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Flashback - Comme une ombre sur terre..., Il y a 10 ans de ça...
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[Ce post est un flasback. Il n'a d'autre but que celui d'expliquer un épisode important de la vie de mon personnage Rezar Valith. Si vous souhaitez intéragir, j'en serais ravis, mais sachez ceci se passe il y a dix ans, et n'est pas extrèmement propre à l'intéraction, comme vous le lirez plus loin]
C’était le jour de l’anniversaire de son arrivée à l’orphelinat. Le dix-huitième anniversaire. Rezar, comme nombre d’orphelins, ne pouvait deviner son anniversaire véritable, n’ayant pas de parents pour le lui apprendre. Il devait cependant faire face à une autre impossibilité concernant son âge : celle de connaître sa signification véritable. Si toutes les autres races de la terre disposaient de repaires, d’un âge de majorité, d’une adolescence, d’une vieillesses, il n’en était pas de même pour les tieffelins. Ils étaient étrangers où qu’ils aillent, rares, impossibles à étudier : aucune société, aucune famille, aucuns liens… Rezar ne pouvait que choisir aléatoirement. Devait-il se considérer majeur, comme un être humain le devrait ? Ou était-il encore dans une première jeunesse, comme un démon millénaire ? Ou peut être était-ce au contraire un âge très avancé pour un tieffelin ? Les mélanges contre natures vivent rarement très vieux, comme les demi orcs. Il soupira. « Au fond, qu’est-ce que ça change ? » Mais il savait, en son âme et conscience, que ça changeait énormément de choses pour lui.
Il ne sortait des égouts que très rarement, et seulement de nuit : la plupart du temps, c’était pour attaquer un homme saoul ou une courtisane imprudente, les traîner dans son antre et les dépecer. La chair humaine le changeait de la viande de rat, et il n’en tirait pas la même honte discrète. Mais cette fois, il devait sortir en plein jour : il avait rendez-vous. Pour camoufler ses attributs, il s’était vêtu de haillons difformes, avait roulé sa queue en boule dans son dos et avançait en boitant, comme un bossus infortuné. Il rasait les murs, comme un véritable clochard : et de sorte, personne ne faisait attention à lui. Personne ne regarde jamais les miséreux : on a toujours peur de croiser leur regard.
Son regard se perdit sur un groupe à l’arrêt, devant une boulangerie. Il y avait un grand mâle et une femelle âgée, et puis deux larves d’humains. Rezar se dit qu’il devait s’agir d’une famille. Ils achetaient du pain chaud, puis la plus petite d’entre eux réclama une pâtisserie. Tout le monde rit, et la gâterie lui fut accordée : puis, ils repartirent et disparurent. Cette scène parut distante à Rezar : il n’en comprenait pas la signification. Il ne comprenait pas pourquoi le mâle et la femelle avaient laissé la larve leur dicter sa volonté. Il connaissait le principe de conservation de l’espèce, qui poussait chaque être à vouloir protéger ses petits : mais il n’expliquait pas la réaction des adultes.
Il haussa les épaules, et se dirigea vers sa destination. Après des mois de recherches, il allait revoir sa mère : cette mère qu’il n’avait vu que le jour de sa naissance, et qui n’avait pu le garder près d’elle. Aujourd’hui, il vivait seul, il ne serait plus un fardeau pour elle : il voulait simplement la revoir et lui dire qu’il allait bien. Rajustant sa bosse, il se dirigea vers l’auberge qu’on lui avait indiqué.
Une âme de poète et un coeur de lion.
