La Graine, Blingabel, Christal

Une barque en bois, devenue grise par le temps, glisse doucement sur les eaux silencieuses autour de l’éperon rocheux. A son bord, une ombre informe marmonne, chantonne, grogne, s’esclaffe quand une vague secoue un peu plus son embarcation et, quand soudain elle trouve quelque chose, flottant, poussée sur le bord de la falaise. Elle rit alors, fière d’elle, de son sort et de sa clairvoyance, elle qui n’y voit pas plus loin que le bout de ses rames et ne semble pas en avoir besoin pour se diriger.

Sur les eaux silencieuses autour de l’éperon rocheux, une couche huileuse s’illumine brièvement, puis disparait dans un claquement de langue de la vieille femme.



Blingabel se réveille dans sa chambre de l’auberge de Gunar comme si la journée de la veille n’avait été qu’un rêve. Son corps ne la fait plus souffrir du tout, elle se sent même ragaillardie et il lui faut quelques secondes pour se rendre compte que c’est la conséquence de la bénédiction de la Dame des Chats. Ses sens lui revenant peu à peu, elle reconnait l’odeur de cendre et de poussière de l’habit qu’elle portait, lui assurant qu’elle a vraiment vécu l’échec de sa poursuite du Thayen … et la perte du curieux individu qui lui avait promis de l’aider.

Il ne fait pas froid, la rue derrière les volets clos, semble animée par l’activité normale d’Eauprofonde comme si, déjà, à l’instar de son petit corps, les blessures de la cité s’étaient refermées.

Deux chambres plus loin, une femme, nue, s’étire langoureusement sur son lit. Pas un voile ne la couvre et elle apprécie, s’éveillant en souriant, sentir un vent léger parcourir son corps et lui arracher un frisson. Un jour de plus elle profitera de la vie et de ce que sa Dame lui offrira de bonheurs.
Elle tâte la couverture à côté d’elle, ses doigts cherchent le torse de l’amant qui aurait dû se trouver là … et qui y serait peut-être … s’il n’avait voulu rejoindre sa quête à tout prix. A elle aussi, qu’il soit Noire ou Blanc, l’homme manquerait.


Rejoignant la salle commune tour à tour, elles sont accueillies par Koralinne, souriante malgré les signes évidents de la fatigue. Un parfum léger, d’herbe et de fleurs, l’auréole, camouflant efficacement les plaisirs des premiers mois de sa grossesse.

- Je vous apporte votre petit déjeuner.

A la faveur de l’ouverture de la porte de l’auberge par un badaud quelconque, les deux aventurières entendent un corbeau croasser, puis un autre, comme s’ils se répondaient, suivis de la toux sèche et sans souffle d’une masse grise de tissus tressautant sous les pas de la vieille femme qui s’y dissimule et semble avoir toutes les peines du monde à pousser la porte. Sur chacune de ses épaules en une belle paire d’épaulettes vivantes, les deux corbeaux poussant un croassement courroucé.

[Egnéhéé… humf humf… pfff]

- Tu aurais pu tenir la porte ! Sale gamin !

En arrivant dans la salle commune, Blingabel se sentait un peu comme en vacances. Elle essayait d’oublier la journée de la veille qui n’était pas un souvenir particulièrement plaisant pour elle. La mystérieuse disparition du non moins mystérieux humain qui lui avait promis son aide restait gravé dans sa mémoire et continuait de l'interroger. En effet, les évènements de la veille restaient toujours une énigme pour elle. Etait-il mort ? Que s’était-il réellement passé durant les quelques secondes fatidiques ? Tout cela lui semblait désormais si flou qu’elle n’était plus certaine de ce qu’elle avait vu et entendu.

Quoi qu’il en soit, la jeune gnome était décidée à faire une petite pause dans la recherche de son Thayen, afin de prendre un peu de repos. Quelques jours d’oisiveté lui permettraient certainement de repartir d’un bon pied, avec les idées plus claires. De ce repos, elle jugeait en avoir bien besoin, après ces mois de traques infructueuses, même si elle restait farouchement déterminée à lui mettre tôt ou tard la main dessus. Cela restait bien évidemment son objectif principal. Tout à sa réflexion autour de son repos, Blingabel se fit la remarque que l’auberge était en fin de compte assez agréable. Même si le confort n’était à la hauteur de son terrier familial, il y avait probablement de quoi passer quelques jours agréables avant de reprendre la route.

