Promenons-nous dans les bois, Chapitre 1

Cyprien s'installa gauchement dans la demeure de la vénérable Shanala.
L'entrée en matière de la guérisseuse, ses manières rudes, et toutes les choses qu'elles savaient sans les voir n'étaient pas faites pour mettre à l'aise le Saë'Tel'Quess; toujours un peu dubitatif face aux grands prodiges magiques.

Persuadé qu'elle l'observait mais sans pouvoir pour autant cerner son regard, il se tenait plus raide que d'habitude n'osant que de furtifs coups d'œil sur l'étalage hétéroclite qui ornait la cabane.

Il prit la parole sachant que Nob, déjà identifié comme non membre de la confrérie, était un peu en porte-à-faux.
Quant à Lhamo elle demeurait au delà du stade de sa compréhension.
Il ne la comptait plus comme une supérieure.

En fait, il ne la comptait plus du tout.

- Je suis Rebhe-Llon, un novice de la confrérie. Je suis parti avec une autre novice il y a quelques jours depuis Thüldae avec l'ordre de me diriger vers le Nord-Ouest en direction de Fort Noënar.
Chemin faisant nous avons rencontré Nob d'abord, ce Maître Hin qui, j'en suis sûr se présentera lui même. Pour l'heure il me suffira de dire qu'il nous a sauvé la vie à Lhamo et à moi.
Lhamo, nous la rencontrâmes le deuxième jour. Elle était seule vivante dans les cendres d'un village de nomades Sy'Tel'Quess se recueillant et cherchant des indices.

Dès lors nous essayons de l'assister dans cette quête.

Depuis, nous avons vu des chiens comme ceux qu'utilisent les chasseurs humains tuer une adolescente Sy'Tel'Quess; une famille humaine exterminée par des grugach vengeurs semble t-il, et recueilli les précisions que le Père de Josh a pu nous donner.
Selon Ethan des humains aussi ont été victimes de chiens affamés à dessein.

Nous pensons que les Elfes verts ont été massacrés au moyen d'un feu magique, que les chiens appartenaient à un potentat de Fort Noënar, Eirontalar; La jeune novice qui m'accompagnait et une autre Sy'Tel'Quess' sont parties recueillir les sentiments de la tribu Grugach la plus proche ...
Quant à nous nous sommes modestement venus demander qui est derrière ces chiens qui attaquent les humains comme les elfes ?
Qui détruit un village en restant invisible ?
Qu'est-il arrivé à Fort Noënar pour que les provocations coutumières prennent ce tour tragique cette année ?

Il regarda Nob pour l'inviter à parler.
Il savait qu'il avait été lapidaire dans son résumé. C'était voulu.
A la fois pour ne pas accabler Shanala qui savait peut-être déjà tout ça, mais également pour que le Prêtre puisse compléter s'il s'en sentait l'envie.

Il baissa les yeux essayant d'identifier à l'odeur les racines qu'écrasait la guérisseuse.

Narration: Ethan Larford

Plongé dans de sombres réflexions, le regard tourné vers le lieu où se trouvait quelques secondes plus tôt la femme elfe, Ethan n'entendit qu'au dernier moment da question de la grugash. Il se remémora alors une journée de Martel, vingt ans plus tôt...

- Tout à commencé par ma rencontre fortuite avec Oromë, son fils. J'étais moi un peu plus jeune et plus leste qu'aujourd'hui et quant au grugash, il était un peu trop téméraire. Au cours d'une chasse, il a rencontré quelques braconniers qui posaient des pièges à ours

Il renifla de mépris et poursuivit son histoire en commun.

- Des «attrape-patte» pour être précis.

Le forestier posa son sac sur le sol et avisa une pierre moussue sur laquelle il prit place en retirant d'une de ses poches une blague à tabac et une pipe en bois sculptée.

- Ce genre de pièges immonde mais pour lequel «broyeur de patte» conviendrait mieux mais enfin! J'étais parmi eux ou plus exactement avec mon mentor, celui par qui j'ai tout appris. Ce dernier à voulu que j'installe les mâchoires mais j'ai refusé.

