Chapitre II : La route vers le Fort, Chapitre II : La route vers le Fort

L'elfe de lune ne savait plus trop sur quels pieds danser, un comble pour la danseuse naturelle qu'elle est ! En effet, elle détestait les orques mais rien ne prouvait qu'ils étaient les responsables de la scène actuelle. Ce qui comptait le plus à ses yeux c'était de sauver les survivants et rien d'autres. Qu'apporterait plus un combat contre eux ? Le groupe avait une mission et rien n'en devait les détourner. L'attitude de la moniale lui paraissait étrange, voir irrationnelle.

Après avoir activé la magie de son médaillon lunaire pour former une protection de force invisible autour d'elle, elle finit enfin à arriver aux côtés de Celestia. Elle ne lui laissa pas le temps de répondre au chef orque.

- Grand chef, je suis une gardienne sylvestre dont la magie est puissante comme tu as pu le constater. Je peux d'un mot infliger d'atroces souffrances, d'un claquement de doigts lancer des éclairs de foudres, et bien plus encore...Comme toi aussi tu as des guerriers puissants et fiers qui suivront sans sourciller leur valeureux chef. Beaucoup mourront, chez les tiens et comme chez les miens. Je me moque totalement des biens matériels des trésors que vous pouvez trouver ici. Par contre s'il y a des survivants, je veux les sauver car je suis une gardienne. Nous pouvons donc trouver un compromis.

L'ensorceleuse attendit la réponse surveillant la réaction des orques. Elle était prête à jeter son sort le plus mortel si les hostilités étaient engagées..


Activation armure de mage par son médaillon

Sahadeva constata que son employeuse, après avoir usé de sa magie, s'avançait d'un pas décidé en direction de la moniale. Le guerrier lui emboîta immédiatement le pas en tenant fermement son arc. Son arme était toujours pointée vers le bas mais il était concentré et prêt à décocher une flèche au moindre signe d'intention hostile.

Le Maquar n'avait guère croisé d'orques au cours de sa vie mais les récits qu'il avait entendus à leur sujet dressait un portrait peu amène de ces créatures. Bien qu'il ait manqué une partie de la conversation, en partie à cause de la distance qui le séparait de Célestia, en partie à cause de son ignorance totale de la langue orque, il comprit que Célestia et Azur'ael avaient adopté des positions divergentes. Là où la moniale paraissait menaçante et déterminée à combattre, l'ensorceleuse lui semblait proposer une sorte de compromis. Ses propres sentiments étaient partagés : il voulait rendre la justice mais également éviter un bain de sang inutile. Il lui semblait indispensable de tirer au clair les circonstances de cette embuscade : les orques étaient-ils de simples pillards ou étaient-ils également à l'origine de ce massacre? La réponse qu'ils avaient faite à Célestia semblait indiquer la première option.

Les créatures avaient une connaissance basique du commun et n'avaient pas encore fait montre d'hostilité, aussi le Durpari décida-t-il de tenter de les interroger. D'une voix forte, il cria à leur intention :

- Nous ne voulons pas de violence inutile mais nous sommes prêts à nous battre s'il le faut. Savez-vous ce qui est arrivé à ce convoi ? Avez-vous observé quelque chose à ce sujet?

Célestia n'en crut pas ses yeux ni ses oreilles. Elle tourna la tête vers l'elfe et ajouta juste après que Sahadeva intervint. Elle prit bien soin de parler suffisamment doucement pour ne pas éveiller les soupçons adverses.

-Vous êtes sérieux là ? Honnêtement, vous pensez négocier avec eux ? Ils ont attaqué ou du moins profité de ce convoi. C'est du vol pur et simple. Ils méritent d'être jugés et punis pour cela. Seriez-vous contre la justice ?

Célestia garda son attention fixée sur les orques. Elle balayait du regard les alentours vérifiant par la même occasion que personne ne les encerclait. Elle n'avait aucune confiance spontanée dans les orques, encore plus avec ceux qui pillaient une caravane. Elle remarqua que l'elfe s'était entourée d'une aura protectrice similaire à la sienne. Elle ne put s'empêcher d'ajouter en sourdine.

