Route de la Fourche, suite de Panique à Fortnouveau

Zakkarit posa distraitement la main sur la bourse qui pendait a sa ceinture, se rappelant me sortilège lui permettant d'invoquer son allié de toujours. Il attendit tout du moins que le combat commence, ce qui ne se fit pas. Il soupira intérieurement.
¤Bon, tant pis, ça sera pour une autre fois.¤

Il changea de jambe d'appui en croisant les bras, attendant que les deux hommes parviennent a sa hauteur, et se retint de sourire quand Kobalt décrivit ce qu'avait raconté les nains. Il n'en croyait pas un mots, mais ne dit rien. Il bailla en se retournant, et suivit ses compagnons sur la route qui les mèneraient vers leur destination.

¤Allez, qu'on abrège le voyage ! J'ai pas envi de passer trois jours sur la route, il fait trop froid.¤
Il regarda le ciel pour voir ou se situait le soleil, espérant qu'il verrait un village avant qu'il ne soit couché.

Narration

Bon an mal an, les trois aventuriers se mirent en marche. Le chemin était tout tracé devant eux car ils n'avaient qu'à suivre la route de la Fourche. Le soleil rougeoyant du matin plongeait directement dans leurs yeux. La lumière était là, il n'y avait plus qu'à la suivre. Les montagnes étaient blanches et immaculées, et la neige sur le sol faisait un tapis de nacre à perdre de vue. La marche était simple cependant, car la route bien entretenue. Le gel de la saison, l'avait en plus durcit ce qui la rendait encore plus apte au voyage et à la marche. Le froid se faisait sentir, mais tendait à être de plus en plus supportable au fur et à mesure que la chaleur arrivait avec le jour grandissant. Il n'y a avait aucun oiseau dans le ciel, ce qui n'était pas spécialement étrange en cette saison. Seuls quelques rapaces planaient dans les airs à la recherche de quelques proies.
Le temps passa, alors que l'astre du jour avait revêtu sa parure dorée. L'ombre des montagnes Nétheres couvrait toute la partir sud de la route, mais commençait à diminuer bien qu'elle ne disparaitrait pas totalement. Ces premières heures de marche fastidieuses et monotones se passèrent sans que leur tranquillité ne soit perturbée. En fait tout était étonnamment calme. Trop calme même par rapport à ce qu'il s'attendait. Seule une patrouille de Sundabar vint croiser leur chemin sans s'arrêter ni même les interpeler. La fatigue commença à se faire sentir et ils s'arrêtèrent pour une courte pause avant de reprendre de plus belle. Alors qu'ils s'étaient posés sur le bas côté de la route, un étrange éclat lumineux et métallique arriva dans leur yeux. Cette lumière semblait venir de la colline qui s'élevait devant eux côté nord de la route. La source de cet éclairage ne devait pas se trouver à plus d'une lieu de leur position, mais il fallait traverser à même la neige pour s'y rendre. Une chose les intrigua tout de même. Cette lumière scintillait et se déplaçait en se rapprochant d'eux.

La halte que les compagnons avaient décidé n'était pas pour déplaire au voleur. Ses pieds meurtris par les longues heures de marche l'avaient réclamée à cors et à cris. Il s'assit sur le bas côté, jetant son paquetage à côté de lui et commença à masser ses pieds endoloris.

- Rhaaaa ça fait un mal de chien ! J'aurais deux mots à dire au cordonnier du Bastion la prochaine fois. Il va m'entendre ce sacré zouave !

Il poursuivit pendant encore un moment ses récriminations contre ses malheureuses bottes, qui n'avaient rien demandé. Puis après avoir une dernière fois proféré des grossièretés indignes d'un noble Compagnon des Marches, il les remit, non sans une grimace de douleur. Le fait d'avoir mal aux pieds lui faisait oublier qu'il avait froid. La fraicheur de l'air rajoutait à sa mauvaise humeur, qui ne s'arrangea pas lorsqu'il vit Zakkarit et Menthas arriver. Heureusement, depuis qu'ils étaient parti de Sundabar, ni l'un ni l'autre n'avait pipé mot. Ce qui avait rendu le voyage passablement monotone... Un peu de conversation ne ferait pas de mal, autrement ils finiraient par perdre la faculté de parler !

- Eh, bien, j'espère que vous avez de la nourriture sur vous. Personnellement je suis un piètre cuisinier, alors faudrait éviter de me demander de faire la cuisine. Mais je pense qu'on ne devrait pas arriver à cette extrémité. Je peux chasser, à la limite... Même si ça m'embêterait de perdre des flèches dans l'affaire. Mais si c'est pour manger... Si il y avait des rats dans le coin, je pourrais vous faire une recette dont je suis le seul à connaître le secret. Sans doute parce que personne ne penserait à cuisiner du rat... Toujours est-il que...

