La Folie du Géant

Son ignorance du mécanisme se mêlait à sa perplexité quant à la raison d'être de cette chambre froide. Finalement, sa seule inspiration fût d'ordre culinaire, lorsqu'il se dit qu'une salade de légume du soleil serait un véritable luxe, en cette période, tout autant qu'en ces lieux...

¤ Ça sent sacrément l'embrouille ce truc... mais bon, pour c'que ce peut bien m'faire... ¤

Le froid était des plus désagréable, et, mis à part quelques légumes, rien de suspect ne lui avait sauté aux yeux. Il n'eut dont aucun remord à écourter sa visite et à s'engager dans l'étroit escalier au moment même où on l'interpellait.


¤ Tranquille mon gars, on a le temps ! J'compte pas me casser le cou pour quelques sac de choux ¤

Toutes traces de transpiration était un lointain souvenir... Pour tout dire, celles ci ayant été remplacées par une fine couche de givre, pas évident de s'imaginer Arakh en plein labeur quelques minutes plus tôt.Revenu parmis ses paires éphémères, il les dévisagea rapidement, et marmonna dans sa barbe à leur attention

- " Qu'est ce qui vous arrive ? Un truc à dire ?!" Le rôdeur patienta une seconde, puis s'ébroua " En tout cas moi, j'ai un putain de truc à vous dire ! On se gèle les miches la haut ! "

Ses pas le mèneraient jusqu'à l'embrasure de la porte, où il prendrait un congé dénué de formalité et à grandes foulées il rejoindrait l'auberge, là où un bon grog bien chargé en liqueur l'attendait !

Virgile comprenait parfaitement les craintes du bourgmestre, et sa volonté de se tenir loin d'affaires qui risquaient d'amener le désordre dans sa ville. Mais il ne les partageait pas.

- Faites attention à vos propos, cher Bourgmestre. A vous entendre, nous sauverions des innocents à aller nous faire tuer ailleurs. Je ne peux en convenir que si on considère que nous même ne le somme pas, Innocents.
Cependant je comprends qu'a choisir, vous préfériez sauver les innocents sous votre juridiction que des inconnus. Mais attention, la culpabilité d'un innocent se mesure, au fil du temps, à la paix qu'il a engendré. Et fermer les yeux pendant une guerre n'a jamais amené la paix.

Je vous donne simplement mon avis, car je ne sais pas encore si les survivants décideront de partir ou rester, mais par précaution je mobiliserai une milice ce soir pour protéger les abords de l'auberge. Après tout, nos ennemis risquent de présumer que nous y sommes..

Après avoir pris congé d'un signe de la tête, le moine sorti du bâtiment communal, et parti à la recherche de Sabetha. Affronter l'adversité ne le dérangeait pas, mais Virgile aimait savoir de quoi il en retournait. Et la magicienne semblait enquêter sur leur mésaventure.

La magicienne sourit, les oghmites étaient des ecclésiastiques plus agréables que nombreux de leurs pairs. Elle suivit le vieil homme en gardant le ton bas.

- Et bien, ceux ci étaient probablement trop littéraux. Porteurs de Mort, pas Donneurs de Mort. Certain la garderont à jamais avec eux désormais.

Je pense en effet qu'Orlack à trop joué, et il m'a semblé bien certain d'échappé à ce qui va suivre. Je suppose qu'il a offert son arrière salle au astorien en espérant se faire une belle marge, mais il n'avait pas prévu ça.

Elle hocha la tête, montrant clairement son avis sur le manque de prudence évident du patron.

- Je ne connais pas très bien la pègre, hélas, mais je sais de source sûre que les rivalités entre les différents groupes, fussent elles bien ancrée, vont rarement à l'encontre de leurs intérêts. Les économies parallèles fonctionnent tout autant en toile que les officielles, si les Masques font aussi clairement preuve d'hostilité sur une autre guilde influente, je vais me permettre de supposer qu'ils ont beaucoup à gagner. Et vu la situation, il est possible qu'ils tablent sur les perturbations que provoquent et vont continuer de provoquer les dragons fous. Ces quasi-vampires et ceux qui les créent pourraient bien avoir des plans macabres. Récupérer un dragon agonisant pour en faire une dracoliche, qui sait ? Je suis peut-être pris d'un biais qui me conduit à associer ce que je vois à ma propre quête cela dit.