Tout en bourrant sa pipe, Ethan se permit un sourire en évoquant ces souvenirs.

- Je me souviens comme si c'était hier de la tête qu'il a fait et des deux autres aussi. Mais cela faisait un moment que leurs méthodes me révulsaient. Ce genre de pièges était terrible et l'est encore aujourd'hui et quand l'animal marche sur la planchette et que le verrou se déclenche refermant violemment les mâchoires sur la patte, il n'est pas difficile d'imaginer quelle douleur est ressentie par l'animal.

La fumée âpre dégagée par la pipe d'Ethan s'éleva bientôt dans les airs pendant qu'il aspirait une grande bouffée.

- Enfin, mon refus ne me mit pas dans les bonnes grâces de mon mentor et il me redemanda deux fois d'installer ces pièges, je refusais deux nouvelles fois. Alors il voulut me donner un leçon. J'ai eu le malheur de tirer mon épée...ensuite tout se passa très vite. Je fis couler le premier sang et les trois me sont tombés dessus. C'est là qu'Oromë fit son apparition. Il nous observait depuis un moment, dissimulé et il m'assista.

La suite de l'histoire était dès plus banale. Ethan tua son mentor presque accidentellement puisque ce dernier tomba sur sa lame sans avoir manqué toutefois de le blesser sérieusement avant de mourir mais l'elfe sauvage réduisit au silence les deux autres braconniers.

- Je pense que lui comme moi avons été dépassé par les événements...Blessé, il décida de me soigner sur place et je fus prit de fièvres pendant deux jours et deux nuits. A mon réveil, je me retrouvais face à une dizaine d'elfes sauvages dont le père d'Oromë. Aussi bizarre que cela puisse paraître, c'est à ce moment là que notre amitié est née…

Le sagespectre était impressionné par la vieille femme. Par bien des cotés, elle lui rappelait certains ermites et shamans de son peuple qui vivaient au plus profond de la forêt et qu’il avait eu l’occasion de voir à de rares moments lors de son initiation. Tous lui donnaient cette impression de voir au delà des apparences et de posséder une grande connaissance sur les mystères. Lui même avait terminé son noviciat depuis de nombreux mois, initié à nombre de chose, il était loin d’être ignorant mais cela même lui avait fait comprendre que ce qu’il savait n’etait finalement que peu de chose par rapport à tout ce qui lui restait encore à apprendre….voir même, à comprendre. Intimidé et se sentant revenir à ses premières années d’études, Nob laissa parler Cyprien sans jamais l’interrompre, se plongeant lui mêmes dans l’examen des différents livres et bocaux qui parsemaient la pièce, tentant, grâce à ses talents de médecine et d’alchimiste, d’en découvrire les différents usages. La voix de l’elfe ne résonnait plus dans la pièce et le Hin prit conscience que celui ci en avait terminé.

-Dame Shalana, je ne suis effectivement pas de la confrérie. Je me nomme Nob du clan des Sombreterres de la vallée de Channath et disciple d’Urogalan, celui qui doit être.

Ce retrouver face à elle lui rappela étrangement sa vie passée et les raisons de son départ du clan, cette envie de rencontrer d’autres communautés de Sagespectres, Pieds légers et Vaillants. Ce fut d’une voix hésitante, sachant que cela n’avait rien à voir avec leur affaire qu’il continua.

-Pardonnez moi ma Dame, mais…sauriez vous si des communautés d’Halfelins voir même de sagespectres se sont installées dans cette région ? Je sais que cette question étonnera mon compagnon, mais les événements tragiques qui sont récemment arrivés me font penser que mes frères seraient des proies rêvés pour un chasseur aux appétits inhumains. Un chasseur dont les chiens sont marqués des lettres TE.

Nob n’ajouta pas grand chose, la vieille femme ne devait certainement pas être du genre à utiliser plus de mots qu’il le fallait pour parler et l’essentiel avait déjà été dit.

