Chamaeleontis - Chapitre I, 20 Tarsakh 1373

Boroneth, Gweadal & Lyloo ; (Géodas)

es raisons qui avaient rassemblé Boroneth la sauvage, Gweadal l'érudite et Lyloo la stoïque sur la Côte des Dragons en cette période de Tarsakh de l'année mille trois cent soixante-treize du calendrier des Vaux pouvait relever de la coïncidence. C'est en tout cas ce que quelques esprits mineurs pouvaient penser. Car les coïncidences en Faerûn n'existent pas - un certain Ashyn Futhvuer vous le répétera si jamais vous le croisez -, et tout est déterminé par le destin que vous réservent vos dieux.

Ces trois jeunes femmes allaient ainsi, innocemment, au devant d'une incroyable aventure qui prendrait racine à Elversult, mais elles ne le savait pas encore.

Elles avaient tout d'abord rencontré Géodas, halfelin de son état, au détour d'une offre de mission glanée sur Teziir dans l'auberge du Tabouret Volant. l'employeur offrait une coquette somme et quelques bonus collatéraux non désagréables pour explorer les caves d'un manoir abandonné. Rien de bien dangereux en théorie, mais la forte récompense aurait du mettre la puce à l'oreille des quatre compères. A peine arrivés sur les lieux, il se trouva que l'employeur avait largement sous-estimé la complexité de la chose. Tout quatre durent faire demi-tour aussi vite que possible : une horde de kobolts hantait les lieux.
Tous s'en sortirent, même si certains eurent moins de chance que d'autres : Géodas écopa d'une sérieuse blessure au crâne. Las, il avait rendez-vous avec Eldrad à Elversult dans moins de deux jours et pour une affaire importante qui plus est. A peine avait-il eu la force de le dire à ses compagnons qu'il perdit connaissance. Boroneth le porta jusqu'à la ville où il reçu les soins adéquats, mais le prêtre était catégorique : le poison de la lance qu'il avait reçu le laisserait comateux pendant au moins une décade.

Ni une ni deux, les trois compagnons laissèrent l'ensorceleur à ses hallucinations et se mirent en route pour Elversult : l'auberge de la Roulotte.

Boroneth, Eldrad, Gweadal, Lyloo & Melkiot

omblé de joie de voir son ami Géodas après ces longues années, Eldrad s'excusa auprès de Melkiot pour le rejoindre et l'inviter à s'attabler avec eux. Il ne put cependant cacher une surprise en voyant l'halfelin mesurer pas loin de deux pieds de plus que lors de leur dernière rencontre. La raison était simple : ce n'était pas l'halfelin.

Gweadal avait usé d'un sort de déguisement pour prendre l'apparence de l'ensorceleur - quoi de plus simple que d'être reconnu lorsqu'on ne sait pas exactement qui l'on cherche ! -. Elle se tourna vers ses deux amies qui l'avaient attendu à l'entrée de l'auberge, et en quelques pas, Lyloo et Boroneth accoururent.

Avant de partir de Teziir, les trois jeunes femmes avaient eu le bon sens de se rendre chez Géodas et d'emporter avec elles la lettre qu'il avait reçu de Eldrad. Il y faisait mention d'une quête donnée par la dirigeante de la Compagnie de Mercenaires du Saphir Noir, Miriel Ilastul, à laquelle il s'était joint depuis plusieurs décades déjà. Cette quête consistait en une recherche d'informations pour compléter la deuxième moitié d'une carte au trésor, trésor qui apparemment était le butin d'aventures - au pluriel - d'une troupe d'aventuriers aujourd'hui dissoute. Point besoin de préciser que l'on parlait ici de quelques babioles tout à fait digne d'intérêt. Inutile de préciser non plus que l'affaire serait complexe, et cela Eldrad et Melkiot commençaient à le comprendre.

Heureusement, Miriel avait prévu ce cas de figure. Eldrad disposait dans son sac de plusieurs exemplaires d'un contrat qu'elle lui avait fourni : sachant que ses hommes auraient besoin d'aide sur place, il était sage de poser le cadre de cette aide sur papier. On est jamais trop prudent.

