Aventure forestière, Episode 1

Fatiguée, autant que frustrée par l'issue du combat, elle se consola finalement rapidement à l'idée d'avoir épargné une créature sylvestre. Son état de fatigue, ajoutée à la pluie battante et à la nuit tombante lui évoquait de douloureux souvenirs dont elle portait encore de disgracieux stigmates à la jambe.
Concernant le nouveau venu, après l'avoir silencieusement toisé, et voyant la réaction sensée de sa lointaine cousine, elle décida de laisser Sève et le reste du groupe au jeu d' une diplomatie dont elle n'était pas dotée.
Adhèrant aux propos avisés de la druide, elle se mit à la recherche d'un abri pendant que les autres partageaient causette au nouveau venu. Un humain, avec tout le potentiel de cupidité, de cruauté et de vanité que cette race lui inspirait depuis toujours. Mais sa rencontre avec Sève lui avait appris à temporiser ses idées reçues. L'avenir dirait à qui ils avaient à faire. Et elle avait bien appris depuis que l'humanité n'avait pas le monopole de ces viles desseins. Tant que le groupe ne se mettait pas à partager une chope avec un orque, un combattant de plus ne serait pas du luxe.
En attendant, notre rodeuse débutante scruta les environs à la recherche d'un abri. L'esprit toujours embué par la mémoire de sa blessure, elle ne tarda pas à remarquer un arbre suffisamment grand pour espérer leur offrir un asile similaire à celui que Rillifane Rallathil avait décidé de lui accorder lorsqu'elle s'était ouverte la jambe. Elle en fit le tour à la recherche d'une ouverture, prenant garde à ce qu'il ne soit pas déjà occupé avant de chercher à s'y engouffré si jamais une opportunité se présentait.

Il n'y aurait pas eu cette pluie incessante qui les glaçait jusqu'aux os, on aurait presque pu se croire à Darromar, à la cour de la reine gouvernante Zaranda Étoile Rhindaun, tant la conversation prenait l'allure d'un vulgaire dialogue mondain où seules des banalités se voyaient échangées.

- Nous poursuivons donc des buts similaires, commenta Stor. De notre côté, nous sommes à la recherche de maître Urgon, l'apothicaire de Brost, qui a disparu, voila quelques jours, dans cette même forêt.

Perplexe, le petit barde se frotta le menton, caressant une barde imaginaire. Il y avait vraiment quelque chose de bizarre dans ces bois et la seule présence du Tendriculaire n'expliquait pas tout ou alors l'être végétal était doté d'un solide appétit - à en rendre jaloux nombre de Halfelins - pour avoir englouti autant de voyageurs.

- Votre marchant, habitait-il Brost, lui aussi ?, interrogea le Hin. Ou venait-il d'ailleurs ? Y-a-t-il un autre lien entre tous ces disparus, autre que celui de s'être trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment. De mon humble avis, une unique salade, même géante, ne peut être tenu pour responsable de tant de disparitions. Qu'en pensez-vous, très chère ?

En posant cette dernière question, le ménestrel se tourna légèrement vers Sève, requérant l'avis d'une experte de la vie végétale. Il était toujours bon de se faire confirmer ses hypothèses par quelqu'un qui s'y connaissait vraiment sur le sujet.

Frissonnant en sentant une goutte d'eau se faufiler dans son col et couler le long de sa colonne vertébrale, Stor ajouta rapidement :

- Pour le moment, l'urgence est de trouver un endroit où passer la nuit et facilement défendable. J'espère que vos loups ont le flair suffisamment développé pour détecter un spectre si ce dernier se décidait à nous rendre visite.

- Ah, oui , poursuivit, d'un ton badin, Stor à l'attention de Nibor. Nous avons de bonnes raisons de croire que la salade n'est pas le seul danger du coin. Un mort-vivant rode aussi dans le coin et aurait la fâcheuse habitude de fossiliser ses victimes...

Enwel avait eu sa réponse et Stor s'était empressé de retourner celle qu'attendait Nibor. Elle décida donc de tourner les talons pour trouver un trou assez large pour les abriter.
Lyn avait pris les devants faisant déjà le tour d'un imposant séquoia. Elle serait de trop dans cette même recherche. Elle alla donc explorer les environs de l'abri potentiel pour s'assurer qu'aucun autre congénère de la salade combattue ne se tapissaient dans les coins les plus sombres des fourrés qui l'environnaient. Tronch sur ses talons elle parcourut sous une pluie battante chaque lieu qu'elle estima suspect.