Tandis que Cyprien expliquait à la vieille dame la raison de leur venue, Lhamo s’était abaissée au niveau du sol et caressait avec attention le pelage soyeux des chats. Ces gestes simples oeuvraient sur elle comme une méditation, et lui permettaient de relâcher les angoisses et craintes qui s’étaient accumulées depuis plusieurs jours.
Lorsqu’ils avaient marché plus tôt dans la foret, elle n’avait pu se défaire de ce sentiment oppressant qui pesait sur elle. La perspective de leur enquête et surtout de ce qu’il faudrait faire était déjà un poids suffisant, mais à cela venait s’ajouter ses propres doutes et la crainte supplémentaire de voire Burd’Hymme prise au piège sans pouvoir l’aider.

Là, dans la cabane odorante, perdue au cœur de la végétation, l’elfe noire semblait avoir oublié ce pour quoi elle était venue. Il n’en n’était rien pourtant et elle ne perdait pas une miette de ce qu’il se disait. Elle n’avait salué la sorcière qu’en pensée, mais elle était certaine que de gratifier ses chats d’affection était le meilleur chemin pour atteindre son estime. Si Lhamo était maladroite dans ses relations avec les humains, ou les elfes - peu importaient leur origines, ils représentaient les peuples pensants gouvernants le monde – elle l’était beaucoup moins avec ceux qui ne semblaient pas parler. Et c’est avec tact et expérience qu’elle flattait le dos des félins, faisant glisser ses doigts aux endroits supposés être sensibles. Elle n’avait pas rabattu sa capuche sur sa tête, non pas parce que la dame était aveugle, mais parce qu’elle avait vite compris que son âme avait remplacé sa vue, et qu’il était inutile de se dissimuler. La présence de Josh également, et son attitude envers elle tout au long de leur randonnée lui avaient quelque peu oté le malaise et la honte de sa naissance. A cette pensée, elle se retourna vers lui et lui adressa l’un de ses rares sourires.
De premier abord le visage de Lhamo pouvait sembler rude, froid, fermé presqu’antipathique. Mais lorsqu’elle souriait, c’était un peu comme de lourds nuages gris s’écartant un bref instant pour laisser passer les rayons du soleil printanier. Sa physionomie tout entière se métamorphosait et suggérait des promesses de jours heureux. Hélas, ou tant mieux peut être, elle ne souriait jamais longtemps, et aussi vite qu’il s’était illuminé, son visage reprenait le sérieux du marbre noir.
Détachant son regard de la silhouette du jeune homme, elle s’attarda sur les plantes qui séchaient au plafond et tacha de les reconnaître. Lors de son initiation druidique, très tardive si l’on en juge les trente années qu’elle avait passé au sein de Cercle à servir la cause druidique avec ferveur et loyauté, elle avait a peine effleuré l’étude des soins et des médecines, car ses talents et ses goûts la portait plutôt au contact animal. Après les événements qui s’étaient abattus sur eux comme autant coup de tonnerre, elle regrettait cette lacune et se promis d’y remédier dès que l’occasion se présenterait. Comme aujourd’hui.

Aussi sûre d'elle qu'elle pouvait l'être, Bur'dhyme avait été prise de court par l'apparition soudain de la Grugash Sihasapas. Pourtant, l'Ensorceleuse connaissait les moeurs des Elfes Sauvages agressifs, et elle avait aussi été prévenue par Ethan. Mais être confrontée à une vraie manifestation de cette agressivité et pas à de simples conseils d'un forestier avait fait retomber la petite Bur'dhyme sur terre. Si personne n'était intervenu à sa place, elle aurait certainement écouté la gardienne et rebroussé chemin, surtout que cette dernière était évidemment escortée par nombre guerriers perchés aux arbres.. l'Elfe Verte avait trop peur de dire quelque chose de déplacé, aussi noble soit leur cause, surtout envers cette tribu. Le moindre mot de travers, la moindre hésitation aurait pu détruire tout un discours.

