Les esclaves, Eltabar

a naine était, comme certain de ses compagnons l'avaient déjà remarqués, une personne qui aimait bien, et surtout beaucoup parlé. Elle était donc globalement plutôt contente que ses compagnons aient entamés une discussion sur un sujet où elle avait son mot à dire. Elle commençait même à être rassurée pour sa vie et celle de ses deux compagnons présents qui s'étaient finalement pas mal sortis de leur première confrontation aux bandits faisant office de gardiens de l'ordre. Pour celle d'Omsath elle n'était pas vraiment inquiète ayant vu la façon dont avait été traité Karth lors de son échauffourée avec Daleto, alors qu'en achetant l'elfe Ramas Fezim ne devait pas avoir le même but. Elle se doutait évidemment que la vie d'Omsath ne devait pas être facile dans le manoir du mage rouge.

-Mon cher Baltanin je suis parfaitement d'accord avec toi. Pour la bière comme pour le bourreau. Comprenez que j'aimerai si c'était possible délivrer Omsath et les autres esclaves le plus vite possible mais je crains qu'en nous rendant trop tôt chez ce pourceau de mage rouge nous ne fassions qu'engendrer son ire et beaucoup trop de choses reposent sur son bon vouloir. J'enrage nous ne sommes pas encore dans son domaine que nous sommes déjà en son pouvoir. Je pense que pour boire la bière nous serons bien dans cette auberge sur le port. Je n'ai pas l'habitude de fréquenter des ports, la majorité de l'eau que j'ai durant ma courte vie étant plus dure que ces pavés sur lesquels nous marchons, mais je pense que c'est là où on doit pouvoir rencontrer le plus d'étrangers et donc paraître le moins suspects.
Quand au garde, j'ignore si il est de mèche avec le mage mais il est clair qu'il ne nous a pas cherché des poux trop longtemps. Après est-ce par ce que le mage lui a demandé de nous laisser tranquilles ou parce qu'il craint sa colère si il retarde ses invités, c'est dur à dire. Au choix, j'aimerai mieux la seconde car si les gardes y sont mêlés ce que prévoit l'arcaniste rouge doit être de grande ampleur. Je crains que ce soir, nous soyons, d'une façon ou d'une autre esclaves de ce thayen.

La naine eut très vite honte d'une pensée qui lui traversa l'esprit. ¤ Au moins je n'endurerai pas les souffrances de cette pauvre Omsath car je doute que ce porc rouge me trouve à son goût. ¤ Cela fit soudain penser à la naine que le mage rouge ne comptait peut être pas faire du groupe d'esclaves achetés le matin même, ou au moins d'une partie de celui-ci, des esclaves normaux. Que pourrait bien faire ce mage avec un elfe aussi chétif, sans vouloir le vexer, et certainement moins compétent que lui dans l'art des arcanes?

Voyant que Baltanin, ne pensant plus qu’à boire, n’avait pas plus écouté ses subtiles analyses que les pépiements polaires, Nasky laissa le rôdeur-éclaireur prendre deux mètres d’avance et enchaîna la conversation avec Gunlann