Utilisation de pistage afin de repérer les créatures hostiles environnantes.

- Mes loups ont surtout du flair pour se nourrir, un spectre ça rempli pas le ventre. Par contre en parlant de ventre, je pense que cette jeune plante avait très faim, un simple petit élémentaire a réussi à calmer son appétit…à moins que ce soit la violence de vos coups ! En tout cas j’irais pas voir à l’intérieur de son estomac, il doit y faire tout noir !

Répondit la druide à Stor et à Thojan après un temps de réflexion. Il fallait se rendre à l’évidence, tout le monde n’aimait pas être trempé jusqu’aux os et c’est tout naturellement que l’ensemble du groupe se retrouva devant ce grand séquoia majestueux.
Sève, elle adorait la pluie. En revanche, elle détestait les nuits noires et tous ces mystères et peurs qu’elles engendrées, surtout en pleine forêts. Ce refuge allait être salutaire pour passer la nuit à condition de bien s’organiser. Lyn était déjà rentrée à l’intérieur, elle la rejoignit immédiatement pour déterminer si il y avait suffisamment de place pour tout le monde. Comme elle le redoutait, il y faisait si noir que la jeune druide ressenti une certaine angoisse avant d’aller plus loin. Elle appela la barbare d’une petite voix.

- Lyn, Lyn, tu es là, je te vois pas, Lyn c’est pas drôle, montres toi. On y voit rien ! je me souviens de ton histoire dans un arbre !

La Téthyrienne, bras en avant, tâter la noirceur du lieux . L’odeur humide de l’arbre lui emplissait les narines. Le tronc creux pouvait abritait aussi tout un tas de créatures amicales ou pas. Il fallait y voir plus clair sans pour autant risquer de mettre le feu et blesser cet arbre salutaire.

C’est alors qu’un étrange phénomène se produisit, un nuage lumineux enveloppa le corps de Sève. La lueur éclaira vivement dans un rayon de 1,50 mètre et faiblement sur 3 mètres, suffisamment pour que le reste du groupe ne se prenne pas les pieds dans une racine. Elle se sentait maintenant rassurer. Elle savait qu’elle ne pouvait pas utiliser ce don à l’extérieur car elle attirerait le mal à coup sûr. Par contre, les êtres d’alignement bon reconnaissent immédiatement cette aura comme un signe de pureté et de dévotion envers les puissances du Bien. Elle espérait que ce cela suffise à intégrer au plus vite Nibor, le nouveau venu, la confiance entre tous allait être une arme pour le reste de la nuit.

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utilise auréole de lumière

Nibor acquiesçait de signes de têtes respectueux aux quelques remarques de ces potentiels compagnons. Il répondit à la question du Tormite :
- Tant qu'on ne fait pas de mauvaise rencontre, il n'est pas difficile de survivre une dizaine de jours dans la forêt. L'eau n'est pas difficile à trouver, dit-il en levant les yeux au ciel, et un minimum de nourriture peut faire en sorte de tenir une longue période. Affaibli, peut-être, mais en vie. Par ailleurs, c'était un habitué de la cueillette de champignons. J'ai cru comprendre que c'était une activité lucrative pour qui s'y connait, à la bonne saison. Ce n'était pas la première fois qu'il partait seul...
-...
- Après, la perspective de rencontres avec des plantes affamées diminue certainement ses chances. Et cette pluie qui va brouiller ce qui reste des traces...
- Brost, dites-vous ? Oui en effet, il vient de ce patelin.

- ...
- Pardon ? Des mort-vivants ? Un frisson lui traversa le dos. Dû à la sensation de froid de ses habits détrempés ou à la perspective de rencontrer un (ou des) spectre(s) ? Et bien, j'ai beau être optimiste, mais ça n'a pas l'air d'être en la faveur de ces disparus. Chouette contrée !

- Mais tout-à-fait d'accord, le plus urgent est de s'abriter. Mais je suis navré, je n'ai même pas pris la peine de vous demander : me permettriez-vous de me joindre à vous ? Quitte à chercher un disparu, autant en chercher plusieurs en combinant nos efforts. Vous semblez plus organisé, mais je ne suis pas dénué d'aptitude pour ce qui est de vivre en forêt...Il prononça cette dernière phrase sur un ton descendant. Chercher le fils d'un marchand n'apportait évidemment aucun talent trouvé habituellement chez les marchands en soi, et Nibor n'était pas du style à se sur-vendre.