C'est donc ainsi que Miriel l'avait soulagée d'un poids. La Rôdeuse avait expliqué brièvement la situation comme l'Ensorceleuse aurait souhaité, mais pas forcément réussi, à le faire. A la fin de la tirade de son amie, Bur'dhyme s'empressa de montrer elle aussi sa broche, et de garder l'air le plus humble possible, bien qu'elle n'appréciait déjà pas le comportement de cette archère hautaine. Mais plus encore que la tirade de Miriel, c'est la déclaration de Ethan qui eut le plus d'impact. Bien qu'il ne soit pas Sy'Tel'Quessir, le fait qu'il en connaisse un lui donnait plus d'importance que deux membres Elfes Sauvages de la confrérie des Gardiens Sylvestres.

Quelque peu déçue par cette constatation, Bur'dhyme en fut tout de même soulagée. Finalement, sans le forestier, elles seraient peut-être déjà mortes. La Grugash commençait déjà à cerner le personnage, il n'était pas du genre à prendre des risques insensés. Il ne serait jamais venu s'il n'avait pas connu cet orateur.

Toujours est-il que Bur'dhyme n'avait pas dit un seul mot depuis leur arrivée sur le territoire des Sihasapas. Leur geôlière était partie se renseigner sur la véracité des dires de l'Humain tout en les sommant de rester ici. Elle fut des plus étonnées de voir que ses deux compagnons engagaient tranquillement une discussion, alors qu'elle était tendue au possible et aurait peine à desserrer les dents, à moins d'être rassurée par un membre important de cette tribu. Elle écouta pourtant le curieux récit de Ethan, et le respecta encore un peu plus ensuite.

Et finalement, puisque tout le monde discutait dans cette atmosphère hostile, pourquoi pas elle ? L'Ensorceleuse paraîtrait un peu moins taciturne si elle participait au dialogue :

C'est une belle histoire pleine de bons sentiments que vous nous racontez là, monsieur Ethan. Il m'était arrivé une aventure semblable il y a quelques années. J'avais moi aussi sauvé la vie à un Humain dans les environs de Fort Arran, près du bois de Chondal. Mais là, c'était contre d'autres hommes, et je n'ai jamais revu cette personne. Il a dû être effrayé par mon origine.

Se taisant soudaint aussi vite qu'elle avait commencé à parler, Bur'dhyme s'adossa contre un arbre et se mit à regarder dans la direction que la gardienne avait prise pour se renseigner dans sa tribu. L'attente commençait à se faire sentir maintenant.

Vingt troisième jour de la Flétrissure-Année de la Magie Sauvage
23 Eleinte 1372 (CV)

MJ
Narration: Lhamo, Cyprien et Nob Sombreterre

Lieu : Chez Shanala
Temps : /
Moment : Dans l’après-midi

ourmentée par une sensation de vide insondable face aux déclarations du Saë'Tel'Quess, la vieille femme porta la main au symbole qu’elle portait autour du cou. Une entrée en matière plutôt brutale de la part de l’elfe des bois mais qui mettait en avant la détermination du novice à mettre un terme à l’innommable. Oui, que de questions et de réponses qu’il allait falloir lui donner. Cela faisait longtemps que Shanala n’avait pas vu une telle impatience chez un elfe des bois, en fait, pas depuis qu’un Saë’Tel’Quess originaire de la Wealdath avait rallié la Haute-Forêt et rejoint les rangs des Gardiens Sylvestres, accompagné d’un loup au pelage brun. Le hasard était étrange.

le nom de Thüldae avait une telle signification pour de nombreuses communautés sylvestres de la Haute-Forêt que désormais, elle ne pouvait se défier de ses membres. Oui, la Cité Sylvestre avait connue des jours bien sombres, de nombreux gardiens en majorité des Tel’Quessir, avaient sacrifiés leurs vies pour la défense de leur communauté face à un ennemi dès plus puissant. Parmi les Gardiens Sylvestres survivants, quelques-uns baissèrent les bras. D’autres, qui répondaient aux noms de Isòrion, Linwëline ou Yvhann, préférèrent aller de l’avant, et à force de courage et de détermination, redonnèrent ses lettres de noblesses à la confrérie des Gardiens Sylvestres qui peu à peu revedenait ce qu’elle n’avait jamais cessé d’être, une organisation au service des populations sylvestres et de la nature, ouverte à toute les races.