- Je te le dis moi, c’est tous les puissants de ce pays qui nous attendent. Tu ne crois pas que deux nains, accompagnés d’un des ennemis mortels de Thay, seraient arrivés sans encombre jusqu’ici sans leur aide?
Remarque, notre numéro a du divertir les gardes, car il était de qualité… Ca doit leur changer des spectacles Hobbits de cirque…
Mais je pense que certains sur-tatoués… comme les types à l’arrivée de la ville, tous les gardes qu’on a rencontré dans le voyage, le fameux éxécuteur … avaient bel et bien des recommandations pour nous laisser tranquille. Et puis il y a le plan que tu as trouvé si facilement.
En fait, l’acheteur d’Omsaht, on dirait bien qu’il collectionne des aventuriers étrangers, comme si il voulait une équipe venue d’ailleurs … Il a même acheté un elfe qui devait avoir des pouvoirs magiques, car sa frimousse n’était pas du genre à effrayer même un demi Rashémi. Et il y en a pourtant eut un qui a détallé comme un gros lapin de 100 kilogs !!! Hi hi.
Figure toi qu'en plus, je le connais . Il s’appelle Karth. Je l’avais déjà vu lors d’une caravane. Malgré sa calvitie, il ne m’avait pas semblé aussi pleutre.
En tout cas, j’ai dans l’idée que ce Ramas et une bande de « terroristes » dans son genre ont un projet pour nous tout autre que les « éboulis de Tyr ».
Et puis, au fait, que lui vous avez-vous dit et que vous a-t-il répondu à l’encapuchonné ? Pourquoi n’a-t-il pas utilisé sa chevalière en fer pour vous massacrer ? C’est quoi exactement cette histoire de rendez vous ?
Et pourquoi pas un truc du genre : compétition entre races pour un objet magique ? La Lanceflamme, c’est quoi au juste ? Une tige de fer que l’un des meilleurs guerriers des Thay doit pouvoir utiliser pour embrocher deux nains et un Rashémi à la fois.. et ensuite les faire griller par un dieu du feu ?
…encore qu’il pourrait prendre des chauves, ce serait aussi amusant, moins compliqué et moins cher que l’importation. Il pourrait recommencer plus souvent.
Il veut peut etre varier ses habitudes alimentaires.

La subite faim apparue à l’idée de brochette, ajouté à une trop intense activité cérébrale, lui provoqua une de ses fréquentes et brèves poussée d’adrénaline. C’est ce moment que choisit un simple passant demi tondu assez mal habillé et de corpulence plutôt petite pour croiser le trio à l’angle d’une petite ruelle peu fréquentée. Après avoir furtivement observé les alentours à la recherche d’un éventuel garde qui les suivrait et qui n’aurait pas été informé des recommandations protectrices d’une quelconque «Organisation Thayenne d’Aventuriers Novices » le barbare croisa le regard surpris du simple Thayen et, du haut de son mètre quatre vingt dix terminés en longs blocs de mèches ornés d’anneaux, il se permit de le prendre à témoin de sa lassitude intellectuelle de barbare Rashémi en lui soufflant gentiment à la figure, les yeux écarquillés et le sourcil droit relevé : "BouuuuuuhComme tout cela est fatiguant, vous ne trouvez pas ?"

Etant tombé encore une fois sur un Thayen peu enclin à l’humour et visiblement pressé de passer son chemin, Naskyrien, déçu de l’attitude des indigènes, continua sa discussion avec la naine des flocons au caractère plus social.
¤ Bon sang, mais je vais finir par me casser les reins si je continue à parler penché. ¤

es yeux de la naine s'ouvrirent en grand pendant que sa bouche en faisait autant. Le barbare avec lequel elle discutait venait d'appeler par son prénom ce qui était sinon un obstacle au moins un grain de sable dans le rouage de la grande machinerie de leur vie. Jamais elle n'aurait cru que le fier barbare pourrait pactiser avec un ennemi, surtout un ennemi issu de ces gens qu'elle croyait qu'il haïssait au plus haut point. Elle se mit à douter de lui réalisant à quel point elle le connaissait peu.
Soudain, comme le blizzard disparaît lorsque cesse le vent, la naine réalisa que le barbare ne connaissait peut être pas réellement ce thayen. Il connaissait son nom, la belle affaire. Elle aussi connaissait le nom de cette guerrière en armure noire et de son maître de mage et pourtant celui qui aurait dit qu'elle les connaissait réellement aurait menti. Elle les connaissait encore beaucoup moins que ses camarades, pour l'instant en tout cas.
Malgré tout cette réflexion sur l'identité du guerrier avait de multiples avantages. Si le barbare connaissait pour de vrai ce guerrier, il pourrait certainement fournir des renseignements des plus utiles. Cela lui fit penser qu'ils manquaient cruellement d'information sur Ramas Fezim et ses alliés. Sans compter que cela exacerbait la méfiance de l'Inugaakalikurite qui s'étaient atténuée suite à sa rencontre avec l'accueillant maître des réfugiés d'Arragrath. Elle décida intérieurement qu'elle continuerait à se conduire de la même façon envers ses équipiers mais qu'elle serait largement plus méfiante, quitte à leur sembler un peu froide. Elle attendit que Naskyrien ait finit de parler, et dire que c'est lui qui la surnommait la pie, pour lui répondre sur le ton le plus calme qu'elle put. Par contre, elle ne fit pas attention aux propos du Rashémi, même si elle réussit à capter la majorité de se questions.

