Chapitre 1 : Padhiver

Metzli, Corvo Stern et Karmeth:

5ème jour de la Griffe des Tempête, année des Dragons Renégats
5 Mirtul 1373.
Période de la journée : Début de soirée
Climat : Ciel dégagé. Vent frais.
Température : environ 1 degré.

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Les aventuriers observent la scène:
Metzli: 14 (Dé) + 0 contre DD 20 = Echec
Corvo: 14 (Dé) + 10 contre DD 20 = Réussite
Karmeth: 4 (Dé) + 3 contre DD 18 = Echec

Karmeth et Corvo Stern laissèrent la tâche de mener la discussion avec l’émissaire de la Main des Mystères à Metzli pendant qu’ils observaient la situation et les autres participants. Le Kaxanar n’hésita pas à utiliser l’Art pour améliorer ses sens et augmenter leurs chances de détecter un éventuel piège avant qu’il ne soit trop tard. Mais il n’y avait pas grand chose à rapporter. Ou, en tout cas, pas grand chose qu’il arrivait à percevoir même dans cet état amélioré.

Il n’en était pas de même pour Corvo. Avant toute chose, il était certain que l’émissaire n’était pas un vieil homme, contrairement aux apparences. Il était assez évident qu’il utilisait la magie pour déguiser son apparence. Plus difficile à percevoir, le Cormyréen se trouva rapidement avec l’assurance que les deux personnes qu’ils venaient rencontrer n’étaient pas seules. Il ne pouvait voir personne d’autre mais le quartier était bien trop calme pour qu’il n’y ait pas quelqu’un qui soit en train de s’assurer de leur tranquillité. Enfin, il avait la certitude que sous les plis de sa cape, le vieillard cachait une lame dont sa main gauche ne s’éloignait jamais beaucoup.

Il en était là de ses observations quand ce dernier prit la parole. D’un signe de la main, il inclut les trois aventuriers dans ses salutations. Il y avait une certaine élégance dans ses mouvements, comme s’il faisait une révérence devant un membre de la noblesse plutôt qu’entamait une discussion avec trois personnes qui avaient passé une journée à le chercher.

-Tout le plaisir de cette rencontre est pour moi. Cette remarque causa un roulement des yeux d’Obinus que seul Corvo remarqua. J’ai de nombreux noms, selon la région, mais vous pouvez m’appeler Barnabas. Il semblerait que je doive m’excuser d’avoir causer des inquiétudes à Karmeth. Cela n’était point mon objectif.

Il fit une courte pause, enlevant du sommet de son bâton une mèche de cheveux blancs qui avait glissée devant ses yeux. Lorsque sa canne se trouva de nouveau au contact avec le sol, il reprit sur un ton un peu plus sérieux.

-Ce n’est pas tant le Comte que la foule de gens qui vont et viennent autour de lui que je cherche à éviter. Mais je pérore. Je suppose que vous avez des questions pour lesquelles vous voulez des réponses mais, si je puis me permettre, faites attention à ce que vous demandez: parfois, l’ignorance est la meilleure armure.

Moreta :

5ème jour de la Griffe des Tempête, année des Dragons Renégats
5 Mirtul 1373.
Période de la journée : Nuit
Climat : Vent frais.
Température : environ 2 degrés.

L’escapade de la soirée avait été plutôt décevante et n’avait pas donné les résultats que Moreta aurait pu attendre et espérer. Mais il ne s’agissait là que d’un contretemps, au pire. La Lunargentine n’avait aucun doute qu’elle aurait rapidement l’occasion de croiser à nouveau la route de ceux qui venaient d’échapper à sa poursuite. Et ils ne seraient pas aussi chanceux la prochaine fois.

La pluie cessa complètement après quelques minutes de marche et Moreta n’eut aucune difficulté à trouver le chemin du retour. La salle principale de l’auberge était maintenant complètement silencieuse et elle ne vit personne qui puisse être témoin de son escapade nocturne.

6ème jour de la Griffe des Tempête, année des Dragons Renégats
6 Mirtul 1373.
Période de la journée : Peu avant l’aube
Climat : Ciel dégagé
Température : environ 4 degrés.