Et si aujourd'hui même, dans sa demeure tous n'appartenaient pas à la confrérie, cette dernière était bien représentée en la personne de Rebhe-Llon mais aussi grâce à la présence du sagespectre et de l'elfe noire. La bénédiction de Sylvanus imprégnait la drow, elle pouvait la sentir, presque la palper et cette sensation lui fit un bien fou alors que dans ses oreilles réosonnaient les mots du novice. Au fur et à mesure du résumé, son visage devint sombre, pourtant, elle continua à l’écouter, sans l’interrompre. Puis ce fut au tour du Gardien Lugubre de prendre la parole. Quand il termina, elle sut à son tour, quelles réponses apporter.

- Celui Qui Doit Etre révèle que la mort est une fin naturelle, honorant ainsi la vie qui fut, N’est-ce pas maître Hin ? Ici ce n’est pas le cas car aujourd’hui un mal insidieux ronge cette partie de la Haute-Forêt et ce mal doit être éradiqué.

Le son de sa voix était monocorde, personne dans la pièce ne pouvait se douter qu’à l’intérieur de la vieille femme affrontait un véritable maelström d’émotions.

- Qui Rebhe-Llon ? Des âmes noires qui sont allées au-delà des règles édictées par celles des hommes, des monstres qui ont transgressé des lois pour assouvir la plus vil des envies, celle de chasser des êtres humains alors qu’eux même se considèrent comme des humains ! Ces engeances ne valent pas mieux que la pire progéniture orque…

Un instant dépitée, la vieille femme se reprit et s’approcha encore plus près du novice.

- Eirontalar, ce nom ne m’est pas inconnu fils de Thüldae. Ce chasseur invétéré, lâche de surcroît, dénature l’acte de chasse. Oui, il sait maintenant qu’il est plus facile d’avoir comme proie des êtres qui sont quantité négligeable aux yeux de tous !

Un rictus déforma son visage, dévoilant des dents noires.

- Il joint l’utile à l’agréable, la chasse et le commerce. La saison va prendre fin, ses emplettes sont terminées, un convoi est partit déjà incognito vers la Cité des Splendeurs, un second partira dans peu de temps. Mais n’ayez crainte, il lui reste à conclure quelques petites traques juste pour le plaisir. Quand j’ai demandé à Ethan de prévenir la confrérie, il s’agissait seulement de fournir des informations mais les événements se sont accélérés…Il faut maintenant y mettre un terme.

La guérisseuse soupira et elle secoua la tête avant de jeter un bref regard à Lhamo, une drow dont elle pouvait ressentir le tumulte intérieur.

- Quirtus n’aime pas les étrangers et aime encore moins qu’on le caresse. Tu es sur la bonne voie même si le doute t’étreint, Quirtus le sait et c’est pour cela qu’il te laisse l’approcher. L’instinct des félins ne peut être trompé et cela est de bon augure pour toi. Laisse le temps au temps.

Sans se préoccuper du reste, la vieille femme se dirigea vers le coin de la pièce où se trouvait une cheminée qui occupait l’angle du mur, elle continuait à parler en tournant le dos aux compagnons et là, un seul être comprit le sens de ses paroles.

…

Quelques fauteuils en osier trônaient près d’une table basse. Elle prit place dans celui qui se trouvait le plus près de l’âtre et fit signe d’une main aux compagnons de prendre place, face à elle. Une dizaine de chats l’entouraient et ronronnaient en cadence, deux d’entre eux, au pelage noir et blanc sautèrent sur ses genoux pour s’y installer.

