Chapitre 2A: Au large de la Côte des Épées - Moira, Moira

Les précédentes aventures de Moira

19ème jour de la Fonte, année des Dragons Renégats
19 Mirtul 1373.
Période de la journée : Début de matinée.
Climat : Brouillard dense
Température : environ 0 degrés.

Moira :

Depuis qu’elle avait quitté le havre de Padhiver, l’Aribeth Aunia avait rencontré un temps plutôt clément. La première dizaine à bord s’était achevée par un orage de grêle mais l’équipage était suffisamment compétent pour que les dommages soient minimes et que le voyage puisse continuer.

Ils avaient fait escale par deux fois déjà pour se ravitailler, une fois à Port Llast et la seconde à Moresby, guère plus qu’un hameau et, jusqu’à ce jour, ne s’étaient jamais éloignés de la côte plus que nécessaire. Le plan était de changer cela durant la journée qui commençait. Cela devait leur faire gagner quelques jours de voyage en prenant une route légèrement plus courte et directe mais surtout cela leur évitait de passer trop près de Luskan.

Deux heures environ après que l’Aribeth Aunia eut changé de course, le vent qui jusque là gonflait ses voiles se tarit et le navire entra dans une zone d’épais brouillard. Depuis le centre du pont, Moira pouvait à peine distinguer le bastingage de chaque côté et la proue comme la poupe avaient complètement disparues. Dans son dos, elle entendit le capitaine haranguer la vigie pour lui demander s’il avait une meilleure vue depuis le commet du mât, ce à quoi ce dernier répondit qu’il était tout autant dans la mélasse que le reste du navire. Sa déclaration s’acheva par un ”Wow” quand le navire fut secoué par un impact soudain. Moira n’avait pas assez d’expérience de la navigation en haute mer pour en identifier la cause mais le capitaine ordonna immédiatement à un groupe de marins de se rendre dans les cales pour vérifier que l’Aribeth Aunia n’avait pas une voie d’eau.

Moira avait atteint ces derniers jour un état de plénitude rare. Voir défiler la côte le visage au vent lui avait fait un bien fou, et entre deux moment de contemplations, une saine activité en mettant la main à la pâte pour aider les marins à la manoeuvre. Le mauvais temps ne l'inquiétait guère, les manières rustiques et franches de l'équipage lui plaisait, tout le contraire d'un sir Gilfy lointain... Au point d'envisager une reconversion de carrière dans la marine? Peut-être pas encore. Il lui fallait d'abord apprendre à faire ces fichu noeuds correctement.

Le soir, elle se retirait dans son coin en toute quiétude, grattant de la pointe du couteau un morceau de bois qui allait devenir une nouvelle statuette. Taiseuse comme à son habitude, elle parlait peu mais gardait les oreilles ouvertes aux ragots de l'équipage. Sauf une fois, pour demander d'où venait le nom du navire: Aribeth Aunia. S'ensuivit la triste histoire d'une paladine déchue, qui trouva plus tard la rédemption dans la mort. Un personnage controversé de l'histoire de Padhiver, curieux choix de baptême pour le vaisseau.


Ce matin, le brouillard les avait encerclé alors qu'ils traversaient une zone dangereuse fourmillant de pirates Luskaniens. Quand un choc ébranla le navire, Moira serra les dents et évalua mentalement les possibilités: ils étaient trop loin de la côte pour avoir heurté un rocher, un autre navire serait visible maintenant, et un monstre marin aurait causé plus de panique. La seule explication qu'elle voyait pour le moment était un débris dérivant, et de nature suffisamment étrange pour laisser la vigie sans voix.

Circonspecte, la mercenaire s'approcha prudemment du bord...

19ème jour de la Fonte, année des Dragons Renégats
19 Mirtul 1373.
Période de la journée : Début de matinée.
Climat : Brouillard dense
Température : environ 0 degrés.


Se dirigeant prudemment vers le bastingage, Moira put observer la réaction du reste des passagers. La plupart des membres de l'équipages continuaient leurs occupations en l'absence d'ordres changeant leurs devoirs. En particulier, plusieurs étaient en train de replier les voiles qui n'étaient pas d'une grande utilité en l'absence de vent. La Damarienne pouvait à peine les distinguer. L'entourage de Sir Gylfy n'était visiblement pas aussi serein. Plusieurs de ceux dont la tâche était d'assurer sa protection, Bevvy en tête, avait eu la même réaction que Moira et s'était dirigé vers le bord du navire tandis que les autres posaient autant de questions que possible pour lesquelles personne n'avait de réponse.

