Route de la Fourche, suite de Panique à Fortnouveau

Ce phénomène commençait à irriter Menthas. Le sentiment d'être suivi l'inquiétait de plus en plus. Mais le pire, était de ne pas savoir ce qu'était cette lueur qui les pistait. Apparement ses deux compères n'avaient pas l'air d'être plus inquiet que ça. Ou du moins, peut être qu'ils laissaient penser qu'ils ne s'en préocupaient pas. Le prêtre était intrigué par la façon de se déplacer de cette lueur. Pour pouvoir se déplacer aussi vite qu'eux sur une surface plus difficile, la chose ne devait certainement pas marcher dans la neige. Et sa curieuse manie de se cacher lorsqu'ils s'arrêtaient, laissait penser que la "chose", seul nom qui collait le mieux à cette lueur selon le mulan, croyait ne pas être repéré par le trio.

Menthas fit part des ses impressions à Kobalt et Zakkarit:


"Vous avez remarqué que la lueur disparait à chaque fois qu'on s'arrête? On dirait qu'elle nous espionne mais qu'elle n'a pas conscience qu'on l'a remarqué. Faisons comme si on ne l'avait pas vu, mais restons sur nos gardes. Mais essayons de ne pas trop trainer et de ralier Fortnouveau, cet endroit me parait de plus en plus inhospitalier."

En effet, en plus des rumeurs qui vagabondaient dans le région, cet étrange évènement en disait long sur l'insécurité qui régnait dans les alentours.

Il avait beau faire tout ce qu'il pouvait pour ne pas s'en soucier, le roublard suivait tout de même du coin de l'œil le petit manège de l'étrange point lumineux. Pas de quoi être inquiet cependant : après tout ils étaient loin, et puis ils n'avaient strictement aucune idée de ce que cela pouvait être. Or il était inutile d'avoir peur de l'inconnu. A quoi ça rime de craindre quelque chose dont on ignore tout ? C'était une crainte analogue à la peur de l'obscurité qu'ont certains imbéciles. En réalité ce n'est pas des ténèbres que l'on a peur, c'est de ne pas savoir ce qui s'y trouve. Kobalt, pour sa part appréciait l'obscurité et la voyait d'avantage comme un atout précieux qu'un handicap.
Le roublard ne partageait cependant pas l'optimisme du prêtre de la Cavalière concernant le fait que cette... chose n'a pas remarqué qu'ils l'avaient repéré depuis un moment. De l'avis du thétyrien, elle n'en avait cure, ce qui n'était pas rassurant en soi : elle devait être drôlement confiante sur ses capacités à essuyer une attaque de trois types armés jusqu'aux dents.

Il répondit à Menthas, non sans avoir jeté un regard en biais à Zakkarit qui semblait sur le point de piquer un somme :

- Je ne pense pas qu'il soit utile de forcer le pas. Cela ne ferait que nous fatiguer, et puis on n'arriverait pas beaucoup plus vite à Fortnouveau. On a encore quelques jours de marche, alors autant garder des forces pour tout... imprévu. Mais si t'as peur du truc qui nous suit, ce n'est pas la peine d'aller à Fortnouveau, ce n'est pas un endroit pour les femmelettes.

Il ne se privait jamais de balancer des petites piques à ses compagnons, tant pour se maintenir en forme que pour ne pas regretter de ne l'avoir pas fait. Et puis c'était de bonne guerre.

Une chose était sûre, c'est que la compagnie de Kobalt n'était pas la moins originale du monde. A tel point que le prêtre se demandait comment, personne ne l'avait étripé jusqu'à présent. La qualité principale qu'il avait pu déceler chez lui, était sa capacité a être désagréable et arrogant. Mais assez bizarrement, cela n'énervait pas plus que cela Menthas. Il arrivait presque à sourire des pointes d'ironie qui inondaient les paroles du roublard.

"Ne t'inquiètes pas pour moi. La méfiance ne va pas forcement avec la peur. Je préfèrais juste faire part de mon intrigue pour cette chose. Enfin si cela ne t'interpelle pas plus que ça, j'admire ton insouciance."

A chaque dialogue, les deux partenaires ne pouvaient s'empêcher de se titiller l'un l'autre, comme si l'un d'eux allait craquer un moment ou un autre. Et pourtant le voyage était monotone. A croire qu'il était les seuls dans la région.

Afin de rompre cet engourdissement moral, Menthas décida d'engager un semblant de conversation. A défaut de réussir, au moins il aurait essayé.

"Dit moi au faite, que cest-il passé dans l'auberge l'autre soir? Puisque je m'étais retrouvé dehors, je n'ai pu avoir d'informations."