- Mes chatons. Vous avez raison…prenez place…Que de question qui méritent des réponses.

ratifiant le dénommé Quirtus d’une dernière caresse du bout des doigts, Lhamo se releva lentement, presque avec majesté. La vieille dame l’impressionnait. Elle était ce genre d’âme qui avait su plaire à l’ancienne drow. Honnête, juste et sage. Quelque chose en elle lui rappelait Hellecon le haut druide du Cercle de Meibion Cywir, comme si Shanala en était l’incarnation féminine.
Ayant recouvert juste assez d’assurance, la jeune elfe noire s’approcha de la sorcière. Chacun de ses mouvements trahissaient le respect qu’elle lui inspirait. Jetant un regard à Nob et à Cyprien, comme recherchant leur appui ou leur approbation, elle poursuivit le cours des questions.

- Le problème aujourd’hui, et je suppose que vous êtes la première à vous en rendre compte, c’est qu’une guerre entre les elfes et les hommes est en train d’éclore. Cela va bien au-delà d’une triste histoire de seigneur aux mœurs malsaines. Nous pourrions simplement l’éliminer, mais cela ne rendra pas à la forêt la paix. Que du contraire, cela accélérera probablement la naissance d’un feu plus destructeur encore ! Je crois que nous devrions trouver le moyen de faire connaître aux autres hommes et à leur justice les crimes qu’on commis un des leurs. Je ne sais comment se compose leur société, ni quels sont les procédés auxquels ils sont sensibles. Toutefois je suis convaincue que le seul moyen que nous ayons de démasquer ce vilain, est de lui tendre un piège, avec la complicité des autorités du Fort. Une idée lui apparut soudain. Une idée un peu folle, à laquelle elle n’avait pas songé longtemps, mais elle préféra la partager sur le moment plutôt que d’attendre d’avoir plus mûrement réfléchis. « S’il le faut…je jouerai le rôle de la proie. J’imagine qu’une personne…de mon teint, ne fera qu’attiser la haine, et fais donc de moi la cible idéale pour une chasse de cette sorte. »

Soucieuse de prendre les risques à la place de ses compagnons, elle oublia que justement sa couleur pourrait servir d’excuse aux chasseurs, et ne prouverait pas grand-chose. La personne la plus disposée a remplir ce rôle était la jolie Burd’Hymme, mais cela n’effleura bien entendu pas même son esprit.

- ’ ’

Le sagespectre sembla se délecter quelques instants des sonorités si familières même provenant de la bouche d’une autre race.

- ’ ’

Nob se recula dans un coin un peu plus sombre de la pièce. Des souvenirs revenaient de nouveau le harceler, cela etait devenu fréquent ces dernières heures et les paroles de Shalana rendaient encore plus criant certains manques. Jamais, non, jamais il ne pourrait retrouver la véritable complicité ou fusion qu’il pouvait ressentir dans une communauté sagespectres. Il devait toutefois s’avouer qu’il avait volontairement fait le sacrifice de tout cela en partant sur les routes. Partir à la recherche d'autres communauté Halfelin etait une chose, mais les chances de retrouver les traces de membre de sa race en dehors des bois de Chondal ou de Channate etaient bien faible. D’ailleurs, Shanala n’avait pas précisée si elle parlait de hin dans la haute forêt ou plus précisément, de sagespectre. L’heure n’etait malheureusement pas à ces questions et le prêtre d’Urogalan se concentra sur les dires de Lhamo.

-Effectivement, cet Eirontalar ferait certainement de vous une proie de choix, mais il est à craindre que les officiels se fassent également un plaisir de vous faire écharper par leur chiens. Si nous tentons de coopérer avec les autorités du fort, n’est il pas à craindre que notre cible en soit averti ? ? J’imagine qu’il doit y posséder des amis et des relations . Quand à mettre fin à son existence par nous même, ça l’empêcherait de nuire mais pourrait également pousser les humains à prendre des mesures punitives contre les elfes. Par ma foi, c’est un dilemme que je ne sais comment résoudre.

Excepté lui même, tout ses compagnons étaient des elfes, Nob craignait que la parole ou les actes d’un elfe ne vaille pas grand chose par les temps qui couraient.