Reste qu'à l'instant présent, Melkiot était assis à la table regardant l'air surpris - voir ahuri - d'un Eldrad à quelques pieds de lui et faisant face à un grand Géodas, une elfe et une humaine.

Eldrad demanda à Melkiot de répéter sa phrase il allait le faire lorsque son compagnon se leva d'un coup pour regarder une troupe qui venait d'arriver.
*Houlà c'est quoi tout ce monde ?*
Eldrad semblait connaitre le nouvel arrivant, son visage se fendant d'un large sourire.
*Comme on dit, plus on est de fous plus on rit!*
Une humaine et une elfe s'ajoutait au personnage qui venait d'entrer dans la taverne, Melkiot leur jeta un bref coup d'oeil. Il but une gorgée de vin puis attendit que Eldrad revienne avec le reste de la troupe. Si tout le monde devait participer à la mission cela leur faisait une chance en plus de réussite mais aussi une de se faire repérer.

Cela faisait maintenant une petite semaine que la dernière mission de Lyloo l'avait conduite sur la côte des dragons. En effet son voyage aux Îles Moonshaes à la poursuite d'une organisation faisant du trafic d'esclaves l'avait emmené après plusieurs péripéties sur la côte des dragons où elle avait connu Boroneth et Gweadal.
Ces deux femmes étaient étranges et très différentes et Lyloo n'avait pas encore pu déchiffrer la totalité de leur caractère qui restait encore énigmatique pour elle.

Cependant il était clair que Gweadal était une sorte de magicienne maniant aisément les arts mystiques et Boroneth une sorte de Guerrière assez aguerrie. Elles avaient toutes les trois cependant un point commun elles connaissaient Géodas, cependant celui-ci avait résulte grièvement blessé lors de leur mission au Teziir et leur avait demandé sur son lit de mort de rejoindre et aider un certain Eldrad à Elversult pour lui.
Une fois à Elversult, afin de retrouver facilement Eldrad, Gweadal avait utilisé un sort déguisement pour se faire passer pour Géodas, histoire de ne pas effrayer l'ancien ami de Géodas. Lyloo, Gweadal et Boroneth se trouvaient actuellement à l'auberge de la roulotte face à Eldrad et un certain Melkiot.

Lyloo observa les deux personnages, Eldrad était un demi-elfe une sorte de mélange d'humain et d'elfe. La rapière accrochée à son côté gauche indiquait qu'il devait être assez rapide et adroit au combat sûrement quelqu'un qu'il valait mieux éviter de prendre de haut. Melkiot quand à lui donnait l'impression de vouloir rester à l'abri des regards son accoutrement louche ne disait rien de bon à Lyloo.

*Donc voila les amis de Geodas...faudra faire avec après tout j'ai donné ma parole à Geodas d'aider cet Eldrad.*

Prenant place à la table Lyloo salua les deux hommes et se commanda un verre d'eau auprès de la serveuse. Puis se tournant vers ses futurs coéquipiers elle lâcha un simple, -Alors à quoi on a affaire?

Depuis que Gweadal avait quitté le Monastère des Neuf Portes, elle n’avait pas vraiment pris le temps de faire la connaissance d’autres aventuriers itinérants. Elle était extrêmement reconnaissante envers le Monastère pour l’entraînement martial intense qu’elle avait pu suivre et était restée très concentrée sur la mission qui lui avait été secrètement confiée. Mais tout compte fait, elle avait finalement bien fait d’accepter cette petite offre de quête placardée sur le mur l’Auberge du Tabouret Volant de Teziir. Elle s’était avérée plus périlleuse que lucrative au final, mais avait permis à la magicienne de rencontrer Lyloo et Boroneth et de passer un peu de temps en leur compagnie. Sans oublier ce pauvre Geodas qui avait eu du mal à fuir devant cette horde de kobolts qui avait accordé un accueil digne de leur réputation à la petite troupe aventurière venue les déranger !