Le reste de la nuit s’était passé sans incident et la Lunargentine put se lever avant que Padhiver ne se réveille. La grande salle était complètement vide à l’exception d’un jeune garçon en train de passer le balai en sifflotant. Il ne s’aperçut de sa présence que quand elle se trouva à seulement quelques mètres dans son dos et sursauta quand elle lui sembla apparaitre de nul part.

-Bonjour. Je ne suis pas sûr qu’il y ait grand chose de prêt dans la cuisine mais je peux aller vérifier si vous voulez.

Sans vraiment attendre une réponse, il se dirigea vers le fond de l’auberge, laissant Moreta seule dans la pièce. Une nouvelle journée se dressait devant elle.

Sans très bien savoir pourquoi, Metzli était quelque peu mal à l'aise. En temps normal, elle aurait exulté d'avoir accompli la tâche que le Comte lui avait confiée: retrouver ce mystérieux envoyé de la Main des Mystères.

La jeune ensorceleuse était en effet quelqu'un de joyeux, d'enjoué et d'un naturel peu méfiant, ce qui la rendait sympathique aux gens de bien mais faisait d'elle une proie de choix pour les arnaqueurs et beaux parleurs en tous genres. Les deux années qu'elle avait passées sur les routes lui avaient valu d'acquérir un peu d'expérience en ce domaine et elle se montrait plus prudente que par le passé mais sa personnalité n'avait pas fondamentalement changé. Dès lors, elle ne s'expliquait pas très ce sentiment de gêne qu'elle ressentait en écoutant Barnabas et en le voyant flanqué d'Obinus.

¤ Est-ce la présence de ce désagréable Obinus et le mystère entourant son rôle dans cette situation? Ou la crainte d'être épiée? ¤

La jeune amnienne jeta un regard inquiet aux alentours, sans toutefois apercevoir le moindre élément suspect. Cela ne la rassura pas complètement cat elle ne se rappelait que trop bien l'attaque menée contre le Comte Aksel Tørshavn le soir où elle l'avait rencontré.

Elle décida de jouer la carte de la prudence et ne pas entrer trop dans les détails. Elle se permit néanmoins un trait d'esprit :

- L'ignorance est une armure bien fragile lorsque l'on est confronté à des puissances qui nous dépassent: la connaissance est bien souvent nécessaire pour éviter de se jeter stupidement dans la gueule d'un loup. Mais le fait d'exposer imprudemment son savoir est en effet tout aussi dangereux que l'ignorance. La sagesse voudrait que l'on sache ce qu'il faut savoir, sans toutefois que les autres n'en aient conscience.

L'ensorceleuse esquissa un sourire avant de poursuivre :

- Je ne suis qu'une envoyée du Comte Aksel Tørshavn, chargée de vous retrouver et de lui rapporter vos intentions. Les questions importantes devront être traitées avec lui ou avec une personne qu'il jugera compétente. Pour ma part, je ne vous poserai que deux questions : êtes-vous prêt à aider le Comte à faire face à ses ennemis? Et, si c'est le cas, quand et comment peut-il reprendre contact avec vous?

L’expérience et les sens affutés du Corvo firent une fois de plus leurs preuves, si bien qu’il ne lui fallut pas longtemps pour détecter les premiers éléments suspects de la rencontre… Qu’il s’agisse du déguisement magique masquant les traits de celui qui se présentait comme étant Barnabas, de l’environnement bien trop calme témoignant que d’autres sbires devaient contrôler l’ensemble des environs ou encore de l’arme dissimulée à portée de main du vieillard, rien de tout cela n’était réellement la source de son inquiétude naissante. Quoi de plus normal que toutes ces précautions après tout ?

Non en réalité, les craintes du jeune homme prenaient réellement racine dans la réaction étrange d’Obinus… Le prétendu apprenti avait roulé les yeux au ciel lorsque le vieillard entama quelques formules de politesse à l’attention de Metzli...
Au fond de lui, Corvo espérait qu’il ne s’agisse que d’un nouveau témoignage de l’irrespect teinté de suffisance de l’apprenti… Mais l’esprit paranoïaque du Cormyrien ne pouvait se contenter de cette seule explication. L’attitude d’Obinus soulevait maintenant d’autre hypothèses…

¤ Soit Obinus est en fait le type qu’on recherche, auquel cas, il fait passer le vieux pour lui et ce dernier s'exprime d'une manière un peu trop mielleuse à son gout… Soit Obinus et le vieux sont des imposteurs et vont passer à l’attaque d’ici peu, auquel cas, l’apprenti trouve que son complice en fait trop…¤