Après s’être installée à une table, la magicienne applaudit avec une joie non feinte aux propos de Koralinne qui venait d’arriver. Un bon petit déjeuner était exactement ce qu’il lui fallait. Le jeune gnome avait un très bon appétit, et elle n’imaginait pas commencer la journée sans un substantiel repas. Elle salua également Christal avec un grand geste accompagné d’un sourire jovial quand celle-ci gagna à son tour la salle.

- Salut Cricri ! Bien dormi ?

Blingabel sursauta en entendant le croassement sonore de deux corbeaux. Elle dévisagea d’un air perplexe la vieille femme qui venait de faire son entrée dans l’auberge accompagnée de deux volatiles. C’était assurément un singulier personnage. Plissant les yeux, l’illusionniste ne quitta pas la nouvelle venue du regard.

L'Indulgente s'était réveillée dans la volupté des doux rayons matinaux. Son humeur aurait été des plus ensoleillée si elle n'avait pas immédiatement revue les cadavres, la violence... La bâtisse s'effondrer sur l'oiseau de malheur q'était devenu son nouvel ami.Et Doréah...
Maussade, elle fit sa toilette et passa la robe modeste que lui avait prêté Koraline, puisque sa tunique séchait depuis la veille. Elle Lissa ses longs cheveux sombres, les coiffa de tresses et de torsades savemment réparties, puis descendit dans la salle principale.

La gnomette l'y accueillit de façon enthousiaste, ce qui lui arracha un sourire. Crhichri... Cela faisait bien longtemps qu'on ne l'avait pas appelé ainsi. Elle lui enbrassa le front en guise de réponse et s'assit à ses côtés. Christal se releva pour enlasser Koraline , lorsqu'une vieille dame entra bruyamment dans l'auberge.

La prêtresse se fige en entendant les croassements.

Raffard!... Raffard! Elle se sentie transportée et stupide à la fois!

La vieille bique n'avait pas l'air avenante mais Christal n'en avait cure. Elle s'approcha doucement mais sûrement, du trio inquiétant.

La bonne rencontre, Ma dame! Quels jolis oiseaux avez-vous là! Son visage était soucieux, concentré, ses yeux ne pouvant quitter les corbeaux. Elle tenta une caresse vers l'un d'entre eux en soufflant tout bêtement : Raffard? C'est toi? Dis moi, c'est toi?

- On va s’occuper de toi mon beau. Elle aime les tiens tu sais … Mais ? Oh oh ! Tu n’es pas ce que tu sembles être ! Hi hi hi ! Comme si je ne le savais pas ! Hi hi hi !

Sur les eaux silencieuses autour de l’éperon rocheux, la vieille femme lisse le plumage noir de ses doigts noueux, le corbeau s’ébroue et croasse bruyamment, le bec dressé vers le ciel.

- Bien sûr, bien sûr, tu n’en sais rien … Viens-là …




- Hé là ma jolie ! Laisse-moi m’assoir plutôt que d’embêter mes amis ! [Gniiih … pufff … pufff …]

Les articulations de la vieille grinçaient comme la porte cochère d’une grange, chaque mouvement lui étaient difficiles. Sous une masse de tissus gris, ses cheveux se mêlaient à une sorte de capuche et tandis qu’elle tendait son coup vers l’indugente pour la voir mieux, cette dernière pu voir qu’un voile blanc recouvrait ses pupilles. Elle ne devait plus y voir grand-chose. Son visage n’était plus qu’un nœud complexe de rides, ses mains tenaient plus des serres. Il tenait du miracle –ou d’autre chose- qu’une humaine si âgée respire encore.

Le corbeau se laissait flatter sous les doigts fins et délicats de Christal, provoquant la jalousie de l’autre qui croassa de plus belle, arrachant un sursaut à sa maîtresse.

- Ce corbeau est le tien que tu lui donnes un petit nom comme ça ? Comment sais-tu que ce n’est pas l’autre ? Ou un de ceux qui picorent les pendus à un des carrefours là-bas ? [humpf] C’est un oiseau tu sais, certains parlent parfois mais pas celui-là. Enfin, je ne crois pas.