-Tu connais l'un de nos ennemis mais c'est une nouvelle excellente. Que peux-tu nous dire à son propos dit tout ce qui te passera par la tête, tant qu'il est concerné évidemment. Au fait, je vais répondre à tes questions. Une Flammelance est une lance d'arçon, tu sais les armes qu'utilisent les cavaliers, enchantée et seul les plus puissants mages rouges en ont une en leur possession. Je ne crois pas qu'elle ait déjà été utilisée pour la cuisine mais je demanderai à maître Frolamin de te la prêter si tu veux tenter l'expérience, si toute fois nous réussissons à mener cette mission à bien. Pour le rendez-vous avec le thayen, Baltanin est de lui même aller voir le mage qui a semblé suffisamment intéressé par nous pour ne pas nous occire et pour nous inviter chez lui en prime. Mais je t'en prie dit m'en plus à propos de ce Carte, c'est cela?

Omsath, volonté : 6(dé) +4 >< DD15 = échec
Lyaël, volonté : 11 (dé) + 2 (racial) + 0 >< DD15 + 2 (charmée) = échec
Omsath est charmée
Lyaël reste charmée


Narration

Baltanin, Gunlann, Naskyrien

Tandis que les trois agents de la Compagnie des Marches d’Argent se dirigeaient vers le port, suscitant au passage la curiosité de la population, qui de façon plus ou moins hostile exprimait son étonnement, le bruit de couvert ou l’odeur alléchante de plat épicés en train de cuire indiqua davantage que la hauteur du soleil dans le ciel qu’il était aux environs de la mi journée. Pressé par leur faim, leur soif, et probablement une once d’angoisse, les compères marchaient à vive allure, longeant le grand mur des entrepôts et se faufilant dans la foule du marché.
L’endroit grouillait de vie et de couleur. Chaque étals offrait au regard et à l’odorat des mets raffinés, des tissus de grande qualité, ou des objets surprenants. Une garde légère patrouillait parmi les passants et surveillait le moindre mouvement suspect. Cette fois encore, le trio ne passa pas inaperçu, et après s’être fait prendre pour des esclaves en fuite, les saufs conduit s’avérèrent une nouvelle fois de précieux atouts, et l’incident se clôtura simplement par le crachat d’un autochtone aux pieds de Baltanin tandis que celui-ci rangeait les précieux documents avec soin.
Au terme du marché, qui formait un « L » en suivant le tracé du grand mur, se trouvait la place portuaire. Plusieurs tavernes s’y tenaient dont celle que Gunlann avait repéré plutôt dans la journée. Le bâtiment était construit autour d’une petite cour à ciel ouvert, ou diverses couchettes de bois entouraient une fontaine au débit régulier. Des fleurs odorantes qui poussaient en grappes dans des pots suspendus donnaient une petite touche de couleurs sur les murs uniformément ocre. La coutume locale semblait être de se restaurer allongé. Aucune chaise, aucun bar, aucun tabouret constituant la norme des auberges du nord, ne composaient le mobilier de celle-ci. Des tables basses et des sofas revêtus de tissus moirés étaient posés a d’intervalles régulier, certains dans de petites alcôves protégée par des voiles, ou l’on devinait la présence d’esclaves particulières. Le service était assuré par des jeunes femmes toutes torses nues, et de beauté fluctuante, le lourd fard qu’elles portaient empêchaient pour la plupart de rayonner pleinement. La vue des grappes de fruits inconnus, et des corbeilles de pâtisseries raviva l’appétit de Naskyrien, tandis que Baltanin, ne repéra pas une seule chope de bière naine.