Le premier réflexe pour le roublard fut de garder le silence. Mais tandis qu’il écoutait Metzli réagir, il repensa à l’attaque qu’elle avait décrite et subie pas plus tard que la veille…

¤ Même genre de contexte… Autant prendre les devants, au moins on sera fixé ¤

Sans prendre plus de précautions et au risque de faire réagir en bien ou en mal Barnabas et l’apprenti, Corvo pris la parole à son tour de manière à alerter ses compagnons. D’une voix calme, sûr de lui et sur le même ton que le trait d’esprit de Metzli, il coupa le vieux et la belle Amnienne :

- Si je peux me permettre Maître Barnabas, quand vous parler de l’ignorance comme de la meilleure des armures, faites-vous allusion au déguisement magique qui vous grime en ce moment même, au fait que la dague dissimulée dans votre robe est à deux doigt de finir dans votre main gauche ou encore à celui qui fait que vous être en supériorité numérique malgré le calme - un peu trop prononcé il faut le dire - des environs alors que nous ne sommes que trois ? Sauf votre respect permettez-moi donc de vous contredire et d’aller dans le sens de Dame Metzli : Dans ces cas précis, l’ignorance ressemble surtout à une armure trouée !

Les dés étaient jetés, restaient maintenant à voir comment la partie adverse allait prendre ces informations. Corvo, lui, avait assez confiance en l’expérience de ses compagnons pour savoir qu’ils ne sur-réagiraient pas à ces informations.

¤ Si le chaos doit se déclencher maintenant, alors Tymora sera de notre côté ¤

Karmeth se fustigea intérieurement pour s'être montré si aveugle. Malgré les révélations de Corvo il ne voyait toujours qu'une place déserte, un vieillard et un jeune homme.

¤Elle est belle la vigilance... Si l'ignorance est une armure, je suis blindé !¤

Le prêtre décida de partir sur le principe que la discussion allait continuer de manière civilisée. Il n'allait pas reprocher aux mages de faire preuve de précaution.

-Bref, je serais de mon côté plus exigent que Metzli, car plus perdu encore. La ville est le terrain de jeu d'au moins deux organisations malfaisantes, dont au moins une veut notre peaux, et j'ai bien l'intention de leur gâcher la vie.
Avez-vous des informations qui nous permettraient d'agir en ce sens ? Si en plus vous avez besoin d'actions plus... visible que ce que vous permet le secret dont vous vous entourez actuellement, n'hésitez pas.

Cette fois-ci bien décidé à ne laisser aucun détail lui échapper, le Kaxanar en remit une couche en déclenchant la magie stockée en lui qui attendait depuis l'incident à la tour des capes.

¤Allez, on se réveille et on se concentre !¤ s'ordonna-t-il en focalisant son regard sur les deux hommes.

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La nuit avait portée conseil à la jolie elfe. La journée de la veille était une perte de temps, vu le peu d’informations qu’elle avait eu, mais heureusement de rien d’autres, grâce à ses talents de musicienne. Certains argumenteraient qu’un homme était mort, mais ce n’était qu’un humain, et il était déjà condamné à court terme. Au moins, le trio aurait plus de mal à faire ce qu’ils voudraient dans la cave, même si du moment que cela ne lui apportait rien, Moreta s’en moquait.
Revenue tard, l’elfe fut malgré tout la première cliente dans la salle commune, descendant les escaliers avec sa grâce et sa discrétion naturelle, elle arriva à côté du garçon de ménage et toussota un peu pour se faire remarquer, le faisant sursauter dans l’état second, certainement moitié endormi moitié ailleurs, où il se trouvait en faisant son travail, ce qui était compréhensible pour un faible humain à cette heure.
Le regardant partir, la barde ne lui répondit pas, car dans son état, il ne l’aurait certainement pas remarqué. A la place, elle préféra se trouver un bon siège à une table, forcément encore vide, et attendre son retour, et réfléchit à la journée à venir.
Plusieurs choix s’offraient à elle, et trois d’entre eux semblaient se détacher : le premier était de récupérer les informations dans la maison au bord du lac. C’était plus un travail de nuit, mais il lui faudrait bien la journée pour le préparer. Si quelqu’un avait voulu ses informations, un autre les voudrait certainement, le problème, c’est qu’elle n’avait aucune idée de qui, ou du prix qu’elle pourrait en tirer. Cela voulait aussi dire avancer elle-même les frais pour cette mission risquée, sans aucune certitude d’en tirer bénéfices même si elle réussissait.
Le second choix était de continuer sur son aventure de la veille, récupérer les informations sur le culte et le peu regretté traître Jehal, et les revendre à des organisations qui les voudraient bien. Pour le coup, elle avait une idée de qui pourrait vouloir acheter ses informations, mais peu d’idée sur où chercher, car d’ici peu les autorités envahiraient le magasin, et lui ferait concurrence, et pourraient mal voir de la concurrence.
Aussi le troisième choix semblait être le meilleur, et celui pour lequel elle était venu ici. Certes, il n’y avait aucun espoir de paiement monétaire, mais aucun risque non plus. De plus, cela la rapprocherait de la vengeance qu’elle attendait depuis des années, et il lui faudrait bien faire ces recherches un jour ou l’autre, alors autant le faire aujourd’hui.
La journée risquait d’être studieuse.