Les deux jeunes femmes peu singulières avaient émoustillé la curiosité et l’intérêt de la génasi. Leur accoutrement radicalement différent mettait étrangement en évidence les impressionnantes épées qu’elles portaient. De quoi trancher facilement un kobolt en deux avec une telle lame, à condition d’avoir la force nécessaire de la manier correctement ! Après la formation monastique qu’elle venait de suivie, Gweadal imaginait mal pouvoir se servir des ses nouvelles techniques de combat avec une arme si imposante. Elle regrettait un peu de ne avoir pu assister à une démonstration de l’efficacité de ces deux combattantes, tous naturellement plus préoccupées à fuir et à sauver leur peau qu'à riposter aux assauts des kobolts.

Le voyage pour Elversult s’était déroulé rapidement et voilà que Gweadal et ses deux nouvelles compagnes de route étaient enfin devant la porte de l'auberge de la Roulotte. Après avoir revêtu magiquement l’apparence de Geodas, en réduisant le plus possible sa taille pour copier plus fidèlement la petite silhouette de l’halfelin, la magicienne poussa la porte de la Taverne et laissa alors ses yeux balayer la scène qui s'offrait devant elle pour analyser le moindre détail. Concentrée pour essayer de percer à jour le moindre aventurier qui pourrait lui faire un signe ou changer radicalement de comportement en apercevant le faux Geodas, Gweadal fut presque surprise de voir que son déguisement avait fait mouche en l’espace de quelques secondes, mais aussi rassurée par le sourire de l’homme qui s’était levé et s’approchait de son ami illusoire. Prendre l’apparence d’une tierce personne n’était jamais sans risque, surtout pour un rendez-vous de ce type dans un lieu très fréquenté, mais visiblement personne d’autre que ce demi-elfe n’avait reconnu Géodas, ou du moins, n’avait manifesté sa présence.

Anticipant le désarroi et la méfiance du supposé Eldrad devant ce Géodas étrangement grand, la magicienne reprit sans attendre sa silhouette de genasi d'air et commença de sa voix féminine.

- Salutations, je ne suis malheureusement pas la personne que vous espériez, mais j'ai peut-être un message pour vous.

Soucieuse de limiter les risques de traiter avec la mauvaise personne, voire avec un imposteur, Gweadal se garda de prononcer les noms de Géodas et d'Eldrad puis continua.

- Pardonnez-moi de vous approcher de cette manière peu commode... Vous êtes... ?

La magicienne tenait devant elle, de ses deux mains, le parchemin roulé que les trois comparses avaient trouvé chez Géodas. Elle employa un ton courtois et anormalement froid face au sourire du demi-elfe pour se donner les airs d'un simple messager et se limiter les ennuis en cas d'embrouille. Il fallait dire aussi que la personne attablée qui tenait compagnie au demi-elfe n'inspirait pas trop confiance à Gweadal.

Il était maintenant loin le temps où la jeune elfe des bois avait décidé de quitter sa paisible vie perdue en pleine forêt, pour rejoindre ce que le commun des mortels appelait « ville ».
Elle échoua dans une cité prénommée Teziir. C’était la première fois qu’elle se retrouvait dans un aussi grand rassemblement de maisons. Pourtant , certains citadins allaient vite lui laisser entendre qu’il existait encore bien plus grand, plus loin. Bien plus grand !!! Les premières minutes passées au-delà des murs qui délimitaient la ville furent emplies de fascination, d’émerveillement, de surprise et de curiosité.
La cité grouillait (c’était le terme à employer !!). Des centaines de gens s’affairaient de tâches multiples, proposaient, en pleine rue des services en tout genre. On lui proposa mille fois de lui confectionner une tenue qui la rendrait belle comme le jour, d’autres vantait les mérites d’un élixir qui effacerait à jamais ses cicatrices, et des enfants couraient autour d’elle, lui proposant contre un sou de la guider vers les quartiers les plus intéressants. Elle se laissa tenter par l’un deux, un petit bonhomme, qui disait vivre dans la rue, abandonné de ses parents.


