Adhémar sur la route, Le Croisé trouve sa voie

ADHEMAR

Adhémar avait parcouru bien des lieues dans sa quête de Justice. Par le fer et le sang, le chevalier découvrait chaque jour le poids d’une responsabilité qu’il avait endossé comme un manteau. Il était le bras d’Hoar, il n’avait ni le temps de se reposer, ni de se congratuler pour ses réussites.

Il sillonnait les plus grandes routes, au hasard ou suivant des intuitions qu’il considérait divines, pour y croiser tout ce que les Royaumes pouvait comporter de malandrins, de monstres en maraude, de victime aussi d’autres grands vers, de villages en ruines... Quand il le pouvait, il apportait soutien et réconfort mais le plus souvent, il cherchait à mettre en pratique l’enseignement de son maitre défunt. Un jour il aurait peut-être la force de défier un dragon et d’apporter la juste vengeance à Elversult.

Voyageant vers le Sud, il découvrit Hlondeth, la fabuleuse Cité des Serpents. La plus grande des Cités indépendantes de l’Ouest du Bief de Vilhon, et celle dont le passé avait été le plus majestueux. Le commerce maritime et terrestre, notamment la pierre verte extraite des Orsaunes méridionales et la joaillerie, assurait une prospérité à la ville, mais sans espoir de retrouver la gloire du passé. Si l’indépendance vis à vis du Turmish ou du Chondath semblait presque assurée, plus rien ne restait des grands rêves expansionnistes des siècles précédents. Seule la richesse et l’extravagance de l’architecture témoignaient encore de la gloire qui avait été.

Mais ce qui faisait la particularité de Hlondeth, c’était la prédominance du thème du serpent. Les murs, les portes, les mosaïques comme les bijoux et les vêtements s’ornaient de motifs ophidiens ; et, lorsque le soleil se reflétait sur les bâtiments, la pierre verte, si caractéristique de la ville, semblait onduler comme une couleuvre.

Partout ailleurs ils auraient été chassés comme des monstres, ici les Yuan-Tis vivaient en bonne intelligence avec les autres humanoïdes de la cité. Pour largement minoritaires qu’ils furent, ce pourcent de la population était on ne peut plus visible et bien présents à tous les niveaux de pouvoir de la ville.



Il n’y resta qu’une nuit pour poursuivre son périple par une traversée en bateau jusqu’à Arrabar, centre de commerce aussi puissant que prospère grâce à sa localisation sur les grandes axes de commerces, son exploitation de la pêche et une présence armée de mercenaires et autres armées privées la protégeant plus qu’efficacement. S’il apprit qu’une enclave de Sorciers Rouges s’y était développée avec l’accord du seigneur Eles Wianar, il était déjà beaucoup plus au Sud, raccompagnant un artisan sur la Route Dorée, le long des Plaines Dorées du Sespech.

S’il n’était question ici de Dragons, il en était par contre de Nagas qui continuaient d’effrayer nombre de leurs voisins humains … à raison la plupart du temps.



Quand il arriva enfin à Kagarr, destination de l’artisan qui revenait dans son village, le soleil était haut. L’activité semblait ralentie comme si les villageois prenaient pour sacré un instant de repos en ce tout début d’après-midi. Conscient d’à quel point les travaux d’agriculture pouvaient être éreintants, le Chevalier se garda bien d’en faire le moindre commentaire. Hurlen Fig, son ‘employeur’ de ces derniers jours, lui tendit la main, reconnaissant.

Ils avaient voyagé pendant bien des jours à deux parce qu’aucune troupe de mercenaires n’avait accéder à la demande de protéger un simple chariot sur une si longue route… et surtout pour si peu -cinq pièces d’argent seulement, la seule chose que l’homme était capable d’offrir. L’avantage indéniable fut qu’ils ne semblèrent pas une cible assez intéressante pour qui que ce soit et qu’à l’exception d’une poignée de Kobolds qu’ils mirent en fuite, ils ne firent aucune mauvaise rencontre.

- Merci mon ami pour le voyage et bienvenu à Kagarr. Voici les cinq pièces d’argent comme convenu. L’endroit prête moins à l’émerveillement qu’Arrabar la Puissante mais nous y sommes bien. Je t’invite à prendre le temps de voir notre portail au centre du village, c’est notre plus grande fierté. De ce qu’on dit, il ne fonctionne plus depuis la mort du magicien qui l’a créé mais il amenait tout droit à Eauprofonde ! En un instant ! C’est une belle construction que cette arche de pierre taillée, défendue par nos gardes pour que personne ne la saccage puisqu’elle ne sert plus.