Metzli, Corvo Stern et Karmeth:

5ème jour de la Griffe des Tempête, année des Dragons Renégats
5 Mirtul 1373.
Période de la journée : Début de soirée
Climat : Ciel dégagé. Vent frais.
Température : environ 1 degré.

Barnabas accueillit la révélation que Corvo était capable de percevoir bien plus que ce qui était immédiatement visible, ainsi que la menace à peine voilée qu’elle contenait, avec un simple hochement de tête. Il fut le premier à qui il répondit mais il ne tarda pas à en englober les sujets des questions de Metzli et Karmeth a la conversation. Le nain prêtait attention aux inflexions de la voix de l’envoyé de la Main et, l’aide de Demoiselle Chance lui donnant un avantage, il parvint à la décision que Barnabas ne mentait probablement pas.

- Ce n’est pas contre moi que l’ignorance peut vous servir d’armure, je ne vous veux aucun mal. Mais je pense que vous comprendrez que je préfère me montrer trop prudent que pas assez. D’où notre situation présente.

Il se redressa plus nettement et ses traits rajeunirent comme par enchantement, ou par annulation d’illusion plus correctement. Ses deux main se trouvaient maintenant sur son bâton qui ressemblait maintenant bien moins à une béquille et bien plus à un objet magique lui-même. La dague que Corvo avait aperçue pendait toujours à sa ceinture.

- Vous avez raison, Karmeth , que Padhiver est un nid de vipère. Relativement. Je ne vous conseille pas de visiter Eauprofonde ou Athkatla. Mais il y a plus de deux organisations qui se disputent la cité dans les ombres et de nombreuses factions au sein de plusieurs de ses organisations. Mais vous n’êtes pas ici pour recevoir un cours de philosophie politique, n’est-ce pas? De ce que j’ai pu rassembler comme information, je dirai que le Trône de Fer est derrière la tentative d’assassinat sur la personne du Comte. Il est possible qu’ils soient aussi responsables de certains de vos autres problèmes. Obinus me dit aussi que vous vous êtes trouvés sur le chemin de l’une des machinations du Culte du Dragon quand vous lui avez rendu visite mais je ne pense pas que votre identité leur ait été révélée pour l’instant.

Il fit une courte pause qui ne laissa guère de temps à qui que ce soit d’interjeter. Obinus faillit essayer de placer un mot mais Barnabas reprit la parole avant qu’il n’en ait eu le temps. Le seul moment où Karmeth sentit qu’il y avait une sorte de désaccord entre les deux. Obinus n’insista pas, cependant. Barnabas sortit un parchemin muni d’un sceau étrange. Aucun des trois aventuriers ne le reconnut.

-Il est plus sûr pour le Comte de ne pas essayer de me contacter. Mais, en cas d’urgence, dites-lui de porter une rose blanche à sa boutonnière et je trouverai un moyen de lui parler. Donnez-lui aussi ce parchemin. Il saura quoi en faire. J’aimerai aussi que vous lui disiez qu’il est urgent qu’il lance son expédition. Le parchemin aidera. Si cela n’est pas trop vous demander, j’aimerai que vous en fassiez partie. Trop de monde sait qu’il l’organise pour qu’il n’y ait pas au moins un saboteur parmi eux.