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l s’installa à une table, et commanda un verre d’eau. Puis, lorsqu’il sentit l’inquiétant aubergiste calme et reposé, il lui demanda : « Je cherche Aelia Valith. On m’a dit qu’elle dormait dans cette auberge. » L’aubergiste le lorgna de haut, mais ne répondit pas. « Je peux payer, vous savez ? » Cette fois, l’autre ricana. « Et quel montant tu pourrais payer, qui rachèterait la confiance de mes clients ? T’as bien l’endroit qu’c’était ici, fiston ? Si j’étais du genre à dire qui vient et qui vient pas chez moi, t’crois qu’j’pourrais tenir un bouge pareil ? J’connais pas ta gueuse, et j’m’en fous d’savoir c’que tu lui veux. » « C’est ma mère. Je veux la voir. » « T’as pas entendu ? J’ai dis qu’j’en avais rien à faire. Aller, bouge de là. » « Je vous en supplie…c’est important…j’ai besoin de savoir si elle est bien ici ! Il faut que je la voie, il faut qu’elle sache ce que je viens lui dire. C’est très important pour elle aussi. Elle vous en sera reconnaissant, je vous assure ! » L’aubergiste sembla hésiter, puis quitta le comptoir un moment. Il revint quelques minutes plus tard, et glissa à l’oreille de Rezar. « Ecoute, petit…elle veut bien te voir, mais pas ici, pas maintenant. Vient ce soir dans la petite ruelle derrière, d’accord ? Madame Valith viendra te rencontrer. Elle dit qu’elle préfère pas…que vous vous voyez en plein jour. Tu comprends, petit ? » Rezar se dit qu’il comprenait, et remercia chaleureusement l’aubergiste avant de quitter l’endroit. Le fiélon se balada un peu en ville, pour passer le temps. Un sentiment étrange lui remplissait la poitrine : il ne l’avait jamais ressentit avant. C’était bon, mais ce n’était pas du plaisir. C’était calme, ça ne faisait pas de remue ménage dans son âme. Il était simplement…content. Il sourit. Ça avait été tellement simple qu’il avait du mal à y croire. Sa mère était bien là ? Et elle voulait bien le voir ? Un sentiment agréable le remplissait des pieds à la tête, sans bousculer aucun organe. Cela coulait en lui comme un sang nouveau, pompé par des souvenirs et des espoirs. Il profita du temps qui lui restait pour réfléchir sur comment il avait su le nom de sa mère, et obtenu des informations sur elle. Il y avait eut un autre survivant d’Arkdain. Lawfer, un jeune guerrier à l’époque, avait lui-même réussi à s’échapper lors de l’attaque, et passa plusieurs années à s’en vouloir pour n’être pas mort aux côtés de ses compagnons. Le regret fut tel qu’il leur creusa des tombes et voulut faire de leurs enterrements de véritables cérémonies : ayant vent de ces faits, Aelia le retrouva, et ils se retrouvèrent ensemble pour faire le deuil de leurs anciens camarades. Mais Aelia avait confié à Lawfer l’histoire de son accouchement impie, et le jeune homme ne pouvait s’empêcher de penser à l’avenir de l’enfant. Il fit alors des recherches, retrouva la trace de Rezar, et le rencontra un jour d’hiver. Rezar avait alors quinze ans. « Depuis, je ne vis pratiquement que pour la revoir…mais elle est insaisissable. Aelia l’empaleuse, la célèbre tueuse experte en hallebardes et armes d’hast, essaye de rester loin des lieux trop habités. Elle a déjà trop soufferts de ses ennemis. Mais moi, je suis un ami ! Je suis son fils, au nom des dieux ! Elle ne pouvait pas me protéger…je ne lui en veux pas. Mais maintenant, je vais pouvoir l’aider à se cacher. Peut être qu’elle me prendra avec elle…peut être que je pourrais enfin quitter mon égout. Peut être que mon cauchemar est terminé… » Ses yeux brillèrent. Le cauchemar ? Terminé ? Cela le semblait bien. Aelia avait probablement peur de le rencontrer en public, mais ce soir ils partiraient ensemble, et ils iraient loin de ces endroits. Elle connaissait sûrement des villes plus acceuillantes, où on ne le forcerait pas à se cacher pour survivre. Elle lui apprendrait un métier, peut être celui des armes. Il coulerait une existence tranquille, et puis…et puis…tout le reste n’aurait plus d’importance. Il soupira de bonheur. Tout cela allait se réaliser, il le savait. Demain, il serait déjà hors de cette ville de fous et d’humains.