Mais avant cela, quelque soit leur plan, il leur faut de la discrétion, il n'y a aucun doute sur le fait qu'ils vont essayer de se débarrasser des témoins gênants... Enfin, vous connaissez les magiciens, nous avons tous tendance - peut-être à tort - que gagner la bataille des savoirs permet de remporter n'importe quelle guerre.

Elle ouvrit le premier ouvrage que lui tendait le prêtre et commença à lire.

e bourgmestre regarda Virgile, qui venait de terminer sa tirade. Il soupira.

- Certes, je comprends votre point de vue. Reste que des innocents qui ont réussi à se défaire des Masques tout en restant en vie, le sont probablement moins que les hommes qui chargent leurs oignons dans l’entrepôt... sans même comparer leurs capacités à passer la nuit si d'aventure les Masques débarquaient ici ce soir.

Il s’arrêta, tourna la tête vers l'une des nombreuses lucarnes, le regard dans le vague.

- Quelle genre de protection puis-je vraiment offrir ? La plupart des gardes du village ont vu trop de printemps, ou trop peu, et les autres fuiraient à la seule évocation d'une milice d'assassin des Masques venus venger leurs frères. Et ils auraient probablement raison. Sonner l'alarme et regrouper les habitants dans la caserne aurait des chances de finir en charnier. Réquisitionner les gardes cette nuit sous un faux prétexte de bandits ou de bêtes sauvages serait bien inutile - "connais ton ennemi" est l'adage des tacticiens et ce n'est ni bandits, ni bêtes sauvages qu'ils verront s'ils gardent l'oeil un peu trop bien ouvert -.

- Tout autant que la nouvelle est désastreuse, aussi bien pour Orlack que pour le passage à l'auberge du village, ce n'est pas après Reddansyr que les Masques en avaient. Doubler la garde devant l'auberge serait une invitation à aller y faire un tour pour les Masques, s'ils devaient venir ce soir. Je mettrai quelques gardes dans la confidence, ils viendront chez toi à la nuit tombée pour alléger vos tours de garde, mais c'est le maximum que je puisse raisonnablement faire.

- Orlack, des que les choses se seront tassées, ...

Ils n'entendirent pas la suite, laissant le prêtre de Kelemvor et Orlack à leur discussion.


Arakh n'avait pas traîné dans les pattes du fermier, qui rouspétait encore sur ces feignasses de fillettes portant l’épée et battant la campagne à la recherche de gobelins anorexiques à découper pendant que d'honorables gens se tuaient le dos aux champs, et tomba sur Virgile et Lorindol qui sortaient de leur entrevue avec le bourgmestre, l'air un peu trop décidé de prendre le large.

S'il gardait sa trajectoire vers l'auberge, il y trouverait un endroit simple mais agréable, très fréquentée en cette fin de journée où la plupart des habitants terminaient leur journée. Une ambiance chaleureuse, un barde à la flûte sur l'estrade centrale qui de toute évidence abusait de sa musique pour remplir sa bourse, et les quatre nouveaux compagnons de mésaventure - trois clients et le dernier membre de la réunion - attablés ensemble à s'humecter le palais.


Des années de lecture avait donné cette capacité à Sabetha d'avaler des archives en un clin d’œil, lisant en diagonale, se focalisant sur certains mot-clef pour accélérer encore plus la cadence. Elle apprit tout de Alias et Chair-à-Dragon, qui en 1368 CV débarrassèrent Port-Ponant de son nouveau roi auto-proclamé. Ce miracle eut cependant une conséquence contre-productive en cela que la guilde trouva moins d'un an plus tard un nouveau successeur, qui après une purge dans ses rangs, la fit fructifier comme jamais, grâce à une discrétion et perversion accrue.

Le second ouvrage abordait le destin du tristement légendaire Manshoon fondateur du Zhentarim, évincé par Fzoul Chembril et Orgauth, et de l’éveil consécutif de clones, au moment où les masques de Port-Ponant vivaient de gros chamboulement.

