Un nouveau départ..., La route se poursuit sans fin - Ian

Journée du 4 Eleasis 1372
Contrées du Mitan Occidental
Sur la route reliant Nashkell à Bérégost

Bolgeais plongea une nouvelle fois son regard perçant dans celui de Ian.
Saisissant le poignet du moine d'une main ferme, il lui énonça:
- Attention mon bon ami. Vouloir venir en aide à un être dans le besoin est digne d'éloges ; mais être prêt à prendre des risques pour un inconnu est bien moins sage.
Il desserra son étreinte.
- Par la grâce de Tymora, vous vous adressez à un homme bon, du moins qui s'emploie encore à l'être à son âge avancé...

Ramenant sa main derrière son dos, le voyageur reprit son cheminement.
- Mais puisque vous insistez, Ian Tomjan, je ne peux nier qu'une aide supplémentaire serait la bienvenue. Je n'avais pas de souci particulier à Bérégost, rassurez-vous ; j'en suis simplement parti car le devoir m'appelait ailleurs. Je dois rejoindre l'Amn pour régler une affaire relativement pressante. Voyageant à pied, je préfère prendre de l'avance.

Il marqua une pause et inspira une large bouffée d'air.
- Ainsi, ma requête serait la suivante:
Lorsque vous remettrez ma missive à mes amis, pourriez-vous s'il vous plaît les accompagner dans la suite de leur propre voyage, ce qui ne devrait pas dépasser deux chevauchées?
Il n'y aura dans cette tâche nul risque et, bien que votre bonté vous honore, je suis prêt à financer cette humble mission.


Hm, pour info, une chevauchée = 10 jours

Ian regarda avec surprise la réaction du vieil homme. Il écouta avec attention ses paroles et prit un court temps de réflexion avant de parler à son tour :

-J'accepte avec gratitude votre requête. Dusse-t-elle me prendre deux ans je n'ai, je vous l'ai dit, pas de but précis à atteindre et mon voyage aura plus de sens s'il se fait en bonne compagnie, fit-il en souriant. Concernant le financement c'est fort aimable et bienvenu de votre part, pourriez-vous en faire don au prochain temple d'Ilmater que vous croiserez ? J'ai peur de ne pas en trouver à Bérégost.

Il hocha la tête d'un air pensif puis aborda enfin le point qui semblait le déranger :

-Je dois donc craindre de prendre des risques ? N'est-ce pourtant pas là la seule façon d'aller vers autrui ? demanda-t-il avec naïveté. Si je craignais pour ma vie n'aurais-je pas mieux fait de passer mon chemin lorsque je vous ai vu plus tôt ? Quelle différence faites-vous entre "venir en aide à un être dans le besoin" et "prendre des risques pour un inconnu" ? poursuivit-il doucement.

Il regardait le vénérable avec des yeux emplis de questions, tout en veillant bien à progresser au même rythme que lui.

Journée du 4 Eleasis 1372
Contrées du Mitan Occidental
Sur la route reliant Nashkell à Bérégost

Pour la première fois depuis leur récente rencontre, Bolgeais se permit de rire de la candeur de Ian.
Il ne s'agissait certes pas d'un rire clair et sonore, mais le léger ricanement difficilement contenu par le vieillard ne laissait que peu de doute quant à son sentiment vis-à-vis des propos du moine.
- L'avenir vous apprendra à comprendre ce genre de nuance mon jeune compagnon de route.
Quant au reste, vous avez raison. Il n'appartient qu'à vous de décider où mener vos pas et à qui prêter votre bras.
L'ancien soupira, et le sourire qu'il affichait, quoiqu'infime, disparut de sa bouche fine et ridée.
- Qu'à vous... ajouta-t-il tel un écho.

- Ainsi, reprit-t-il, c'est le Dieu Brisé qui recevra votre salaire. Je comprends mieux vos motivations à présent.

- D'après moi, mes amis vont devoir traverser le Bois des Dents Acérées afin de joindre Bérégost. Je vous indiquerez un chemin afin que vous puissiez les intercepter avant ça ; il serait dommage qu'ils marchent en vain, croyant me trouver en un lieu où je ne suis plus.
Ces gens se nomment Ilrauth, Gerbo, Fisevent, Jehal et Livien. C'est à ce dernier que vous remettrez ma lettre. N'ayez crainte, je vous noterez tout ceci par écrit lorsque... Oh!
Il stoppa brusquement, levant l'index vers l'horizon.

A quelques petites centaines de mètres devant les voyageurs s'étendait un bosquet composé de quelques arbres à l'apparence usée. Deux d'entre eux, courbés, se rejoignaient en une arche végétale.
- C'est ici. Je ne peux que remercier Shaundakul de préserver mes jambes fatiguées. C'est parmi ces arbres que se trouve notre fameux puits.
L'homme sortit de sous sa robe une outre de belle facture.
- Pourriez-vous s'il vous plaît aller y remplir ceci? Je crains que notre discussion ne m'ait que trop dessécher la gorge, et m'ait épuisé du même coup.