La petite troupe hétéroclite composé des deux humains et du demi-elfe s'était remise en route, chacun avec son paquetage sur les épaules, le long de la route de la Fourche qui pour l'instant partait en ligne droite jusqu'à perte de vue. Si leur route semblait toute tracée, les facteurs d'incertitudes étaient tout de même multiples et ils pouvaient s'attendre à quelques surprises venant briser la monotonie du voyage. A peine avaient-ils fait quelques mètres après leur dernière halte que le prêtre essaya courageusement de lancer une conversation. En effet Menthas ignorait tout des évènements qui s'étaient déroulés à l'auberge. Suite au coup qu'il avait reçu sur la tête le roublard lui-même ne se souvenait plus de tout.

Il rassembla ses esprits pour tenter de décrire les évènements de la veille à son acolyte le plus fidèlement possible, même si il ne voyait pas d'intérêt à ce genre de discussion.

- Bon, tu t'souviens des deux branques qui détroussèrent tantôt les jeunes nobles plein de pognon et de bière ? Ben j'les ai suivis. Ils avaient l'air de bien connaître l'auberge tu noteras, puisque ils ont emprunté un passage secret dissimulé derrière une étagère dans la cave. Avec le recul, je pense que j'aurais du prendre un saucisson ou deux avec moi. Toujours est-il que j'étais encombré de la donzelle qui était avec nous au départ, l'espèce de crétine avec du sang elfique là, j'sais plus comment qu'elle s'appelait. Bref à un moment on s'est retrouvé devant deux passages qui allaient à deux endroits différents. J'en ai profité pour envoyer la jeunette au casse-pipe puis j'ai rebroussé chemin. Je sais pas c'qu'elle est devenue, et c'est pas plus mal, on est déjà assez encombré comme ça si tu vois s'que j'veux dire.

Nouveau regard en biais vers Zakkarit.

- Quand je suis ressorti du passage qui n'avait de secret que le nom puisque tant de monde y passe comme si c'était un simple couloir, j'ai débarque en plein milieu d'une grosse bagarre. J'en ignore les raisons, même si je pense que ce n'est pas sans lien avec cette histoire de vol à la tire. Après ça la garde a débarqué et tu connais la suite.
Cependant un truc me chiffonne dans cette affaire : si les deux voleurs connaissaient l'existence du couloir dérobé, c'est qu'ils avaient surement des complices parmi le personnel de l'auberge, voire de l'aubergiste lui-même, et donc nous aurions dû le questionner plus avant : il n'était peut-être pas aussi blanc comme neige qu'il le laissait entendre.

Le choix de pareille expression était inconsciemment dicté par le décor morne et immaculé qui s'étendait autour d'eux. On aurait dit qu'un linge blanc avait été étendu devant les yeux des Compagnons des Marches. Le blanc du ciel se perdait dans le blanc de la plaine et des Montagnes Néthères, de sorte que nulle ligne ne se voyait à l'horizon.

¤Tout ce blanc d'un coup me donne mal aux yeux. Si on rajoute à ça les maux de tête causés par mes réflexions et la simple présence d'un parasite comme le magicien, on n'est pas rendus.¤

- Et de ton côté qu'est-ce qui s'est passé ? Et pourquoi on se retrouve avec cet individu dans les pattes ?

Il parlait ouvertement de Zakkarit comme si celui-ci n'était pas présent. A vrai dire il se moquait éperdument de vexer le jeune demi-elfe ou de se le mettre à dos. Rien ne justifiait à ses yeux qu'il voyage avec eux alors qu'ils devaient remplir une mission de la plus haute importance, et qui ne relevait que des Frères des Marches et de personne d'autre.

Narration

Tout était calme et monotone d'après Kobalt. Il était vrai que le décor ne pouvait lui laisser tort. Mais comme bien souvent dans ces contrées, le calme précédait souvent la tempête. Par deux fois ils avaient vu apparaitre et disparaitre une lumière étrange et par deux fois cette même lumière avait disparu de leur champ de vision. Fallait-il voir en ça un mauvais présage ou bien une simple coïncidence, l'un d'entre eux n'en saurait jamais rien de toutes façons.
Alors qu'ils étaient tranquillement installés pour se reposer une voix retentit sans que personne ne puissent voir d'où elle venait. Tout ce qu'ils purent constater c'est qu'elle ne devait pas être à plus de cinq ou six toises d'eux.

-On ne bouge plus ! On garde bien ses mains en évidence et bien hautes ! Les deux hommes surtout quant au troisième il va bien sagement aller récupérer les bourses de chacun et attendre la suite de mes instructions.