Une petite femme vint à leur rencontre, ses cheveux attachés en un chignon pratique, vêtue de la tenue pratique des paysans et chaussées de bottes qui avaient vu plus d’un hiver. Ses yeux souriaient tandis que sa voix se voulait pleine de remontrance : - « Et béh ! C’est pas trop tôt Hurlen Fig ! Tu as encore du trainer en route ou boire le gain de tes ventes dans ton Arrabar ! Excusez-nous mon bon monsieur mais mon mari a besoin que je lui tire les oreilles et a intérêt de m’embrasser s’il ne veut pas risquer plus ! »

Le moment était parfait de simplicité et de complicité. Même si les retrouvailles n’étaient pas l’élément moteur d’Adhémar, il ne pouvait qu’en apprécier la sincérité.

- Et puis tu te trompes pour le portail, on se trompait tous au faitn voilà quelques heures qu’une sorte de princesse en est sortie. Pour sûr qu’elle était belle … Elle a payé les gardes avec de l’or si tu peux t’imaginer … Par contre, elle est partie avec Harlog et son fils, vers le bois. je n’les aime pas ces deux-là, j’espère qu’il ne lui arrivera rien…

De villages en villages, de citées en citées, Adhémar parcourait le royaume à la recherche de victimes de brigandage, de crimes ou d’attaques de créatures de toutes sortes. Sa démarche était toujours identique. Enquêter, débusquer et punir les fautifs. Quelques fois il ramenait ses proies devant les victimes afin quelles aient droit à leur propre vengeance. D’autres fois quand certains crimes le révulsait il les jugeait lui-même et ne rapportait que les corps. Quoiqu’il en soit si quelqu’un se moquait de lui en lui demandant de l’aide alors qu’il était coupable ces personnes subissaient son courroux.

Adhémar n’était pas qu’un simple mercenaire ou justicier. Non et il ne travaillait pas non plus pour l’argent et les autorités. Il représentait la vengeance des humiliés, le chevalier qui punissait les criminels. Il était un envoyé d’Hoar, un croisé dévoué qui était chargé de traquer et éliminer n’importe quelle brute qui démunissait les simples gens.

Allant tantôt au sud, tantôt à l’est le jeune homme parcourait le Royaume suivant son instinct. Des injustices il en avait vu de toute sorte alors quand il pouvait aider les victimes en se débarrassant de leurs problèmes il leur rendait service en contrepartie d’un bon repas et d’un gîte.

Cette fois ci il était en direction de la citée de Hondeth la citée des serpents comme on disait. Il n’était étrangement jamais venu dans cette ville et il était curieux d’y mettre les pieds.

Il avait ouïe-dire que cet endroit était dominé par les hommes-serpents mais malgré leur présence rien ne là différenciait beaucoup des autres villes. Tout était consacré aux serpents dans ces lieux mais le commerce était roi comme dans la plupart des autres citées. Ne voyant rien de particulièrement dangereux à ses yeux dans les parages le jeune chevalier décida d’embarquer le lendemain pour Arrabar.

Au petit matin il parcoura le port à la recherche d’une embarcation. Un vieux loup de mer propriétaire de « L’Ecumeur de la Mer des Etoiles Déchues » l’accepta à son bord. Le vieil homme bavard comme une pie lui raconta que le commerce prospérait dans cette contrée ainsi qu’un tas d’autres racontars. La traversée parue très courte avec tous ces bavardages et une fois de l’autre côté et une bonne poignée de main Adhémar quitta la capitale du Chondath en direction de Fort Arran puis de la métropole d’Ormpetarr.

Déjeunant dans une taverne il rencontra un artisan nommé Hurlen Fig qui recherchait un protecteur pour le raccompagner à son village. L’agent divin ne trouvant toujours pas de missions particulières accepta l’offre de l’homme. Non pas pour l’argent mais plus par instinct. Il ne savait pas pourquoi mais un pressentiment l’incitait à poursuivre sa route dans cette direction.

Sur la Route Dorée, il apprit que des sorciers rouges ainsi que des mercenaires avaient élu domicile dans les parages mais là n’était pas sa préoccupation. Cette route pouvait être dangereuse à tout moment avec de potentielles attaques de Nagas.