Le soupir désabusé du vieil homme empli Ian de compassion. Il eu soudain une violente envie de prendre ne serait-ce qu'un peu du poids qui semblait peser sur les épaules de l'ancien.

¤L'âge est-il donc si dur à porter ?¤

Il se tint coi durant les explications de la mission qui l'attendait, se contentant de fixer avec attention son interlocuteur. Il se répéta en esprit les noms des personnes qu'il devait retrouver et s'apprêtait à en demander une description physique lorsque Bolgeais s'interrompit.

Ils avaient atteint le but de leur périple et le jeune homme admira le paysage. Il n'y avait pour l'instant rien de "féérique" mais il croyait se souvenir que ces petits être étaient réputé pour leur discrétion.

Il n'eût cependant guère le temps d'y songer et ouvrit des yeux effaré lorsque son compagnon lui avoua sa fatigue. Le moine n'avait pas songé un instant que sa curiosité et son bavardage aient pu incommoder le vieillard, aussi c'est avec affolement qu'il répondit :

-Mais bien sûr, où avais-je donc la tête ! Je vous apporte sur le champs de quoi vous rafraîchir !

Au moment où il allait saisir l'outre, il se souvint néanmoins du sentiment qui l'avait envahi un instant auparavant et en profita pour poser doucement sa main d'adolescent sur celle ridée de son vis-à-vis.

-Je vais vous prêter ma jeunesse, aussi faites-moi le plaisir de ragaillardir ce sourire, entendu ? lui dit-il à mi-voix en instillant autant de joie de vivre qu'il lui était possible dans ses paroles, montrant l'exemple en laissant ses fossettes transfigurer son visage juvénile.

Puis sur ces mots il se retourna, serra délicatement l'outre contre son corps, fléchit les jambes, et s'élança.

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Contrées du Mitan Occidental
Vers la route reliant Nashkell à Bérégost

Tout à son désir de rendre service au vieux Bolgeais, Ian ne tarda pas à rejoindre le bosquet qui lui avait été indiqué.
Après avoir passé l'entrée naturelle formée par les deux arbres courbés, le jeune moine put découvrir le fameux puits.

Celui-ci consistait en un cercle de pierre relativement anciennes, à en croire les nombreuses plantes grimpantes qui avaient commencé, par endroit, à mordre la roche, laissant apparaître sous les feuilles de multiples fissures.
Rien ne pouvait indiquer ce qui, dans le folklore, avait contribué à donner à cet endroit une telle réputation, si ce n'était la beauté de la minuscule clairière formée et protégée par les arbres formant le bosquet.

En s'approchant, le jeune homme put découvrir l'intérieur du puits, qui lui arrivait à peine à la taille.
La surface de l'eau était pleinement lisse et laissait deviner que le puits était assez profond, à peine éclairci par le haut soleil qui dardait ses rayons à travers l'ouverture formée au centre de la canopée.

La fraîcheur de l'endroit n'était pas pour déplaire au jeune homme, surtout par ce temps magnifique. Néanmoins il ne désirait pas s'attarder outre mesure, aussi se dirigea-t-il sans hésiter vers le puits. Une fois devant la structure de pierre, et plus par amusement que par superstition, il murmura :

-Les fées soient remerciées de ce splendide présent, en s'inclinant légèrement.

Après quoi il vérifia que le parapet était assez solide pour ne pas s'écrouler sous lui et se pencha pour remplir l'outre de l'ancien. Si l'eau était trop loin pour qu'il puisse y puiser à la main, il allait lui falloir tremper son sac. Placer l'outre dans le sac et le lester de quelques pierres ne serait pas bien compliqué, mais que faire des denrées qu'il transportait actuellement dans ledit sac ?

¤Bah, il séchera rapidement avec ce soleil, le vrai problème se posera si les lanières du sac ne suffisent pas à atteindre l'eau...¤ songea le jeune homme.

Il lui tardait de rejoindre son compagnon de route aussi s'efforçait-il d'agir aussi rapidement qu'il en était capable.

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Vers la route reliant Nashkell à Bérégost

La surface de l'eau était assez proche pour pouvoir être atteinte à la main.
Penché par-dessus le rebord, Ian n'eût qu'à retrousser sa manche et laisser pendre son avant-bras dans l'eau afin que l'outre se remplisse.
L'eau était à une température parfaite, juste assez tiède pour que le moine remarque à peine que sa main entrait en contact avec l'élément liquide.

Les bulles d'air qui s'échappaient de la gourde en peau se firent de moins en moins nombreuses avant de disparaître totalement, signe que le contenant était enfin plein.

Sa besogne achevée, le jouvenceau ne perdit pas de temps, tout à son désir de rendre rapidement service au vieux Bolgeais.
Ressortant du bosquet, son précieux butin à la main, Ian parcouru en sens inverse la distance qui le séparait de l'Ancien. A mesure qu'il approchait, il ne parvint cependant pas à apercevoir la silhouette pourtant imposante du vieil homme.

Non loin de l'endroit où les deux hommes s'était quittés, une large pierre plate attira le regard du moine. Un petit objet brillant y avait été déposé, ainsi que deux lettres. Sur l'une d'elle était inscrit le nom "Livien" ; sur l'autre, "Ian".
Mais nulle trace de Bolgeais...