-Je vois que la confiance est de la partie quand même. Les orques ne changeront jamais. Ils sont nés pour tuer. Il n'y a que lorsqu'ils se battent entre eux qu'ils ne font pas de mal et encore je n'en suis même pas certaine. Je vous souhaite bien du plaisir avec eux.

Elle n'ajouta rien mais se préparait quand même à intervenir si jamais la charge des orques se produisait. Charge qui selon elle ne manquerait pas de se produire tôt ou tard. Pour sa part, elle préférait tout de suite cela évitait les pertes de temps.

Plusieurs échanges avaient lieu avec les créatures alors qu’échangé avec des orques étaient déjà anormal, Vieltal se concentra sur le chef puis sur son tabard dont il ne reconnaissait pas le symbole… Se pourrait-il qu’il s’agisse d’adorateur d’un autre dieu que Gruumsh? Les adorateurs du dieu borgne n’auraient pas pris le temps d’écouter et auraient foncés tête première sur les aventuriers pour les détrousser. Pourtant, ceux-là étaient beaucoup plus calmes malgré les menaces proférées par l’elfe et la démonstration de pouvoir…

Le barde continuait d’avancer lentement dans la boue, à l’écart de ses compagnons qui se regroupaient. Les orques étaient trop nombreux pour qu’il risque de les contourner complètement et ainsi se retrouver seul derrière les lignes ennemies, Il entreprit d'abord de s'approcher d'eux par le flan. En entendant l'elfe parler de survivants, Vieltal comprit qu'il était le mieux placer pour inspecter les environs et voir s'ils avaient survivant ou non et ce, même s'il devait passer derrière les orques pour en avoir le coeur net. Il savait qu'il lui était possible de communiquer avec ses compagnons par l'entremise d'un de ses sorts, il devait donc être certains pour avertir les autres.

Il espérait juste que les échanges continueraient le temps qu'il cherche.

Piqué au vif par la tirade de Célestia, Sahadeva ne put s'empêcher de répliquer. Tout comme la moniale, il s'exprima à voix basse, de manière à ne pas être entendu des orques :

- Je sers la justice. Mais, en matière de justice, colère et précipitation sont de mauvaises conseillères. Il nous faut évaluer la situation sans haine et sans a priori pour agir en justes... et ceux qui ont commis ce massacre sont de bien plus grands criminels que ces pillards, autant récolter autant d'informations que nous le pourrons...

Le Durpari était prêt à se battre et même à mourir s'il le fallait car le rôle d'un Maquar était de maintenir l'ordre et de protéger ceux qui en avaient besoin. Mais s'il devait perdre la vie ce jour-là, il espérait que ce serait pour une juste cause et non parce que le manque de diplomatie et le ton provocateur de Célestia avaient causé la colère des orques qui, jusqu'alors, semblaient prêts à discuter.

Une lueur d’intelligence traversa le regard du chef orque. Quand la Danseuse Lunaire s’était dévoilée, expliquant que la démonstration de pouvoir était de son fait, elle avait pour beaucoup réduit l’aura de la moniale

- Ce qui s’est passé Gardienne Sylvestre ? -Il semblait avoir volontairement oblitéré l’intervention du Maquar pour ne s’adresser qu’à Azur’ael, seule à s’être présentée- Des marchands ont abandonné leur cargaison, ils avaient surement peur de la pluie. Personne à sauver ici que vous.

Vieltal, de son côté, n’était pas resté inactif. Entre prudence pour ne se faire ni repérer, ni risquer tomber et précipitation pour apporter au plus vite son support à ses compagnons, il avait pu profiter du regroupement des humanoïdes autour des charriots pour réduire son écart. Aucune bataille n’avait eu lieu là, pas la moindre trace de sang –bien qu’elles eurent certainement été effacée par la nuit de la veille. La voiture de tête arborait un essieu brisé. Il ne s’y trouvait ni coffre, ni tonneau, ni caisse. Les traces des chevaux étaient nombreuses et bien visibles, ordonnées pour ce qu’il pouvait en juger.