Daleto, Karth

Un silence pesant s’était installé entre les deux individus, particulièrement depuis qu’Arthat avait repris son post de garde sur la terrasse. Le temps était long, trop long même. Il était surprenant qu’on ne s’occupe pas davantage d’eux. N’y avait donc t’il aucune tache de prévue pour ce nouvel esclave? Personne pour lui donner de directives ?
Dans la demeure, seul le bruit coutumier des esclaves faisant leur office régnait, et les pas lourd de Savvir Phen à l’étage. Pas, que Karth avait appris à reconnaître.
Une mouche vola.

Lyäel, Omsath

Les deux jeunes filles s’étaient plongées dans l’eau avec délice. Au fur et à mesure qu’elle se détendait dans l’onde chaude, les parfums capiteux se répandant dans la pièce empli la prêtresse d’une volupté soudaine. Tout ses sens se relâchaient tandis qu’un bien être indéfinissable s’emparait d’elle. Au sourire qu’arborait à présent Lyaël, il était certain que la même sensation de bonheur l’avait envahie également. Elles nageaient toutes deux dans le bassin sans penser davantage aux soucis qui les accablaient plus tôt, sans prendre garde à la présence de Ramas Fezim qui ne semblait pas avoir bougé d’un pouce.

- Que voilà un tableau charmant ! déclara une voix agréable dans leur dos

Au même instant le mage rouge assoupi se volitisa en une centaines de bulles aux reflet irisés qui s’éparpillèrent dans la salle d’eau sous le regard fasciné des demoiselles.

Ramas Fezim

- Vous êtes absolument ravissante, poursuivit Ramas Fezim, qui se tenait au bord du bassin, vêtu d’une nouvelle robe de satin écarlate, esquissant un sourire mystérieux « Qu’il m’est douloureux de savoir que vous ne resterez pas ici éternellement, pour mon plus grand plaisir. Ainsi est faite l’existence… » Il s’agenouilla alors, afin d’être plus proche d’Omsath et Lyaël. Son regard était mystérieux et envoûtant. Il murmura : - Je lis dans vos yeux votre étonnement. Vous vous surprenez de ne pas me voir user de vous comme de vulgaires esclaves, n’est ce pas ? La réponse viendra bien assez tôt. Il est des choses contre lesquelles on ne peut lutter, même possédant toute la puissance du monde. Profitez donc de ce moment de répit. Savourez la douceur du luxe que je peux vous offrir…pour le moment. -------------------- Ramas Fezim est un homme de grande et fière stature. Bien que peu musclé comparé a un homme habitué au travaux physique ou au maniement des armes, on ne peut dire qu’il ne soit pas bien bâti. Un regard sombre, un visage austère qu’il présente en public peut soudainement se parer d’un air de frivolité où brille l’éclat de la débauche.

Il se releva doucement et se dirigea vers une autre porte qui était dissimulée dans le mur.

Ayant calculé la superficie de la pièce une dizaine de fois en réajustant à chaque fois son approximation de la longueur, la largeur et de la hauteur de la pièce dans laquelle il se trouvait, Daleto imagina qu’elle pouvait être l’occupation de la guerrière située à l’étage au-dessus. Il tenta de se la représenter. Le bruit de ses pas avait l’aspect d’un décompte malsain, qui indiquerait la fin de son attente et le moment où il serait pourquoi on l’avait amener ici.
¤ Sans doute sait-elle pourquoi je suis ici. Il serait plaisant de lui parler pour connaître mon destin dans cette région d’humains dégénérés. ¤ pensa-t-il en mettant fin à ses exercices mentaux et en reportant son regard sur son garde du corps qui semblait s’amuser autant que lui.

« Dites moi l’ami, le traitement des marchands d’esclaves et nos … hum petits incidents m’ont épuisé, si jamais je dois vous être utile pour quoi que soit, il serait bon que je me repose pleinement afin d’être redevenu maître de tout mes moyens. A moins que vous ayez quelques potions capables de me rendre ma forme » dit-il en brisant ce silence de mort. Sa question était un peu osée et sans doute inutile mais il n’avait rien trouvé de mieux pour réengager la conversation.