Alors qu'il terminait sa phrase, ils se dirigeaient à la suite de Sève qui venait, apparemment, de rentrer dans une cavité d'un tronc d'un arbre immense. L'instant d'après, une lueur fut émise faiblement de l'intérieur, et Nibor, en se rapprochant, ne put s'empêcher de penser à quel point des allumes-feux pouvaient être pratique pour allumer une torche rapidement. Mais... Cette lueur ne venait pas d'une torche ordinaire. Elle semblait ne varier que très peu, pas comme le ferait la lumière d'une flamme changeante. Puis, après quelques pas, Nibor put constater que nulle torche n'était utile en ces lieux. Il lâcha, d'étonnement un "Oh" non sans une pointe d'admiration.

Certes, il savait qu'il était possible d'illuminer l'espace grâce à la magie. Mais cette lumière là, qui provenait directement de la druidesse, avait quelque chose de plus. Sans trop savoir pourquoi, les quelques doutes qui subsistaient après la courtoisie du barde et du tormite s'envolèrent à cette vue. Nibor savait maintenant que cette personne pouvait être digne de confiance. Et il n'en espéra que plus que le groupe accepte sa présence pour la suite...

Début de la nuitée
Grandes averses


Le séquoia était d'une taille gigantesque, capable d'abriter certainement tous les aventuriers. La pluie tombait en continue comme un torrent se déversant dans des roches montagneuses. Elwen et son chien durent admettre que pister serait peine perdue avec ce rideau de pluie et la nuit noire.

Le coeur de l'arbre restait des plus mystérieux avec pour l'instant la seule satisfaction d'avoir trouvé un toit contre cette pluie capable de noyer un halfelin ou de laver un nain.

Le mystère du lieu sylvestre s'éclaircit par un phénomène mystique. La druidresse s'était auréolée d'une lumière blanche et apaisante, que les âmes bienveillantes perçurent comme une douce caresse.

Le coeur de l'arbre abritait une galerie de bois entrelacés partant d'un plafond à deux trois mètres de leur tête. Moisissure, champignons et toiles d'araignées parsemaient l'endroit. La lumière trouvait obstacle face à des piliers racinaux ne permettant pas de distinguer tout le tour le l'arbre.

Elwen, distraite par la lumière, n'avait pas remarqué que Trunch venait se s'éclipser comme un renard au coeur de ce labyrinthe de racines. Celui qui le ferait obéir au doigt et à l’œil n'était pas encore né pour l'instant. C'est seulement en entendant un aboiement que l'elfe des bois s'aperçut de sa disparition. Un deuxième aboiement résonna puis plus rien. Le silence...

Les loups étaient restés dehors, ils y étaient à leur place. Tronch, lui n’avait pas ce même instinct, domestiqué, il suivait comme un… chien. Heureusement car il avait dû flairer un danger et l’avait signalé. Le fait de ne plus l’entendre si rapidement était plus inquiétant par contre. Sève, qui s’était attardée sur ces champignons contre l’intérieur du tronc, s’inquiétait de ce silence si soudain. Dans ces racines, il devait se cacher quelque chose qui pique, mords ou aspire et Tronch leur avait surement évité de s’y confronter directement.

- Peut-être des araignées ? pensa la druide à voix haute en pointant les toiles qui pendaient de ci de là.

Sève sembla déçue, elle avait espéré une soirée plus clémente pour le groupe après cette journée en forêt. Un chant reposant, éclairé doucement par sa nimbe, un bon repas et repos, le bruit de la pluie dehors, des rires à l’intérieur, faire connaissance et partager. Cet endroit aurait été parfait mais la nature en avait une nouvelle fois décidé autrement. Le groupe avait failli finir dans le ventre du jeune tendriculaire, il se trouvait maintenant dans un autre qui pouvait être tout aussi dangereux. Elle resta sur la défensive, aux aguets.

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Perception

La nuit avait cessé d'attendre son tour. Impatiente, elle balaya d'un souffle les dernières lueurs du jour, à moins que cela ne fut la pluie qui, à force d’opiniâtreté, était parvenu à éteindre les dernières cendres de l'astre solaire. En tous les cas, la sylvestre ne l'avait pas anticipé et s'était aventurée plus que de raison dans les bois. Pensant tranquilliser ses comparses en ratissant les environs, elle était consciente que les risques qu'elle avait pris ne feraient que les inquiéter. Elle renonça à son idée de repérer les lieux. Elle chercha dans l'obscurité le séquoia qui semblait avoir été choisi par son groupe afin de s'y abriter avec eux. La nuit serait longue, mais ensemble ils avaient une petite chance de voir l'aube.

