Contrat à délai... déterminé.

Orlpar cogita un bref instant, jaugeant les capacités physiques d'Aeryth pour divulguer à celle-ci sans passer par l'intermédiaire naine:

- Ben ouais, pourquoi pas...ça peut être pas mal, le métissage des cultures, pas vrai Glër ?
Bon, faudrait penser à sortir de cet endroit, j'ai les poils au garde à vous.

Le soldat avait tout de même empoché la note parcheminée et, se dirigeant vers la sortie, mit le pied sur une dalle qui s'enfonça dans le sol.
Aussitôt, des étincelles jaillirent d'os qui étaient éparpillés aux quatre coins d'une geôle, pour laisser place à deux squelettes dont la mine aurait suffi à dissuader un nécromencien. De plus, ces garde-mangers canins tenaient dans leur main un morceau de métal qu'ils avaient au préalable trouvé et rammassé par terre.
Ceux-ci se dirigèrent vers le fauteur de trouble d'un pas lent, sans arrière-pensées, dans le seul but de l'occire une bonne fois pour toute.
Orlpar, reculant légèrement et voyant les deux passoires assurer leur dérangement, se mit au niveau d'Aeryth et s'insurgea:

- P'tain... J'suis verni moi, j'ai vraiment la poisse... Voilà que maintenant j'attire cette satanée poche astrale... Mes amis, je crois que nous avons à faire à un piège magique de bas étage qui va nous coûter la peau des fesses, si vous voulez mon avis... Celà étant dit, j'ai assez souffert la dernière fois...

Sa bonne conscience lui rappela qu'il y avait quand même une jeune demi-elfe et un nain à aider... Il tentait par tous les moyens de paraître aussi indifférent que possible à toutes situations, mais au final, ce bougre avait bon fond et ne pouvait abandonner des connaissances. Il attrapa son épée d'un vif mouvement et plongea au sol dans la direction d'une carcasse, sectionna les tendons de celle-ci, ce qui la fit s'écrouler sans avoir même assené un coup de barreau. Quant à l'autre, Orlpar était à sa merci. Immobile, il immagina la masse de ferraille lui arriver dessus à grands pas. Ce simple d'esprit ne pensait jamais plus loin que le fond de son verre et les concéquences en étaient souvent néfastes...

Le petit répudié allait répliquer de façon plutôt méchante, et d' ailleurs on s' y attendait. Mais alors intervint le pied foireux d' Orlpar, interrompant Glër dans ses sombres pensées. Il était tout prés de l' entrée, mais lorsqu' il vit ces saloperies surgir du néant, immédiatement il recula et tenta de se faire oublier dans l' ombre, à l' arrière.
Sa réflexion momentanée se résumait à quelques bribes de réflexes :

- Bon, le p' tit a foutu la merde, et maintenant il s' y noie. Logiquement, quand il y sera passé, ils nous foutront la paix, et on pourra s' en aller avec cette fille. Qui m' trouve attachant, bordel de merde.

Cependant, alors que le soldat esquintait un des squelettes, une nouvelle pensée plus amicale fit son chemin dans les méandres tortueux du cerveau Hurletripien.
On peut la traduire ainsi :

- En même temps, avec lui j' ai de quoi me réconcilier avec Eauprofonde...ville des bourgeois...et puis il est bien, ce p'tit gars. Il paye sa bière.

Serrant les dents de manière à chasser toute réflexion, bandant ce qu' il lui restait de muscles, Glër abandonna son esprit tourmenté au Berserk. Brandissant son pic de prolétaire, les yeux rougeoyants, il chargea le second adversaire, tout en grondant ainsi :

- Sangdieu ! J' me ferais bien un p'tit os à moëlle !

Le spectacle d' un nain crasseux, à demi fou, sautant à la gorge d' un adversaire pour le perforer de multiples coups d' un outil qui n' est pas fait pour ça au départ, n' est guère fréquent.
De plus, on en sait pas grand-chose, vu que les derniers à y avoir goûté mangent les pissenlits par la racine.
Bref : si ce squelette ne fut point immédiatement terrassé par l' effrayante apparition, du moins il se détourna pour un moment de son idée première.