Les deux autres charriots par contre étaient chargés. De hautes et lourdes caisses en bois pour le second, dont une déjà ouverte par un orc, et un assortiment de caisses plus petites, quelques sacs et des tonneaux pour le troisième. Pour l’humain l’affaire était limpide : Les marchands pris dans la tempête avaient dû abandonner leurs charriots. Ils avaient détaché les chevaux.

Reviendraient-ils chercher leur cargaison ? Difficile à dire sans pouvoir en estimer la valeur. A priori rien de précieux puisqu’aucun coffre ne s’y trouvaient mais peu nombreux étaient ceux qui pouvaient se permettre de perdre une cargaison entière.

- snamascarid zaris ,arsswa, b aor riogrum'ov ad anim siwa, f agrgra ior .ammaf wa, gr snamagrum'aor zaoriV .crwa, ’gr à xum'ad orum'ov fum'wa, or ,agrgrium'of wa, gr zanarpaR.

Aux ordres de leur chef, trois des orques reprirent leurs fouilles, montrant les crocs à Célestia. Les deux guerriers aux arcs la tenaient en joug, cordes tendues. Dans une pure attitude de défi, le plus grand lança en commun, un grand sourire aux lèvres : - « Content que vous soyez raisonnables. Soyez prudents sur la route, il y a beaucoup de brigands ces derniers temps. »

L'ensorceleuse était sereine et n'affichait aucune peur même lorsque le chef évoqua une menace à peine déguisée à leur attention. Devant de tels individus, il ne fallait montrer aucune faiblesse. Elle hésita pourtant à le punir ouvertement pour lui montrer de quel bois elle se chauffe. Sachant maintenant qu'il n'y avait plus de vie humaine à sauver ici, elle pouvait sans frémir leur balancer un sort dévastateur. Mais elle ne succomba pas à cette tentation. Elle avait d'autres chats à fouetter. Et puis, elle n'avait aucune envie de donner raison à la moniale qui engageait leur groupe dans un combat sans les avoir consultés. Elle était même fâchée de son manque de sagesse et de discernement. La justice avait "bon dos". Qui était elle pour pouvoir la proclamer et tuer en son nom ? L'homme du sud semblait plus pesé dans ses réactions, ce qu'elle approuva.

- Très bien, puisque ce sont des caravanes laissées à l'abandon, ils appartiennent à ceux qui les trouvent. Soyez également prudents en forêt car il y a plus dangereux que des brigands...

L'elfe avait pris sa décision et n'y reviendrait pas. Si Celestia voulait engager un combat, elle le ferait sans elle. D'ailleurs, il n'y avait même plus d'arguments de justice qui tenait. Par contre, de là à faire totalement confiance aux orques, l'elfe n'était pas totalement imprudent. Elle rebroussa donc chemin pour revenir sur ses pas, tout en surveillant ses arrières et alentours.

Célestia regarda l'elfe se retourner face à deux archers qui pointaient chacun une flèche dans leur direction. Un aveu de faiblesse et de peur. Voilà le message qui était envoyé à l'encontre des orques. En regardant plus en détail, seule sa personne était évoquée ici. Cependant, elle ne devait pas laisser ses sentiments envers les orques nuire à son jugement. En ça la remarque de Sahadeva lui avait rappelé son devoir. Elle continua donc sa conversation avec lui.

-Admettons, qu'ils disent la vérité. On peut donc aller vérifier sur place n'est ce pas ? J'attendrai que tout le monde soit rentré avant de continuer notre chemin. Mais j'ai pris bonne note que pour cette elfe, tout ce qui est abandonné devient la propriété du plus fort. Je commence à comprendre maintenant pourquoi ils reculent face aux orques dans les marches d'argent.

Elle ne bougea pas d'un cil dans un premier temps. Elle observait patiemment et scrupuleusement le comportement des orques. Elle remarqua quelque chose tout de même. Ils étaient pressés, très pressés peut-être un peu trop.