« Ah oui au fait, peut être savez vous où se trouve mon équipement, j’ai un grimoire et quelques objets importants faisant parti du fouillis indispensable à mon efficacité, je suis un peu inquiet à leur sujet. J’aimerai grandement les récupérer en sortant d’ici » enchaîna-t-il sans attendre la réponse à sa première question.

Le bagou n’était pas une de ces qualités premières mais il avait là l’occasion de l’exercer. Le risque permanent que représentait ce thayen en colère était un exercice aussi dangereux que la traversée d’un gouffre sur un fil et sans filet. L’erreur n’était pas permise, lui qui en avait déjà commise une et qui l’avait payée chèrement. De plus la promiscuité de cette pièce sombre commençait à lui donner le cafard, il aurait bien voulu sortir de cette prison et respirer à nouveau l’air libre aussi vicié soit il par la présence de tant de mages maléfiques. Peut-être allait-il le convaincre de le sortir d'ici.

omme il est difficile pour une naine polaire de garder son calme dans une grande ville comme ceci. Rien que de devoir subir un énième contrôle de ces gardes imbéciles exaspérait Gunlann. Non seulement ces gardes imberbes et chauves sont d'une laideur peu commune, non seulement ils ne vivent que pour le mal et par le mal mais en plus ils sont totalement paranoïaques.
Sans compter l'intrépide gredin qui osa cracher aux pieds de Baltanin. La naine avait fait un petit pas en avant dans le but de faire regretter à ce malappris d'avoir manqué de respect à son compagnon. Son esprit avait été parcouru d'un dilemme quasi-insoluble. Devait-elle chercher à venger l'honneur bafoué de son camarade nain ou tenter de paraître aussi stoïque qu'un glaçon pour avoir une chance de sauver Omsath? Et elle ne l'avait pas frappé car elle ne pouvait pas chercher à venger l'honneur du nain sans le nier par son intervention personnelle. Elle lui avait tout de même lancé un regard aussi noir qu'elle l'avait pu même si elle savait que la noirceur de son regard ne pourrait jamais égaler celle du coeur de cet homme. Elle avait serré les dents en se disant qu'ils seraient mieux à l'auberge et qu'il fallait donc attendre et être patiente.
Mais l'auberge ne valait pas vraiment mieux tout compte fait. La naine se demanda une nouvelle fois comment des êtres vivants pouvaient décemment espérer mieux valoir que d'autres. Comment pouvaient-ils croire que leur statut d'êtres humains les autorisait à en mettre d'autres en esclavages? Et pourquoi? La naine avait peu étudié avec son mentor mais elle avait tout de même acquis une certaine connaissance. Elle savait qu'on travaille toujours mieux lorsque l'on a envie de bien faire et que donc sur un plan purement productif l'esclavage était une perte. Et l'esclavage entraîne une accoutumance au non effort qui rend incompétent. Sans compter évidemment que l'esclavage crée une haine entre l'esclave et le maître qui ne peut qu'occasionner des conflits. Non la prêtresse d'Ulutiu ne pouvait pas trouver un quelconque avantage à l'esclavage à part peut être l'assouvissement d'un complexe d'infériorité. Sans compter que dans cette auberge non seulement les esclaves avaient été spoliés de leur liberté mais aussi de leur honneur car elle devait servir à moitié nues. Elle eut à nouveau une envie irrépressible de toutes les libérées mais elle oubliât vite cette idée avoir les yeux plus gros que le ventre ne la mènerait nul part. Elle décida donc d'aller s'asseoir, ou plutôt se coucher encore une idée saugrenue mais acceptable celle-ci, en attendant de savoir que faire. La naine n'avait as encore une faim irrépressible et souhaitait attendre de savoir ce qu'allaient faire ses camarades.

-Le déjeuner n'est pas encore passé et notre visite chez le mage rouge doit avoir lieu après le dîner. Je pense que nous ferions aussi bien de rester ici entre ces deux repas, non?

Karth commençait à trouver le temps long. D’habitude on l’appelait pour faire des rondes dans la demeure, où bien Savvir venait le voir pour lui ordonner une chose ou autre qui devait être faite. Mais là rien! Il devait donc rester là à s’impatienter sur sa chaise et à surveiller un esclave épuisé. Tout ce qu’il avait pour lui était que cet elfe était magicien, et le guerrier ne voulait pas le laisser sans surveillance. Par expérience, Karth savait que ceux qui manipulent cet Art, ont beaucoup de possibilités, et que parfois même l’épuisement physique peut ne pas venir à bout d’eux.

