, la chaleur du feu convenable l’ambiance était saine, l’hydromel succulent, Vorn en profitait tout autant que son esclave et les gens commençaient à entrer dans l’auberge. Certaines personnes sortaient du lot; il y avait eu cette sylvestre qui était entrée, prit une chambre puis était ressortie toute propre, pour ensuite revenir dans l’auberge. Il y eut dernièrement ce colosse… Céleste. Là, le faussement appelé Kryssyyor dû lâcher sa lecture et siroter son hydromel pour mieux l’observer.

Dans sa dernière quête, de plusieurs personnages rencontrés, Xarss avait appris beaucoup de choses sur les autres et aussi, beaucoup plus sur lui-même. De Lor’Kar il apprit qu’il fallait avoir un œil avisé pour les alliés, là c’était indéniable, cet Aasimar serviteur de Heaum en était un sans aucun doute, de Beïran il apprit qu’il ne fallait pas sombrer dans la vengeance, de Lorik qu’une amitié pouvait vous apporter à la mort, digne , mais funeste, de Borig qu’il fallait ne pas avoir honte de sa race ainsi que de ses racines même si vous ne les respecter plus, puis qu’il faut garder confiance à vos choix, d’Ashura qu’il ne valait rien de trop vouloir être gentil, de la frêle blême de toujours se méfier et de Khelrod, le paladin qui lui avait sauvé la vie, mais surtout qui avait eu confiance en lui pour la première fois de son existence.

En voyant cet être ailé, l’ex-sombre comprit qu’il ne fallait pas perdre de temps. Il attendit que son regard croise le sien, même si Xarss avait son capuchon par-dessus sa tête la peau de ses mains pouvait trahir sa race, il l’invitait quand même à prendre place à sa table. Le fils délaissé par la matrone Merenwen Symryvvin avait comprit que sur son nouveau sentier et venant de Kespesk qu’il valait mieux oser que de rester dans l’ombre, il eut un sourire à cette pensée, déposant son livre pages ouvertes et face à la table, il s’adossait confortablement attendant que l’Aasimar prenne place à sa table, si bien sur il daignerait approcher d’un drow.

La porte s’ouvrit laissant voir une naine dont Xarss n’avait jamais vu aussi pâle et suante et sur le coup se demandait si elle ne venait pas de l’Outreterre. *Une Duergar?* Pensait-il hâtivement, mais elle avait un quelque chose de surfacin, cette dernière allait rejoindre la sylvestre à la table non loin de lui, ses oreilles sensibles s’ajustèrent en conséquence.

Du coup, la porte s’ouvrit encore et un autre colosse entrait, semblait-il, non chaland, à voir son armure, sa démarche, son attitude qui semblait être sur de lui, tout donnait à croire à l’ex traitre qu’il venait de trouver un autre allié. *Mais qui voudrait bien d’un drow avec eux? * Se dit-il avec amusement et surtout avec son sens aigue de la curiosité. Vorn décidait de se dégourdir les pattes et allait précipitamment vers le vestibule d’entrée, il semblerait qu’un petit rongeur c’était fait invité par le dernier entré et qu’il finirait bien digéré le lendemain par le félidé tigré de gris et noir.

Il ne restait maintenant plus qu’à s’offrir un autre verre d’hydromel, ce que le noble fugitif fit avec délicatesse, comme si c’était son dernier verre. Il fit balancer le liquide en rond dans son verre, humait les yeux fermés le nectar puis prit une petite gorgé, le laissait s’exprimer en bouche puis l’avalait en expirant doucement par le nez les effluves magnifiques. Décidément c’était l’un des pires qu’il avait bu jusqu’à ce jour, ce serait du cidre qu’il aurait comprit. Il appréciait quand même le breuvage se disant que celle qui avait acheté à Lunargent serait sans doute meilleur, surtout le Sec Arabelan de la cuvée spéciale de 1336, tirée pour le couronnement d'Azoun IV qu’Irène avait bien voulut lui vendre, les quatre bouteilles, soigneusement emballé dans son havresac attendaient un moment spécial ou pas pour être ouvertes. Le délaissé n’avait pas voulut en ouvrir une ici, cela n’aurait pas été respectable pour l’aubergiste, donc il était à boire ce que Reynald appelait de l’hydromel.


“Celui qui assiste en spectateur voit clair, celui qui prend parti se laisse égarer.” Phrase qu’il avait retenue de l’un de ses passages auprès de son oncle Pharum et qui lui avait été répété par son paternel lors d’une sortie entre mâle. La leçon qu’il avait retenue des deux avait été simple : Tu as deux yeux, deux oreilles et une bouche, alors regarde, écoute et ferme ton clapet. Ce serait ce qu’il tenterait de faire en cette fin de journée qui s’annonçait peut être bénéfique pour son enquête.