Un évènement anormal vint interrompre son interminable et insupportable flot de paroles. Il vit au loin un éclat scintillant se diriger vers eux. Un coup d'œil vers ses deux compagnons lui permit de voir qu'eux aussi l'avaient vu. Le roublard se renfrogna et reprit la parole.

- Comptez pas sur moi pour aller voir ce qui se passe. Je peux servir d'éclaireur, mais je n'ai aucune envie de me déplacer et encore moins de batifoler dans la neige. De toute façon, pas besoin d'éclaireur, car "ça" parait tout à fait éclairé ! Et puis j'ai mal aux pieds ! Et d'ailleurs, il semble que cela veuille bien nous épargner la peine de nous déplacer, puisque ça vient vers nous.

Il s'allongea confortablement, nouant ses mains derrière la tête et croisant les jambes dans une posture de quelqu'un qui se prélasse à l'ombre d'un arbre lors d'une chaude après-midi d'été. Le thétyrien n'avait pas la même notion des saisons que les êtres humains normaux, il fallait croire...

Zakkarit retira son sac de ses épaules et le laissa tomber lourdement par terre en grommelant. De toute façon, il n'y avais rien de spécialement fragile dans son sac. Il se laissa tomber dessus et massa ses épaules endolories en s'étirant largement et marmonnant des imprécations à propos de l'humidité et de la rigidité de ses articulations.

-Mais pourquoi j'ai décidé de partir à l'aventure moi... j'aurai pas pu faire un métier d'avenir ? Rempailler des chaises par exemple...

Il continua de grommeler plusieurs minutes a voix basse en se frottant les mains l'une contre l'autre pour les garder chaudes, quand Kobalt commença à parler du repas.

¤Tiens, c'est vrai que j'ai rien acheté a manger moi... je n'avais pas prévu ça dans mon paquetage... en même temps, y a pas eu grand chose de prévu ces derniers temps...¤

Il bailla et failli s'étrangler en voyant une boule lumineuse se diriger vers eux au dessus de la neige. Il sauta sur ses pied, et réfléchit a toute vitesse pour trouver quoi faire. Il opta finalement pour le plus évident : Il se tînt en garde, en retrait par rapport a ses compagnons et plongea une de ses mains dans l'une des petites sacoches de sa ceinture pour toucher sa bougie du bout des doigts, prêt a lancer un sort si nécessaire.
-C'est quoi ce truc ?

Le voyage avait, dans l'esprit du prêtre, duré une éternité. Cela était surement du à la faible consistance de la conversation qu'ils avaient tenu durant leur marche. En clair: le néant. Mais les moments de calme ne duraient jamais longtemps depuis les derniers jours. Il fallut une halte, histoire de souffler un peu, pour que quelquechose d'anormal se produise. Pendant que Zakkarit et Kobalt se lamentaient pour diverses raisons, une lumière scintillante vint troubler le court répit du trio.

Qu'est-ce que c'était, Menthas n'en savait rien. Mais il était rare de voir des sources de lumière se balader dans le ciel. Une chose était sûre, cet étrange phénomène n'était là pas pour rassurer Le mulan. Et presque par précaution, en vue d'éventuels désagréments proches, il posa la main sur le pommeau de son épée. Il tourna la tête en direction des deux autres et se rendit compte que Zakkarit était aussi intrigué par la lueur, alors que Kobalt semblait totalement s'en désintéresser.
Il s'adressa à ce dernier avec une pointe d'humour.

"Et bien, on peut dire que tu prends les choses du bon côté toi. Tu as un truc brillant qui se promène dans les airs et tu commences la sieste, ou tu es très sûr de toi ou bien alors tu es complètement taré."

Menthas savait pertinement que la deuxième hypothèse était la bonne, mais il avait encore laissé le bénéfice du doute sur son jugement final quant à la santé mentale du roublard.

Narration

Alors qu'ils s'arrêtèrent, l'éclat lumineux en fit tout autant quelques minutes plus tard pour finalement disparaitre complètement. Difficile de dire s'il avait disparu dans la neige ou s'il s'était envolé tout simplement, mais le fait était là, il n'y avait plus rien à voir. Ils patientèrent encore quelques minutes sans rien voir de nouveau. Kobalt toujours allongé de tout son long, commençait tout de même à sentir les effets de la froidure du sol sur lui. Il ne pourrait certainement pas tenir très longtemps dans cette position sans en ressentir les effets tôt ou tard. Les deux autres cherchant vainement du regard l'étrange lueur sans rien distinguer. Soit c'était une étrange coïncidence, soit il se passait des choses très bizarre dans le coin. Tout était calme, dans ce coin. Un calme hivernale ou même pas le moindre cri animal ne venait perturber leur tranquillité.