Le voyage dura plusieurs jours et à part une attaque d’une petite troupe de Kobolds que les deux protagonistes mirent en fuite rapidement rien de très particulier ne se déroula. Hurlen qui avait hurlé tel une furie devant l’attaque des petits monstres était assez fier de son exploit et n’arrêtait pas de dire : « Les autres du village y vont pas le croire que j’ai chassé des petits monstres ». Cette soirée là au coin du feu fut un véritable instant de détente pour les deux hurluberlus traversant cette route. Et cette aventure resterait sans nul doute gravée dans la mémoire de l’artisan.

Les jours suivants se déroulèrent sans encombres jusqu’à l’arrivée à Kagarr domicile du commerçant. Leur arrivée ne passa pas inaperçu car tous les paysans épuisés par la chaleur et leurs travaux d’agriculture prenaient un instant de repos dans les quelques endroits d’ombres qu’ils pouvaient trouver.

L’artisan fier de son village ne cessait de répéter à son compagnon de venir voir le portail magique qui était au centre de celui-ci :

- « Tu devrais venir voir notre portail. Il est inactif mais magnifique ! »

Hurlen remercia ensuite Adhémar en tendant vers lui une main rocailleuse remplie des cinq pièces d’argent qu’il lui devait. Le jeune chevalier referma la main tendue par son compagnon de route en lui disant :

- « Gardes cet argent pour toi et ta famille mon ami ». Petit sourire du jeune homme.

- « Je ne t’ai pas raccompagné pour ton argent. Ta compagnie était agréable et ma seule récompense est d’avoir eut un camarade de route sympathique ».

La main virile de l’agent divin fit une tape sur l’épaule du commerçant quand soudain il vit et entendit un petit bout de femme venir dans leur direction. Il ne fallut pas longtemps à Adhémar pour deviner que cette étrangère était la femme d’Hurlen. Elle était pleine d’entrain et de gentillesse malgré les remontrances envers son mari.

Elle avait apparemment entendu les paroles de son homme et était ouvertement entrain de le contredire. En effet quelques heures auparavant une jeune et belle princesse en était sortie payant les gardes avec de l’or. Et elle était partie avec un certain Harlog et son fils qui semblaient être des personnes louches vers une forêt.

Le chevalier demanda aussitôt à la femme d’Hurlen :

- « Une jeune princesse ? Pouvez-vous me la décrire ? Savez-vous où elle allait ? Et ce dénommé Harlog et son fils sont ils des gens de confiance ? »

Adhémar avait suivit son instinct et cela l’avait conduit jusqu’ici ou une personne d’une certaine noblesse pouvait avoir besoin de lui.

ADHEMAR

La femme d’Hurlen était gênée, comme si elle s’en voulait de ne pas être intervenue ou de cacher quelque chose. Sa réponse, se concentrant sur la demande de description allait dans le même sens.

- La décrire ? Hum … Un joli brin, avec un port princier, qui parlait fort et bien. Elle avait une belle armure de cuir sous une cape de soie, des bijoux dans les cheveux et aux poignets. Elle parlait au nom d’un « Chondacul », je ne sais pas si c’est le seigneur de son pays ou son dieu, jamais entendu parler. Elle avait les oreilles pointues aussi, un peu comme une elfe, mais avec quelque chose de bizarre aux yeux, je n’ai pas pu bien voir avec la distance.

Hurlen, venant au secours de sa femme en époux bienveillant, poursuivit :

- Des gens de confiance? Surement pas mon ami… On ne peut jamais rien prouver, mais à chaque fois que quelque chose de bizarre se passe, tout l’monde regarde vers Harlog et son fils. Rien qu’l’histoire de sa femme, c’est une sacrée histoire qui a bien fait jacasser. Un jour elle était là, l’autre plus. Il nous a juste dit qu’elle était partie. Pas qu’on puisse lui donner tort mais j’doute qu’elle ait pu partir de nuit, seule. Ils partent régulièrement dans le bois voisin, le bois d’Ankh comme on l’appelle, enfin voisin … y en a pour une grosse journée à cheval, et pas au pas, et c’est mieux parce que c’est un bois mauvais. De dehors, on n’dirait pas, mais dès qu’on a franchi l’orée, ils puent la magie. Les insectes sont plus gros que des bœufs à c’qu’on dit, rien de bon là-bas…

Le voyage avait duré assez longtemps que pour que l’homme prévoit les prochains actes de l’agent divin. La femme interrompit alors le mari dont le visage déjà grave se chargea de crainte et de tristesse, comme s’ils parlaient d’une défunte.