-Franchement, si j’ai bien compris, le fort est dirigé par des hommes comme ce Teilos. Des aristocrates férus de chasse même si on peut les espérer plus honnêtes, ils n’en restent pas moins humains et du même sang. Dame Shalana, peut on espérer du soutien de la part d’autres notables ? Bougeraient ils le petit doigt ou feraient ils corps avec l’un des leurs ?

Le Hin s’etait assis par terre dans l’un des coins sombres semblant presque deviser tout seul à haute voix.

-Non, non, non, je ne vois vraiment pas un de leur aristocrate nous accompagner pour confondre l’un des leurs. Finalement, tout ce que nous pourrions faire contre Teilos sera suspect, car vous êtes des elfes. Je ne connais pas encore l’opinion des gens de la régions sur les elfes, mais j’imagine qu’il y en aura toujours pour crier à la machination elfique. Sauf si cet Eirontalar à déjà une si mauvaises réputation auprès des siens qu’ils soient déjà à la recherche d’un prétexte. Il nous faut sérieusement songer à demander l’aide d’un notable ou pour le moins, d’un groupe d’humain pouvant nous aider. Quand à organiser un appât, peut être, mais Teilos est chasseur, un chasseur garde toujours des trophées, non ? Avec quelques complicités, ne pourrions nous pas tout simplement trouver ces preuves dans le pavillon de chasse des Eirontalar ?

Le Saë Tel'Quessir resta coi tandis que ses compagnons s'exprimaient.
Il n'était pas doué pour le faire, du moins pas en grand comité, et c'était toujours un peu une souffrance que de devoir faire l'orateur.

En conséquence ça le rendait hésitant, irritable presque, comme quand on est accablé d'une corvée.

En outre, ils n'avaient fait que marcher depuis tous ces jours et finalement , il ignorait ce que ressentait Lhamo et le Hin.

Mais cette fois ils touchaient au but : Cette Shanala était l'instigatrice de l'alerte de Thüldae et elle leur avait déjà beaucoup appris.

Comme un automate il suivit la guérisseuse tandis qu'elle s'installait dans un autre coin de la pièce. Elle semblait avoir des accointances avec la druidesse aussi quand résonna un langage inconnu pour lui, il pensa que les deux femmes échangeaient dans un langage secret soit druidique soit sylvestre de la Haute-Forêt.
Quelle ne fut pas sa surprise de voir que c'est à Nob que s'adressait la sage ancêtre, lui témoignant un respect et un accueil à la mesure du courage et des souffrances endurées par le Sagespectre pour la confrérie jusqu'à présent.

Il ne put toutefois s'empêcher de réagir à la proposition de l'Elfe Noire :

- C'est une idée très humm ...spéciale, Lhamo. Votre couleur de peau risque fort d'enclencher leur peur plutôt que d'attiser leur haine.
Et même s'ils n'ont pas peur, dans leurs massacres, au delà de plaisirs impies, ils essaient sans doute d'agrandir la zone où ils chassent de façon plus conventionnelle en la dépeuplant d'elfes sylvestres...

Il vaudrait mieux que ce soit moi la proie. Je suis un peu acrobate et je devrais pouvoir me protéger des chiens grâce aux arbres et sans doute même échapper aux chasseurs ...
Et sinon il vaut mieux perdre un novice qu'une initiée.
La confrérie a déjà failli être anéantie en début d'année je crois, quand Thüldae a été attaqué, non ?

Mais j'aurais presque tendance à dire, qu'il faudrait deux personnes : Un elfe et un humain - J'exclus les demi-elfes qu'un côté soupçonnera toujours l'autre de manipuler - Afin que les deux nations voient qu'elles étaient toutes deux victimes et resserrent leurs liens en combattant un ennemi commun.

Les humains que j'ai un peu côtoyés sont infiniment plus variés et plus tranchés que les autres races.
Nous le savons d'ailleurs, nous qui connaissons par leurs actes à la fois Ethan et Eirontalar.

Je ne serais pas surpris qu'il y ait dans Fort Noenar même un ou deux cœurs purs, capables et désireux de s'élever contre ce fou.