Elle fit volte-face pour retrouver l'arbre salutaire. Elle courrait à toutes jambes sans pour autant céder à la panique. Elle avait plus ou moins mémorisé le chemin qu'elle avait suivi jusque là.Tronche la suivait, pressé surement de s'abriter, lui aussi dans son tronc clos. Ils parcoururent une bonne distance quand la nuit coupa leurs élans. La progression devenait périlleuse. La pluie drapait son regard d'un voile opaque et lui glaçait le sang. Tronch semblait s’inquiéter de la situation. Le doute qu'il percevait dans l'attitude de sa protectrice devait certainement l'angoisser. Enwel ne reconnaissait plus l'endroit et cela ne signifiait rien de bon. Elle ferma les yeux. Elle ne pouvait voir. Elle ne pouvait ni entendre, ni sentir. La pluie s'en assurait. Mais elle pouvait se souvenir. Elle chercha un moment, un détail ancré dans sa mémoire qui pourrait la sortir de là, mais tout était déjà flou. Tronche ne faisait aucun bruit. Il devait attendre, anxieux que la marche reprît. La sylvestre ne pouvait s'abandonner à l'obscurité et comme répondant à ses prières une lumière éclaira son visage. Elle ouvrit les yeux pour fêter ce nouveau soleil et sourit. Elle se lança vers lui, Tronch la suivait fidèlement. Ils atteignirent le refuge nocturne où les attendaient le restant du groupe. Tout le monde semblait fatigués et soulagés à la fois. Cet abri était une aubaine. C'était une grande surface, suffisante pour les accueillir et pour qu'ils puissent se mouvoir aisément. Il y avait même des extensions qui se divisaient en méandres obscures qui paraissait sans fin.

Quand elle entra dans l'arbre, Enwel resta figée devant cette lumière douce qui lui apportait du réconfort. Ils étaient enfin à l'abri, au sec et en sûreté. Elle soupira de soulagement en essayant de trouver un endroit pour s’asseoir. Ce qu'elle fit en s'adossant contre la paroi interne du séquoia. Mais sa pausa fut de courte durée. Alors qu'elle profitait encore de cette douce lumière, elle entendit un premier aboiement qu'il la fit se lever. Cela ne pouvait être que Tronch. Les loups de Sève se montraient dans l'ouverture de l'abri, tels les puissants gardiens de leur tranquillité, ils n'étaient donc pas en cause. De plus, la complicité qu'ils partageaient avec leur maîtresse les forçait à l’obéissance. Enwel et Tronch n'étaient pas encore à un tel degré de complicité. Le canidé avait une tendance à l’indépendance d'action qui pouvait coûter autant que bénéficier. En l’occurrence, cela leur coûterait probablement. Enwel siffla doucement par réflexe mais cela n'eu aucun effet sur Tronch. Le deuxième aboiement laissa place au silence. La sylvestre s’inquiéta pour son compagnon. Elle regarda ses comparses afin de les jauger. Savoir qui la suivrait dans ces couloirs arboricoles. Sève s'essaya à déterminer ce qui les menaçait. Des araignées... c'était probable en effet. Enwel dégaina l'une de ses épées courtes. Ses flèches ne seraient que d'une utilité limitée en ces lieux étroits. Elle fit un pas vers l'obscurité cherchant à les trouer de son regard perçant. Elle n'y voyait pas grand chose.

À l'instar de ses compagnons, Stor s'était hâté à l'intérieur du séquoia, pressé de se mettre à l'abri du véritable déluge qui s'abattait sur eux à présent. L'intérieur de l'arbre était grandiose et l'aura lumineuse émanant de Sève, tout en les faisant baigner dans une atmosphère rassurante, ajoutait encore du charme à ce jeu d'ombres bien mystérieux. Avec un soupir de soulagement, le petit barde laissa tomber son sac près du tronc avant d'observer les lieux, son tempérament poétique ne pouvant qu'être fasciner par le spectacle. Si on lui laissait quelques minutes, nul doute que l'inspiration allait bientôt le gagner et qu'un chant n'allait pas tarder à souligner l'ambiance apaisante. Déjà, le Hin avait saisi son yarting, commençant à murmurer quelques notes, lorsque la tension émanant du groupe interrompit son élan. Aux deux jappements de Tronch succédait maintenant le silence, jugé suffisamment inquiétant pour voir les autres adopter une attitude défensive. Par contagion, Stor posa son instrument de musique avant de dégainer, lui aussi, son épée courte. Scrutant les alentours, il essayait de distinguer quelque chose au delà de la faible luminescence émise par Sève.