Soudain, l’elfe brisa le silence de mort qui s’était installé dans la pièce. Cette voix résonna dans sa tête le faisant revenir subitement des limbes dans lesquels son esprit vagabondait, malgré ses yeux grands ouverts.

¤ "Ami"? Est-il fou ? Il m’a humilié, et j’ai bien failli le tuer, et il m’appelle "ami" ?¤

A ces pensées son regard se fit d’un noir mortel, mais l’allusion aux "incidents" qui s’étaient déroulés plus tôt entre eux, le fit sourire, il n’avait rien d’engageant, mais c’était tout de même un sourire. Malgré sa focalisation sur ces passages, le thayen avait saisi le sens des paroles de l’elfe, et il ne tarda pas à lui répondre.

- Pour ton équipement "l’ami". Karth avait dit ça sur un ton plus qu’ironique. "Je crois savoir de quoi tu parles, mais Seigneur Fezim, t’as acheté tel que tu es, je n’ai vu aucun équipement. Mais si mon seigneur te veut pour tes capacités de magicien, ce dont je doute fortement, il saura te donner le nécessaire."

Karth fit une pause dans la conversation, le temps de réfléchir au premier point.

¤Ce qu’il dit est justifié, peut être devrait je l’amener dans les quartiers des esclaves...¤

- Il n’est peut être pas utile que tu redevienne maître de tes moyens tout de suite, elfe. Et je n’ai reçu aucune directive te concernant, et comme je ne suis pas là depuis très longtemps...

Cette dernière partie avait été presque murmurée, mais cela lui était venu spontanément, comme une prolongation de sa pensée.
Le guerrier s’activa alors, se levant de son tabouret, il empoigna aussitôt sa lame et approcha de l’esclave. Et s’adressa à lui sur un ton plus autoritaire.

- Lève toi ! On va faire un tour...

Son visage était impassible, encore une fois, il allait faire juste ce qui lui semblait être son travail.

Tout le long du chemin jusqu’au quartier portuaire, le discours était allé bon train entre le grand barbare et la petite naine .
Baltanin, aussi inquiet et grincheux que d'habitude, mais peut etre avec les épaules plus affalées encore, tel un saule apprenant l’arrivée de l’hiver, gardait sa petite avance et laissait ce qu'il semblait considérer comme une Double Calamité Autonome poursuivre son tir verbal simultané au milieu de la capitale des thayens.
Le chemin jusqu'à l'auberge qui devait les restaurer et les abreuver ne devrait normalement pas etre long, mais suffisant pour que nos deux prodiges nordiques de la causette s'en donnent à coeur joie.
Depuis qu'ils se connaissaient, le barbare avait plutôt tendance à subir les incroyables raisonnements à haut débit de Gunlann avec plus ou moins de patience, mais à ce jour, entre l'impression de danger plus fort et plus proche, ainsi que les balbutiements poétiques internes du récent lettré, Nasky était plus bavard qu jamais .
Bien sûr, la naine n'écoutait pas le tiers de ce que le barbare disait, mais ce dernier ne s'en apercevait pas car il n'écoutait pas la moitié de ce que disait la naine. Il raconta avec moult détail sa rencontre avec Karth, en profitant pour narrer comment il s'était retrouvé tout seul derrière d'étranges éboulis apparus au milieu de la route, un énorme rocher de plus de 100 kilos ayant frôlé son oreille droite, comment il avait du se battre contre des chevaux paniqués et un commerçant paniquant de la panique des pauvres betes... et tout cela, seul avec sa hache à deux mains .. à la ceinture...