- Le … C’est là qu’elle a dit qu’elle voulait aller la princesse, dans le bois d’Ankh …

Le redresseur de torts écoutait avec attention les réponses de la femme de l’artisan réfléchissant et regroupant les indices un à un. Il était clair que son arrivée dans ces lieux n’était pas due au hasard. Hoar l’avait mené ici à Kagarr c’était maintenant certain. Son destin était de venir en aide aux personnes susceptibles d’être en danger et apparemment cette jeune femme s’était jetée dans la gueule du loup sans s’en douter.

¤ Chondacul ? Ne serait-ce pas plutôt Shaundakul le dieu des protecteurs de caravanes ? ¤

Adhémar voulut questionner à nouveau l’épouse de son compagnon de route au sujet de Shaundakul mais celui-ci là voyant embarrassée vint soudainement à sa rescousse. Hurlen concentra ses réponses sur le dénommé Harlog et ce qu’il entendit ne le rassura pas. Le protecteur divin resta silencieux un long moment. On avait l’impression qu’il méditait. Que son corps était ici mais son esprit ailleurs.

¤ Des bijoux, une armure, une elfe avec un regard étrange, Shaundakul. ¤

Les indices s’accumulaient il suffisait maintenant de les remettrent en ordre comme si c’était un puzzle. Mais des éléments étaient encore manquants. Pourquoi cette elfe avait-elle utilisé ce portail magique qui n’était plus utilisé depuis des lustres ? Etait-elle une magicienne, une guerrière ? Pourquoi avait-elle quitté Eauprofonde pour ce bois d’Ankh qui était apparemment dangereux ? Quoiqu’il en soit elle était partie avec deux potentiels criminels d’après les dires de son nouvel ami.

Adhémar revenu à la réalité des vivants contempla les visages consternés de ses nouveaux amis. Il devait agir au plus vite avant que ces deux bougres ne fassent un mauvais coup. La puissance du dieu vengeur lui parcourait les veines. Il ressentait son pouvoir. Il savait que ce bois devait cacher bien des secrets et dangers mais il en avait cure. Il devait partir au plus vite et retrouver cette femme. Il planait cependant un mystère sur cette elfe au regard étrange mais une représentante du dieu Shaundakul ne pouvait être en aucun cas mauvaise du moins c’est ce qu’il pensait. Etait-elle réellement une princesse ? Le chevalier ne le savait pas mais sa curiosité et son désir de mettre la main sur ce Harlog était une source de motivation supplémentaire. S’il avait tué sa femme et que son fils avait été complice alors ils devaient payer tous les deux. Quoiqu’il en coûte.

L’envoyé d’Hoar posa une dernière question au couple :

- « Pouvez-vous m’indiquer la direction à prendre pour aller vers ce bois d’Ankh ? »

ADHEMAR

Le Croisé eut vite fait de faire le lien et de placer Shaundakul comme élément définissant la princesse, probablement sa divinité tutélaire au moins puisqu’elle parlait en son nom, peut-être même plus. Sans qu’il y ait un lien évident entre celui-ci et Hoar, ils n’étaient pas ennemis et plus d’une fois Adhemar avait accepté la charge divine de protéger –ou venger- un voyageur adorant le Chevaucheur des Vents.

La réponse du marchand l’interrompit dans ses réflexions, il en était fébrile, voulant absolument aider au mieux.

- Plein ouest mon ami ! A soixante lieues d’ici ! Tu ne devrais pas perdre une minute, surtout pas à te ravitailler en route !

Les Kagarrans s’échangèrent un regard complice et hochèrent la tête. Hurlen se saisit aussi vite que possible d’un sac dans lequel Adhemar savait qu’il restait quelques-unes des rations qu’ils avaient partagé tout au long du voyage. S’il était lourdement armé, il était relativement démuni pour partir seul à l’aventure, son dernier employeur le savait bien.

- Prends cette corde aussi, on a toujours besoin d’une corde.

De Kagarr ne partaient que deux routes : une vers le Sud-Sud-Ouest, vers Yhep, celle qu’ils avaient remontée après avoir franchi les eaux Nagas, et celle vers l’Ouest et Ankhapur, à plusieurs journées de chevauchée que ses cibles avaient emprunté.