Ian regarda lentement autour de lui sans grand espoir, tout cela ressemblait fortement à un adieu en bonne et due forme. Un adieu qui allait bien à l'étrange personnage qu'était Bolgeais l'ancien.

¤Mais qu'il doit détester les au-revoirs pour s'enfuir de la sorte !¤

Résigné, le moine versa cérémonieusement la moitié du contenu de l'outre à l'endroit où avait disparut le vieil homme. Puis il but l'autre moitié avec empressement, épanchant goulûment sa soif.

-Vous vous étiez rendu compte que j'avais oublié d'en emporter une, hein ? murmura-t-il avec gratitude. Je m'assurerai de vous la rendre un jour.

Il vérifia que la gourde était bien vide avant de la ranger soigneusement dans son sac, puis se dirigea vers ce que son compagnon de route lui avait laissé.

Il fourra la lettre à Livien aux côtés de l'outre, jeta un regard curieux au petit objet brillant avant de lui faire subir le même sort, puis s'empara du message qui lui était destiné. Ceci fait il se releva, vérifia soigneusement qu'il n'avait rien oublié, et commença à se mettre en marche tout en ouvrant sa missive.

¤En route pour les Bois des Dents Acérées !¤

Il en frémit d'excitation : l'aventure continuait !

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Contrées du Mitan Occidental
Vers la route reliant Nashkell à Bérégost

L'eau qu'avait bue Ian était étrangement plus fraîche que lorsqu'il l'avait tirée du puits ; si bien qu'elle désaltéra agréablement le moine tout en apportant en même temps une nouvelle force à ses jambes qui s'étaient légèrement fatiguées durant sa marche.
Que la source ait été ou non enchantée par les fées, son eau avait un indubitable effet bénéfique.

Le petit objet laissé par Bolgeais l'Ancien ressemblait fort à une boussole, si ce n'était que son cadran était vierge de toute inscription. Son aiguille, pourtant, restait fixée dans une unique direction.

Enfin, le jeune homme ouvrit l'enveloppe laissée à son intention. A l'intérieur se trouvait un papier jauni qu'il déplia:

Cliquez ici pour dérouler le parchemin...

Jeune Ian Tomjan,

je vous remercie d'avoir effectué à mes côtés quelques pas de mon long pèlerinage.
J'aurais aimé avoir le temps de le poursuivre en votre compagnie mais il me fallait partir, non sans la certitude que vous accomplirez au mieux la mission que je vous ai confiée.

Je ne boirai pas de cette eau que l'on dit enchantée, mais je suis certain que vous en ferez bon usage. Elle saura, je n'en doute pas, vous apporter un réconfort bienvenu durant les quelques jours de marche qui vous séparent du Bois des Dents Acérées.

Je vous avez déclaré que je vous indiquerai une voie menant à mes amis. La boussole que je vous confie sera cette voie. Son aiguille sera votre guide jusqu'à Livien et à son groupe. Remettez-lui la missive et faites en sorte qu'il ne perde ni ses forces ni son temps à suivre mes traces.

Que Tymora vous accompagne,

B.

Le moine secoua la tête avec un soupir, décidément l'ancien ne lui facilitait pas la tâche. Après une gourde de roi voilà qu'il obtenait maintenant la garde d'une boussole mystérieuse. Ian se demandait encore par quel prodige elle arrivait à indiquer une direction précise autre que le nord, mais décida de ne pas se poser davantage de question.

On comptait sur lui et cela seul importait.

Il se mit donc en route en petite foulée, résigné à utiliser la boussole qu'on lui avait confié lorsque le besoin s'en ferait sentir. Ce n'était après tout qu'une sorte de carte avec un seul chemin, et pas vraiment comme s'il l'utilisait pour son bénéfice personnel, mais ça n'empêchait pas ses convictions d'en être dérangé. Il était convaincu jusqu'à encore récemment qu'il n'avait pas besoin de richesses matérielles. Il découvrait aujourd'hui que ces mêmes richesses pouvait s'avérer nécessaire pour venir en aide à autrui, voire sauver des vies.
Cette gourde qu'il avait vidé, la regretterait-il s'il venait à tomber sur un pauvre hère mourant de déshydratation ?

¤Non, je me débrouillerais par mes moyens propres. En lui donnant mon sang à boire si nécessaire !¤ trancha-t-il en hochant la tête avec conviction.

Un autre point le dérangeait, le message du vieil homme spécifiait clairement qu'il devrait dissuader le dénommé Livien de tenter de le retrouver. Hors c'était tout à fait contre les intérêts du jeune homme. Il comptait bien retrouver Bolgeais pour lui rendre les affaires qu'il lui avait si généreusement confié. Il allait falloir trouver un moyen de remédier à tout ça...

Mais pour l'heure il fallait se concentrer ! La missive indiquait également qu'il faudrait plusieurs jours de marches avant de parvenir au point de rendez-vous.
Avec un sourire impatient, le blondinet accéléra sa marche.