De là à relier les deux événement, il n'y avait qu'un pas.

Elle fut tirée de sa lecture par le même prêtre d'Oghma qui entre temps avait disparu pour reparaître, suivit de visages qu'elle connaissait bien.

Du point de vue de Virgile, l'entretient avec le bourgmestre s'était déroulé sans surprise. L'instinct de survie – qui faisait régulièrement ses preuves par ailleurs – ne prêtait guère l'oreille même aux conseils les plus avisés. Qu'importe, le moine qui avait si longtemps suivi ses émotions plutôt que sa sagesse ne lui en tenait pas rigueur.
En sortant de la tente, il ne pu s’empêcher de remarquer qu'Olarck restait pour une conversation privée.

¤ L'innocence trouve souvent moins de protecteurs que le crime ¤

Cheminant dans le village, il finit par trouver le temple où s'était rendu Sabetha. Après en avoir traversé le jardin et être entré dans le bâtiment, le prêtre l’accueillit ainsi que Lorindol et les conduisit au près de la magicienne.

- Nous n'auront presque aucune aide de la part de la milice, et nous ne sommes pas les bienvenus à l'auberge. Il a été évoqué de se regrouper chez Olarck, mais ce dernier ne s'est pas montré outre-mesure enthousiaste, résuma Virgile pour la magicienne.
En parlant de ce dernier, as-tu toujours les documents sauvés du feu ? Il me semble l'heure de les étudier. rajouta-t-il en s'adressant à l'elfe.
Pour ma part, tenter de rester à tout prix ou partir au plus vite - ainsi que toutes les déclinaisons imaginables – devrait me convenir. Rien de me retient ici, mais ma curiosité est piquée.

En attendant que ses compagnons donnent leur avis Virgile se mit à parcourir les rayonnages du regard, sans chercher d'ouvrage en particulier mais attentifs à ceux qui avaient une chance de parler d'hommes-araignées. Il n'aurait probablement pas le temps de les lire, mais il était réconfortant de savoir qu'il existait des traités sur eux, et donc sur comment s'en débarrasser efficacement.

L'association n'avait pas été longue à faire dans son esprit, quoiqu'elle trouvait qu'entre Manshoon et Alias, cela faisait beaucoup d'histoire de clones. Il y avait bien longtemps qu'elle n'avait pas entendu parler du Réseau Noir. Le Cormyr avait eu à traiter avec les exactions de l'organisation plus d'une fois, le Zentharim constituait presque une mercantile nation souterraine. Quand on été sensée hériter d'une marche, on vous en parlait.

Et ça n'avait rien de rassurant.

Parmi les dizaines de catastrophes qui arrivaient tout les ans en Faerun, ça lui était passé à côté. Alias aurait été bien utile...

Entendant ses compagnons qui arrivaient elle redressa la tête et se contenta d'énoncer sa conclusion :

- Les Masques sont dirigés par l'un des clones de Manshoon. Le Zhentarim et les Masques pourraient voler de consort... Ça dépasse largement notre champ d'action.

Elle referma le livre délicatement et le remis à sa place :

- Si les oghmites sont au courant d'autres doivent le savoir, elle émis un bruit de bouche signifiant son exaspération. Les rois et les élues sont toujours partants pour déclarer des guerres voyantes, mais quant il s'agit de stopper l'empire de criminels sur une population, personne n'est prêt à traverser les frontières.

Elle se retourna vers ses compagnons d'infortune.

- Orlack va assumer sa stupidité cupide. Si sa maison doit servir de bûcher pour les Porteurs qui restent, qu'elle brûle.

Le mage se laissa guider vers le temple d'oghma sans rechigner. Leur temple était réputé pour apaiser les âmes travailleuses de l'esprit.

D'ailleurs Sabetha y avait déjà trouvé son bonheur, des livres des parchemins le délassement d'une bonne lecture.

l'ecclésiastique semblait des plus accueillants, munis de son plus humble sourire Lorindol se dirigeant rapidement à sa rencontre pour se présenter.