La chaleur de l'auberge fut une caresse agréable pour le paladin qui avait passé toute la matinée sous la pluie. L'ambiance était calme, on aurait même pu dire feutrée. Reportant son regard vide sur la petite salle, il balaya une nouvelle fois les personnes présentes. Il fut immanquablement attiré par l'individu qui avait gardé sa capuche sur la tête, même à l'intérieur de l'auberge. Il y eut un détail qui marqua l'aasimar. La main, cette main fine noire ébène, il n'y avait trente six races qui affichait une telle couleur de peau. Elion d'Alusaire n'allait pas se défiler devant une telle provocation. Les drows avaient une réputation suffisamment sinistre et connu à Sundabar pour que le dévot de la Sentinelle sache à quoi s'en tenir. Pour autant, il était suffisamment concerner pour savoir que l'on ne pouvait pas se fier à la race pour définir la valeur d'un être. Son âme seule comptait. En outre, il ne connaissait pas les lois en cours dans ce village. Il avait déjà faillit être sacrifié par la loi des hommes, et il n'avait pas réellement envie de réitérer l'expérience. D'autant que les chevaliers de son ordre avait bien tenté de lui apprendre à faire preuve de moins manichéisme. C'était l'heure de vérifier ça. Si ce qu'il s'apprêtait à faire une âme aussi sombre que sa peau, il faudrait faire un effort incommensurable pour ne l'occire sur le champs.

Il inclina simplement la tête en direction de l'inconnu. Elion d'Alusaire avait été formaté pour ne montrer aucune émotion. Ce qui se passait derrière ses yeux topaze ne s'affichait qu'extrêmement rarement à l'extérieur. Il resta donc impassible, son visage toujours aussi fermé qu'à son habitude. Il ferma les yeux et posa l'index et le majeur de sa main gauche sur son front, se concentra et rouvrit les yeux devenus légèrement plus lumineux. L'inconnu passait sous le regard de Heaum. Ce fut une surprise, car l'âme du drow n'était pas rongée par la noirceur. Certes elle était loin d'être immaculée, mais il était évident qu'il était une exception parmi les siens. Le cimeterre lourd resterait dans son dos. A moins, à moins que le perfide ne tente de cacher sa véritable nature par la magie. Refermant un instant ses yeux, il se concentra sur la magie et n'allait pas gâcher cette usage d'un de ses pouvoirs uniquement sur le drow, même s'il ferait l'objet d'une analyse plus poussée pour définir quelle magie était possiblement à l’œuvre. Mais à priori, il n'y avait rien de particulier, un aura sur un anneau à sa main, qui ressemblait très exactement à celui que lui-même portait. Il avait une arme magique et quelques autres objets, mais rien qui ne soit susceptible de cacher sa nature. Par la même occasion, il avait pu voir que la forestière et la naine non loin de lui n'étaient pas non plus de vulgaires voyageurs.

¤ Par la Vigilant, intéressant, très intéressant. ¤

Reynald finit par se présenter et passa directement au menu du jour, ce qui mit un terme à l'exploration menée par le paladin. Tout comme le drow, le menu ne l'intéressait que très peu. Pour le reste, il resterait sur sa faim et pouvait se préparer à un court et tranquille séjour. Visiblement, il n'y avait aucun problème de taille à secouer les environs. Tout du moins, si l'on croyait sur parole l'aubergiste. Le chevalier des Yeux Vigilants regarda le chat sur les genoux de l'inconnu qui lui avait signe et se décida pour sa commande. Cela serait du poulet pour le chat, un pichet de vin recommandé par Reynald pour l'étrange inconnu et de l'eau pour lui. Cela ferait marcher le commerce local. Il passa sa commande et demanda qu'on lui apporte là où il serait assis. L'entretien s'acheva rapidement avec l'entrée d'un humain qui le dépassait d'une bonne tête. C'était assez rare pour être marquant et il avait un physique aussi impressionnant que le sien. Évidement, Elion détailla l'homme en armure de la tête au pieds. La vigilance commençait par être en mesure d'évaluer la situation. Une nouvelle pièce de taille venait d'entrer sur l'échiquier, il fallait tenter d'en ressortir ses forces et ses faiblesses. Un examen qui s'arrêta rapidement, lorsqu'il vit le symbole de Heaum sur le haut des gantelets. De fait, il fut partagé entre répondre à l'invitation qu'on lui avait lancé et échanger avec le colosse blond. On ne croisait pas tous les jours des personnes partageant sa foi au point de la porter ostensiblement, même si dans le cas de cet humain cela restait très discret.

Elion d'Alusaire se leva et se dirigea vers la table au fond de la pièce. En passant à la hauteur d'Alrion, il posa son regard mort sur l'humain. Son visage resta fermé tel une porte de prison. Il se signa et salua de la tête. Il n'ajouta, sur un ton neutre, qu'un simple :

- Que la bénédiction du Vigilant soit sur vous. Joignez-vous à nous si le cœur vous en dit.