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e soir. La ville n'est plus que silence et ténèbres. Rezar se faufile jusque dans l'arrière cour de la Botte Noire. Il a attendu ce moment des années, et ce soir il pourra enfin la voir. Il attends dans les ombres : son coeur bat vite, et il a du mal à penser. Son ancienne vie est sur le point de se cloturer. Une femme sort des ombres : elle est mince et grande, légèrement athlétique. Elle est mûre, mais ses traits gardent de la jeunesse. Ses cheuveux roux coupés à la garçonne lui donnent un air ferme, combatif. Ses grand yeux bleux radoucissent le reste de son visage. Ces yeux, Rezar les connait depuis longtemps : il a exactement les mêmes. La femme est en armure, et porte une hallebarde d'un air menaçant. "Ne fait pas un geste de trop, étranger !" lança t-elle. "Il parait que tu prétends être mon fils." Rezar ne s'était pas attendu à une réception aussi froide. Mais il savait qu'elle l'avait abandonné peu de temps après sa naissance : elle ne le connaissait pas, ne lui avait pas donné de nom. Peut être était-il un étranger pour elle, après tout. Mais même de cette façon, elle lui avait donné vie : et lui était en quête d'origines. "Je suis votre fils, mère...il n'y a aucun doute là dessus." Son coeur battait la chamade. En était-il sûr ? Etait-il vraiment son fils ? Il l'avait été tout ce temps, mais après tout...il ne disposait que de la parole d'un inconnu. Se pouvait-il que toute cette histoire ne soit qu'un mensonge ? Il avala sa salive. "Je n'ai eu aucun fils que j'ai voulu garder" lança la jeune femme. "Si tu prétends être le mien, alors prouve le d'une manière où d'une autre." Rezar réfléchit. Lui même n'avait aucune preuve, mais...la coincidence aurait été trop énorme. Non, cela devait être ainsi, ils devaient être du même sang...au moins en partie. Il détacha ses haillons, et laissa sa queue rouler au sol. Quand il fut désengourdie, il fouetta mollement l'air une ou deux fois, pour la mettre en vue. La jeune femme eut un mouvement de recul. "C'est donc bien toi que j'ai mis au monde. Pour une surprise..." Les yeux de Rezar s'humidifièrent. La voix de la femme semblait convaincue : il n'y avait plus de doute possible. Il se laissa aller à un déversement de sentiments. "Maman ! Je t'ai cherchée si longtemps ! Dieux, je suis si heureux maintenant. J'ai tant de choses à te raconter !" Il fit mine de venir vers elle, mais elle fouetta l'air de sa hallebarde en signe de menace. "N'avance plus, fiélon !" Le mot le frappa comme une gifle. Fiélon ? "J'ai dis que je n'avais eu aucun fils dont j'ai désirée la venue. Si tu es bien celui que je pense, alors tu n'es qu'une erreur, un châtiment que j'ai subit pour ma faiblesse et mon incapacité à protéger ceux que j'aimai. Tu es né sur une pile de cadavre, métis...je n'ai eu d'autre choix que de te mettre au monde, et je t'aurais supprimé si seulement j'en avais eu la force. Tu as eu tort de me chercher : je n'aurais pas pour un adulte la même pitié que j'ai eu pour un nouveau né." Il sentit d'autres présences autour de lui. Certaines ombres se firent plus denses, et il entendit des pas sourds se diriger vers lui. Il était entouré : il avait baissé sa garde, et on l'avait encerclé. Le regard céruléen de la femme cherchait à se planter dans sa chair comme une lame de poignard. "Mais...mais pourquoi ?! Qu'est ce que ça veux dire ?" Sa protestation sonnait, même à ses oreilles, dérisoire. Il savait ce qu'elle allait répondre : le plus sombre côté de sa personnalité y avait réfléchi depuis bien, bien longtemps... "Tu