-Une remarque tout de même. Quand vous possédez quelque chose. Pourquoi se dépêcher de le récupérer ? Je ne connais que deux catégories de personnes qui se dépêchent de transporter leurs biens. Ceux qui veulent les mettre à l'abri et ceux qui sont en train de les voler. Je me demande bien où je dois classer ces orques.

Elle ne put résister à leur envoyer un avertissement. Une sorte de mise en garde pour l'avenir.

-.wa, ragésorp orum'ov ium'q afgra anum' orwa, p zarum'wa, -n orum'ov rum'oj ac sa .iwa, rdnaivar aj rum'oj num' .orascwa, oron srwa, p aum'q orégum'j orammoor an orum'oN

Au jeu de la provocation, Célestia ne voulait pas perdre la face. Ceci était peut-être le seul combat qu'elle mènerait aujourd'hui et elle n'entendait pas le perdre. Il restait à savoir comment les orques réagiraient face à la protection elfique que leur accordait la moniale.

Sahadeva avait tenté de tempérer le ton de Célestia qu'il jugeait excessivement agressif. Mais sur le fond, il était plus ou moins d'accord avec elle : les orcs étaient en train de piller un convoi et il les considérait comme des fauteurs de troubles. Aussi n'avait-il que peu apprécié l'air provocateur et le sourire narquois de leur chef.

A ses yeux, les intrus devaient à tout le moins être chassés des vestiges du convoi et leurs armes détruites s'ils faisaient mine de résister. Le tout en s'efforçant d'éviter de tuer quiconque. Son regard suivit Azur'ael qui faisait mine de s'en aller, une attitude peu compréhensible à ses yeux.

¤ Voilà qui ne nous facilitera pas la tâche... Espérons qu'il y ait moins de dissensions si un combat sérieux venait à survenir... ¤

Pour sa part, le Maquar décida d'attendre aux côtés de la moniale. Si l'histoire des orcs semblait crédible, il serait hasardeux de ne se fier qu'à leur parole. Il était pour sa part persuadé que Vieltal n'avait pas perdu son temps et devait avoir récolté des informations utiles, informations qui leur permettrait d'évaluer la situation avec toutes les cartes en main. C'était alors que Célestia avait adressé une tirade aux orcs dans cette langue qu'il ne comprenait pas. Parlant à voix basse, il lui dit :

- Je ne sais pas ce que vous leur avez raconté mais quoi qu'il arrive mon arc et mon cimeterre sont à vos côtés.

D'un geste discret, il tendit légèrement la corde de son arc pour ne pas perdre un instant si la situation venait à se gâter...

À la lueur des discussions, la confrontation semblait éviter. L’envie d’en découdre tenaillait toujours le barde. Cependant, la réaction inattendue de ses orques le bouleversait et la présence d’aucun otage, survivant ou même de trace de combats laissait sous-entendre que ces créatures avaient trouvés l’endroit par hasard tout comme eux. On ne pouvait les blâmer de vouloir profiter du maigre butin.

Observant ses alliés, le barde comprit que la moniale voyait d’un tout autre œil les orques, Sahadeva à ses côtés. La discorde n’aiderait pas les compagnons pour le reste du voyage, le barde devait agir pour calmer les ardeurs et appuyer les gestes d’Azur’ael qui quittait la scène.

Vieltal n’avait pas fait appel à ses tours depuis longtemps. Il prit une grande respiration et se concentra sur le message qu’il devait envoyer. Plantant son épée dans le sol, il tritura le bout de fil de cuivre lui permettant d’effectuer son sort. Il pointa tour à tour ses trois compagnons pour qu’ils entendent le message. Puis, le chuchota son message.

- C’est moi, Vieltal, aucune trace de combat et aucune âme qui vive derrière les orques.

Il ouvrit les yeux puis entreprit de quitter la scène pour rejoindre Azur’ael tout en regardant ses deux autres compagnons, il devait rester assez près si les choses s’envenimaient. Il n'avait pas fait de commentaires vis-à-vis sa position... Il se battrait s'il le devait mais il comprenait également que la route n'était pas terminée et que les embuches viendraient bien assez tôt.

Vieltal lance Message sur ses trois compagnons