- Le fameux Karth était alors un autre mercenaire caravanier employé par un autre marchand que le mien. C'est un Thayen avec qui je n'ai préféré jamais discuter... mais que je ne l'ai jamais embêté, tu me connais? Mais bon, je pense qu'il faut s'en méfier plus que de coutume de ce bonhomme, non immunisé à la magie elfique soit dit en passant.
Je le sens fourbe, gros plein de soupe, la cervelle …, (ou autre chose hi hi)… coincée dans les biceps.. Non, il ne faut pas lui tourner le dos à ce Thay qui se croit Rashémi… , ce valet sans coeur serviteur à carreau de reine rouge , cet as des sprinteurs ... Oui, mieux vaut se méfier du jeu de Karth !!!

Puis, baissant le ton au point de devoir se plier davantage vers l'appareil auditif de la môme des glaces, il en profita ensuite pour ressortir sa panoplie historique maintes fois entendue par la naine sur les Rashémis divisés en deux, les poil ras et les poils longs, ces derniers étant plus naturels, moins androgynes, et surtout plus libres. Il enchaîna à voix basse sur le souvenir des scènes qu’ils venaient de vivre sur la place, oscillant entre la position "courbée en deux" à celle de "pliée en quatre" accompagné de pouffements hilares plus ou moins contrôlés.
Ils finirent par arriver dans le quartier portuaire, beaucoup plus mouvementé, et inévitablement truffé de ces inévitables sentinelles chauves faisant semblant de contrôler des papiers inutiles. Etant des personnes trés maladroites, ils n'osèrent pas demander franchement au trio une petite démonstration du fameux numéro de la place rouge qui, à n'en pas douter, devait déjà fait le tour de toute la capitale Thayenne. L'inspiration des esprits forestiers ne se manifestant pas, ils n'offrirent point à leurs contrôleurs ce privilège. Le peloton Thayen laissa donc partir le trio révolutionnaire avec une pointe de déception que les rustres ne surent manifester autrement que par un pitoyable mépris, ce "laisser aller" aussi louche que les autres réconfortant au passage la certitude de Nasky de se trouver en plein milieu d'un "voyage organisé" par, et malgré, le pays Thay.

Il n’avait du coup plus parlé jusqu’à l’auberge. Celle ci lui sembla plus une maison de plaisir qu’une simple taverne sympathique et modeste.
Tout était d’un luxe tape à l’œil carrément désagréable et, comble de prétention et de mauvais goût, des esclaves bien vivants étaient si nombreux qu’ils semblaient remplacer jusqu’aux portemanteaux.
Se sentant très mal à l’aise et redoutant l’idée de passer toute l’après midi à devoir s’empêcher de roter après un bon repas, voyant de plus qu’il n’y avait même pas de chaises prévues, se demandant si ce rôle n’était pas également destiné à des esclaves d’une race inconnue en forme de fauteuil, le barbare dit : ...

- Mouais, drole de gueule ici ? C’est ca une auberge chez les Thayens ? Si vous voulez mon avis, ce n’est pas là qu’on va se régaler et encore moins déguster une bonne bière de génépi.

Il se demanda également si ils n’allaient pas devoir y laisser l’intégralité de leurs bourses pour, au final, mal se sustenter, mal boire et avec, en cadeau d'adieu, un massage effectué par des esclaves aussi joyeuses de pétrifier la viande d'un barbare de Rashéménie que lui-même le serait de devoir se bouffer du Hobbit !!! Il eut néanmoins une idée. ...

" Etes vous sûr, mes amis, que c’est bien ici que le seigneur Ramas Fezim nous a dit d’aller sans se préoccuper d’argent ? Que les gens de ce lieu connaissaient très bien notre nouvel employeur, et ne nous feraient rien payer ????
Après tout c’est vrai qu’on est invités, non ?? dit il avec un demi sourire et un subtil clin d’œil en regardant les nains surpris par ses dernières paroles.

¤ Parfois mes qualités d’orateur m’étonnent moi-même ¤ pensa Daleto en se relevant lentement. Soit le guerrier rouge avait une envie pressante de quitter cette pièce, soit il avait réussit à le convaincre sans faire allusion à son intention première. Enfin peu importe, le résultat était là et l’elfe doré en était ravi.

La vue de la main posée sur la hampe de son épée était une peur qu’il commençait à bien surmonter. Cette balade n’était pas une conduite à un échafaud ou un bûché, donc pas de quoi paniquer tel un nain devant son créancier.