Aeryth recula de quelques pas ; elle marmona quelque chose et une colonne de feu jaillit de ses mains. La magie heurta un des squelettes qui s'effondra en un joli tas d'os roussis

Pas mal pour une frêle demoiselle ?!

Elle empoigna son bâton, prète à frapper.

Sorry, je risque de ne pas être là pendant un moment, mon écran à cramé , j'essaierai de venir faire un tour dès que j'en aurai l'occasion, continuez l'histoire, faites comme si j'étais à vos côtés et je répondrai dès que possible.

Glër, quoi qu' il advienne, s' en fichait pas mal à partir de maintenant. Il aurait voulu que ses adversaires soient de bons vivants, bien gorgés de sang clair, afin de pouvoir s' en asperger.
Un Berserker est tout sauf quelqu' un de bien. Ce n' est pas pour rien, tout de même, que Berserker signifie Fou Furieux...
Peut-être l' ennemi rescapé le savait-il...pour autant qu' un tas d' os puisse savoir quoi que ce soit. En tous cas, il ne manqua pas de profiter de l' état d' hystérie du nabot pour lui défoncer proprement un flanc avec sa massue improvisée.
Le blessé, projeté au sol, émit un hurlement atroce qu' on ne saurait décemment évoquer, l' entrecoupant de jurons de son cru.
Au prix d' un effort considérable, Hurletripes se releva et réussit à éviter un autre coup. Cependant, il était vraiment affaibli, et ce n' était que parce que le Hasard fait parfois preuve d' un humour très, très discutable que Glër tenait encore sur ses courtes pattes...

Orlpar se releva rapidemment d'un mouvement leste, toujours son épée à la main. Il regardait aux alentours essayant désespéremment de trouver une idée en s'aidant du décor. Mais quel décor ! Rien dans cette salle ne pouvait lui être utile et encore moins des pierres décellées et des os.
Lorsque sa tête eût finie de parcourir la circonférence de la pièce, elle s'arrêta et une expression d'étonnement vînt remplacer l'ancienne.
Etant donné que les tendons de son ex-ennemi avaient été sectionnés, le-dit adversaire ne pouvait se tenir debout -chose évidente-, mais le fourbe était bel et bien en train de ramper au sol toujours ampli par ses mêmes convictions.
Orlpar, qui pensait l'avoir vaincu ne réagit pas de suite, laissant au squelette le temps de se saisir de son pied. Un cri d'effroi retentit lorsque la chose fût faite. Le guerrier gigotait dans tous les sens pour se défaire de la vilainie et prononçait manifestement des jurons qui fûrent entre-coupés par ses bonds.
Aussi hilarante que la situation pouvait paraître, Orlpar ne riait pas; il donnait des coups de pied à "l'horreur" jusqu'à ce que celle-ci soit réduite en un tas d'os éparpillé sur le sol.

Quand au deuxième squelette, il était posté devant le nain blessé et comptait bien exterminer le gêneur.

Le pauvre type en avait assez. Le peu de facultés mentales qui lui restaient lui apprirent, comme on raconte une mauvaise blague, que le Berserk allait cesser. Et n'importe quel badaud abruti à l' ergot de seigle vous le dira : un nain pauvre, blessé, évervé, son amour-propre souillé durant une fin d' hystérie, est annonciateur de l'imminence de quelques coups de hache dans les rotules.

Mais Hurletripes était-il vraiment un nain ?
Son père aurait dit non. En fait, toute la race naine aurait répondu par la négative. Glër lui même les emmerdait pas mal, les nains...c' est vrai, quoi...
Après un dernier coup de pic que le mort-vivant put esquiver sans trop de problèmes, un sourire un peu triste vint échouer sous la moustache raide de sueur du nain.
Alors seulement il s' écroula.

Orlpar était trop éloigné du squelette pour espérer le distraire.
C'est donc au moment où Glër chût à terre que le morceau de ferraille qui servait d'arme à l'amas d'os passa à quelques centimètres de la touffe capillaire. La créature animée par magie se figea un instant comme stoppée par une quelconque force et s'écroula à son tour au sol redevenant ce qu'elle était auparavant.