Se penchant par-dessus la barrière qui l'empêchait de tomber par-dessus bord, Moira put observer une partie de la coque de l'Aribeth Aunia mais elle n'y voyait rien de particulier. La surface de l'eau elle-même était difficile à distinguer dans la brume mais la Damarienne pensait deviner les vagues formées par l'avancée du bateau. Soudain, il lui sembla que sous la surface de l'océan elle pouvait voir pendant moins d'une seconde une forme oblongue qui aurait pu être un gros poisson ou même une personne. Le soldat le plus proche d'elle ne sembla pas l'avoir vu et il se détourna pour demander à ses compagnons s'ils avaient eu plus de chance.

Il n'eau pas le temps de parler, cependant, avant qu'une autre secousse, vaguement au même niveau du bateau mais de l'autre côté agita le navire faisant tomber au sol certains des passagers inatentifs. Une poignée de secondes plus tard à peine, le navire fut secoué une nouvelle fois mais, cette fois-ci, cela ne ressemblait pas à un choc. Le navire avait clairement recommencé à accelérer malgré le fait que ses voiles étaient repliées et que le vent n'avait pas recommencé à souffler. Le capitaine, maintenant au milieu de son bateau, commença à se diriger vers la proue du navire et criant:

-Fils de poulpe!

Perplexe, la mercenaire se détourna du bord. Il lui avait bien semblé apercevoir une silhouette de taille humaine en dessous du niveau de l'eau. Et voilà un autre choc, cette fois de l'autre côté.

*Merde, mais qu'est ce qui se passe encore?*

C'était comme si quelqu'un ou quelque chose venait de harponner la coque, et s'était mis à hâler le navire. Quelle créature pouvait avoir une telle force? La panique était en train de s'emparer de l'équipage, seul le capitaine semblait savoir se qui se tramait, mais il venait de filer à l'avant sans donner d'explications.

Moira se rabattit sur la seule autre personne susceptible d'avoir expérimenté une situation similaire: Bevvy. Le vieux guerrier regroupait ses hommes près de sa charge.

-Bevvy! J'ai vu une ombre de taille humaine filer sous le navire. Une idée de ce qu'il se passe?

Elle avait vaguement l'intuition que tout cela était la prémisse d'une attaque imminente. L'Aribeth Aunia allait peut-être partager le sort du personnage éponyme...

19ème jour de la Fonte, année des Dragons Renégats
19 Mirtul 1373.
Période de la journée : Début de matinée.
Climat : Brouillard dense
Température : environ 0 degrés.

Pendant qu'elle se dirigeait vers Bevvy pour essayer d'en savoir plus sur leur situation, Moira put entendre certains des marins lui communiquer de nouvelles informations. A la poupe du bateau et sur ses côtés, certains commencèrent à signaler l'apparition de grappins et de personnes se servant des cordes pour grimper. Personne était toutefois une description assez peu exacte: les créatures, quoique de taille humaine, ressemblaient plus à des poissons ou des amphibiens se tenant debout qu'à des humains. Plusieurs membres de l'équipage tentaient d'arracher les grappins ou de couper les cordes humides que les attaquants escaladaient mais la plupart n'étaient pas équipés pour ce genre de tâche.

Malgré les efforts de Bevvy et de ses soldats, ainsi que de Moira, il ne fallut pas longtemps pour que les premiers assaillants posent le pied sur le pont du navire éсhangeant quelques coups avec les marins. Avant que les rares membres de l'équipage possésant une arme puisse réagir, ayant été plus efficaces dans la destruction des méthodes d'escalade, ils se trouvaient plus loin des assaillants, une explosion attira l'attention de tous ceux sur l'Aribeth Aunia: le mât venait de se faire couper en deux par une boule de flamme. La vigie, qui n'avait pas quitté son poste sombra dans l'océan avec son perchoir pendant que le créateur de la boule enflammée prenait la parole. Il se trouvait assis sur ce qui ressemblait à un énorme crabe composé de pierres marines et était entouré de deux énormes humanoïdes portant de lourdes massues.

-Toute résistance est futile! Rendez-vous et vous aurez une chance de survivre.

La première réaction de Moira fût de se dire:

*Sérieusement?*

La deuxième fût immédiatement de dégainer Scathach. Mais alors qu'elle et Bevvy parvenaient à tenir en respect les étranges créatures mi-homme mi-poissons, il n'en était pas de même pour le reste de l'équipage. Rapidement, il ne resta plus qu'eux, formant et petit cercle autour de sir Gilfy. L'air empestait le crabe pas frais chaque fois qu'un des assaillants rendait ses tripes, mais cela n'importunait pas Moira, habituée à des odeurs de cadavres autrement plus sévère. La situation se compliquait, mais s'ils parvenaient en tuer assez, peut-être que cela découragerait les autres. Ce n'était certes pas vraiment un plan élaboré, mais un plan quand même...

Du moins jusqu'à ce qu'une explosion coupe le mât en deux.