« Je m’appelle Virgile, M’dame, pour vous servir »

« Ne me sert pas de M’dame je te prie, appelle moi Boroneth d’accord, ça suffira »

« Oui M’dame Boroneth »


Elle fut vite attendrie par ce dernier, même si sa méfiance omniprésente l’amena, à plusieurs reprises à vérifier la présence et le contenu de sa bourse.
Ils débouchèrent dans un quartier des plus animés. Les bâtiments étaient ornés de planches qui arboraient symboles et lettres, que la barbare était incapable de déchiffrer. Heureusement, certains symboles étaient très équivoques.
Perdue dans cette jungle, la magie des premiers instants s’avéra éphémère. Elle commençait à saturer. Trop de monde l’entourait, trop d’odeur en tout genre l’étouffait. Elle avait la nausée. Et puis ce bruit, ces bruits ! Un brouhaha incessant, nourri de cris, de fracas, de chariot, de pleurs, de rires. C’était ce qu’il y avait de pire. On aurait dit qu’un village entier s’était installé dans sa tête. Elle aurait voulu tout balayer d’un coup d’épée, fermer les yeux, et retrouver le chant des oiseaux, le bruissement des feuilles, et l’odeur de l’herbe mouillée. Elle essaya de transmettre son mal-être au petit Virgile.


« Je sais ce qu’il vous faut M’da.. euh Boroneth »

« Tu n’as qu’à me tutoyer, ça sera plus facile »

« Suis moi, je sais ce qu’il te faut, Boro »


Elle n’était pas sure de préférer le diminutif, mais s’en contenta et suivit, difficilement malgré sa disposition naturelle à la marche, le môme jusqu’à un marché animal. Ce qu’elle vit la glaça d’effroi. Le traitement qu’infligeait certains vendeurs à leurs bêtes la remplit de colère. Des larmes coulèrent spontanément sur son visage. Sans s’en rendre compte, elle avait posé sa main sur le pommeau de son épée, quand Virgile lui posa sa main sur la sienne


« Faut pas pleurer, madame. Moi aussi, je n’ai plus personne, mais je me débrouille »

« Amène moi quelque part au calme, où je pourrai avoir le gîte et le couvert , d’accord »

« D’accord »


Elle suivit à nouveau très mécaniquement le gosse qui ne lui avait pas lâcher la main depuis. Elle aurait été incapable de dire, s’ils marchaient depuis deux secondes ou deux heures, lorsqu’il désigna une imposante bâtisse. L’enseigne était très équivoque, un lit pris entre un couteau et une fourchette d’un coté, et une choppe débordante de mousse de l’autre. Elle reprit ses esprits, donna une deuxième pièce de cuivre à Virgile.


« Voici l’Auberge du Tabouret Volant ! »

« Merci bonhomme ! Prends soin de toi. Que Sylvanus te bénisse. »


Elle s’engouffra dans l’auberge, croisant voyageurs, hommes d’armes et marchands itinérant en tout genre. Le brouhaha présent était bien plus clément, fait de tintement de verres, de rires bourrus et de chant paillards. La gorge irritée par les effluves de la ville, elle se laissa tenter par une chopine bien fraîche qui semblait être une des références de la maison. Son verre à la main, reprenant ses esprits, elle aperçut, au milieu de cette faune majoritairement masculine, une épée aussi large que la sienne à la ceinture d’une dame qui lui tournait le dos, couvert d’une crinière flamboyante. Intriguée, elle tendit l’oreille. Elle était en conversation avec un halfelin du nom de Géodas qui semblait recruter pour une mission qu’il qualifiait « d’exploration ». Aspirant à se rendre utile, à faire quelques rencontres lucratives, et à oublier la vision d’horreur du marché, elle s’immisça dans la conversation, avec tout le tact qu’elle n’avait pas. Elle s’assît à leur table, dépoussiéra sa gorge d’une grande rasade, et en guise de bonjour ou de présentation, lâcha un simple :


« J’en suis »