Seule Aeryth, qui était douée de magie, pût comprendre le phénomène; et elle en déduit tout simplement que la durée du sort qui avait animé les deux monstres était terminé.

Orlpar n'y comprit pas grand chose, pour lui la magie était une chose qui le dépassait et à laquelle il ne valait mieux pas se frotter. Mais il était néanmoins heureux de voir l'autre "enfoutre", comme il l'aurait si élégamment nommé, manger les belladones par la racine: expression purement aquafondienne...

Le guerrier s'approcha du barbare à piètre carrure et vit que son inconscience était dûe à une hyper-activité dont le nain n'était guère à-même de supporter, il clama donc haut et fort ces paroles à l'ensorceleuse:

- Pas d'panique ma'mzelle, il a juste été malmené par un coup d'tuyau. Y va pas tarder à revenir à lui... Au pire je l'aiderai à revenir plus vite.

Le rustre qu'était ce soldat traina Glër -peu enclin à épuiser ses épaules- au dehors du repaire esclavagiste, s'assit sur une barrière de bois ouvragée sans faire attention à qui cette merveille pouvait bien appartenir et attendit.

Glër ouvrit les yeux, puis fit une sale grimace qui reflétait très bien la douleur de la blessure. Le Berserk achevé, l' esprit du nain se calmait et les pensées commenceaient à affluer....

En premier lieu vint l' idée matrone "Putain, j' ai mal !" puis ses nombreuses filles, comme par exemple "J' vais avoir mal longtemps ?", "Est-ce que les autres vont me croire si j' leur dis que je simule ?" et bien sûr "Ma bourse est-elle bien accrochée ?" qui était toujours bien en vue dans la cervelle lâche du paria.

Hurletripes tenta de se relever, et s' il ne retomba pas ce fut grâce à cette belle barrière -plutôt charitable pour un bout de bois sculpté-, qui reçut le nain alors qu' il s' apprêtait à goûter les bons pavés durcis de Port-Ponant.

Sous les yeux légèrement horrifiés d' Orlpar, Glër ouvrit les lèvres, sans doute pour s' exprimer, mais il fut interrompu par un flot de sang qui s' échappa de sa bouche et d' entre ses dents cariées. Il toussota, souilla le sol d' un mollard vermillon et dit :

- Par les gigots roboratifs des..hhh... succubes du Kalderash ! Je...gh...l' ai bien baisé...hhh...cet emplâtre...ghhh...

Puis, alors que le soldat tirait une mine inquiète, le blessé crut bon d' ajouter :

- Eh...ghh...t'bile pas...hhh...j' ai...même pas mal.

Aeryth regardait ,avec un petit sourir, le nain se relever et dit avec un ton légèrement ironique :

Mais oui, maître nain, on voit que vous êtes en pleine forme et que vous n'avez pas besoin d'aide mais, permettez-moi de vous proposer mon épaule et le peu de force que j'ai pour vous amener au temple le plus proche. A moins, biensur, que votre égo vous alourdisse au point que vous ne puissiez plus vous trainer ?!

Et Glër de criailler :

- J' ai pas mal ! Et...ghrk.. j' ai pas de mégot sur moi, ça fait une vingtaine que j' ai arrêté d' fumer ! Pas la peine d' essayer d' te foutre de ma gueule...j' vois bien que t' as très mal, et que tu veux aller te faire soigner ! Ghhhh....

Il se mit debout, et s' appuya sur son vieux pic comme sur une béquille.

- Y'a pas de honte à avoir besoin de soins, mademoiselle...t' es mage ou chaispasquoi, heurk, alors c 'est normal que tu résistes pas bien dans la baston ! au fait...comment tu t' appelles ?

En disant cela, Hurletripes grimaçait et on voyait bien qu' en le laissant mariner un peu il finirait par se rendre. Enfin...pour autant que l' Anti-nain par excellence, le lâche le plus notoire de Toril, mérite que l' on perde ne serait-ce qu' une seconde sur son cas.