Quelque chose dans le ton de la femme se voulait … chaleureux. Le reproche n’en était pas un. Elle ressemblait à une grand-mère bienveillante qui aurait compris par expérience de la vie, ce qui avait bien pu provoquer son geste.

- Paies-moi donc à boire et raconte-moi ton histoire.

Sursautant comme la vieille, la prêtresse recula d'un pas, confuse. Elle qui était si sûre d'elle d'habitude, se sentait idiote et désespérée. Mais la coïncidence était si grande. Bellaï et Raffard sétaient changés en oiseaux avant de disparaître sous les décombres de la demeure Renaudin, la veille! Et maintenant deux oiseaux semblables apparaissaient sur les épaules d'une humaine dont la peau aussi torturée que l'écorce d'un vieux chêne laissait entendre que son âge même était sur-naturel!

Le ton de la bonne femme était finalement plus encourageant que de prime abord. L'Indulgente se tourna vers Blingabelle, lui dédia un regard appuyé, avant de répondre à la femme :

Euh.. Oui bien sûr, que voulez-vous boire ? Asseyez-vous je vous en prie. Elle recula la chaise pour l'inconnue, fit un geste de la main à la gnomette afin qu'elle se joigne à elles et s'assit à son tour.

Voici une amie, Bling, et je me nome Christal Belheaumière, pretresse au grand Hall des festivités de Calimport, pour vous servir Ma dame.

Elle marqua une petite pose, espérant que la vieille se présenterait elle aussi.
Évidemment qu'il n'était pas question de tout lui raconter. Les derniers évènements mêlaient illégalité, mission secrète, danger, traque... Non, ces choses ne se racontaient pas au premier venu. Pourtant Christal était très curieuse de savoir qui elle était et d'où venait ses oiseaux. Par expérience, elle savait que faire parler les autres commençait souvent par en dire un peu sur soi.

Et bien... Veuillez m'excuser. J'ai vu des choses, des choses pas croyables... Comme un homme et un chat être changés en corbeaux... Des amis que j'aimerai aider...

Elle accentua sa mine préoccupée et dépitée et fixa le bois de leur table.

Je sais, ce n'est pas courant, mais c'est pourtant bien vrai, que Sharess m'en soit témoin...

La petite créature ne perdait pas une miette du fascinant spectacle, à ses yeux, représenté par la vieille bonne femme et ses deux volatiles. La vieille semblait toute droit sortie des histoires de sorcières qu'on racontait aux petits gnomes avant de s'endormir. Même si celle-ci n'avait pas l'air bien méchante à première vue. Quand aux deux animaux croassants, la magicienne ne pouvait pas ne pas faire le rapprochement avec les évènements de la veille... Les volatiles lui avaient immédiatement fait penser à ceux qui avaient surgi de nul part après l'étrange disparition de Raffard. En tant qu'illusionniste, Blingabel avait appris à ne pas se fier à ce qu'elle pouvait voir, elle partait toujours du principe que tout était possible, surtout l'incroyable.

Christal semblait d'ailleurs avoir eu la même idée qu'elle. La magicienne suivit du regard la prêtresse qui avait presque sauté sur la petite vieille, laquelle ne semblait toutefois pas s'en être trop offusquée. Blingabel les rejoignit en sautillant.

- Salut !

Elle accompagna la présentation de Christal d'une petite courbette, avant de de se hisser à son tour sur une chaise. Elle posa ensuite sa main sur le bras de Christal qui semblait très émue. Elle comprit en cet instant que Christal et Raffard devaient être encore plus proche qu'elle ne l'avait cru initialement. Elle se souvint en cet instant des confessions de Raffard au sujet de la prêtresse. Pour le moment, Blingabel ne tirait pas de conclusions hâtives mais restait attentive à la situation pour le moins étrange. Elle prit la parole à son tour.

- Mon amie et moi avons été secoués par la perte de notre compagnon et de son animal familier. Aussi incroyable que cela puisse paraître, vos corbeaux nous les rappellent, d'une certaine manière... Ils n'ont sans doute rien à voir avec les "notres", mais si vous pouviez nous en dire plus sur leur provenance, peut-être que cela pourrait dissiper nos doutes.

- Vous parlez, vous parlez et j'ai toujours aussi soif. Tu sais, les gens qui voient des choses étranges, le plus souvent ils ont juste trop bu ou pas assez. Bientôt tu vas me dire qu'il y avait des plumes, des gobelins et de la fumée aussi?