Moreta :

5ème jour de la Griffe des Tempête, année des Dragons Renégats
6 Mirtul 1373.
Période de la journée : Peu avant l’aube
Climat : Ciel dégagé
Température : environ 4 degrés.

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Moreta a une chance d’apercevoir l’halfeline :
6 (Dé) + 11 contre DD 26 = Echec

Moreta n’eut pas à se montrer trop patiente. Les yeux toujours un peu vides, le garçon revint de la cuisine avec la nouvelle qu’il avait trouvé de quoi lui préparer un petit-déjeuner. Un ragoût était en train de chauffer dans la cheminée mais, en attendant, il apporta une miche de pain, de la charcuterie et du fromage. Dans l’ensemble, le repas s’avéra plutôt satisfaisant et l’astre du jour n’avait pas encore commencé à paraitre au-dessus des murs de la ville quand la Lunargentine se dirigea vers la Maison du Savoir, le temple-bibliothèque dédié au Seigneur de la Connaissance.

Les rues du Joyau du Nord étaient encore relativement calmes mais le nombre de chariots et de charrettes que Moreta devait éviter croissait avec chaque minute. Il lui fallut un peu moins d’une demi-heure pour atteindre l’imposant bâtiment qui se dressait non loin de la rivière de Padhiver et du Pont du Dauphin qui l’enjambait. Les portes du temple, au sommet de quelques marches semi-circulaires et sous un vitrail en forme d’ogive contenant le symbole divin du Dieu sage, étaient entrouvertes et laissaient s’échapper une musique lente et grave.

La Lunargentine gravit les marches de marbre et pénétra dans le temple. La source de la musique se trouvait à l’autre bout du bâtiment et la plupart des badauds se trouvaient à proximité du choeur et de l’orchestre. Quelques autres personnes se trouvaient alentours, y compris un peintre qui essayait de représenter la cérémonie sur la toile, et un demi-elfe qui lui tournait le dos en train d’accorder un luth. Malgré le fait que le soleil était encore trop bas pour offrir beaucoup de lumière et que de nombreux encensoirs produisaient ce qui aurait dû être une épaisse fumée, l’atmosphère était claire et lumineuse. L’elfe fit quelques pas entre les rangées de colonnes qui l’accueillaient quand une voix se fit entendre dans son dos. Sa propriétaire était une halfeline aux cheveux blancs que Moreta n’avait pas vu en entrant.

-Comment puis-je vous aider?

Avançant sans difficulté dans la ville, l’elfe connaissait le chemin de sa destination, pour l’avoir observé à l’avance. Aussi, c’est sans difficulté qu’elle trouva la bibliothèque où elle allait, si tout se passait bien, passer les prochains jours, ou semaines.
Le lieu était plus animé que ce à quoi l’elfe s’attendait, avec un orchestre qui jouait non loin, au moins, l’ambiance de travail serait peut-être un peu moins pesante, mais la tranquillité était une qualité recherchée dans un bibliothèque, pour pouvoir travailler dans de bonnes conditions, et ne pas rater les passages importants des ouvrages, mais à y réfléchir un peu plus, leur présence n’avait rien d’étonnant, la musique aussi était une connaissance.
Allant pour avancer vers le groupe, Moreta entendit derrière une très discrète halfeline se proposer. L’elfe se retourna donc, supposa qu’il s’agissait d’une employée des lieux et lui indiqua :

Bonjour. Bien sur, c’est possible. Je souhaiterais consulter quelques ouvrages pour des recherches personnelles, j’ai appris que c’était possible ici. J’aurais voulu connaître les modalités exactes que pratique ce lieu.

Les détails, l’elfe préférait les garder pour elle autant que possible, après tout, si elle venait ici, c’était pour enquêter sur un groupe illégal, doté d’intentions pour le moins peu recommandables, qui n’hésiterait certainement pas avant de l’envoyer rejoindre ses ancêtres, et cela dans le but de tuer l’un de leur membre. Autant dire qu’elle n’avait pas envie que le Culte comme les autorités ne l’apprennent, aussi espérait-elle que les modalités du lieu lui permettrait de taire ses motivations, même si cela la forcerait à travailler plus longtemps, le temps, elle en avait devant elle.