ne comprends pas ? Tu es le souvenir, la preuve matérielle de mon échec. Le simple fait de savoir que tu existe empoisonne mon existence. J'ai souffert comme une chienne pour que tu puisses voir le jour, et aujourd'hui je vais te rendre cette douleur, au centuple. Tu va payer pour ton père, démon ! Mais ne t'inquiète pas, il te rejoindra bientôt. Vous autres, occupez vous de lui." Elle tourna les talons et disparut dans les ombres. Rezar entendit de nombreux pas se diriger vers lui : pas des roublards, des soudards. Il ne put juger de leur nombre, ni même de leur apparence : le premier coup lui frappa la mâchoire et lui fit presque perdre connaissance. On le rossait à coup de bâtons. Il tenta de se relever, mais d'autres coups le clouèrent au sol. Les hommes frappèrent, frappèrent le fiélon encore et encore, jusqu'à ce que les blessures causées par les gourdins se mettent à saigner, tant la peau s'était fragilisée. Certains de ses os craquèrent. Il sentit distinctement une côte se briser. Puis, la marée de coup s'interrompit. Il avait arrêté de se débattre depuis longtemps. "Vous croyez qu'il est mort ?" "S'il ne l'est pas, il est mourrant. Jetons le dans une bouche d'égout, il ne se relèvera jamais de ces blessures. Les rats n'auront qu'à l'achever." Il entendit le bruit de la plaque qu'on soulevait, sentit la chutte, puis l'humidité et la pourriture. Il se retrouvait au fond d'un puit, dans une marre de déjections. Lui même déchets...l'ironie de la situation était trop forte pour qu'il ne la note pas, même complètement sonné. Ses sens étaient à bout, et il s'évanoui. Ses yeux se rouvrirent : il se trouvait toujours au fond de l'égoût. Quelques heures avaient dû passer, tout au plus. La douleur, elle, était toujours là. Pourquoi n'était-il pas mort ? Pourquoi s'était-il réveillé ? Il trouva la force de se relever. Chaque mouvement déchirait ses membres, mais il pouvait marcher. Il le sentait. Malgré la douleur, ses membres répondaient. Ses yeux s'emplirent de larmes, au souvenir de la scène qu'il venait de vivre. Il avait voulut s'enfuir, et on l'avait rendu à l'égout...sa propre mère voulait qu'il disparaisse, qu'il ne reste rien de lui. Elle voulait qu'il ne soit plus qu'un lointain souvenir. Elle voulait pouvoir nier jusqu'à son existence. Il hésitait. Devait-il accepter, et disparaitre ? Mourir, puisque c'était le voeux non seulement de sa mère, mais de toutes les personnes qu'il avait rencontrées ? Ou survivre, et alors pourquoi ? "Ne t'inquiète pas" se rappela t-il "ton père te rejoindra bientôt." Son père. Le démon ? Oui, pas de doute. Aelia devait avoir préparé sa vengeance durant toutes ces années. C'était à ce point, qu'elle regrettait l'évènement. Qu'elle souhaitait l'oublier. "Alors pourquoi je ne disparais pas...pourquoi mon corps réponds t-il encore...?" Des larmes perlèrent sur ses joues. Il les essuya d'un revers de bras, et ses yeux se glacèrent soudain. "Très bien. Puisque c'est ce que le monde désire, alors je vais disparaître...mais pour disparaitre, mourir ne suffira pas..." Il marcha tient bien que mal vers son repaire. Il connaissait les égouts par coeur, connaissait chaque tunnel et savait retrouver son chemin. Lorsqu'il eut rejoint sa caverne, un point de conjonction entre plusieurs tunnels où la roche n'avait pas été entièrement taillée, il tira de sous une pile de couvertures un certain nombre de livres, puis en choisit un en particulier et se mit à le parcourir frénétiquement. Sur la couverture était écrit : "La Guerre Sanglante."
Une âme de poète et un coeur de lion.