- A la bonne rencontre, Lorindol pour vous servir ! Ce lieu de paix met particulièrement agréable. Je suppose que notre mésaventure vous a été relatée par notre compagnon de route ici présent. L’accueil du bourgmestre étant des plus frais nous voilà d'en de meilleurs conditions pour nous ressourcer un moment.-

Interpellez par Virgile, le mage s’exécuta sur le champ.
- D'ailleurs bon maître, pourriez vous m'aider à éclaircir ce que peut bien être cette trouvaille.-

Sortant de son sac sans fond le coffret, voyons ce qu'il contient !

Arakh passa le chambranle, revigoré rien qu'à sentir les relents du bois humectés de bières, il comptait bien se payer une cuite monumentale ! Après tout ce merdier, c'était là une légitime fin à cette mémorable journée!

¤ Bordel ! Bordel ! Bordel ! Quel abruti ! Sombre crétin ! Gnoll décharné ! ¤

Il ressassait les mêmes pensées, parfois ponctuées d'un grognement, alors qu'il restait en retrait de Lorindol et Virgile. Il avait eu le malheur de croiser leur chemin quelques minutes auparavant, et vu leur face déconfite et leur empressement, il avait alors bifurqué à leur suite... Et maintenant il se retrouvait là, dans un temple... ou une bibliothèque... Qu'importe en fait... il était bien loin d'un comptoir et d'une bonne mousse qui y serait tranquillement attablé. Contrairement à lui, ses trois comparses semblaient plutôt à leur aise dans ces lieu.

¤ On étouffe dans ce trou.. Ça pue l'ennui au moins autant que le cul béni.. ! ¤

Le rôdeur répondît d'un haussement d'épaule à l'assertion de Sabetha, il n'avait pas été plus loquace pour commenter les introspections du moine. D'un grognement il attira l'attention du groupe

- " J'vais vous attendre là dehors... si vous avez b'soin de moi, appelez moi, j'suis pas loin.. "

Parvenu à l'extérieur, il s'installa sur le premier muret visible, et attendît...

la demande de Lorindol, le prêtre parut tout excité, comme un enfant à qui l'on venait de donner une surprise.

Il prit la boite de bois sans un mot et inspecta le sac qu'elle contenait. Il y plongea la main sans frémir et sortit plusieurs rations de survie à base de viande séchée, une boussole, un sabre, une paire de botte, et plus étrange, un grand tissu de couleur crème rapiécé à un endroit. Il était à se demander si ce sac avait un fond.
Il fronça les sourcils en voyant le carnet marqué de l'alphabet espruar, et retourna la boite deux fois avant de sourire.

Il invita tout le beau monde à suivre Arakh dehors, et déposa la boite sur le perron avant de s’éloigner de quelques pas.

- Ael !

S’écria-t-il en langage elfique, et aussitôt une barque apparu en lieu et place de la boite, longue de trois mètres, sur un mètre vingt de large et soixante centimètres de profondeur. Elle était équipée d’une paire de rames, d’une ancre et d’un mât auquel il était possible de hisser une voile triangulaire - sans aucun doute le tissu rapiécé du sac.

- Habad !

Et la barque redevint une boite.

- Je vous conseille de ne pas utiliser le troisième mot de pouvoir avant d'avoir de la place. Il rendit la boite au mage. "Il invoque un bateau avec cinq paires de rame. Je n'avais jamais vu un tel objet de mes yeux. Par curiosité, d’où l'avez-vous trouvé ?"

Lorindol avait déjà entendu parler de ce genre d'artefact profane, l'idée même d'une barque portative lui semblait saugrenue mais cet objet pouvait éventuellement être utile.

Naviguer n'étant pas dans sa nature profonde, il précisa le lieu de la trouvaille au vieux prêtre sans hésiter.

- Compagnons, l'objet ici présent à une valeur certaine. Sa perte doit rendre son propriétaire bien penaud. Je ne suis plus sure de qui était le propriétaire de cet objet, je ne crois pas que cela soit Orlack ?-


- Considérons pour l'instant qu'il nous est prêté à long terme, pour l'instant j'aimerai que nous fouillons la barque une bonne fois histoire d'etre sure que rien n'y est dissimulé.-

Replaçant l'objet sur le perron, le mage s'appliqua à renouveler l'ordre profane.

fouille de la barque