Depuis cet après-midi là, elle ne regrettait pas son engagement. Elle avait eu du mal à suivre la décision de ses deux compagnes de fuir face à une appétissante, au goût de son épée, meute de kobold. Elle avait alors pris délicatement l’halfelin blessé sous son bras, et avait ouvert la route, se retournant régulièrement afin de s’assurer que les deux aventurières la suivaient.
Ce jour, elle ne s’était pas vraiment fait d’opinion d’elles. Une confiance relative s’était installée, reliquat d’une fuite qui avait demandé une certaine cohésion de groupe. Elle avait conscience d’avoir l’air aussi singulière à leurs yeux, qu’elles l’étaient aux siens.
Sa tenue polaire, tachée du sang d’halfelin était resté dans un de ses sacs, devenue, de toute façon, obsolète au regard du climat. Elle arborait dorénavant une courte jupe en cuir foncée, maintenue par un imposant ceinturon et une armure de cuir, délibérément un tantinet trop grande afin de garder un maximum de liberté de mouvement.
Elles étaient maintenant attablées en compagnie de deux représentant de la gente masculine, qui par leur accoutrement, leur équipement, et/ou leur attitude, semblaient tout mettre en œuvre pour inspirer peu confiance. Tout étant si nouveau pour elle, elle ne s’attarda pas sur les apparences. Seuls les actes comptent…
Une tension semblait régner à table, sans qu’elle ne comprenne pourquoi. Afin de résister à l’impérieuse envie de rompre les silences, elle fit signe à la serveuse du bar. Celle-ci mit bien trop de temps à répondre à son appel. Aussi, pour se mettre à son aise au milieu de ces quatres fiers aventuriers, elle décida de faire en sorte de ne plus avoir besoin de cette serveuse quelque peu molle :


« Deux belles et grandes chopines bien fraiches devant moi siouplait gente Dame ! »

En s'approchant de Geodas, Eldrad avait été surpris par la taille de son compagnon puis cette surprise avait laissé place à de l'amusement. Il savait combien son ami aimé faire des farces ou jouer avec la magie pour duper son entourage. Mais l'amusement était maintenant lui aussi retombé, et bien bas.

¤ Qui est cette femme ? ¤ se demandait le demi-elfe.

Cette personne, qui se tenait debout devant lui, n'était pas Geodas, bien au contraire. Celui-ci était apparemment en mauvaise posture, victime d'une blessure qui mettait peut-être sa vie en danger.

¤ Brave Geodas, toujours a fureter partout, j'espère qu'il s'en sortira ¤

Eldrad n'avait pas pour habitude de s’inquiéter pour quiconque mais l'halfelin avait gagner un peu de son amitié avec son caractère farceur et enjoué.

Cependant, une mission lui avait été confié et il ne pouvait s'y soustraire.
Deux autres personnes, une elfe et une humaine, avait d'ailleurs rejoint la personne qui se faisait passer pour Geodas. Et sans aucunes gênes, elles étaient venus s'installer à la table qu'il occupait avec Melkiot, demandant par la même occasion, des explications.

¤ Bon, abordons le sujet vaguement et voyons si ces dames se joignent à nous ¤

- Tout d'abord, laissez moi me présenter, je suis Eldrad Ulthrane, membre de la compagnie de mercenaires du Saphir Noir et voici Melkiot, un mercenaire que je viens de recruter, dit-il tout en le montrant aux nouvelles venus.

- J'avais mandé Geodas pour m'aider dans une tache qui m'a été confié mais vous le savez surement déjà ? demanda t-il, tout en scrutant le visage de chacunes des personnes se trouvant devant lui.

- D'ailleurs si vous pouviez vous présenter vous aussi, et me dire quels sont vos compétences, ainsi que les informations que vous a laissés Geodas concernant cette quête, cela me ferait gagner du temps, n'est-ce pas ?

Lyloo fut étonnée de voir Gweadal laisser tomber son déguisement aussi rapidement alors que celui-ci avait tellement bien marché, apparemment elle voulait jouer cartes sur table pour mieux gagner la confiance d'Eldrad.
Autre chose qui frappa Lyloo sur le comportement d'Eldrad fut le peu que les blessures de Geodas parurent l'affecter, faudrait pas trop compter sur lui en cas de coup dur se dit la guerrière.

Puis le fait de citer la compagnie du Saphir noir fut quelque chose qui interpella Lyloo, jamais elle n'avait entendu parler d'une telle compagnie. Mais apparemment l'usage de mercenaires n'était pas quelque chose de rare chez eux d'après les paroles du demi-elfe, chose qui rendait dite compagnie encore plus louche.