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elia se réveilla en sueur, un son difforme s'échappant de sa bouche. L'homme qui dormait à côté d'elle, Belenus, ouvrit les yeux et se jetta instinctivement sur elle pour la protéger. Ils se débatirent tout deux un moment dans le noir puis, lorsqu'ils se rendirent compte de la méprise, la jeune femme soupira. "Tu as encore fait ce cauchemard ?" demanda Belenus d'un air inquiet. "Oui...je revois encore chaque instant de cette scène. C'est le revoir qui m'a fait cet effet...je suis désolée." Belenus la serra fort dans ses bras. "Ne soit pas désolée, rien n'est de ta faute...tu devrais plutôt m'en vouloir de ne pas pouvoir chasser ces affreux souvenirs. C'est mon rôle, non ?" "Idiot...ce ne sont pas des choses qu'on oublie comme ça." Belenus baissa la tête. "Je sais, mais...quelque part, je me dis que si j'étais vraiment digne de toi, j'aurais été capable de te soigner à l'heure qu'il est." Aelia l'embrassa en silence puis le fixa droit dans les yeux. "Ne redit plus jamais ce genre de bêtises, tu m'entends ? Il y a des choses contre lesquelles personnes ne peux rien. Je t'aime, j'ai juste besoin d'un peu de temps." "D'accord, mais ça vaux aussi pour toi : tu ne pouvais rien faire contre cette chose, et tu n'as pas à t'en vouloir pour la mort de tes anciens camarades. Tu m'entends, Aelia ?" La jeune femme sourit. "Ah, tu m'as piégée...très bien, très bien..." Ils rirent ensemble, puis retournèrent se coucher. Après quelques minutes de silence, Aelia murmura : "Tu sais, je m'en veux un peu pour l'autre...j'aurais peut être dû lui laisser une chance. Mais le voir me glaçait tellement le sang..." Elle frissonna. Belenus l'entoura de ses bras. "Non, tu as eu pleinement raison. On a jamais vu de cette engeance faire le bien, tu le sais : c'est plus fort qu'eux, le mal coule dans leurs veines. Ce sont juste une sous-espèce de démons. Ils ne méritent que la mort." Aelia se retourna et lui fit face, l'air douteuse. "Mais tu sais...et si jamais le sang d'humain leur permettais de changer leur nature ? Et si jamais il avait été capable de bonnes choses, malgré son héritage ? Nous avons peut être été trop rapides à le condamner." Le visage de Belenus s'endurcit. "Ne dis pas de bêtises, ma chérie. Quand bien même un peu de bon sens lui aurait été inoculé par ton sang, il était beaucoup trop vieux. Quel influence pense tu que l'on aurais put avoir sur lui, maintenant ? Il n'aurait fait que nous causer des problèmes, et te rappeler de mauvais souvenirs. Nous nous sommes débarassés de lui et nous allons faire de même pour son père. C'était ta décision." "Je sais, mais..." "Tu es fatiguée, dors. Je vais en bas me chercher à boire." Belenus sortit des dras et enfila une robe de chambre avant de sortir. Un démon, faire le bien ? Sottises. Aelia n'y penserait probablement plus dans quelques jours. C'était une bonne chose de faite, et bientôt...tout serait finit. Il avait à peine fait quelques pas dehors lorsqu'il sentit le froid contact de l'acier contre sa pomme d'adam. Il s'arrêta net : il avait une lame sous la gorge et quelqu'un le menaçait par l'arrière. "J'ai tout entendu. Alors c'est toi que je dois remercier pour l'acceuil, hein ? Niveau influence, tu dois en connaître un rayon...ne pense même pas à crier." La main jaunâtre de Rezar ne tremblait pas. Belenus sentait une totale assurance dans la voix du fiélon. "Tu n'es pas mort, immondice ? Je croyais pourtant avoir dû donner des ordres clairs." "Ma mère m'a tué ce soir, humain. Tes hommes ne pouvaient pas tuer un cadavre. Maintenant, dis moi pourquoi toute cette haine : est-ce que tu étais jaloux de ce qu'elle racontait à propos des attributs de mon père, ou est ce que tu ne peux simplement pas supporter que votre fille ne sois pas son premier enfant ?" "Pourriture ! Qu'est ce que tu as fais à Joelle ?" "La ferme." La lame se planta dans la chair et trancha la jugulaire nette. Le corps tomba à terre pendant que Rezar se dirigeait vers la salle à coucher. Il entrouvrit la porte silencieusement et se faufila à l'intérieur. Dans le lit, Aelia était roulée en boule, les yeux mi-clos. Elle tendit le bras dans sa direction. "Tu as fais vite, mon amour..." Rezar ne répondit rien, et alla s'installer dans le lit à côté d'Aelia. L'obscurité ne permettait pas qu'ils puissent l'un l'autre distinguer leurs traits. Il se lova contre Aelia, et elle l'entoura de ses bras. Sa poitrine était chaude et comfortable. Il ronronna doucement, et Aelia eut un petit rire. "C'est bien la première fois que je te fais cet effet..." Ils restèrent l'un contre l'autre en silence. Puis, la jeune femme se mit à parcourir l'anatomie du fiélon de ses mains et sentit sa peau de grenouille devenir de plus en plus chaude. Elle eut un mouvement de recul que Rezar perçu très nettement. Il sortit des couvertures et sauta en arrière : Aelia se jeta sur le côté et attrapa sa hallebarde. Ils ne dirent mots et se fixèrent. Pendant quelques minutes, la salle ne resonnait plus que de leurs respirations étouffées. Lentement, un autre son vint recouvrir le premier : le son de pleurs. Tout deux, baissant le regard, se mirent à pleurer.