Ils cherchaient du regard sans rien voir. L'homme, car il s'agissait d'une voix d'homme, était admirablement caché. Pouvaient-ils résister ? Le devaient-ils seulement ? Telle est la question.

D'où venait cette voix? C'était bien la question qui trainait dans la tête du prêtre, mais aussi très certainement de son compagnon. Mais l'heure n'était pas à la réflexion, car la personne ne semblait pas être là pour rigoler. En tout cas, le petit groupe s'était fait admirablement piégé, si se faire surprendre pouvait être considéré comme un art. Une chose était sûre, ils avaient baissé leur attention durant leur petit dialogue.
N'ayant aucune indication sur la personne ni le nombre, la sagesse s'imposait. Il valait mieux obéir. Du moins pour le moment.

¤On ne va pas tenter de jouer les héros, parceque si on se fait zigouiller, notre souvenir ne restera pas gravé très longtemps dans les mémoires. Donc pour la gloire on vera plus tard.
J'espère que Kobalt en pensera autant.¤

Le mulan tourna la tête vers le roublard et lui adressa la parole doucement:

"Pour le moment mieux vaut s'en tenir à ce qu'il dit. Inutile d'opposer une résistance contre un ennemi inconnu et invisible."

Menthas leva les bras sagement tout en cherchant autour de lui la provenance de la voix mystérieuse. En voyant Zakkarit, il ne put s'empêcher de penser:

¤Pourriture, si ce gars est de leur côté, je lui ferais payer sa trahison.¤

Le jeune prêtre n'acceptait pas qu'il puisse le trahir alors qu'il l'avait sorti de l'embarras la veille dans la taverne.

Sur les nerfs depuis le début du voyage du fait de sa monotonie, le petit truand se demanda combien de temps cet ennui allait se prolonger, lorsque l'embuscade eut lieu. Il n'eut donc pas besoin d'attaquer ses propres compagnons pour ne pas perdre la main, ce qui lui évitait par la même occasion d'avoir deux cadavres sur les bras. Sans compter des explications qu'il devrait par la suite fournir à Théodus pour ces meurtres, dont un aurait eu un membre de la Compagnie pour victime. Cela aurait été légèrement embarrassant, à vrai dire...

Seulement ici le problème ne se posa pas : ils étaient apparemment pris au piège par des brigands qui leur demandaient leur bourse, tout en restant sagement à couvert. Kobalt apprécia le procédé : la discrétion des bandits était remarquable étant donné que les trois aventuriers ne s'étaient doutés de rien. Cela lui laissa penser qu'ils avaient affaire à des bandits de grand chemin habitués de la rase campagne, et pas de détrousseurs urbains comme l'était le thétyrien lui-même.

Il était à peu près sûr que les bouseux qui les encerclaient étaient au moins trois, car selon le voleur il ne valait rien de se risquer à essayer de dépouiller des inconnus dont on ignorait tout en infériorité numérique. Si un combat venait à éclater, il fallait espérer que les gredins ne soient pas plus que trois, auquel cas ils se verraient en grande difficulté. Trois, car pour lui Zakkarit ne faisait pas partie des assaillants, même si ce pleutre obéissait aveuglément aux ordres qu'on lui aboyait. Un petit détail choquait Kobalt cependant :

¤Mais comment il sait que je suis un humain, lui ! Il a pas pu voir la forme de mes oreilles avec ma cagoule sur la tête !¤

En même temps, vous étiez prévenus : c'était un petit détail. Le voleur fut convaincu que son assaillant était donc un devin, ou quelque-chose du genre. La sagesse aurait voulu que le roublard renonce à sa bourse et laisse sagement filer les détrousseurs. Mais il n'était pas connu pour ses choix judicieux, et de toute manière rien ne prouvait que les bandits ne les tueraient pas après s'être servis. Il fallait donc réagir. Admirez avec quelle étonnante facilité ces pensées sont venues se relier entre elles et être prise comme étant un raisonnement "logique" dans l'esprit malade du membre de la phalange du Rat.

Il banda ses muscles, luttant contre le froid, et lorsque Zakkarit arriva à sa hauteur pour lui soustraire son bien, il tenta une manoeuvre hasardeuse et dangereuse : faire une clé de poignée à l'ensorceleur en se plaçant derrière lui, pour ainsi voir ce qui se passait dans son dos. Si il n'arrivait pas à faire cela, alors les carottes seraient cuites pour lui...