Quoi qu'il en soit Lyloo aimait bien jouer cartes sur table à l'instar de Gweadal et n'eut aucune gène à dévoiler certaines de ses capacités comme leur avait demandé le demi-elfe.

-Tout ce qu'il vous faut savoir c'est que je ne crains pas le combat et que malgré mon équipement apparent je peux observer et espionner sans que l'on puisse me détecter. Je ne suis pas une épéiste courante. J'ai en effet quelques capacités qui me mettent au dessus des guerriers habituels bien que j'ai beaucoup à apprendre et un manque d'expérience sur le terrain certain...

Le temps d'analyser les paroles du demi-elfe, ce qui laissa Lyloo se présenter la première, Gweadal finit par répondre elle aussi aux questions d'Eldrad. Elle continua d'un ton simple et courtois, tout de même moins impersonnel.

- Heureuse de faire votre connaissance Eldrad Ulthrane. Je suis Gweadal Avendis. Comme vous avez pu le voir j’étudie la magie. Tenez. Dit-elle alors qu’elle tendit la lettre écrite par Eldras lui-même à l’attention de Géodas.

- Nous avons rencontré Géodas à Teziir pour une petite mission qui a malheureusement mal tourné. Si les prêtres de Teziir veillent bien sur lui, sa vie ne devrait pas être en danger. Ce que nous savons du Saphir Noir où de la tâche qui vous a été confiée ? Pas grand-chose, à vrai dire ce que vous avez écrit dans cette lettre que Géodas nous a demandé de vous remettre.

Il n’était pas nécessaire d’entrer trop dans les détails sur la mésaventure de Teziir. L’important pour la magicienne était d’en apprendre plus sur cette mission d’une certaine importance avant d’envisager la suite des évènements. Après tout, l’halfelin semblait fort sympathique mais Gweadal ne s’estimait pas assez redevable envers lui pour s’engager hâtivement dans une nouvelle mésaventure visiblement cette fois de plus grande envergure.

Les longs cheveux de Gweadal avaient repris leur teinte blanc-neige. D’une manière assez étrange, on pouvait les voir se mouvoir lentement le long du corps et des épaules de le génasi d'air. C’était comme s’ils étaient de temps à autre animés par un léger courrant d’air venu interrompre le calme atmosphérique surnaturel imposé par les quatre murs de cette taverne. De sa main droite désormais libre, elle dégagea doucement la manche gauche de son bliaud pour laisser apparaître Falim, un petit faucon au plumage allant du marron à un brun assez clair. Guidé par la main de la magicienne, il alla s’accrocher délicatement sur son épaule gauche et de ses yeux étrangement brillant d’intelligence, commença à dévisager chacun des aventuriers, ou mercenaires, aux alentours.

Dans le flot de la conversation, la sauvageonne s'attarda sur une question à laquelle elle était supposée répondre . Elle s'envoya une interminable rasade dans le gosier, puis profita du premier blanc venu pour s'insérer dans la conversation.

"Sur Geodas , je ne sais pas grand-chose, si ce n'est qu'il est pas bien lourd et plutôt résistant a la douleur , sachant que c'est moi qui l'ai porté et qu'il s'est très peu plaint malgré sa vilaine blessure. Quant à mes compétences..."

Elle posa violemment un arc imposant à plat sur la table. Elle pinça la corde. Elle était tellement tendue qu'elle n'émit aucun son, dure comme une lame.

"Ceci est ma harpe, mais gare à celui qui entendra mon concert, car le dernier son qu'il entendra sera un sifflement ."

Elle reprit une rasade, laissa son arc encombrer leur table et dégaina une non moins imposante épée pour la déposer a côté de son arc.

"Et voici aiguille, ma fidèle compagne lorsque je m'adonnes à des travaux de coutures . Et enfin, voici celle qui vous encouragera à ne pas vous fier aux apparences car lorsqu'elle rentre en action rares sont ceux qui, à taille égale , peuvent la suivre."