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"Tu m'as déjà rejeté deux fois, et tu as souhaité ma mort de tout ton coeur. Et pourtant, je suis irresistiblement attiré par toi...pourquoi ? Je ne me comprends pas. Je croyais être venu pour me venger : mais il me suffit d'apercevoir ta silhouette pour perdre toutes mes forces, et pour vouloir venir me lover contre ton sein."
Rezar prononçait ces mots d'un air détaché. Ses yeux semblaient parcourir un monde différent.
"Je suis séparé en deux. Une partie de moi te hais pour ce que tu m'as fais, et une autre te comprends et t'excuse tout ce mal. Je ne sais pas laquelle je devrais écouter. Elles me semblent aussi saine l'une que l'autre."
Aelia essuya ses larmes et son nez coulant du revers de son poignet. Elle fixait Rezar, et ses yeux étaient pleins de regrets.
"Mon...mon fils...je suis désolé..."
Elle n'arrivait pas à prononcer un mot de plus. En voyant Rezar, même dans cette pénombre, elle devinait sa peau salle, ses vêtements déchirés, elle sentait son odeur infecte. Dans ses yeux, elle lisait une malice inhumaine, comme si ces paupières fendues étaient capables de trancher l'espace. Son corps entier n'était que maléfice. Et pourtant...elle songea à Joelle, qui dormait à côté. Sa fille. Celle qu'elle avait considéré comme son unique enfant. Que serait-elle devenu, sans sa protection ? Aurait-elle fini par devenir l'étrange animal que Rezar était ? Comment séparer, dans son apparence, l'innée de l'acquis ? Aelia était rongée par un remords venu d'un autre temps.
"J'ai...j'ai toujours douté...je ne t'ai jamais détesté, mon fils. Pas toi, en tout cas, mais...ce que tu me rappelais. Je voulais t'aimer, mais je n'y arrivais pas. Chaque fois que je te voyais, j'avais ce besoin de...te tordre le cou !"
Elle se couvrit la bouche de la paume de sa main. Etait-elle vraiment envahie par ces pensées ? Oui, sans nul doute.
"Si je t'ai abandonné, c'était aussi...pour te protéger de moi-même. Mais maintenant...maintenant..."
Rezar la coupa.
"Maintenant, il est trop tard, mère."
"Comment peux tu dire ça ?" Sa mine était dévastée.
"Vous avez la mémoire un peu courte, mère...mais pas moi. Vous m'avez tué ce soir, l'avez vous oublié ?"
"Mais...mais tu as survécu...tu es revenu vers moi !" Les derniers mots étaient suppliants. "Ecoute, je...je sais que c'est dur, mais comprends moi..."
"Je comprends. Je comprends que vous ayez voulu fonder une nouvelle famille pour m'oublier. La petite à côté est assez âgée. Vous n'avez pas attendu bien longtemps avant de la concevoir..."
"Joelle...elle a deux ans de moins que toi...oh, pardonne moi, mon petit...