Ça ne pouvait pas être un hasard, c'était ... une évidence qui sauta aux yeux des aventurières, comme un poing au milieu de la figure.
- Tu es drôle toi ! Un familier tu dis? Tu connais donc l'Art ma petite?

La tête des deux femmes tournait à présent. Qui était donc cette sorcière et que faisait-elle donc là?
- Ferme donc ta bouche ma grande, je ne vous connais pas moi ! [Hihigni ... Pumf pumf] Mademoiselle, apportez-moi un hydromel, j'ai la gorge toute nouée.

La vieille s'étira, on eut cru qu'elle allait se briser en morceau tant elle craquait de chaque articulation. Elle sourit, ou plutôt sa bouche se tordit dans une curieuse vague qui devait être un sourire quelques centaines d'années plus tôt.
- Mes corbeaux ne sont pas des familiers si c'est ta question, ni l'un, ni l'autre, ce sont des bons oiseaux qui ne coûtent rien en grenaille, ils se débrouillent toujours pour trouver ce dont ils ont besoin. Ils viennent du Bois de Padhiver vous savez, c'est un endroit ... spécial.

Elle redevint sérieuse, elles eurent même l'impression qu'elle ... s'endormait ?
- Je suis désolé pour votre ami et son chat. Vous savez, je peux vous aider ... ou peut-être pas mais ça vaut la peine d'essayer non? Où a-t-il disparu? Je peux aller y faire un tour si vous voulez.

La jeune novice dû se forcer à conserver une mine plutôt neutre et une respiration discrête. La vieille était vraiment intrigante, voir même très louche. Les corbeaux, son allusion aux circonstances exactes de la transformation, sa proposition presque immédiate de les aider. Christal avait le présentiment intense que ce n'était pas le hasard qui l'avait invité à pousser la porte de cette auberge. Mais quoi alors? Le plus évident était qu'elle soit agent de la Fraternité maléfique qui sévissait sur la ville et qu'elle soit là pour finir le boulot. Dans ce cas, les éloigner de la taverne était la première chose à faire. A la demeure des Renaudin serait probablement étroitement surveillée par les gardes mais aussi par les voisins. Un retour sur ce lieu serait très risqué.

Et pourtant, l'indulgente ne pouvait étouffer l'espoir que, providence ou pas, cette rencontre soit la clef du sauvetage de Raffard.

Elle s'enfonça dans son siège et regarda longuement Blingabelle, comme pour chercher à perser ce qu'elle en pensait.

Les deux jeunes femmes pouvaient décliner l'offre, par prudence. Elles pouvaient aussi chercher à en savoir un peu plus. La deuxième option requererait de choisir par quel biais. La ruse ou la franchise.
La vieille semblait fooooort vieille, et comme on disait à Calimport, ce n'était pas aux vieux singes à qui on aprenait à faire la grimace.

Carte sur table? Pourquoi pas... La prêtresse hésitait grandement et cherchait le regard de sa nouvelle compère gnomette. En attendant, elle demanda avec calme et courtoisie, tentant de paraître le plus détendue possible :

Ce serait d'une extrême bonté de votre part que d'aider nos amis, je dois dire! Surtout que nous ne nous connaissons pas et que vous ne nous devez rien. Rares sont les altruistes de nos jours... Devrons-nous faire quelque chose en retour, qui vous serait utile ou agréable?

D'une part, la question était à propos. De l'autre, elle ésperait ainsi éveiller le doute chez Blingabelle afin qu'elle aussi fasse fonctionner ses méninges avec méfiance.

A l'évocation des plumes, Blingabel grimaça et passa instinctivement sa main sur son ancienne blessure. Même si elle était complètement guérie, le souvenir de la douleur extrême qu'elle avait ressenti restait vivace. Elle chassa rapidement l'hideux visage du chaman gobelin qui venait de lui revenir à l'esprit pour se concentrer sur celui la vieille bonne femme. Le fait qu'elle évoque successivement les plumes, les gobelins et la fumée, cela commençait à faire beaucoup trop de coïncidences. Il apparaissait de plus en plus évident à la jeune gnome que son interlocutrice en savait bien plus qu'elle ne voulait bien le laisser croire. Qui était-elle réellement ? Comment pouvait-elle savoir toutes ces choses ? Ces corbeaux avaient donc réellement un lien avec Raffard et son familier ? La curiosité de Blingabel était piquée au vif. Elle regarda Christal et devina qu'elle aussi se faisait les mêmes réflexions.