- Enwel, c'est normal qu'on n'entende plus ton chien ?, demanda-t-il intrigué. Il n'a quand même pas pu disparaître comme ça... En faisant aussi peu de bruit... Je veux dire, s'il était vraiment en danger, on l'entendrait hurler, non ?

Le pouvoir de Torm était une chose extraordinaire. Ce n'était pas la première fois que Thojan se blessait gravement, mais la magie divine que lui procurait le Vrai Dieu l'avait toujours soutenu, de la même manière que sa foi n'avait jamais vacillé. Elle ne vacillerait probablement jamais... En revanche, le contrecoup de la guérison et du combat, avec la fatigue accumulée, aurait raison de sa vigilance, tôt au tard. Alors qu'il suivait le groupe vers un abri quelconque, il dut réprimer un bâillement. Il répondit cependant favorablement à la question de Nibor:

– Sur ma foi, des gens honorables ont tout à s'entreaider; et vous paraissez plus à l'aise que moi dans cet environnement. L'homme que nous recherchons s'appelle Urgon, c'est un cueilleur de champignons réputé. Si nous...

Quand Sève disparut à son tour à l'intérieur de l'arbre, le prêtre se saisit alors de sa torche éternelle, dans l'idée de procurer au groupe une lueur salutaire. Mais ce fut de la druidesse-même qu'un halo émana. La lueur surnaturelle lui emplit les yeux bien plus qu'elle n'aurait du le faire, et le figea sur place.

¤ Impossible ! Elle est... ¤

Plongé en arrière dans le passé, Thojan revivait la seule fois où il avait contemplé une telle lumière: dans le halo d'un archon lumineux; un réel émissaire du Bien, convoqué temporairement sur le plan matériel. Il était impossible de contrefaire un tel éclat... Peu de gens le savaient, mais les cieux des plans supérieurs rayonnaient de différents reflets. Aucune commune mesure avec les illuminations magiques crées par différents sorts, profanes ou divins. Un haut-prêtre avait tenté de décrire les lueurs des premières strates de Céleste. A force de dévotion, Thojan avait déjà réussi, quelques fois, à canaliser la lumière argentée de la première strate, Lumia. Il frôlait la maitrise de la seconde. Des mystiques avait dédié leur vie entière à la recherche des sept rayonnements de Céleste. Même si elle était faible, l'aura lumineuse de Sève était une preuve irréfutable: elle était digne de confiance, sans doute bien davantage que Thojan lui-même.

Et elle s'était déjà enfoncée dans les profondeurs de l'arbre ! Ravalant toute question impromptue et grossièrement curieuse, Thojan la suivit à pas empressés et décapuchonna sa torche magique. La lueur était loin d'être aussi glorieuse, mais elle éclairait bien plus fort. On pouvait à peine distinguer la poudre de rubis qui couvrait l’extrémité du bâton et qui avait servi à focaliser le sort. Alors que le disciple de Torm inspectait les lieux à la lueur nouvelle, il jugea aussitôt l'abri sec, autrement dit, hautement confortable. Une part de lui n'avait qu'une envie, se défaire de son armure et se lover entre deux racines pour la nuit. Mais Tronch, encore une fois, ne lui en laissa pas l'occasion.

Avant qu'il ne puisse finir sa discussion avec Nibor, briser l'inspiration poétique de Stor avec sa flamme éternelle, parler avec Sève, ou déposer son paquetage, ce foutu clébard disparut entre deux contreforts ligneux. Thojan ne s'en aperçut même pas avant le bref aboiement et le silence qui s'ensuivit. Il était assez rare que le Tormtar ne sache pas quoi dire, mais là, il commença sa phrase par une interjection hésitante.

– Euh... Il a peut-être levé un lièvre et à la bouche pleine pour répondre ? On ne devrait pas se lancer à sa suite aveuglément. A quoi pouvons-nous nous attendre comme mauvaises rencontres, dans ce genre d'abri ?

Du goût de Thojan, il avait passé assez de temps dans des végétaux ces derniers temps. N'eusse été la pluie, il aurait campé dehors. Et pas question de s'enfoncer dans un tunnel au milieu des racines avec son armure et son paquetage sur le dos. Il aurait tout d'une tortue coincée dans un tas de branches. Pour la première fois, chacun put entendre une pointe d'exaspération dans les paroles du prêtre.

– Il faudrait vraiment le mettre au pas, ce satané molosse...