Aelia laissa tomber sa hallebarde et avança vers Rezar. Elle posa ses mains sur les épaules froides du fiélon, puis les fit glisser le long de son dos et l'entoura de ses bras.
"Tu as dû vivre des choses horribles, mais c'est fini...c'est fini..."
Elle sentit une morsure froide dans son ventre. La sensation de l'acier pénétrant la chair, elle l'avait connu durant ces batailles. Mais jamais aussi profondément, jamais aussi froid. Elle recula, hoqueta sans pouvoir dire un mot, et tomba à la renverse en s'effondrant sur le lit.
"Non" murmura Rezar. "Cela se termine ici pour vous, mère. Mais j'ai un chemin un peu plus long à parcourir."
Aelia n'arrivait pas à trouver de voix. Sa gorge était envahie de sang : elle sentait ses propres fluides vitaux envahir son estomac et ses poumons.
"Pou...pourquoi...?"
"Parce qu'il y a un point de non retour, mère. Un point que l'on atteint, et à partir duquel il serait plus long de revenir en arrière que de continuer. C'est ce point que nous avons atteint ensemble, aujourd'hui. Vous avez fait un choix...que je dois respecter. Nous ne pouvons plus revenir dessus : maintenant, nous sommes tous les jouets de cette volonté que vous avez déclenché. Vous, en tant que sujet : moi, en tant qu'objet. Votre rôle est terminé. Si je dois disparaitre, il vous faut disparaitre aussi. Mais maintenant, j'ai besoin de ce que vous et cet homme savez sur mon père."
"Je...ne..."
Rezar se pencha sur elle, et lui souffla dans le cou. Puis, d'une voix autoritaire : "Son nom !"
"Za...eg...na...lof..."
"Très bien. Ne vous inquiétez pas, il mourra. C'était votre désir : que je disparaisse. Eh bien, j'effacerais toute trace de mon existence, de la vôtre, et de celle de tout ceux qui m'ont un jour connu. Je m'effacerai, au point de ne devenir qu'un nom sans signification, une ombre sur terre."
Les yeux hallucinés d'Aelia s'emplirent de larmes, avant de peu à peu n'être plus que des agates sans âme. Alors, Rezar lui posa un baiser sur la joue, ramassa la hallebarde et sortit de la pièce. Le cadavre de Belenus n'avait pas bougé : mais quelqu'un avait marché dans son sang. Des traces de pas allaient du cadavre jusqu'à la chambre d'Aelia, puis se dirigeaient vers la chambre de Joelle. Rezar y pénétra : la jeune fille n'était plus là, et la fenêtre était grande ouverte. Rezar hurla.
"Non ! Elle est partie ! Non !"
Son plan prévoyait la mort de Joelle. Elle ne pouvait pas survivre ! Elle l'avait vu ! Ils partageaient le même sang ! Si elle survivait, il ne pourrait jamais disparaître vraiment ! Laissant exploser sa rage, il frappa de la hallebarde les murs et les meubles. Des étincelles de magie illuminèrent la pièce alors que la lame mordait dans la pierre et le bois. Le bruit se propagea à travers l'auberge et réveilla les autres locataires, puis les domestiques. L'une d'elle monta les escaliers et, sans apercevoir le cadavre, pénetra dans la pièce. Elle vit Rezar se retourner et poser ses yeux de serpents sur elle : il siffla. Paralysée par la peur elle eut un geste de recul : mais le fiélon la frappa sur la tempe d'un coup de queue et elle s'effondra au sol. D'autres personnes montaient les escaliers en courant : il était en danger. Il ramassa la jeune fille et la hallebarde, et sauta par la fenêtre. Ses jambes, supérieurs a celles d'un humain au niveau de la réception, souffrirent énormément de la chute mais aucune ne lâcha. Il se traina jusqu'à la bouche d'égoût la plus proche et y rampa comme un rat blessé, trainant son butin et sa proie. A la Botte Noire, le personnel était occupé à essayer d'arrêter le feu que la magie de la lance avait allumé. L'auberge illuminerait la nuit pendant de nombreuses heures encore...
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