Elle bascula sur sa chaise et posa son pied sur la table , renversant son premier verre quasi vide au passage. Elle exhibait jusqu'à l'aine une jambe aux muscle impressionnant mais complètement difforme du pied jusqu'au genou en raison de nombreuses cicatrices irrégulières . On pouvait reconnaître plusieurs coups d'une petite lame, mais aussi des zones creusées et décolorées , probables vestiges de chairs nécrosées .
Elle éclata de rires lorsqu'elle constata qu'elle avait coupé l'appétit d'un marchand sur une table voisine,puis reprit,avec précaution cette fois, son arc et son épée .

"Ai-je répondu , de façon satisfaisante, à votre question collègue? Boroneth, pour vous servir"

Elle se leva, et gratifia à chacun des deux une maladroite courbette , avant de se rasseoir, s'accouder à la table et contempler son verre, sans perdre une miette de la réaction de chacunes et surtout de chacun .

Eldrad observait à présent, les trois femmes qui se trouvaient à table avec lui. Elles contrastaient entre elles, aussi bien physiquement que dans leurs manières de se comporter, que l'on pouvait deviner légèrement, compte tenu de la manière dont elles avaient répondu à ses simples questions.

Celle qui se présenta en premier ne se nomma pas, sans doute penser t-elle qu'Eldrad allait deviner son nom. Toujours est-il qu'elle avait l'air d'être assez athlétique, à en juger par l'épée à deux mains qu'elle portait.

- En somme vous êtes une guerrière ? et vous vous nommez ? l'interrogea Eldrad.

- En tous cas, si vous avez des compétences quand à l’observation ou l'espionnage, ça n'en sera que plus utile pour cette mission.

Puis il se tourna vers la deuxième à s'être présenter, c'était celle qui se nommer Gweadal Avendis. D'apparence assez frêle par rapport aux deux autres, elle lui avait déclaré être magicienne. La teinte de ses cheveux virant sur le blanc et celle de sa peau légèrement bleutée, laissait Eldrad pensait qu'elle n'était pas humaine et que la magie qu'elle pratiquait avait un lien avec ses origines.

¤ Qu'est-elle exactement ? ¤

- Vous êtes donc magicienne, fort bien ! Melkiot pratique lui aussi la magie, vous ne serez pas trop de deux je pense car nous avons fort à faire. Vous m'avez un peu rassurez sur le sort de mon ami Geodas et je vous en remercie dit-il, affichant un léger sourire, tout en lui adressant un léger signe de tête.

Il se tourna enfin vers l'elfe, car celle qui s'était présenté comme étant Boroneth, était une elfe à n'en point douter. Eldrad avait reconnu au premier coup d’œil cette représentante de la digne race auquel sa mère avait aussi appartenu. Un léger soupir lui échappa, sans doute le témoignage d'une certaine nostalgie qu'il avait de l'époque où elle était encore en vie. Mais il se remis promptement et s'adressa à elle.

- Boroneth c'est cela ? Je vous remercie vous aussi d'avoir contribué à la sauvegarde de mon ami, néanmoins je vous ferai remarqué qu'il n'est point l'usage de sortir ses armes dans une taverne, surtout à une heure de pointe comme en ce moment. Des voisins de tables ou même le propriétaire de l'établissement pourrait trouver cela suspicieux et nous remarqué plus que de mesure. Or nous avons besoin pour le moment d'être le plus discret possible. Votre explication est clair pour moi, vous êtes une sorte de guerrière vous aussi.

Il marqua une pause, rangea le parchemin que lui avait remis Gweadal et reprit.

- Comme vous le savez déjà, cette quête est mandé par la dirigeante de la compagnie de mercenaire à laquelle j’appartiens. Elle consiste en gros, à une recherche d'informations et d'objets, qui serviront à compléter une carte dont nous avons déjà la moitié. Cette carte donne l'emplacement d'un butin, qu'un groupe de mercenaire a amassé au fil de ses aventures. Ce groupe est aujourd'hui dissous et ils n'en restent que quelques survivants. Nous allons donc nous concentrer sur ces survivants, qui sont deux et qui vivent dans cette ville. Avant d'aller plus loin dans les informations que je vais fournir aux personnes acceptant cette quête, laissez moi vous prévenir que tout ceci comporte une part importante de danger. Cependant comme toute mission qui demande des efforts, la récompense sera largement à la hauteur !

Et tout souriant, il avala son verre cul sec.