Narration

Saisi de l'adversaire
attaque de contact Kobalt 16(dé)+3(mod)=19 CA=12 réussite
Tentative d'immobilisation jet de lutte opposé Kobalt 15(dé)+3(mod)=18 Zakkarit jet 10
Zakkarit est immobilisé.

Lorsque Zakkarit se présenta devant Kobalt, ce dernier le prit complètement au dépourvu. Il l'accrocha et, bien que Zakkarit tenta de résister, se fit complètement bloquer par Kobalt.
Il attendit de voir la suite des évènements et elle ne tarda pas. Celui qui les avait menacé eu un petit rire en même temps qu'il parla.

-Ah ah ah ! Pauvre fou !

C'est alors qu'un carreau apparu en même temps que l'homme qui se tenait à quatre ou cinq pas d'eux. Il sortit du néant tout d'un coup comme ça. Cependant le carreau fila droit vers Kobalt. Fort heureusement pour lui, il avait un bouclier humain devant qui le protégea d'une certaine manière. Le carreau se ficha dans la gorge de Zakkarit qui ne résista pas à l'impact. Il s'écroula inconscient alors que la neige prenait une teinte rouge de son sang. Kobalt était encore en vie mais pour combien de temps ? C'est alors que l'homme sans recharger le moins du monde son arbalète commença à viser de nouveau Kobalt. Quoi qu'allaient faire les deux hommes, il leur faudrait agir très vite.

Initiative
Kobalt 9
Menthas 22
Inconnu ?

Alors que Menthas avait choisi la voie de la sagesse, Kobalt, lui avait choisi celle de la folie. Ce qu'il avait tenté, était osé. Dans l'histoire, l'étranger les avait débarassé d'un personnage dont le prêtre ne savait pas quelles étaient ses intentions, ce qui le laissait perplexe. L'homme avait tiré dans le tas sans se soucier des dégats qu'il pouvait occasionner. Ce qui laisser penser que la vie de Zakkarit ne lui importait peu. L'ensorceleur était-il un complice qui s'était fait doublé ou bien juste une marionnette? Le destin avait décidé que ce mystère ne serait jamais percé.
Dans l'histoire l'adorateur de la dame de la stratégie ne savait pas s'il devait se satisfaire de la mort de Zakkarit ou s'il n'aurait pas mieux valu que le carreau atteigne sa cible initiale. Mais la situation n'était pas propice à ces divagations. Car même si la présence de Kobalt était peut être la plus désagréable de toutes, parmi les habitants de Toril, ses compétences (aussi douteuses qu'elles soient) pourraient s'avérer utile un moment ou un autre.
Mais l'état d'urgence était déclaré. L'inconnu se préparait à renouveler son attaque. Et cette fois si, nul doute que le frère rat ne pourrait s'attirer les faveurs de la déesse Tymora une nouvelle fois.

A première vue leur assaillant ne semblait pas être dans une phase de discussion ni d'écoute; ou bien alors sa perception de la diplomatie devait être aussi développée que la civilisation des contrées des marches d'argent.
Le jeune prêtre se résolu donc à passer à l'action. Il dégaina son épée et se dirigea en direction de l'assassin de leur ex compagnon de route, en essayant d'aller le plus vite possible dans la neige plus immaculée à cause du sang répandu par le carreau.

Narration

Menthas fila droit vers l'homme à l'arbalète et tenta de le pourfendre en deux, cependant celui avait calculé sa distance au plus juste. La neige où il se trouvait constituait un obstacle très gênant pour se déplacer et Menthas en fût le premier à en constater les effets. Il s'arrêta à un pas de l'homme trop loin pour lui porter un coup d'épée. Kobalt voyant Menthas peiner dans la neige opta pour une solution plus directe comme il l'aimait. Il sortit son arc et tira une flèche en direction de l'homme. Celle-ci l'atteint de plein fouet en plein milieu de la poitrine. Aussitôt une lumière écarlate illumina l'espace se réfléchissant même sur la neige et l'instant d'après l'homme n'était plus là. A sa place se trouvait juste deux empreintes de pas qui témoignait de sa présence, mais nulle trace de celui qui les avait faites. Il s'était comme dissipé dans l'air. Menthas vérifia machinalement de sa lame si quelque chose se trouvait devant lui sans rien trouver si ce n'était que de l'air froid. Quoiqu'ils aient fait, l'homme n'était plus là. Ou alors peut-être qu'ils n'étaient pour rien dans cette histoire. Même Menthas n'avait aucune explication quant à cette disparition. Il revint vers Kobalt et le corps de feu leur compagnon, qui gisait mort. Il était trop tard pour le sauver.