Sans plus de cérémonie, l'aasimar poursuivit jusqu'à la table de Xarss. En passant, il salua d'un signe de tête les trois hommes du cru. Puis, ce fut le tour des deux étrangères.

- Mes dames ! Heaum vous garde.

Enfin, il se présenta à la table du mystérieux drow. Aussi près de lui, il n'y avait plus aucun doute. Il s'agissait bien d'un elfe noir. Il n'en montrait rien, mais l'aasimar restait attentif à tout geste suspect. La perfidie des elfes noirs n'avaient, paraissait-il, aucune limite. Mais il avait le bénéfice du doute. De la même façon qu'il avait salué Alrion, Ina et Gunlann, l'aasimar resta de marbre et sa voix monocorde fut neutre.

- Heureuse rencontre, Sir Elion d'Alusaire chevalier des Yeux Vigilants. Que me vaut l'honneur ?

Restant hors de portée d'un coup de pied, il croisa les mains devant lui à la hauteur de sa ceinture. Elles restaient ainsi visibles, mais disponibles.

Elion d'Alusaire utilise une détection de la magie reste 2. Il se concentre : 1er round sur la pièce dans son ensemble, puis 3 rounds sur Xarss.

Heureux que son invitation ne soit pas tombée dans l’ignorance, Xarss disposait son corps sur la chaise de façon plus confortable et parée à toute éventualité. Même si celui qu’il avait invité était un céleste, il n’ignorait pas que son apparence personnelle pouvait apporter quelque mésentente, un drow restait un drow. Donc il laissait ses mains bien en apparence hors de son piwafwi et de chaque côté de son livre où l’on pouvait y lire, ‘’ Petit traité, des grandes vertus’’ puis sourit à ce Élion d'Alusaire Chevalier des Yeux Vigilants avant de prendre la parole en toute franchise. L’ex-sombre avait appris à ne plus cacher la vérité, il avait encore, à certaine occasion, quelque difficulté à omettre de la dire, mais son entrainement allait bon train. Il ne fallait pas non plus qu’il se fasse berner et fit une détection du bien, sur l’imposant céleste ainsi que sur l’ensemble des présents de la salle.

-Bien à vous Élion d’Alusaire, appelez-moi Kryssyyor Daurgothoth ou simplement Kryss, prenez place brave serviteur de Heaum. N’ayez crainte, je suis très loin de mes homologues et peut être plus rarissime que vos semblables célestes d’où l’emprunt de mon nom et vous auriez vite fait de m’extraire de cette vie Torilienne si l’envie vous y prenait, alors je puis vous assurez que je ne tenterai rien d’infâme, comme je vous ai dit, je ne suis pas un personnage squalide. D’ailleurs je n’ai plus honte de mes ascendants, mais en rien je ne supporte leurs idéologies fangeuses accompagnées de tous les synonymes qui s’y rattachent. –

Il laissait un temps pour que le colosse céleste puisse prendre place ou pas puis il continuait.

-En vous voyant, j’ai été intrigué, bien sûr par les majestueuses ailes, mais surtout par votre possible aide que vous pourriez apporter à une cause juste. –– Il prit une gorgée presque délectable et continuait sans vouloir que ce soit une discussion secrète. Il n’avait pas eu amplement de résultats en renseignement dans sa journée et avait décidé d’améliorer ses chances par lui-même. Il prit par contre pour la suite un comportement tout attentionné sur le discours, mélangeant, théâtre, voix intrigante, intonations calculées pour apporter plus d’attentions des autres et sur son discours.

-Mes supérieurs surfacins, m’ont demandé d’éclaircir une sordide histoire d’attaque de vilaines créatures sur certain de nos… explorateurs et semblerait-il sur des gentes dames aussi. Les attaques prirent naissance en ce petit bourg de Cormaeryn allant vers le Nord, il y aurait de cela une quinzaine. De plus ils m’ont demandé de les repérer, de les étudier et si cela était possible, de les éliminer. –

Il avait baissé la voix vers la fin puis dramatiquement il c’était levé de sa chaise acrobatiquement pour se retrouver debout derrière elle, les bras bien ouverts faisant quelque pas de danses et déclarait riant à toute dent…

-Me voyez-vous comme eux me voix? J’ai à peine le gabarit de mon illustre chat Vorn. J’ai donc besoin d’aide assurément, et cette mission, je ne puis l’accomplir seul. Ce qui est malheureux dans toute cette affaire, c’est que je n’ai point l’or pour engager de l’aide, tout comme mon humble personne, il me faut des gens désintéressés, pour le bien de cette cause. –

Il reprit place sur sa chaise en se signant, souriant et détendu présentant sa bouteille d’hydromel paré à en servir un verre à qui le voudrait bien.



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