*Oh, sérieusement!?*

Le sorcier derrière tout ce cirque venait de faire son apparition, encadré de deux mastodontes, leur intimant de se rendre. Pas le genre de négociation qu'elle aimait. Leur agresseur en voulait-il à Gilfy, ou était-il simplement un pirate particulièrement exotique?

Elle jeta un coup d'oeil rapide à Bevvy pour voir sa réaction. Il était le vétéran, et pour ainsi dire par défaut un peu le chef de cette escouade.

L'arme à la main et sans se démonter, elle répondit calmement au lanceur de sort:

-Mais qui êtes vous et que voulez-vous?

19ème jour de la Fonte, année des Dragons Renégats
19 Mirtul 1373.
Période de la journée : Début de matinée.
Climat : Brouillard dense
Température : environ 0 degrés.

Moira :

Moira n’était pas née de la dernière pluie et ne comptait pas s’avouer vaincue sans mieux comprendre de quoi il retournait. Le cercle de combattants dont elle faisait partie était en clair infériorité numérique et la plupart des autres avaient quelques blessures légères.

Sir Gilfy se trouvait au centre du cercle. Il avait une rapière en main et, à en croire le sang qui en dégoutait, il en avait fait use. Il fit un signe à Moira et Bevvy, les deux seules personnes qui semblaient avoir encore assez de sang froid, que le moment était venu pour lui de prendre la parole. Malgré une estafilade en travers du torse qui ruinait son uniforme, il avait un certain air de noblesse et d’autorité qui poussèrent les assaillants à cesser de piailler.

-Je suis responsable de l’équipage de ce navire. Dites moi quels sont vos plans le concernant et nous pourrons peut-être négocier.

Le sorcier donna un léger coup à sa monture et celle-ci dirigea ses yeux vers l’un des matelots couchés sur le pont, l’un des tridents des hommes-poissons en travers de la poitrine mais encore bien vivant. Le crabe le saisit dans l’une de ses pinces et le coupa en deux avant de faire quelques pas vers le cercle de défenseurs encore valides. Un rictus de colère avait apparu sur le visage de Sir Gilfy et il commença à réagir quand le mage étendit un doigt vers lui.

-

Instantanément, Gilfy se retrouva au centre d’un brasier suffisamment ardent pour que tout ceux qui regardaient dans cette direction se trouve forcés de cacher leurs yeux. Son dos se vouta tandis que l’odeur de chair brûlée commençait à se répandre sur le pont et il se mit à parler.

-Ainsi soit-il. J’ai failli.

Il releva la tête et se précipita vers le mage. Les deux mastodontes s’interposèrent mais celui de droite, trop peu véloce pour éviter le fleuret maintenant imbibé de flammes, se retrouva avec la lame en travers de l’œil et d’une partie du crâne. Pendant que son compagnon poussait un cri de douleur, le deuxième troll aquatique abattît sa massue sur le noble le forçant à mettre genou à terre. Sa rapière perfora le genou de ce second ennemi mais le coup de massue suivant l’envoya par-dessus bord.

Aux côtés Moira, plusieurs des soldats avaient fait un pas en avant pour aller au secours de leur maître mais, voyant l’air résolu sur le visage de Bevvy, avaient renoncé à leur charge. Ce dernier planta son arme dans le bois du pont avant de s’adresser au reste du navire.

-Libre à vous de choisir de mourir aujourd’hui mais nous avons perdu cette bataille.

Le moins que l'on pouvait dire à propos de Sir Gilfy, c'était qu'il avait su mourir droit dans ses bottes. Une mort vaillante, mais malheureusement inutile car elle ne changeait rien à la situation des survivants. Les motivations de ce sorcier restaient incompréhensibles. Il n'était pas venu pour Gilfy, lui même alors quoi? Que se passait-il dans la tête de ce psychopathe?

Surprenamment, Bevvy avait choisi de se rendre. Mais se rendre à qui? Et pourquoi? Pour Moira il était hors de question de se laisser faire. Elle n'était peut-être pas payé pour se battre ici, mais elle tenait l'intégrité de sa personne.

Elle jeta un regard désapprobateur à Bevvy.

-Je vous trouve bien défaitiste...

En réalité elle n'en menait pas large: l'ennemi était clairement en position de force et seul un miracle pourrait inverser la tendance. Il n'y avait qu'une seule chose à faire dans ces cas là: gagner du temps. Jusqu'à ce qu'une opportunité se présente. N'importe quoi. S'en remettre à Tymora n'était pas son lot habituel, mais il n'y avait que la Dame Fortune pour l'aider aujourd'hui.

Campée sur ses positions, la mercenaire ne rendit pas les armes.

-Bon, vous avez fait flamber de ce malheureux, on a compris que vous étiez sérieux, mais vous ne nous avez toujours pas dit ce que vous voulez!