Même bien chargé, en chevauchant vite il devrait les rejoindre rapidement, d’autant que les autres montures, toutes habituées qu’elles furent, devaient trainer un chariot et ses trois occupants. Il devrait par contre gérer la fatigue de son destrier pour lui éviter l’épuisement d’une journée de trot.

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Adhemar reçoit 3 rations de voyage et une corde de chanvre de 10mètres

Ces nouveaux amis venaient de lui donner quelques provisions et une corde de chanvre tout en lui indiquant la direction à prendre pour effectuer sa mission. Les remerciant il remplit les sacoches de son fidèle destrier et une fois en selle il les salua d’un geste de la main en prenant la route indiquée menant vers l’Ouest.

Il devait faire au plus vite mais ne pas trop forcer le rythme. Il ne souhaitait pas épuiser Kaemon son loyal compagnon. Son mentor Amane lui avait offert ce cheval à la fin de sa première année passée à Elversult. Et depuis toutes ces années ils avaient appris à vivre ensemble. Plus qu’un animal Kaemon était un ami. Cela pouvait paraître étrange pour certains mais une amitié sincère s’était développée entre l’homme et l’animal. Sa couleur noir de jais brillait tout en faisant des reflets bleutés. On voyait tous ses muscles en mouvement. C’était un cheval magnifique, puissant et doté d’une intelligence incomparable. Lui tapotant l’encolure il se souvint d’une histoire identique à celle qu’il vivait aujourd’hui.

C’était il y a quelques années. Il était novice dans l’ordre des croisés d’Hoar et avait donc beaucoup moins d’expérience qu’à ces jours. Il était également plus patient. Sa mission était de retrouver deux tueurs qui sévissaient de villes en villes. Ils passaient leur temps à voler, piller, tuer et enlever des femmes qu’ils revendaient ensuite à des hommes encore pires qu’eux.

Laissant une trace des plus facile à repérer il n’avait pas mis beaucoup de temps à les retrouver. Ils avaient élu domicile dans un village perdu au fin fonds de nul part et logeaient dans une auberge nommée « La Main Sanglante ». L’endroit était vraiment malsain. Il se rappelait être entré dans la bâtisse en poussant une porte branlante et pourrie qui sentait une odeur de moisi. L’intérieur n’était pas mieux. Dans l’obscurité de la pièce les deux assassins étaient vautrés mangeant en se chamaillant. A son arrivée dans ces lieux de brigandage ils le regardèrent tout en buvant et riant. Sans aucune peur il s’approcha d’eux et les invita de la plus courtoise des façons à déposer les armes et à se constituer prisonnier. C’est à ce moment qu’un des deux scélérats se leva et fixa son regard bestial dans le regard sans fonds de l’agent divin. Les cheveux poisseux il sentait la vinasse et avait une haleine fétide. Il se mit à déclarer en parlant à son compagnon :

- « Tu l’as entendu Ranufle ? Tu l’as entendu ce minable ? Y veut nous arrêter ! Y faudrait peut être qu’y puisse nous faire sortir ? » L’autre se mit à éclater de rire tout en rongeant son pignon de poulet.

- « T’es gonflé mon gars de v’nir là nous débusquer dans notre tanière ! Y se pourrait bien que t’en ressorte pas vivant ? Et puis… » L’homme n’eut pas le temps de terminer son monologue. Adhémar en avait eut assez d’écouter cet énergumène. Son sang bouillonnait. La rage du justicier prenait le dessus. Le coup porté avec précision au plexus par le chevalier avait provoqué une forte douleur et une diminution des sens de son adversaire. Ce qui lui permit ensuite de lui asséner un énorme coup de poings dans la tempe pour le mettre hors d’état de nuire. Son comparse lui ne riait plus. Il se leva spontanément dégainant une épée des plus ridicules et se précipita sur le jeune homme. Ce n’était pas assez rapide. Le fléau d’arme léger du croisé venait de s’écraser sur le crâne déjà pas bien remplit de Ranufle et un craquement sourd se fit entendre avant qu’il s’effondre.

La vue répugnante du cadavre sur le sol fit brusquement revenir Adhémar à la réalité. Chevauchant en direction du bois d’Ankh il espérait arriver avant qu’Harlog et son fils commettent un possible crime visant la princesse elfe.