Son esprit divagua une dernière fois au moment où le thayen se trouva devant lui. Il se rappela des quelques vers qu’il aimait de temps en temps fredonner sur les chemins de campagnes en quêtes de solitude ou de paix. Il ne pu s’empêcher de les chuchoter une nouvelle fois.
« Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que l’horizon embrassant tout le cercle
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;

Quand la terre est changée en un cachot humide,
Où l’espérance, comme une chauve-souris,
S’en va battant les mûrs de son aile timide
Et se cognant la tête à des plafonds pourris ; … »

Il s’arrêta de peur d’effrayer ou d’ennuyer l’homme en face de lui.
« Je m’excuse, je me suis un peu égaré, quand le corps ne suit plus mon esprit à tendance à prendre le pas … enfin. Où allons-nous ? » lui demanda-t-il en regardant successivement les différentes portes que possédaient l’endroit.

Alors qu’ils s’apprêtaient à se diriger hors de la cuisine, les douces paroles de l’elfe surprirent le guerrier.
Il observa l’esclave avec un regard surpris, jamais il n’avait entendu des mots employés de cette façon. Certes, il avait parfois rencontré des bardes, mais il ne les avait pas supporté assez longtemps pour s’attarder à ce qu’ils disaient... Cependant tous ces enchaînements de paroles lui semblaient étrange, cela contrastait énormément avec tout ce qu’il avait connu jusqu’à présent. Et enfin de comptes, il réalisait qu’il avait énormément de choses à apprendre. Comme il l’avait déjà entendu dans la bouche des quelques mages thayens qu’il avait pu rencontrer, dont son Seigneur, la connaissance elle aussi peut être source de pouvoir. Ces enseignements corroboraient d’ailleurs ceux du vieux Gorthik qui lui avait appris les rudiments du combat : "connaît bien ton ennemi, et tu auras toujours un coup d’avance sur lui."

Il devait donc apprendre, non pas la poésie elfique en particulier, mais il devait expérimenter le monde. Et parfaire sa connaissance du combat, de ses ennemis, et de tous les nombreux autres domaines qui se présenteraient…

Il fut soudainement interrompu dans le cheminement de ses idées, par les excuses de l’elfe. Karth se reprit feignant l’indifférence. Il ne fit aucune remarque, se contentant d’avancer, tout en s’assurant que le magicien le suivait docilement...

- Je vais t’amener aux quartiers des esclaves, là-bas où tu pourras te reposer sur une paillasse plutôt que sur le sol de la cuisine, et ensuite tu pourras peut être servir à quelque chose à Seigneur Fezim…

Ils marchèrent donc dans les couloirs de la demeure, jusqu’à arriver dans un petit escalier menant au sous-sol. En bas se trouvaient les quartiers de tout le personnel de la vaste demeure du Magicien Rouge mis à part le Chevalier Savvir Phen, sur la gauche le quartiers des gardes, et sur la droite les quartiers des esclaves. Il fit passer l’elfe devant lui et l’amena devant la pièce où dormaient les esclaves. C’était une grande pièce simple avec un minimum de mobilier, quelques lits superposés de simple facture, une table au centre, et un coin d’eau avec une bassine pour se laver. Malgré la pauvreté de l’endroit, le tout semblait propre et contenait le minimum de confort. La pièce était bien entendu vide à cette heure de la journée, et l’elfe pourrait donc choisir n’importe lequel des lits pour s’y reposer jusqu'à la nuit.

- Voilà ici tu peux te reposer, profite bien de cet instant que je t’accorde, tu n’auras peut être pas de répit avant un bon bout de temps. Alors ne perds pas de temps à essayer de fuir ou d’inventer des plans farfelus et dors, de toute façon je ne serais pas loin alors inutile de tenter quelque chose...

¤Maintenant, il faut que je trouves un endroit pas loin...¤

Le regard de Karth se posa sur la pièce en face, il avait trouvé comment s’occuper tout en restant suffisamment proche du magicien pour l’empêcher de commettre n'importe quelle folie...