Peut-être que son calme pourrait en inspirer d'autres.

19ème jour de la Fonte, année des Dragons Renégats
19 Mirtul 1373.
Période de la journée : Début de matinée.
Climat : Brouillard dense
Température : environ 0 degrés.

Moira :

Cliquez ici pour dérouler le parchemin...

Le sorcier lance un sort sur Moira: 14(Dé) + 5 contre CA de contact 13 = Réussite
Moira perd 8 points de Force.

Le sorcier ne détourna pas même son regard quand Moira parla. Plusieurs des kuo-toas glapirent et grincèrent à son attention mais leur leader se contenta de pointer un doigt vers elle. Un rayon vert pâle s’en échappa et frappa la Damarienne de plein fouet.

-

Elle sentit ses forces lui échapper soudainement, la forçant à poser genou à terre. Le sorcier, visiblement surpris qu’elle ne soit pas plus affectée, lui accorda un rapide regard plain de dédain.

- Vous ne valez pas ma salive. Enfermez les dans la cale jusqu’à ce que nous arrivions.

Les kuo-toas, qui étaient maintenant largement plus nombreux que les marins, abbaissèrent leurs lances et forcèrent tout l’équipage à descendre l’échelle conduisant à la cale. Un rapide compte des survivants montra que, Moira et Bevvy exclus, il n’y avait plus que huit marins, la plupart ayant subis diverses blessures.

Pendant que Moira récupérait ses forces, qui lui revinrent après quelques minutes, Bevvy essayait de panser les blessures de leurs compagnons. Une fois qu’il fut certain d’avoir fait tout ce qu’il pouvait, il s’adressa à ceux qui étaient prêts à l’écouter.

-Selon toute probabilité, leur plan est de nous vendre comme esclaves, probablement à Luskan. J’ai déjà donné, je n’ai pas envie de réessayer. Les pirates sont nombreux dans la Cité des Voiles mais pas les kuo-toas, ni les scrags donc leurs forces devraient être réduites une fois que nous y serons. Ce sera le moment idéal pour s’enfuir. Cela dit, ce n’est pas un plan sans risque. Alors si quelqu’un a une meilleure idée, c’est le moment.

Moira se releva lentement, avec un calme remarquable, mais intérieurement emplie d'une colère noire. C'en était fini des arrangement et de la diplomatie, il était temps pour la fossoyeuse de se mettre au travail, et elle comptait bien accomplir sa première inhumation en mer...

-Vous avez déjà donné? Il n'en faut pas beaucoup pour atteindre vos limites.

Bevvy avait sûrement eut le temps de se faire à la franchise cassante de Moira, mais cette fois elle était motivée par la revanche. Elle n'allait pas se laisser cravacher par ce mage fou et ses têtes de poissons. Hors de question. Ce n'était pas la première fois qu'elle avait affaire aux esclavagistes de Luskan, elle savait à quoi s'attendre, seule la chance lui avait permis de s'échapper la première fois.

-Ce n'est pas une fois à Luskan, au milieu de plus ennemis et chargé de chaines, que nous allons pouvoir nous échapper plus facilement.

Elle jeta un oeil à ce qui restait de l'équipage de l'Aribeth, bien mal en point: l'un des marin respirait faiblement en toussant du sang, un autre déjà inconscient, un troisième avait la jambe cassée... Moira était une guerrière expérimentée et savait reconnaître des blessures fatales. Non soignés, au moins trois de ces bougres ne survivraient pas plus d'un jour ou deux. Et si leurs ravisseur avait l'intention de les garder en vie, ils auraient déjà reçu des soins. Non, ces malheureux étaient condamnés.

-Regardez-les; ils ne survivront pas, si nous ne sortons pas d'ici.

Elle se retourna pour faire face à la porte de leur geôle improvisée. La cale ne contenait que des matériaux de construction pour Ciseau-Ardent, et quelques meubles du défunt futur gouverneur, mais surtout, l'ennemi leur avait laissé leurs armes! Apparemment, les têtes de poissons n'étaient des sbires très malins.

-Je vous ai dis à quai que je n'avais pas peur de ce qui m'attends, et ça vous avait fait bien ricaner. Je n'ai peut-être rien pu faire pour ce pauvre sir Gilfy, mais je n'abandonne pas la partie: ce n'était que la première manche.

Moira effleura le bois du bout des doigts. Du pins, de moyenne qualité. C'était une porte utilitaire, pas une porte de prison.

-Restez derrière, donc. Moi, j'ai une revanche à prendre...

La mercenaire recula un peu, plia un genou, et sans prévenir, donna un violent coup de talon sur la serrure.


artisanat (menuiserie) +7, pour trouver un point faible, et force(?) +4 pour enfoncer la porte.