Mais vous avez tout deux raison : Comment les trouver, comment entrer en contact avec eux ?

Encore une fois, il avait péroré comme une Teu'Tel'Quess en goguette

Vingt troisième jour de la Flétrissure-Année de la Magie Sauvage
23 Eleinte 1372 (CV)

MJ
Narration: Lhamo, Cyprien et Nob Sombreterre

Lieu : Chez Shanala
Temps : /
Moment : Dans l’après-midi

aux Rebhe-Llon, perdre un novice serait aussi douloureux que perdre un initié. Tout comme risquer sa vie de façon inconsidérée….

Shanala plisse les yeux et le front, son regard vide fixa les flammes un moment avant de se redresser subitement.redresse.

- Josh Larford, apporte le Sac de Bouc, là sur la grand table et ce qui va avec..

Le jeune garçon qui était resté jusqu’ici en retrait obéit et trouva rapidement l’objet demandé, il s’agissait d’un grand flacon trapu à flancs plats, inspiré des outres et qui contenait un liquide vert. Près de la bouteille Josh trouva une série de petits gobelets en étain qu’il ramena dans le coin et qu’il disposa avec soin devant le guérisseuse et lui tendit la bouteille. Sans dire un mot, elle fit le service avec soin, n’osant même pas imaginer qu’on puisse lui refuser ce breuvage qu’elle distillait elle-même. Pourtant elle s’arrêta au dessus cinquième vert.

- Josh Larford ? Crois-tu que cela soit raisonnable ?

Le garçon devint écarlate.

- J’ai dix-sept ans !

- Oui dix-sept ans, ce qui n’est pas forcément une référence mon garçon…

N'attendant pas un éventuelle réplique qui ne viendrait pas, Shanala remplit quand même le verre avant de poser la bouteille près d’elle. Elle prit son verre, laissant aux autres le soin de se servir et dégusta une petite gorgée de ce cru de manière experte. L’alcool qui dépassait légèrement les cinquante degrés dégageait des notes épicées et florales et provoquait en bouche une explosion de fraîcheur en bouche suivie d’une légère amertume dès plus revigorante.

- Les autorité du Fort, les Seigneurs de la Chasse comme ils se nomment ne vous seront d’aucune utilité, vous pouvez me croire…

Shanala tout en parlant, caressait les petits félins qui avaient prit place sur ses genoux et ronronnaient de plaisir.

- Non pas qu’ils se moquent de ce qui se passent mais que l’argent et le pouvoir règne en maitre à fort Noénar et plus est plus facile de se voiler la face surtout quand les preuves n’existent plus ou que certaines soit déjà partis vers d’autres lieux. Je ne suis pas de celle qui croit que cet Eirontalar est stupide et qu’il conserve une quelconque preuve de ses crimes vers lui.. Tout se passe dehors, à l’abri des regards…

Shanala leva son regard vers les compagnons.

- Taéros Eirontalar appartient à branche mineure d’une puissante famille d’Eauprofonde, mais ici nous ne somme pas dans la Cité des Splendeurs, il se sent libre de faire ce qu’il veut mais il est intelligent. Très intelligent. Le confondere ? Pourquoi pas ? En faire un exemple ? Il le faut.

Josh Larford se racla la gorge pour attirer l’attention des compagnons.

- Heu…Mon père pense que si nous apportons les preuves du forfait de ce noble aux autorités du Fort sans qu’ils se mouillent, ils seraient plus compréhensif, et leur permettrait de régler cela entre eux rapidement….

Shanala se tourna vers lui, un léger sourire ourla ses lèvres.

- Oui Tout leur apporter sur un plateau....comme cela ils ménagent les susceptibilités et régler cela entre gens de bonnes familles… Amrath Mulnaubar ; le porte-parole des Seigneurs de la Chasse en serait ravi, j’en suis certaine. Mais nous avons aussi une inconnue, c’est la réaction des elfes surtout depuis l’irruption de ce druide Sy’Tel’Quess…De leur côté, ils ne vont pas rester inactifs, je le crains.