ADHEMAR

Kaemon était bien plus qu'une monture, les deux amis filaient de plus en plus vite vers le chariot tandis que le justicier se remémorait d'anciens souvenirs d'expression de la vengeance d'Hoar, son ami l'emmenait droit vers sa cible, en vue, à mi-chemin du bois d'Ankh qui se dessinait en contre-bas. Le soleil se couchait dans son dos, allongeant leur ombre loin devant eux. Il pouvait les rattraper avant qu'il n'atteigne l'orée du bois ou choisir de les suivre à distance et peut-être les perdre de vue.

De si loin, il ne pouvait s'assurer qu'il n'était rien arrivé déjà à la princesse Elfe, victime potentielle de deux préjugés meurtriers. Son cheval tiendrait l'allure, il le savait.

Une autre certitude s'imposa à lui : Ils étaient loin de tout et devrait trouver un endroit ou passer la nuit. Kagarr était loin et il n'avait pas même rencontré une ferme isolée en cours de route. Aucune fumée n'indiquait la présence d'aucune autre dans une autre direction non plus. Juste ce bois, mystérieux, et sa cible.

De chaque côté de la route, tandis que l'humidité montait et que l'air se rafraichissait, les lueurs de regards de prédateurs suivaient le cavalier, répondant aux étoiles qui s'allumait autour de Séluné.

La cible marqua une pause, à l’endroit où ils allaient quitter la route pour une piste plus étroite. A partir de là, ils ne pourraient pas tenir le rythme sous peine de blesser les chevaux et risquer endommager le charriot. A contrario, le cavalier et sa monture pouvait garder l’allure et les rattraper extrêmement rapidement. La question de l’approche se posait, pressente. Il devait choisir vite !

Allait-il suivre son instinct et intervenir avant le risque qu’il n’arrive quelque chose à la Princesse ? N’était-il pas déjà trop tard ? Fallait-il tenter les surprendre pour qu’il n’y ait aucun doute sur leurs intentions ? Présumés coupables ou innocents ?

Il pouvait frapper maintenant, ou pas, mais quoi qu’il en fut, s’il continuait au trot sans y prendre gare, il serait repéré, c’était une évidence.




Ce message a été modifié par Atlas le Lundi 20 Juin 2016 à 10h44

La cible était maintenant présente visuellement. Eloignée certes mais elle n’était plus très loin du chevalier. Le jeune homme stoppa l’élan de son fidèle compagnon et décida de prendre quelques minutes de réflexion pour agir promptement et correctement. Il analysa rapidement la situation. Le jour commençait à tomber et la nuit elle allait pointer le bout de son nez. Loin de tout il n’avait aucun lieu de repli pour passer la nuit et se protéger des éventuels prédateurs alentours qui rôdaient dans ces lieux.

Fixant son objectif qui lui avait fait une halte Adhémar se souleva doucement de sa selle et parla à voix haute :

- « Hé bien Kaemon que ferais tu toi à ma place ? Dois-je continuer à les suivre à distance ? Ou dois-je intervenir immédiatement ? » » Le destrier émit un léger hennissement à la deuxième question de l’agent divin et gratta le sol avec ses sabots. C’était comme si celui-ci désirait émettre son opinion.

Le jeune homme répondit à sa propre question :

- « Oui tu me connais bien mon ami. Tu sais bien que je ne suis pas du genre à attendre. Attendre serais une erreur. On ne sait pas ce que ces maraudeurs ont bien pu faire subir à cette jeune femme ? Je dois agir de suite. Aller les rencontrer de front »

Le croisé représentant Hoar n’allait pas y aller par quatre chemins. Passer son temps à établir des plans ou des stratégies pour tendre des embuscades dans ce genre de situation était une simple perte de temps à ses yeux. Tous ces stratagèmes étaient réservés pour la guerre et là il n’était point question de guerre mais de brigands ignares.

Adhémar esquissa un petit sourire à la simple pensée de ce qu’il pourrait bien leur faire subir s’ils avaient fait le moindre mal à la jeune princesse. Il procéda ensuite à une rapide inspection de ces armes et annonça en regardant vers les cieux :

- « Hoar dieu vengeur je jure fidèlement en ton nom que justice sera faite ! Si ces mécréants sont coupables ils seront punis pour leurs actes et subiront les pires sévices de la vengeance ! »

Sur ces paroles Adhémar talonna son cheval pour le lancer au galop dans la direction du chariot ou était la jeune elfe. On pouvait voir la rage se dessiner sur son visage. L’agent divin pouvait représenter un ange protecteur pour les victimes. Mais lorsque sa haine contre les criminels s’évacuait il pouvait également représenter la mort pour eux.

SUITE