Metzli avait tressailli en entendant les paroles de Corvo et avait spontanément posé sa main sur le pommeau de son épée courte : pour sa part, elle n'avait rien remarqué de spécial mais les observations du roublard entraient en résonance avec son propre sentiment de malaise.

L'intervention de Karmeth et la réponse de Barnabas avaient cependant permis de détendre quelque peu l'atmosphère. Les informations qu'il avait livrées confirmaient trois choses. Tout d'abord qu'il était remarquablement informé puisqu'il semblait tout connaître aussi bien de leur parcours que des projets plus ou moins secrets du Comte. Ensuite qu'il ne leur voulait effectivement aucun mal, sans quoi il serait déjà passé à l'attaque et ne leur aurait pas livré autant d'informations. Enfin qu'Obinus semblait bel et bien très proche de leur mystérieux interlocuteur.

La fin de son intervention marqua particulièrement l'esprit de la jeune femme :

¤ Nous en revenons donc à cette expédition mentionnée par le Comte... voilà qui promet d'être aussi excitant que dangereux! ¤

Elle frissonna à l'idée des risques qu'elle prendrait en se joignant à une telle équipée. Disposant de réponses à toutes ses questions, elle décida, pour sa part, de clore la conversation :

- Très bien, nous lui communiquerons vos instructions et le parchemin. Je vous remercie, en son nom, de votre aide. Quant à notre participation à l'expédition, je suppose que nous discuterons avec lui en temps utile.

En ce qui la concernait, elle était prête à prendre congé de leur mystérieux interlocuteur et de son désagréable compagnon. Elle était bien décidée à porter au plus ces nouvelles fraîches au Comte.

Voilà qui était, semblait-il, une belle récompense pour leurs efforts de la journée. Ils venaient de récupérer les informations désirées, peut-être même plus encore, et personne n'était mort. De mémoire de Karmeth, c'était bien la première fois qu'une investigation se passait aussi bien.

-Je penses que Metzli a tout dit, il ne nous reste plus qu'à vous souhaiter bonne chance... Que Haela Brillehache veille sur vous et en cas de besoin n'hésitez pas.

L'issue pacifique de la situation était loin de déranger le nain. Il avait eu l'occasion de se battre plus tôt dans la journée et n'était somme toute pas pressé de devoir affronter des êtres non-monstrueux. Et puis dans ces endroits civilisés, un combat avait de grandes chances de se résumer à une dague dans le dos bien placée. C'est pourquoi il frissonna d'excitation à l'idée de l'expédition qui s'annonçait. Loin des intrigues de la ville, les conflits se régleraient de manière beaucoup plus ouverte, et les chances de croiser des grosses bêtes ne pouvait qu'augmenter. Diantre, s'il le fallait il supplierait le Comte de le laisser participer.

Il laissa l'un de ses compagnons prendre le parchemin, il n'était pas le plus alerte de leur petit groupe, il en avait eu la preuve quelques instants auparavant, il aurait bien été capable de se le faire voler à son nez et à sa barbe.

Sans baisser sa garde, le nain s'apprêta à repartir vers l'auberge.

Une fois de plus, Tymora avait accordé ses faveurs au roublard... Finalement, l'intervention de ce dernier n'avait pas déclenché le chaos comme il s'y était attendu. Au contraire, les "révélations" de Corvo avaient eu le mérite d'assainir la situation. Intérieurement, le jeune homme adressa une prière et des remerciements à sa Maîtresse. Quiconque l'observait à se moment précis pouvait distinguer le relâchement de ses maxillaires crispés et de sa main d'épée tendue à l'extrême.

Comme souvent chez Corvo, son humeur bascula du tout au tout. La tension de la rencontre avait fait place à une certaine forme d'euphorie mêlée à une sorte d'excitation mauvaise. La mention du Trône de Fer et, dans une moindre mesure, du Culte du Dragon en était la cause. Corvo avait eu maille à partir avec ces deux organisations et la réputation de celles-ci piquaient l'orgueil du jeune homme. Par le passé, il avait défié avec succès la guilde marchande et, beaucoup plus récemment, il avait échappé aux griffes du Culte... La perspective d'être une épine dans le pieds de ces géants était suffisamment excitante pour lui faire prendre la décision de participer coûte que coûte à l'expédition du Comte...

- D'autres conseils utiles ou informations sur le Trône de Fer et le Culte ? Si non, c'est donc maintenant qu'on se quitte bon amis ?