- Je pratique l'Art... enfin, un petit peu. Comme tout gnome qui se respecte ! Enfin, je ne veux pas dire que tous les gnomes sont magiciens, mais nous avons tous une petite affinité avec l'Art. En tout cas, les meilleurs le sont. Mon grand-père lui-même était très fort, vous auriez du voir la qualité de ses illusions. Elles sont renommées dans toutes les montagnes ! Quoi que, il était certainement meilleur encore dans les concours de blagues !

Quand Blingabel était lancée dans un grand discours sur le lien entre l'Art et le peuple gnome, elle pouvait continuer son babillage incessant pendant des heures et des heures. Sans compter les nombreuses digressions. Toutefois, elle se fit violence pour revenir au sujet qui l'intéressait.

- Et vous mamie, vous pratiquez vous-même ?

Blingabel ne serait pas étonnée que la bonne femme ait un lien quelconque avec la magie, même si cette idée ne reposait pour le moment que sur une intuition. La vieille évoqua le bois de Padhiver. Si ses volatiles venaient bien de ce bois, pouvaient-ils réellement avoir un lien avec Raffard ? Le mystère s'obscurcissait dans l'esprit de la magicienne. Blingabel commença alors à cogiter pour déterminer si elle avait de quelconques connaissances sur le lieu qui venait d'être évoqué.

- Qu'est ce qu'il a de si spécial ce bois ?

Jet(s) de connaissances sur le bois de Padhiver (mystères +8, géographie +4, et/ou nature +6, selon ce qui peut m'apprendre quelque chose sur l'endroit)

- Je ne crois pas que ça soit de l’Art vous savez, pas comme les Elfes en tous cas, où ses guignoles en robes. Il avait une robe ton grand-père ? Je dois dire que j’aimerais beaucoup le rencontrer ! J’adore les bonnes blagues, encore plus quand elles sont racontées par des hommes en robe ! [Hihi hum puff puff pfff]

Contente d’elle, la vieille se mit à pouffer, se perdant dans une toux qui aurait pu l’emporter aussi vite, mais fort heureusement, elle parvint à se reprendre tandis que ses oiseaux battaient des ailes, dérangés par ses tressautements.

- Vous savez, si j’vous propose d’aller voir tout prêt, c’est parce que parfois je vois des choses. Vous pensiez si fort quand je suis entrée que j’ai vu plein de fumée et une sale tête de gobelin avec des plumes. Ce n’est pas très sain si vous voulez mon avis, un beau p’tit brin d’fille comme toi devrait penser à d’autres choses. Mais si ça a un rapport avec la disparition de ton amant, ça se comprend.

Son ton maternaliste était revenu. Sans s’en rendre compte, elle avait pris la main de la prêtresse dans ses serres, presque tendrement, pour la relâcher quand elle se tourna vers la Gnome pétillante.

- Ce qu’il a de spécial ? Il est plein d’Elfes, de Druides, et là-bas certains oiseaux ne sont vraiment pas des oiseaux. Il y a des choses dangereuses, même une Banshee, et je vous déconseille d’aller la voir si vous voulez garder vos jolies fesses !

La vieille avait de nombreuses choses à raconter, elle faisait un effort pour se structurer comme si elle était personnellement impliquée dans l’histoire des aventurières. Après une bonne lampée d’hydromel apportée entre temps par Koraline, elle reprit, l’œil pétillant, un ton plus bas, singeant une tentative de partage d’un secret précieux : - « Mais ce n’est pas tout mes jolies, oh que non … Il y a la rivière qui le traverse et qui la réchauffe même au cœur du Nuiteuse, et un peu de tous les monstres dont vous pouvez rêver … et quelque part, dans les bois, un endroit plus spécial que tout le reste. Difficile à dire si les druides le protègent ou l’isolent mais … » -elle laissa quelques secondes le suspense prendre corps jouant avec les nerfs de ses auditrices attentives- « La puissance qui s’y trouve vous permettrait de retrouver votre ami et son chat, et bien plus. Oui, même de botter les fesses à un homme en robe rouge ma petite ! Pense moins fort s’il-te-plait ! »