L'étrange point lumineux avait disparu aussi soudainement qu'il était apparu. Il s'était tout simplement volatilisé dans la nature. De l'avis du roublard, ses compagnons et lui-même ne devaient pas tarder à en faire autant. Car si il n'avait pas paru s'alarmer de ce phénomène pour le moins insolite, ce brusque revirement ne lui disait rien qui vaille.
Et puis, il avait froid. Il commençait singulièrement à se les geler affalé comme il l'était sur sa couche neigeuse. Il se releva prestement. Il rajusta bien son paquetage sur ses épaules et fit mine de se remettre en route.

- Bon on va pas s'éterniser ici, comme je l'avais dit y'a rien à voir. On f'rait mieux de n'pas traînailler dans les parages. On a encore de la route, alors...

Il enleva hâtivement ce qui restait de neige sur ses vêtements, jeta un coup d'œil rapide vers l'endroit où la source de lumière avait disparu et se mit en route. Il faudrait qu'un évènement venant rompre la monotonie de ce voyage sans histoire vienne le tirer de son ennui. Dans le cas contraire il finirait par poignarder un de ses compagnons sans raison. Pas par haine ou par rancune.
Ce serait plutôt un réflexe nerveux, dirons-nous...

Menthas et Zakkarit remarquèrent peut-être son attitude et le feu qui couvait en lui, alors qu'il marmonnait en s'éloignant :

- Grmblblmm... M'énerve, 'm'énerve... 'S'passe rien...

Plus les évènements allaient, moins Menthas comprenait ce qu'il se passait. Mais la lueur, qui avait fait son apparition dans le ciel pour en disparaitre aussi rapidement, n'était pas pour rassurer le prêtre. La seul chose qui lui paraissait sûre: ils étaient tranquilles pour le moment. Jusqu'à quand, ça il ne le savait pas. Mais il avait le sentiment que ce moment de tranquilité ne serait qu'éphémère. Alors qu'il s'attendait au pire, la situation n'évolua pas. Le mulan resta quelques secondes comme hébété par cet intriguant épisode. Puis voyant Kobalt se remettre en route en grogant, il retrouva ses moyens.

"Oui tu as raison mieux vaut ne pas trainer si l'on veut arriver le plus tôt possible à Fortnouveau. En route."

Joignant la parole au geste il rattrapa Kobalt d'un pas vif.
Bien décidé à ralier Fortnouveau le plus rapidement, le prêtre n'en oubliait pas la lueur qui leur était apparu précédement et restait sur ses gardes. Une chose paraissait évidente, leur mission ne s'avérait pas être une formalité et les troubles ne devaient pas provenir de banales rumeurs.

Zakkarit repris son sac et suivit les autres sans mots dire, sans détourner le regard de l'endroit ou la lumière avait disparue. Il n'était pas tranquille, et il lui tardait de s'éloigner le plus vite possible de cet endroit.
-Mouis, partons d'ici. Plus tôt on arrivera en ville et mieux ça sera.

Il se repassa en mémoire les sorts qu'il connaissait, cherchant a trouver ce qu'il pourrai faire au cas ou la sphère réapparaitrait. Il se hâta de se rapprocher de ses compagnons. Là était la place des pratiquants des arcanes : en seconde ligne pour avoir le temps de jeter des sorts pendant que les premiers ennemis se heurtent au reste du groupe.

¤Mais je ne vois vraiment pas ce que c'était... Un feu follet n'aurai rien à faire ici... hostile ou non ?¤

C'est en méditant sur ces paroles qu'il emboita le pas de ses compagnons, observant toujours la colline enneigée parsemée d'arbres.

Narration

Le petit groupe reprit sa route aussi vite que leurs pas le permettaient. Ils ne seraient pas en vue de Fortnouveau avant deux ou trois jours et devaient donc prendre leur mal en patience. Peu de conversation alimentait leur marche en avant, ce qui rendait leur voyage plus que monotone. Enfin presque. La mystérieuse lumière avait réapparu, mais se contentait cette fois-ci de les suivre parallèlement à leur route. Chose étrange elle arrivait à progresser aussi vite qu'eux, alors qu'ils se déplaçaient sur la terre ferme et elle dans la neige. Cependant elle restait à bonne distance d'eux. Une lieue tout au plus d'eux, à vue d'oeil, même s'il manquait de repères fiables dans cette étendue blanche et immaculée. Le temps passa, et ce petit manège dura tout le temps de leur parcours, sans qu'aucun changement notable n'intervint. Lorsque le soleil fut au zénith, ils s'arrêtèrent pour se restaurer, et la lumière étrange en fit de même en disparaissant comme la dernière fois.